Quand les Groupe B s’emparent du marché des voitures anciennes

Publié le par Thibaut Perez

Quand les Groupe B s’emparent du marché des voitures anciennes
Retroencheres 2-

Ce fut une parenthèse inédite dans l’histoire du rallye automobile. Le Groupe B a été créé en 1982 par la FISA pour remplacer les anciennes catégories Groupe 4 et Groupe 5. Pour y participer, les
voitures devaient être produites à au moins 200 exemplaires. Les constructeurs pouvaient engager une vingtaine de voitures dérivées en compétition, sous l’appellation « évolution » et sans limitation de puissance ni de poids. Cette expérience a donné lieu à une surenchère technologique rarement vue alors en rallye. Au point de multiplier les accidents mortels et de conduire la FISA à supprimer le groupe B au premier janvier 1987.

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Une page d’histoire du sport automobile

Il reste aujourd’hui des exemplaires rares et recherchés de ces monstres de rallye et de leur version civile. Les stars du Groupe B, avec leurs jupes improbables, ont laissé une trace impérissable. Audi Quattro Sport E2, Lancia Delta S4, Renault 5 Maxi Turbo, Citroën BX 4TC, Ford RS200 et bien sur la phénoménale 205 Turbo 16… chacune est aujourd’hui recherchée.

En témoignent les résultats de la récente vente Artcurial. Le 5 février 2021, aux enchères de La Parisienne, sept de ses rarissimes bolides ont été vendus, excédant les attentes des experts. Ainsi une Audi Sport Quattro S1 de 1988, estimée aux alentours de 1 million d’euros, s’est finalement vendue plus de 2 millions. Cette voiture, pratiquement neuve, délivre 600 chevaux pour 1000 kg.

Une Lancia Delta S4, de près de 500 ch et disposant d’un palmarès bien rempli, a trouvé acheteur pour 810 560 €. La reine du groupe B a bataillé durement, notamment avec la 205 T16, en 1986.

De même, la 205 T16 gagnante du Tour de Corse 1986 avec Bruno Saby s’est adjugée pour près d’un million d’euros, au-delà de l’estimation initiale. Imaginez, près d’un million pour une 205 ! Évidemment, c’est une voiture exceptionnelle qui n’a plus grand-chose à voir avec la version de série. Son palmarès impressionne (la T16 est double championne du monde de la catégorie).

Mais ces voitures justifient-elles réellement l’intérêt que leur portent certains collectionneurs (fortunés) ?

Objets de passion ou de spéculation ?

Les monstres du groupe B remplissent tous les critères retenus par les collectionneurs pour valoriser une voiture. Rareté extrême, technologies de pointe pour leur époque, palmarès et notoriété. À l’image d’autres voitures de course (souvenons-nous de la Ferrari 335 S Spider Scaglietti de 1957 achetée 32 millions d’euros par un certain Lionel Messi), ces voitures attirent la lumière et les fantasmes.

Elles restent cependant dédiées à un usage rare, voire inexistant. L’Audi Sport Quattro S1 vendue par l’entremise d’Artcurial est ainsi exposée depuis 1989 au Manoir de l’Automobile. On peut donc se demander si cet engouement pour des voitures à la technologie complexe, voire incompréhensible pour le plus grand nombre des mécanos, repose sur une véritable passion automobile.

Faire de la voiture ancienne un objet d’investissement est une nécessité – dès lors que la maintenance de ces autos est couteuse, il faut qu’une économie s’organise. La seule passion ne suffit pas à préserver nos voitures des effets du temps qui passe.

Mais réduire la voiture ancienne au statut d’objet inerte et spéculatif est quelque part décevant. Ces voitures du groupe B étaient dédiées aux duels frénétiques entre pilotes au courage légendaire. Et bien que nous ayons su conserver ces automobiles, nous ne les reverrons plus ainsi à l’œuvre, sauf lors de très rares épreuves de démonstration dans le massif de l’Eifel ou dans les Vosges, voire sur circuit à quelques rares occasions. Serait-ce la seconde mort du groupe B ?

Et si vous vous dites que le tableau est plus rose du côté des versions d’homologation, restez bien conscients que ces autos restent très complexes, très radicales… et hors de prix elles aussi !

Thibaut Perez est un économiste amoureux des belles automobiles. Lui-même collectionneur il restaure ses autos et il est à l’origine, avec deux amis, de Rétroenchères, une marketplace européenne dédiée aux véhicules de collection.

Thibaut Perez

https://retroencheres.fr/

Thibaut est un des fondateurs de Rétroenchères et contribue à News d'Anciennes depuis l'automne 2020. Acteur du monde de la vente d'anciennes, il nous propose de nous intéresser au marché du véhicule de collection dans notre rubrique Acheter une Ancienne.

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