Essai d’une Renault 18 Turbo Break, combinaison rare et vivante

Publié le par Benjamin

Essai d’une Renault 18 Turbo Break, combinaison rare et vivante

À force que je vous le sorte, vous allez croire que toutes mes intros sont comme du Mahé et que je me recycle d’article en article à vous répéter la même chose. Allez, je me lance : j’aime les moutons à 5 pattes. Du coup, la R18 vous avouerez qu’elle se pose là. Vous en voulez plus ? Ok, la version « famille nombreuse », le break. Et pour me motiver à descendre dans le Charolais, un peu de sensations ? Bah oui, un turbo. Je vous emmène donc faire un tour en Renault 18 Turbo Break et j’avoue que je ne pensais jamais vous écrire cette phrase avec autant d’enthousiasme !

Notre Renault 18 Turbo Break du jour

Aussi grise que la brume qui entoure le canal en ce froid lundi matin. Franchement, au-delà de la couleur, il y a de quoi la rater cette auto. Pourquoi ? Parce que ses formes sont finalement proches de celles de tous les breaks du début des années 80. Quand on dit que les SUVs se ressemblent tous, il faut quand même se replonger dans le passé et cette époque où, déjà, les lignes se standardisaient.

La Renault 18 Turbo Break

Il aurait été hypocrite que je vous loue les qualités stylistiques de la Renault 18 Turbo Break. Après, je ne peux pas non plus dire que c’est moche. Des voitures moches, il y en a eu. Ici on est juste dans le simple, l’efficace et finalement ce n’est pas désagréable et ça traduit bien la vocation de l’auto. C’est le genre de lignes pour lesquelles on a pas besoin de se poser 20.000 questions avant de se dire « oh bah c’est un break, c’est pratique pour la famille. » À défaut de leur décerner un prix d’inventivité, on peut louer l’efficacité des lignes tracées par Gaston Juchet et son équipe.

Sauf que la simplicité et la discrétion initiales ont été compromises quand la régie a ouvert son livre de recette à la page « sauce Turbo ». Les cases Renault 5 et 5 Alpine étaient déjà cochées, c’était au tour de la brave R18 d’y avoir droit. Pourquoi ? Pour aller chercher les méchantes BMW et Mercedes et leurs 6 en ligne ? Certains ont pu le croire. L’intérêt était surtout à trouver dans l’image, dans le lien avec le programme de F1 que venait de rejoindre un français prometteur et déjà vainqueur : Alain Prost.

Ce lien qui permettait d’attirer le client en concession pour voir les belles autos de la gamme Turbo et de lui arracher une signature au bas du bon de commande d’une GTL… parce que la Turbo était quand même plus chère. C’est un peu tout ça qui a créé la R18 Turbo en 1980 et sa version « papa pressé », notre Renault 18 Turbo Break en 1982. Et cette recette elle ne se retrouve pas QUE sous le capot.

La Renault 18 Turbo Break apparaît au moment où la R18 Turbo évolue. Dans le détail, ça se voit sur l’avant de notre auto du jour. Déjà avec la bande colorée à la jonction entre calandre et capot, apparu avec la Phase 2 de la R18. La particularité de la Turbo, c’est aussi son bouclier avant, peint couleur carrosserie. Évidemment on ne passe pas à côté du monogramme Turbo de la calandre.

Mais c’est surtout sur le côté que la Renault 18 Turbo Break se démarque d’une GTL. Elle reprend les attributs des Turbo en les mixant avec d’autres bien attachés aux versions de base. Du coup, elle a des barre de toit et l’arrière semble haut perché. Par contre, elle récupère bien le lettrage transparent affichant fièrement et ostensiblement un Turbo qui provoquera un AVC chez Dam’ Perrich’. On en rajoute un poil avec un attribut très 80s : les jantes BBS. Impossible de les confondre avec les roues des autres breaks.

À l’arrière, c’est finalement plus sobre. Trop ? En même temps dites-moi comment intégrer le becquet de la berline au-dessus du hayon sans que ça fasse ridicule. Du coup, oui, vu comme ça la Renault 18 Turbo Break est très sobre. Le monogramme Turbo ne se rate pas mais pour le reste, ça fait vraiment break classique, jusqu’à la hauteur de caisse, vraiment imposante, pensée pour charger à ras bord le coffre sans racler… quand bien même on parle d’une Turbo.

Le résultat ? Une auto qui cache un peu son jeu, mais seulement de loin. J’en entend qui commencent à dire « sleeper ». Attendons de rouler !

