Roadbook d’Anciennes #44 : La route des parfums (2e senteur)

Publié le par Alexandre Pierquet

Roadbook d’Anciennes #44 : La route des parfums (2e senteur)

Alexandre Pierquet est l’auteur de plusieurs guides qui permettent aux collectionneurs de voitures anciennes de vivre de beaux voyages en voiture de collection. Dans Roadbook d’Anciennes il nous fait découvrir des routes remarquables à découvrir à son rythme et en ancienne. Les autres épisodes sont par ici.

Aujourd’hui, un roadtrip dans l’arrière-pays cannois où se mêlent des panoramas sauvages, des villages romantiques, une cuisine typique et gastronomique. 

Après la découverte des matières premières et des artisans de cet univers olfactif, c’était dans la première partie à revivre ici, le voyage continue sur une sélection d’émotions qui vous conduisent sur les plus belles routes de France.

Le patrimoine comme point de départ

Nous sommes arrivés la veille à la Tour sur Tinée, après une journée de routes enivrantes de senteurs méridionales.

Bâti sur une crête dominant la vallée de la Tinée, entourée de pics et collines boisées, le village a la chance de posséder une vue panoramique et une nature superbe. Il a conservé sa configuration médiévale avec ses rues pavées et sa place bordée de façades peintes. À voir : la chapelle Saint-Jean-Baptiste (XIVe), la chapelle des Pénitents Blancs (XVe), l’église St Martin (XIIe) et la « Maison des Templiers », les fenêtres géminées (début du XVe siècle), l’espace artisanal du Béal (vieux moulins à huile, à farine… du XVIIIe siècle).

Avant de prendre la route, un détour s’impose chez un producteur distillateur d’huiles essentielles bio de qualité labellisées : « les Senteurs du Claut », où les plantes aromatiques et médicinales sont cueillies à la main dans le Mercantour tout proche, berceau de la lavande sauvage d’altitude.

Nous quittons les artisans parfumeurs, pour une petite surprise. Direction plein nord, vers le parc du Mercantour, sur la fameuse M2205.

On avale la route

On est sur la route de la Bonette qui relie la vallée de l’Ubaye*, on en a parlé ici, (Alpes-de-Haute-Provence) à celle de la Tinée (Alpes-Maritimes) par le col de la Bonette dans les Alpes françaises. Un itinéraire qui permet une liaison entre Grenoble et Nice proche de la frontière franco-italienne.

Une bonne partie de la route entre Jausiers et Saint-Étienne-de-Tinée est située en zone protégée du Parc national du Mercantour. La partie des Alpes-de-Haute-Provence est une route communale (C1) et la partie des Alpes-Maritimes est une Route métropolitaine (M2205).

Un détour d’une heure trente pour environ 80 km. Ça grimpe et ça tourne, on s’agrippe dans des paysages à couper le souffle. Sur une grande partie du trajet, la route serpente entre les montagnes en longeant la rivière de la Tinée en contre bas. On ne compte pas le nombre incalculable de ravins qui deviennent comme des compagnons de route. Pour les gourmets des fromageries d’Alpages font de vos haltes un moment de dégustation.

Un point à ne pas rater la cascade de Vens, pour un stop photo. On est maintenant sur le D64. La route s’est rétrécie, comme d’autres routes de montagnes que l’on a déjà pratiquées, mais en plus sauvage. Au fur et à mesure que l’on grimpe, le paysage se dégarnit de sa végétation et le gris de la roche devient omniprésent. Les virages tournent secs dans un environnement lunaire.

La route est à vous, vous êtes seuls au monde. N’oubliez pas qu’avec cette altitude l’oxygène se fait plus rare et vos carbus peuvent en ratatouiller. Plus on grimpe, plus cette sensation de dominer le monde devient vertigineuse. La couleur grise est maintenant partout comme si l’on était au milieu d’un cratère de cendres.

Pour finir ce périple en beauté, poursuivez sur la C1 qui fait le tour de la cime de la Bonette.

Un peu d’histoire

Dès le rattachement du comté de Nice à la France, Napoléon III veut la création d’une route Impériale Nice – Barcelonnette par la Tinée.

À l’origine la route est stratégique et donc militaire, en raison de sa proximité avec la frontière italienne. Puis les politiciens reprennent la main, pour en faire une route de prestige. Nous sommes après la 1ere guerre mondiale et le tourisme devient à la mode, il faut donc trouver des points d’attractivité : ce prestige pouvant être obtenu par un record d’altitude. Le résultat est sans appel, tant l’ambition de son succès est importante. Elle devient la route inter-vallée la plus haute d’Europe culminant à 2802 mètres d’altitude, dépassant ainsi le col de l’Iseran de 30 mètres.

