Quand les GTI ont eu la peau des coupés

Publié le par Benjamin

Quand les GTI ont eu la peau des coupés

À l’heure où les SUV remplacent… tous les autres segments automobiles, on se dirige vers une standardisation de la production automobile. La diversité des carrosseries qu’on a pu voir des années 20 aux années 60 est bien loin. D’ailleurs, le début, c’est lorsque les grands constructeurs ont restreint leur gamme de voitures sportives et prestigieuses pour faire de la place à une nouvelle espèce de voiture : les GTI. On revient sur cette transition et on plonge dans les années 80.

Qu’est-ce qu’une GTI ?

Grand Tourisme Injection : voici ce que signifie le terme GTI. Savez-vous d’où il vient ? De l’Italien ! La première voiture à s’appeler ainsi était la Maserati 3500. Nous sommes en 1961 et c’est alors un terme qui combine l’utilisation de la voiture, une grande tourisme, et un des attributs importants, l’utilisation de l’Injection.

Maserati 3500 gt Hennebont- gti

Ensuite on ne retrouve pas ce terme pendant des années. Jusqu’en 1976 quand Volkswagen sort la version vitaminée de sa Golf, la GTI. Là, on est loin du Grand Tourisme dans la définition de base de la voiture. Mais la version GTI affirme l’auto comme une sportive. L’appellation est peu à peu utilisée par d’autres modèles de la gamme (Jetta ou Scirocco) et se transmettre au groupe PSA qui va l’utiliser sur sa 205, évidemment, mais aussi sur des 604 (oui, oui), des Citroën CX, etc.

À partir des années 80, le terme devient alors un générique. Il qualifie alors une « Bombinette », une Hot Hatch, une compacte vitaminée qui vient chapeauter un modèle. La recette est souvent la même : on prend une compacte, on effectue un dopage du moteur (avec installation de l’injection par exemple), on ajoute des appendices aéros et on propose une présentation plus agressive et, éventuellement, quelques équipements en plus.

Sur ce dernier point, on reste léger. Le but est en effet de séduire les jeunes. Il faut donc garder un prix serré tout en restant attractifs. C’est certainement ce qui va faire le succès des GTI… qui vont prendre de plus en plus de place dans le monde de l’automobile dans les années 80.

Les berlines sportives : un épiphénomène

Alors que l’auto « des jeunes », passait du coupé au GTI, l’offre se restreignait pour la clientèle plus âgée et plus argentée. Pour pouvoir les garder dans leur clientèle, les constructeurs ont été obligé de monter en gamme, via des moteurs plus vitaminés sur des autos plus grosses que les compactes et mieux équipées. Des voitures de papas pressés. Pourquoi ces moteurs vitaminés, recevant parfois de « simples » quatre cylindres bien gonflés, alors même que les gammes proposaient des modèles dotés de 6 ou 8 cylindres ?

Parce que ces lourdes berlines se faisaient taper par les GTI. Et forcément ça faisait mauvais genre. Si ces berlines sportives ont toujours existé, elles ont finalement été imposées par l’explosion de la mode des GTI. Et puis il faut aussi ajouter que leur production permettait aux constructeurs de les homologuer en Groupe A.

Les coupés : les sacrifiés

Le coupé, la voiture élégante et parfaite pour les jeunes. Pourquoi ? Souvent plus légers et offrant une meilleure cavalerie, les coupés étaient des voitures à sensation. Et puis la ligne était plus sexy. Autre argument pour toucher la jeunesse : tant qu’on a pas d’enfant, pas besoin de plus de place, si ce n’est pour emmener les copains ce qui peut se faire avec une 2+2.

Seulement à cause du coût de ces autos, les jeunes ont forcément porté plus d’attention aux GTI. Les coupés se sont moins vendu et ont dû s’embourgeoiser pour se créer une nouvelle clientèle, allant par là à l’encontre de leur idée originale !

Les GTI ont clairement signé la fin de plusieurs modèles. Pensez par exemple à la carrière expresse de la Matra Murena pour vous faire un bon exemple !

Cabriolets

On abordera pas vraiment leur cas ici. Les Cabriolets ont souvent été dérivés des coupés… sauf chez les italiens où il fallait faire travailler à la fois Bertone et Pininfarina (on résume mais ça y ressemble). Pour autant, les cabriolets n’ont pas disparu. Non, ils ont rétréci.

Autre voiture parfaite pour les jeunes, ils se sont juste déplacés. Au lieu d’être fabriqués sur la base des berlines, ce sont les compactes qui se sont décapsulées ! Certains cabriolets étaient même carrément basés sur les GTI, on pense à la Peugeot 205 CTI par exemple.

En tout cas, l’arrivée des GTI a eu moins d’impact sur les cabriolets, même si ils ont entrepris une transition dans la même période.