Sous le capot : « petit escargot… »

C’est juste parce que j’avais la chanson en tête que je vous sers ce titre. Parce qu’en vérité, la Renault 18 Turbo Break n’a pas un petit escargot mais plutôt un Helix pomatia gavé aux rayons gamma. Ça fait un beau bazar sous le capot mais ça fait surtout une fiche technique très intéressante.

Renault 18 Turbo par News dAnciennes 21- Renault 18 Turbo Break

Les Renault 18 de base étaient équipées de Cléon-Fonte (TL ou GTL en 1400) et Cléon-Alu (1647 cm³ sur les TS et GTS). Le Douvrin ? Réservé aux mazout m’sieur ! Sous le capot de la Renault 18 Turbo Break, c’est le Cléon-Alu, mais pas le 1647.

Non, on est allé chercher le « petit » 1565 cm³ de la Renault 16 TS. Et quand ça a été fait on a ouvert le fameux livre de recette et on a assaisonné avec un bon gros Turbo Garett qui ne souffle « que » à 0,6 bar, sans trop toucher au carbu qui reste unique et à simple corps ! La première version sortait 110 ch, la phase 2 (qui vaut donc pour toutes les Renault 18 Turbo Break) sortait 125 ch. Au début des années 80, chez un constructeur français, c’était l’équivalent du canon César, ça faisait des dégâts.

Particularité technique de l’opération, la compression était haute et on a du piocher dans un brevet SAAB pour douter la bestiole d’un détecteur automatique de cliquetis à quartz. Évidemment, on transmet la puissance aux roues avant, mais on compte quand même sur 5 rapports pour le faire.

Sinon, côté châssis, la Renault 18 Turbo Break reprend le train avant à déport négatif ou les suspensions raffermies de la berline. Qu’y a-t-il à ajouter ? Pas grand chose, on reste en présence d’une époque où on n’était pas obligé d’en faire des caisses pour faire une caisse qui aille vite. On faisait confiance au conducteur/pilote peut-être ?

À l’intérieur de la Renault 18 Turbo Break

Oui, c’est un break. Mais à part pour loger deux trois affaires, je n’ai pas ouvert le coffre pour en jauger la capacité. Ce sera comme la puissance d’une Bentley : suffisant. Et puis je ne pense pas que vous vouliez vous offrir une Renault 18 Turbo Break parce que c’est pratique. On fait mieux. Par contre, pour faire vintage, vous êtes au bon endroit.

Renault 18 Turbo par News dAnciennes 28- Renault 18 Turbo Break

On commence déjà par zieuter du côté des sièges. N’essayez pas de les mettre dans une voiture d’une autre marque, des comme ça, il n’y a que Renault pour en avoir proposé ! Maintenant on regarde vers l’avant pour découvrir une autre « Renault touch », une combinaison de plastiques gris et anthracites au dessin encore plus classique que l’extérieur de l’auto (et c’est le conducteur journalier du Saint Scenic qui vous en parle).

Les lignes sont droites, les surfaces plates, et le jeune cadre dynamique qui y prenait bord retrouve encore plus de boutons en se mettant au volant sur le parking du bureau que sur le Commodore 64 qu’il venait de lâcher. Rien que la chaîne Hi-Fi vous replace dans le contexte. Et puis la voiture est également dotée d’un ordinateur de bord, au centre, sous la casquette, et il reçoit un écran à cristaux liquides s’il vous plait !

Pour parfaire le tableau de notre Renault 18 Turbo Break, on trouve évidemment une instrumentation spécifique puisqu’on a un cadran indiquant la charge du turbo. Sinon le reste est, encore une fois, très classique. Il faut quand même noter une chose : l’état de cet intérieur, avec des plastiques qui tiennent et ne sont ni ternes ni craquelés, même 37 ans après !

Au volant de la Renault 18 Turbo Break

Allez c’est parti. La dernière auto sportive dans laquelle je suis monté ? Une Matra Djet VS, moins puissante… et à l’accès beaucoup moins facile que celui de notre Renault 18 Turbo Break. Les dérivés sportifs, ça a ça de bon : ça reste des autos utilisables. Jusqu’à quel point ? C’est toute la question du moment, est-ce que la R18 Turbo va en faire trop ou est-ce qu’elle n’a que de la gueule ?

Moteur… là, la gueule c’est pas son truc. En même on est pas en présence d’une compacte avec clapets actifs et ligne d’échappement inox venue de Croatie. Vos voisins vous disent merci. De fait, la non-sportivité sonore est bien transcrite dans le comportement routier, surtout en ville. Vous pourriez être au volant de n’importe quelle auto que ça ne changerait pas grand chose. Est-ce une critique ? Non. C’est bien aussi de rouler au volant d’une voiture peu exigeante.

