Belle découverte que le Musée Saint-Laurent de Trois-Pistoles au Québec

Publié le par Fabien

Belle découverte que le Musée Saint-Laurent de Trois-Pistoles au Québec

L’opportunité était trop belle : partir outre atlantique et découvrir un musée consacré à l’automobile au Québec. A trois-Pistoles, après avoir traversé l’estuaire du fleuve Saint-Laurent et aperçu au passage quelques marsouins, baleines, phoques et bélougas, une grange et une Buick 46 spéciale des années 30, bleue, sous le soleil de plomb, attire mon regard : le Musée Saint-Laurent de Trois-Pistoles et ses véhicules des années 20 à la fin des seventies me tendait les bras. Visite guidée.

Origines

Le premier juillet 1976, Adrien Côté, « homme d’affaire, grand amateur de sport et avide collectionneur » selon les propos d’un journal de 1983, crée un musée dans sa ville natale de Trois-Pistoles, région du Bas-Saint-Laurent au Québec. Sa passion pour la collection ne se limitait pas aux seules voitures anciennes, puisque Monsieur Côté était avant tout amateur d’antiquités. Il a succombé au virus des vieilles voitures en 1966, en achetant sa première vieille auto pour le simple plaisir de rouler sur les routes de Trois-Pistoles, du Comté des Basques et des environs. Puis le pas franchi, d’autres véhicules sont venus enrichir sa collection tant et si bien qu’il caressa l’idée de monter son propre musée dès 1972.

Le Musée Saint-Laurent de Trois-Pistoles n’est pas né « pour faire de l’argent » selon les propos de son créateur. Ce qui reste le cas, car à $5 (soit 3,30 €), l’entrée est pour le moins peu dispendieuse ! Ce musée est avant tout le partage d’une passion car, si une partie de la collection des véhicules en parfait état, restaurés ou non, est mise à la vue du public, une partie des autos est remisée en attendant sa remise en état ou tout simplement de sortir à l’occasion de mariages, fêtes et autres événements. Cet esprit, Bernard Côté, fils d’Adrien, le préserve et le fait vivre.

A côté des véhicules à traction animale ou motorisés, moultes antiquités sont présentes. Mais ici, ce sont les véhicules à moteur que je vous ferai partager, dont quelques raretés.

Un aperçu du Musée Saint-Laurent de Trois-Pistoles en quelques coups de cœur :

Manic GT

Pour moi, le clou de la collection est une Manic. Une quoi ? Ne cherchez ni en Amérique, ni en Europe cette marque. C’est une marque québécoise, la seule à ma connaissance de voitures à roues (par opposition aux motos, motoneiges et autres engins d’hiver… divers). En fait, la Manic GT, seul modèle commercialisé est bien d’origine québécoise dans son design et sa fabrication, mais ses dessous intimes sont français !

A cette époque, les Alpine A110 collectionnaient les victoires et les honneurs en Europe et un certain Jacques About, français employé par Renault au Canada, fit une étude de marché prouvant qu’un petit véhicule léger comme l’Alpine avait sa place au Québec. Mais devant la faible densité de population de la Belle Province, et donc le faible intérêt commercial, Renault de donna pas suite à sa demande d’importer l’A110.

Mais Jacques About ira au bout de son rêve. Grâce à ses relations chez Renault et à son « coup de crayon », il dessina une robe québécoise pour la Renault 8, agrémentée au passage d’une lunette arrière de Renault 16 : la Manic GT, au nom dérivé de Manicouagan, rivière québécoise, mais aussi, nom symbolique de la réussite industrielle du Québec. Au niveau motorisation, la Manic GT reprenait celle de sa « donneuse », en 1300 cm³ : 66.5, 80 et les 105 chevaux de la version Gordini étaient au catalogue de la Société « Automobile Manic inc. », fondée en 1968 par Jacques About.

Mais la concurrence Nord-Américaine constituée des Ford Mustang et Chevrolet Camaro ne permit pas à la Manic GT de s’imposer. Les choses allaient mal si bien qu’en 1970, la société est rebaptisée « Les Automobiles Manic » pour tenter d’enrayer, en vain, la débandade. A priori, Renault n’aurait pas facilité les choses en générant des délais trop importants dans la livraison des organes, mais les Automobiles Manic engendraient cet état de fait en ayant du mal à respecter ses délais et honorer ses commandes. Bref, quel que soit le fautif, il s’agit d’un cas d’école, la chronique d’une mort annoncée. En mai 1971 et moins de 200 exemplaires de Manic GT produits, la société Manic ferma définitivement.

C’est donc une petite perle, pour les européens, qui peut être admirée au Musée Saint-Laurent de Trois-Pistoles. A côté de cette petite auto, toutes les grandes marques américaines sont présentes : Buick, on l’a vu, Ford, largement représenté, mais aussi Corvair, Plymouth, Nash… Je ne pourrai les passer toutes en revue, mais en voici quelques-unes qui m’ont vraiment plu.

Packard Club Sedan V-Twelve de 1933

Sommet de gamme de la production Packard entre 1932 et 1939, cette voiture symbolise le luxe à l’américaine et sa fabrication restait artisanale. Les chiffres ? les 2500 kg de l’auto étaient propulsés par un 12 cylindres en V de 7,7 litres de cylindrée, développant 160 chevaux pour ce modèle, et emmenant les occupants à plus de 160 km/h. Le tout dans un silence quasi absolu, et tel qu’à l’arrêt, l’on pouvait se demander si le moteur était en route ou pas !