Les années 80 : les GTI s’imposent

Comment illustrer ce changement ? Et bien on a fait des statistiques pour l’évolution des différents types de modèle. Attention, nous n’avons pris que les constructeurs plutôt généralistes, en France, en Allemagne, en Italie et en Angleterre. Ainsi, Porsche ou Ferrari, qui ne produisaient que des coupés et des cabriolets dans des volumes relativement faibles ne sont pas pris en compte.

Quand on additionne les modèles présents dans les différentes gammes de ces constructeurs, l’évolution est très logique.

image 17- gti

On note relativement peu de berlines sportives entre 1975 et 1980 tandis qu’il existe déjà des bombinettes dans les gammes des différents constructeurs généralistes. Cependant, les compactes ne sont pas encore aussi bien installées. Surtout, le modèle « jeune » est donc le coupé et ça se voit bien, il s’en produit plus que de bombinettes et de berlines sportives (réunies) avant 1980.

Ensuite, c’est donc l’essor des puces vitaminées. Elles sont de plus en nombreuses. Si les berlines sportives suivent, il faut se rendre compte que les compactes prennent de plus en plus de place dans les gammes et que les bombinettes vont alors se détacher au début des années 80. Imaginez que certains constructeurs comme Citroën avec la Visa, Peugeot avec la 205 ou Volkswagen avec la Golf peuvent proposer jusqu’à 3 déclinaisons sportives sur un seul modèle !

Dans le même temps, on abandonne donc les coupés. Deux raisons à cela, qui sont finalement assez liées. Les coupés sont des autos à l’image plus jeune et plus sportive. Cependant, ils exigent une production complexe, avec une carrosserie spécifique, quand bien même ils sont basés sur une auto plus populaire comme les R15 et R17 chez Renault ou l’Alfasud Sprint. Les GTi sont moins chères à produire et, si elles constituent le haut de gamme de leur constructeur, elles restent aussi moins chères à l’achat qu’un coupé. Deux facteurs qui font qu’un constructeur ou qu’un client ont de bonnes raisons de délaisser le coupé !

Enfin, il faut bien noter que les bombinettes vont connaître un pic entre 1987 et 1991. Pendant ces 5 années, c’est l’âge d’or de ce type d’auto. Par la suite, leur nombre décroît. Les coupés se stabilisent puisque certains constructeurs ne les ont pas totalement abandonnés. En fait, ils reviennent même dans les années 90. Mais ils ont terminé leur mue. Finis les petits coupés populaires (avec quelques exceptions tout de même) et place à des coupés plus GT, plus hauts de gamme.

Pourquoi on retrouve moins de bombinettes ? Parce qu’on rationalise ! Au lieu de proposer plusieurs déclinaisons sportives sur une même base de compacte, on en propose plus qu’une.

Voilà donc le tableau au niveau européen. Mais on peut aussi regarder l’évolution pays par pays. Et on constate quelques différences pour un même constat.

En France : on se met au sport

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Peut-on parler de « grand remplacement » en France. Pour ce qui est des coupés, pas vraiment. La raison est assez simple : ils étaient peu nombreux dans les années 70. Cette carrosserie représentait le haut de gamme des constructeurs, mais Citroën a arrêté de s’y frotter après la SM, Peugeot a persévéré avec la 504 et la 204 quand Renault avait une approche plus basse en gamme avec les R15 et R17 puis la Fuego.

Côté Simca ? On avait déjà amorcé la mutation. Les Ti, Spéciales et Rallye sorties sur les Simca 1000 et 1100 représentaient l’offre jeune de la marque.

Pour autant, si on manquait alors de vrai haut de gamme, les bombinettes ont été très bien représentées en France. Notamment quand PSA décida d’attaquer fort en sortant des déclinaisons de presque toutes ses autos. Dans la foulée, Renault doit réagir… même si c’est un peu l’inventeur de la bombinette française avec la R8 Gordini.

On remarquera aussi que les constructeurs se sont mis à produire des berlines plus sportives au même moment. En moins grand nombre que les GTI, avec généralement un seul modèle par constructeur, elles ne faisaient que transposer les recettes (voire les mécaniques) des compactes.

Enfin, il faut noter que la bulle éclate au début des années 90. C’est surtout une rationalisation puisqu’on ne propose plus qu’une seule bombinette par gamme, au lieu d’une déclinaison haut de gamme et une plus radicale, à l’image des GTI et Rallye sur la gamme Peugeot 205.

peugeot 106 rallye phase 2 13- gti

En Allemagne : remplacement évident !

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De l’autre côté du Rhin, la production de coupé a toujours été présente. Les chiffres sont presque trompeurs puisque la nette diminution des coupé et l’explosion des GTI et autres bombinettes ne concerne pas les mêmes constructeurs. Les producteurs de coupés, Mercedes et BMW en tête, ont continué d’en proposer.