La Renault 18 Turbo Break se fond dans la circulation facilement. Franchement, rien à redire sur son comportement citadin. Elle reste confortable même sur les dos d’âne, malgré l’essieu arrière rigide hérité de son aïeule R12. Sa direction ne souffre d’aucun reproche. Évidemment le moteur n’est pas vraiment sollicité. Les 182 Nm de couple servent à se caler à un bon 50 en 4e et l’aiguille du témoin de turbo reste autant à plat qu’un altimètre dans la Beauce.

En sortie de ville, la Renault 18 Turbo Break ne se métamorphose pas. La route défile sans qu’on se pose de question. Le break au losange évolue à son 90 règlementaire sans sourciller. Tout juste voit-on un soubresaut d’aiguille avant de passer un rapport. C’est vrai qu’en sortie de ville/village/après un rond-point, on revient vite à notre vitesse réglementaire, sans avoir besoin de forcer sur le pied droit et sans faire prendre de tours. Facile ? Absolument. Décevant ? Attendez, c’était l’échauffement.

Le panneau de sortie d’agglomération prend ses airs de Collina et siffle le début de la partie. Réflexe de celui qui est au volant d’une voiture sportive et qui veut voir ce qu’elle a dans le ventre : tomber un rapport avant d’accélérer. Et là, ça pousse. Et là c’est plus Collina qui siffle, mais m’sieur Garett. Un doute ? Il suffit de voir l’aiguille située sous le compte-tours. Elle s’est dressée à la verticale. Je mentirais en disant que mes poils de bras font pareil, mais la sensation de poussée est là.

J’en remets une couche à la première occasion et cette fois, pas de pitié pour ma semelle droite. J’écrase en troisième et les aiguilles se prennent pour une boussole dans un orage électromagnétique. Que de la gueule ? J’ai déjà la réponse, partielle en tout cas. Oui, la Renault 18 Turbo Break pousse, pousse fort et surtout elle le fait avec la manière. Clairement le sifflement du Garett fait partie de l’ambiance. L’effet Turbo ? Il n’est pas très violent mais il est là. Du coup au fil des kilomètres vous l’attendez en guettant le compte-tour et en serrant un peu plus le volant en mode « allez c’est parti ».

Après, l’effet Turbo, on ne l’a qu’une fois. Quand elle est lancée, et si vous laissez l’aiguille lécher la zone rouge, le turbo ne relâche pas. Pas besoin de mettre une pièce dans la machine, le passage de vitesse c’est un tour gratos. Par contre, faites quand même attention. Surveiller les deux compteurs de droite, c’est marrant, ce qui vous arriverait en cas de « mauvaise rencontre » si vous ne surveillez pas le compteur de gauche, le tachymètre, c’est moins marrant.

Du coup « pas vraiment que de la gueule ». Ok. Mais pour le moment je me suis juste amusé avec le moteur. Sur la large départementale, clairement je n’avais rien à redire du comportement. Les grandes courbes passaient à fond et sans se faire peur. Maintenant qu’on a divisé la largeur de la route par deux (c’est sensé être une deux voie et il y a plus de tracteurs que de voitures) et que les virages sont présents, derrière les haies des bocages, là on est sur un terrain « juge de paix ».

Première chose : le freinage. La Renault 18 Turbo Break s’en tire avec les honneurs avec ses quatre disques, et ceux de devant sont ventilés, ça suffit à ralentir un break qui n’est pas si lourd que ça (±1200 kg). Par contre, si on a introduit le train avant à déport négatif, c’était en partie pour contrer la plongée au freinage… mais ça n’a pas tout résolu. En tout cas, ça freine. Et la direction ? Rien à redire, elle place la Renault 18 Turbo Break là où le conducteur le souhaite. On notera que le poids se sent quand même… sur l’arrière, le contraire eut été étonnant. De là à se mettre en travers, on a de la marge !

Après les terrains de jeu, la Renault 18 Turbo Break revient à ses ambitions premières. C’est à dire rouler dans la circulation normale, sans se trainer. C’est certainement ce qu’elle fait le mieux et le confort à bord est largement suffisant pour qu’on puisse accumuler les bornes sans se fatiguer et en discutant de voitures anciennes. Tellement qu’on a même pas essayé le système Hi-Fi !