Chrysler Sedan Airflow de 1934

Son intérêt vient de l’intérêt, justement, de Chrysler à travailler l’aérodynamique de ses automobiles de série. Fabriquée de 1934 à 1937, moins de 30.000 exemplaires de cette berline familiale ont été produits ! En chiffres, cette Airflow développait 122 chevaux pour 4 litres de cylindrée et atteignait une vitesse de pointe de 140 km/h. Mais ce qu’il faut noter c’est qu’elle va lancer une mode. Les Peugeot 02 par exemple en sont de parfaits exemples.

Ford T à pédales de 1926

Difficile pour un musée Nord Américain de ne pas exposer de Ford T ! Mais celle-ci, produite dans l’avant-dernière année de production du modèle (1908 – 1927), est un modèle Tudor (conduite intérieure two doors, soit 2 portes) à pédales. Cette précision est liée au fait que les commandes d’enclenchement des marches se font par levier et pédale, de marche arrière par pédale uniquement. Sur ces modèles, l’accélérateur et l’avance à l’allumage sont manuels, situés sous le volant de direction, un peu comme dans les tricyclecars de la même époque (focus à retrouver ici).

Hudson Wasp de 1952

Première année de production d’une auto vendue à moins de 50.000 exemplaires en comptant la fin de série après fusion de Hudson avec Nash pour former AMC, American Motors Corporation. Le modèle vu ici repose sur la plateforme d’origine, de type « short-wheelbase Hudson », le châssis Hudson dont l’empattement fut le plus court, et non le châssis Nash. Elle est mue par un 6 cylindres en ligne de 262 cu in (4300 cm³) développant 121 chevaux.

Plymouth Deluxe Sportsmen de 1939

Le rumble-seat, ces places escamotables d’appoint permettant de conserver l’allure de coupé tout en disposant de 4 places, me fait toujours craquer. Et cette Plymouth ne fait pas exception. Et les 5.976 exemplaires produits, d’une part et le fait que 1939 soit la dernière année de production des rumble-seats par Plymouth d’autre part, rendent l’auto encore plus désirable. Détail particulier lié au confort du conducteur sur ce modèle : la colonne de direction était isolée du châssis par du caoutchouc pour moins de vibrations, un meilleur contrôle et surtout, une meilleure isolation des imperfections de la route ! Encore une perle visible au Musée Saint-Laurent de Trois-Pistoles!

Pièces remarquables

Je veux parler ici de quelques européennes et des véhicules plus communs dans cette province où l’hiver et la neige sont présents 5 mois de l’année.

Parmi les européennes, une Austin Healey Sprite Bugeye de 1958, similaire à celle aperçue au Grand Prix Historique de Bressuire (à lire ici), mais surtout une superbe Morris Minor 3326, convertible, de 1950. Compte tenu de sa puissance, ce modèle devait être limité à un usage estival, le manque de puissance ne permettant pas de circuler correctement en conditions hivernales. Suspensions indépendantes, et direction à crémaillère, caractérisent ce modèle du début de production (1948-1971), d’où un confort de conduite certain et un espace intérieur surprenant pour ce gabarit de véhicule. Ce véhicule possède des phares sur les ailes car destiné à l’export : ce positionnement sera dès 1951 repris sur les véhicules européens.

Pour finir, je parlerai des engins spéciaux pour se déplacer dans l’hiver rigoureux du Canada. Motoneiges et auto-neiges sont également présentées parmi l’ensemble de la collection du Musée Saint-Laurent de Trois-Pistoles. Pour exemple, une motoneige Zéphyr, portée par Gilles Villeneuve, le célèbre pilote québécois qui a contribué à démocratiser la F1 au Canada, et un camion Maple-leaf de 1938, mu par un 6 cylindres, et modifié par le carrossier local, J-Adalbert Landry pour Adrien Côté.

En Conclusion…

En conclusion, je dirais que le Musée Saint-Laurent de Trois-Pistoles me fait penser, à une échelle largement inférieure, au Manoir de l’Automobile de Lohéac (où nous avions assisté à l’Autobrocante en 2017, à lire ici) : des voitures qui ont une âme, une histoire, qui roulent encore, et dont le propriétaire est un passionné. Beaucoup des véhicules présents ont même été sous les feux de la rampe en participant à des films et séries.

Bref, le Musée Saint-Laurent de Trois-Pistoles est une adresse que je recommande chaudement à tous les voyageurs amateurs d’anciennes, et aux québécois qui nous lisent !

Fabien

Un lion et un cheval cabré m'ont fait aimer les voitures de mon enfance... Un livre, «La maîtresse d'acier» de Pierre Coutras, et des pilotes de légende m'ont conduit à me passionner pour des bolides plus anciens. A mon tour de partager avec vous.

Commentaires

  1. Alain Lemire

    Merci de cet article sur ce musée de ma province natale! Je serais du pour une visite un de ces jours! 🙂

    Répondre · · 16 septembre 2018 à 16 h 07 min

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