Mais ils ne faisaient alors plus le poids face aux constructeurs généralistes, VW et Opel, mais aussi Ford qui a recentré son entité européenne autour de Cologne, qui ont, eux, peu à peu délaissé les coupés tout en déclinant en diverses versions leurs compactes. Pensez que la Golf a eu droit à ses version GTI 8, GTI 16 et VR6 !

Du coup, pour ce qui est des berlines sportives, ce ne sont pas tant les constructeurs généralistes qui ont embrayé, mais plutôt les BMW, Audi et Mercedes qui se sont décidé à coiffer leurs gammes de vraies autos performantes, avec comme cause, l’explosion des championnats de tourisme.

Là aussi les GTI se feront plus rares dans les années 90, et les raisons sont exactement les mêmes qu’en France.

En Italie : évolution nette

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En Italie, c’est flagrant : les GTI ont pris le pas ! Que ce soit chez Lancia, chez Fiat ou Alfa Romeo, plus Innocenti et Autobianchi, on comptait quelques bombinettes dans les années 70. Peu à peu, elles ont pris de l’importance tandis que les coupés disparaissaient. Même chez Alfa Romeo, après l’arrêt du GTV, aucun remplaçant n’a été immédiatement lancé tandis que les Beta et X1/9 disparaissaient chez Lancia et Fiat.

Pendant ce temps, toutes les compactes des différentes marques du groupe Fiat avaient leurs versions vitaminées. Alfa n’était pas en reste, Fiat plutôt intéressant mais c’est bien Lancia qui déclinait le plus de bombinettes avec plusieurs modèles dans la gamme Delta : les GT, HF Turbo, Integrale et 16V !

Un véritable remplacement qui s’est réduit avec l’arrêt de la Delta (première génération) pour être moins visible par la suite. On notera tout de même que les berlines sportives n’ont pas réellement suivi, même avec les 75 et 155 à la petite durée de vie ou la fameuse Thema 8.32 qui sera évidemment sans descendance. Les années 90 étaient bien mornes chez nos voisins italiens et il a fallu attendre la fin de la décennie pour que les GTA d’Alfa relancent la machine tandis que Fiat se concentrait sur quelques modèles épicés. Et Lancia ? Vous connaissez la suite.

En Angleterre : pic de forme

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Si la production anglaise était plus faible que dans les autres pays européens, on peut clairement voir l’effet de mode créé par les GTI. Les coupés étaient peu nombreux, en particulier quand Triumph a périclité et que MG a arrêté sa MGB GT. Seule Jaguar est resté fidèle à cette carrosserie, mais avec la seule XJS.

Les bombinettes s’étaient alors fait une belle place. D’ailleurs, on peut lire dans cette histoire, celle de la marque MG. De constructeur de roadster/coupé, c’est devenu une griffe qui dérivait des bombinettes des bien sages Austin : MG Metro Turbo, Montego et Maestro.

Pour autant, les berlines n’ont pas réellement suivi. Triumph a arrêté sa Dolomite, Rover a lancé la Vitesse SD1 et il faudra attendre le début des années 90 pour que Rover en propose une avec la 420 GSi Sport Turbo et que Jaguar n’en lance une dans sa gamme XJ, la XJR X300.

Conclusion :

Oui, les GTI ont bien remplacé les coupés dans les années 80. Mais c’est plus un phénomène de mode qu’autre chose. Le concept existait déjà avant et a continué d’exister. Simplement, ces autos sont devenues un peu moins fréquentes mais ont permis à des constructeurs généralistes, ne proposant pas vraiment de sportives, de s’engouffrer dans une brèche du marché du haut de gamme. Une mode éphémère qui prend d’autant plus d’ampleur de nos jours que les jeunes visés à l’époque ont désormais les moyens de s’acheter la voiture de leurs rêves. Du coup, les prix explosent1.

Du coup, les coupés ont été un espèce menacée. Ils se sont relancés chez les constructeurs généralistes avant de disparaître de façon quasi-définitive ces 15 dernières années. Restent les berlines sportives qui perdurent… chez les constructeurs qui sortent encore des berlines.

Volkswagen Golf GTI

1 : Données Collector Car Value

Benjamin

http://newsdanciennes.com

Passionné d'automobile ancienne, il a créé News d'Anciennes en 2013 à force de se balader sur les salons sans savoir quoi faire de ses photos. Conducteur occasionnel de Simca 1100 il adore conduire les voitures des autres, dès qu'elles sont un peu plus rapides !

Commentaires

  1. FrancoisB

    Bravo pour cet article

    Répondre · · 9 décembre 2022 à 10 h 37 min

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