C’est l’heure du bilan à tous les niveaux. S’il y a un domaine qu’il faut scruter, c’est celui des enchères. Il est très important dans le monde de l’automobile ancienne, même s’il ne détermine QUE les prix des modèles des plus élevés. Alors, l’année 2022, un grand cru ?
Pourquoi scruter les résultats des ventes aux enchères
La part des anciennes se vendant via les ventes aux enchères reste infime, c’est vrai. Quand bien même on étendrait à toutes les ventes plus petites qui se déroulent ici ou là (ce qu’on ne fera pas ici), on arrive à peu de voitures au total. Mais il faut scruter cet indicateur car il est important pour le marché en lui-même. Si vous voulez savoir pourquoi, c’est expliqué dans notre article sur le phénomène de l’aspiration, à lire par ici.
D’autre part, en dehors même des fameux spéculateurs dont tout le monde parle sans les avoir jamais vus, les maisons de vente sont de plus en plus courues, dès lors que l’état de l’auto le justifie. Ces dernières années les 205 GTI et autres Citroën 2CV s’y font plus nombreuses, avec à chaque fois un argument spécial qui justifie leur passage sous le marteau, souvent le kilométrage.
L’année 2022 des ventes aux enchères de voitures anciennes
Une grosse année ? En tout cas en valeur c’est indéniable… mais surtout parce qu’on a battu un record qu’on ne croyait pas atteignable. Sinon, les ventes ont vu leur taux de vente légèrement remonter et surtout elles ont pu se tenir dans des conditions plus ou moins normales. Il n’y a qu’en début d’année que certaines ont été perturbées, avant que cela ne rentre dans l’ordre. Par contre, les ventes en ligne sont moins en vue mais elles ont gardé un rythme élevé, avec de nouveaux acteurs sur le marché et avec les « gros » du secteur qui n’ont pas relâché leurs efforts.
Le top 10 des plus grosses valeurs
Pour voir le classement des plus grosses valeurs de tous les temps, c’est ici.
Les valeurs sont données en dollars et au moment de la vente.
1 : la Mercedes-Benz SLR Ulhenhaut Coupé de 1955
143.000.000 $ par RM Sotheby’s
Vente à part pour cette auto puisque les enchères n’étaient pas tout à fait publiques : une « sealed auction » (dont Benjamin Arnaud nous explique le principe ici). Résultat : le plus haut score atteint par une auto aux enchères, près de 3 fois le record précédent !
2 : Ferrari 410 Sport Spider de 1955
22.005.000 $ par RM Sotheby’s à Monterey
Auto de course superbe, avec un beau pedigree et proposée lors du meeting le plus relevé de l’année, lors de la Monterey Car Week, c’était évident que le score allait être élevé. D’ailleurs, nombreuses sont les autos venant de cette vente dans le top 10. Cette auto est tout simplement la 10e auto la plus chère de tous les temps aux enchères.
3 : Ferrari F3003-GA F1 de 2003
14.880.000 $ à Genève par RM Sotheby’s
C’est la F1 la plus chère de tous les temps, doublant le précédent record. Cette auto a emmené Schumi vers 5 victoires, 2 podiums et 3 pôles en 2003.
4 : Talbot-Lago T150-C-SS Goutte d’Eau de 1937
13.425.000 $ à Amelia Island par Gooding & Co
Une beauté française, habituée des ventes aux enchères.
5 : Bugatti Type 57SC Atalante de 1937
10.345.000 $ par Gooding & Co à Pebble Beach
6 : Mercedes-Benz 540 k Spezial Roadster de 1937
9.905.000 par RM Sotheby’s à Monterey
7 : Hispano-Suiza H6C Tuilpwood Torpedo de 1924
9.245.000 $ par RM Sotheby’s à Monterey
Reconnue comme l’Hispano-Suiza la plus célèbre du monde.
8 : Ferrari 250 GT SWB Berlinetta Competizione de 1960
9.066.000 $ par Gooding & Co à Londres
9 : Ferrari 500 TRC Spider de 1957
7.815.000 par RM Sotheby’s à Monterey
=10 : Ferrari 375 America Vignale Cabriolet
7.595.000 $ par RM Sotheby’s à Monterey
=10 : Ferrari 275 GTB/C
7.595.000 $ par RM Sotheby’s à Monterey
Le Top 10 en France
Avec Le Mans Classic, pour une fois, le top 10 des voitures anciennes vendues aux enchères en France ne se résume pas qu’aux ventes parisiennes… mais à une exception près. On voit aussi la prédominance des Ferrari et l’extraordinaire présence dans ce top de la collection des Ferrari monégasques vendues par Artcurial lors de Rétromobile.
En 2023, ce sera encore différent puisqu’on sait qu’on aura droit à une vente de RM Sotheby’s lors des 24h du Mans, en plus des ventes parisiennes (dont on reparlera bientôt) et de la vente du Mans Classic.
1 : Porsche 907 ex-usine de 1968
4.860.000 € par Artcurial à Rétromobile
2 : Ferrari F50 de 1996
4.606.000 € par Artcurial à Rétromobile
3 : Ferrari 288 GTO de 1985
3.464.375 € par RM Sotheby’s à Paris
4 : Ferrari F50 de 1996
3.436.250 € par RM Sotheby’s à Paris
5 : Maserati A6 GCS/53 de 1954
3.418.000 € par Artcurial au Mans Classic
6 : Ferrari Enzo de 2003
3.150.000 € par Artcurial à Rétromobile
7 : Ferrari LaFerrari de 2013
3.004.000 € par Artcurial à Rétromobile
8 : Ferrari LaFerrari de 2014
2.558.750 € par Bonhams au Grand Palais
9 : Ferrari 275 GTB/4 de 1966
2.367.500 € par RM Sotheby’s à Paris
10 : Ferrari F40 de 1989
2.327.000 € par Artcurial à Rétromobile
Du côté des autres maisons françaises :
En dehors de ces vendeurs de millionnaires, on peut jeter un coup d’œil sur les ventes des autres maisons françaises.