Il faudra attendre 1976 et la création du Parc national du Mercantour, pour que la route de la Bonette soit une des rares routes à traverser un Parc national.

Le retour en deux options

On ne se croise jamais sur la même route… C’est un principe dans les roadbook que je fais pour les rallyes que j’organise, mais aussi pour les itinéraires que je conseille. Sauf que cette route, comme nul autre, mérite d’être prise à contre sens pour en apprécier toute sa beauté. Dans ce cas on revient au point de départ à la tour sur Tinée.

Pas d’accord ? Vous l’aurez voulu. Direction Barcelonnette par la route de Nice, un trajet qui n’est pas de tout repos puisqu’il évoque les routes du Rallye du Monte-Carlo.

De là on tourne plein sud sur la D902 en rejoignant la D6002, qui longe la rivière le Var. À Villars sur Var, prendre la D26 (sur votre Gauche) qui vous ramènera sur la M2205 pour arriver à la tour sur Tinée.

Une des plus belles routes de France

Tout cela pour ça, oui, il faut rejoindre Nice et la M32, laquelle est prête à vous enlacer dans sa valse de lacets. Il faudrait avoir un réel talent littéraire pour décrire la route qui passe par Utelle. C’est un itinéraire d’émotions indescriptibles tant il vous plonge dans un décor avec comme toile de fond la grande bleue.

« La route de la Vésubie » et ses gorges vous laisse sans mots, seuls le bruit de votre moteur et le battement de votre cœur seront perceptibles. La route virevolte sur les traces du rallye Monte-Carlo, un itinéraire sportif époustouflant ; les yeux écarquillés, la bouche bée et le pied caressant le frein accompagneront votre descente. Comment vous décrire des paysages qui sont des sensations. Un ressentit véritablement bouleversant, qu’il faut vivre pour une expérience égoïstement personnelle…

Après ce moment d’émotions intenses, on rejoint une route plus sage, la M6202, laquelle longue l’autoroute pour arriver à Nice.

Impossible de faire plus en une journée, sinon de vous faire rêver encore un peu , en vous indiquant d’autres itinéraires de la région à découvrir prochainement dans cette rubrique : comme le parcours historique de la première course de côte (la Turbie) qui vous mène dans un village typique que Jean Cocteau affectionnait passionnément : ”Il n’existe nulle part ailleurs, lieu plus dépaysé, plus insolite, plus suspendu dans le vide… ”.

Sans oublier la route de la « Riviera » qui se décline en trois versions, pour serpenter en bord de mer avec une vision panoramique de la Méditerranée, la fameuse route de la Grande Corniche, celle de la moyenne ou celle de la basse Corniche.

On ne compte pas les kilomètres, on les bouffe à pleines dents et on en redemande. Cette dernière partie du trajet est… à faire pour le croire !

On est pas bien ici ?

Et bien on y reviendra le mois prochain.

Note :

Pour cet itinéraire, j’ai été inspiré par Pierre Coutras, dont l’ami Fabien à relancé une édition du premier roman de l’automobile : « La maitresse d’acier », que l’on peut trouver ici.

Longueur

4/4

à vous de voir, car les possibilités sont multiples ; bien calé dans votre fauteuil que je vous souhaite confortable, vous aller dévorez l’asphalte : promesse de rouleur.
Qualité du revêtement

4/4
Très bien. D’anciennes routes de prestiges qui ont gardé le charme d’antan sans les inconvénients.
Panorama

4/4

Crescendo, de plus en plus étonnants, pour devenirs indescriptibles par les sentiments dont ils vous abreuvent sans fin.
Difficulté

4/4
Tournants, 90°, 180° et toujours plus et encore. N’en jetez plus, il y en aura pour tout le monde… des rouleurs, des vrais. Attention toutefois à certaines saisons, les routes sont fermées.
Budget

3/4
Prévoyez un pique-nique, vous serez aux premières loges, gratuitement.

Mon conseil : prendre une boussole n’est pas absurde, car la route gite et chavire, pour vous dérouter de bonheur. Gardez le cap quoi qu’il arrive.

Alexandre Pierquet

Alexandre est un passionné de véhicules anciens et des belles routes de notre chère France. Il est auteur de plusieurs livres qui vous aideront à les découvrir : le Guide de Voyages en Voiture de Collection et les Belles Routes de France.

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