Du côté d’Aguttes, ce fut une belle année avec des lots de qualité. En un an, ce sont pas moins de deux Alfa Romeo Giulia TZ qui sont passées sous le marteau ! Surtout, la maison a organisé plus de ventes que les années précédentes, en étant notamment présente au départ du Tour Auto ou au 1er Mai à Cassel. On notera enfin une petite spécialisation dans la vente de youngtimers exceptionnelles. Après les 2CV des années 90, c’est une Clio Williams qui a marqué cette année 2022. 15km au compteur et un record pour le modèle : 75.880 € !
Chez Osenat, plus de ventes également. Si on retrouvait les ventes habituelles tout au long de l’année, c’est évidemment la vente d’Epoqu’Auto qui a attiré les regards… mais surtout la vente quasi « improvisée » qui a eu lieu juste après avec une énorme sortie de grange avec la Collection Minard.
Enfin, on a noté la naissance de Collector Cars Auction, une nouvelle maison « lyonnaise » qui a proposé des catalogues intéressants pour ses débuts tandis que Boisseau-Pomez a également proposé un beau catalogue aux 48h Automobiles de Troyes et que Sarthe Enchères a bien animé le salon Auto Moto Rétro Rouen. L’offre se diversifie !
Quelques chiffres supplémentaires :
Quelques infos intéressantes retrouvées sur Classic Car Auctions.info à propos des millionnaires vendues aux enchères cette année. Il faut les comparer avec les chiffres de l’an dernier pour se donner une idée :
2021 | 2022 | |
Plus grosse valeur | Mc Laren F1 Gooding & Co Pebble Beach 20.465.000 $ | Mercedes-Benz SLR Ulhenhaut RM Sotheby’s Sealed Auction 143.000.000 $ |
Plus grosse réunion | Monterey Car Week 87 millionnaires | Monterey Car Week 116 millionnaires |
Nombre de millionnaires Total | 200 voitures anciennes | 298 voitures anciennes |
Maison de vente | RM Sotheby’s 92 millionnaires | RM Sotheby’s 127 millionnaires |
Maison française | Artcurial 6 millionnaires | Artcurial 9 millionnaires |
Sur le sol français | RM Sotheby’s 9 millionnaires (Paris + Guikas) | Artcurial 9 millionnaires (Paris + Le Mans Classic) |
Les tendances et l’avenir :
Niveau tendances, on se rend compte que l’année a été meilleure que 2021, surtout au niveau des millionnaires… mais derrière ça a également suivi puisque les taux de ventes sont remontés, même si les estimations sont plus rarement dépassées, surtout quand on passe le cap des 100.000 €/$. On aurait pu croire à un tassement post-pandémie (même si on en est pas sorti) puisqu’on avait pensé à la dispersion de grandes collections pour compenser les pertes de certaines grandes fortunes dans ces temps troublés.
Soit le phénomène n’est pas bouclé, soit il a finalement été anecdotique. Le fait est que les collection complètes dispersées aux enchères sont encore plus nombreuses !
Pour 2023, aucune tendance n’est encore dessinée. On sait simplement que les grands événements sont de plus en plus nombreux à proposer des ventes aux enchères, du coup le nombre de lots augmente également. Il faudra attendre la mi-mars pour avoir une vision claire puisque les ventes d’Arizona, de Paris et d’Amelia Island seront passées.
Jacques
Le fric, le fric, toujours le fric. Le monde de l’automobile ancienne s’est transformé en un monde de spéculateurs ce qui alimente l’inflation des prix jusqu’aux modèles les plus modestes que le « petit amateur » ne pourra bientôt plus s’offrir… Les maisons de ventes aux enchères ont de beaux jours devant elles. Phénomène encouragé et soutenu par tous les médias et en particulier les revues de véhicules dits de collection. Apparemment les gros titres avec des chiffres pleins de zéros à la suite font recette. Nous vivons une époque moderne !
Signé : un vieux de la vielle plus du tout dans le coup…
· · 21 décembre 2022 à 9 h 20 min
Benjamin
Puisque vous vous lancez, je me lance aussi, ça permettra de remettre les choses en perspective (et de faire d’une pierre plusieurs coups).
Les voitures dont on parle ici n’ont jamais vraiment été abordables. Les prix d’il y a 40 ans doivent être regardés avec le prisme de l’inflation, donc ces autos sont inabordables.
Ensuite, les prix « généraux » n’ont pas été touchés par une quelconque spéculation. C’est l’offre et la demande tout simplement.
L’offre et la demande : de plus en plus de personnes s’intéressent aux véhicules anciens (on ne va pas s’en plaindre) et le nombre de véhicules n’augmente pas. Du coup, l’offre reste la même, la demande augmente. Ce qui fait que les véhicules qui sont dans la tranche de prix haute partent plus facilement. Les autres propriétaires, voyant que ça part, augmentent eux aussi leurs prix… et tout augmente. Nombreux sont les collectionneurs à se plaindre de cette augmentation des tarifs. Mais on en connaît aucun qui serait prêt à lâcher son auto au prix qu’il l’a touché 20 ans auparavant…
· · 21 décembre 2022 à 9 h 27 min