Conclusion :

Ce n’est pas le break ancien que vous achèterez pour aller à la déchetterie le dimanche (il y a plein de C15 pour ça). Ce n’est pas non plus l’auto estampillée Turbo que vous prendrez pour aller arsouiller sur un trackday avec les copains. Le sleeper ? Vous vous ferez quand même déposer par bon nombre d’autos au feu rouge à la sortie du Leclerc le samedi aprem. Alors, à quoi elle sert cette Renault 18 Turbo Break ?

Et bien à contenter celui qui veut une auto pratique, suffisamment performante pour ne pas se traîner et, éventuellement, s’amuser un peu au volant. Et puis avec la Renault 18 Turbo Break vous touchez quand même à une vraie rareté et une auto qu’on voit peu. De quoi raviver les souvenirs et lancer quelques discussions en ouvrant le coffre au prochain rasso pour sortir les cafés. C’est ça aussi la passion non ?

Les plus de la Renault 18 Turbo BreakLes moins de la Renault 18 Turbo Break
PerformanteLa ligne trop banale
L’effet TurboRare
Bonne rouleuseManque d’image
Confortable
Pratique !
image 4- Renault 18 Turbo Break
Fiche techniqueRenault 18 Turbo Break
AnnéesPhase 2 : 1984-1985
Mécanique
Architecture4 cylindres en ligne
Cylindrée1565 cm³
AlimentationCarburateur simple corps et Turbo
Soupapes8
Puissance Max125 ch à 5500 trs/min
Couple Max182 Nm à 3500 trs/min
Boîte de VitesseManuelle 5 rapports
TransmissionTraction
Châssis
Position MoteurLongitudinale avant
FreinageDisques Ventilés AV et Pleins AR
VoiesAV 1423 mm / AR 1344 mm
Empattement2438 mm
Dimensions L x l x h4487 x 1696 x 1402 mm
Poids± 1200 kg
Performances
Vmax Mesurée185 km/h
0 à 100 km/h9,6s
400m d.a16,9s
1000m d.a31,4s
Poids/Puissance9,6 kg/ch
Conso Mixte± 7,5 litres / 100km
Conso Sportive± 13 litres / 100 km
Prix± 5500 €

Conduire une Renault 18 Turbo Break

Vous allez encore dire que je me répète, mais il faudra en trouver une ! Déjà, une R18 Turbo, ça court pas forcément les rues puisqu’on en a produit environ 10.000 exemplaires. Dans le lot vous doutez que les Renault 18 Turbo Break sont encore moins nombreuses et puis comme c’était il y a 40 ans…

La bonne nouvelle, c’est qu’aussi dure à trouver soit-elle, la Renault 18 Turbo Break est peu chère. Comme la Renault 18 Turbo en fait. On est loin des 5 Alpine ou GT Turbo, là, on est entre 4500 et 6000 €, même si certaines, en parfait état et peu kilométrées, peuvent monter bien plus haut et dépasser, dans de rares cas, les 10.000 € !

Du côté des choses à surveiller, les kilomètres ne sont pas un problème, le Cléon-Alu est fiable et robuste. Il ne faut pas négliger le Turbo par contre dont la montée et la descente en température doivent être respectées. Malheureusement, rien ne vous dira si c’était le cas par le passé.
Côté corrosion, on reste à la bascule entre les années 70 et les années 80, par conséquent ça peut être bon ou pas, en fonction de l’humidité dans laquelle était stockée l’auto. Sachez aussi qu’une auto qui a longtemps couché dehors pourra connaître des soucis électriques.

Dernier point : l’intérieur de notre Renault 18 Turbo Break était nickel mais les sièges comme les plastiques ont plutôt tendance à mal vieillir et le soleil n’arrange rien.

Un grand merci à Benjamin, le créateur de Classic Parts Finder, un site parfait pour trouver et vendre des pièces pour les anciennes (même introuvables), pour le prêt de sa voiture !

Banniere PA Renault copie- Renault 18 Turbo Break

Benjamin

http://newsdanciennes.com

Passionné d'automobile ancienne, il a créé News d'Anciennes en 2013 à force de se balader sur les salons sans savoir quoi faire de ses photos. Conducteur occasionnel de Simca 1100 il adore conduire les voitures des autres, dès qu'elles sont un peu plus rapides !

Commentaires

  1. regis p

    J’ai atteint un age où j’aurais sans doute la larme à l’oeil si j’en voyais une dans la rue. Même les Fuego et les R14 je les trouve sympa maintenant.

    Répondre · · 25 avril 2023 à 14 h 37 min

  2. Bendjou

    À l’époque de sa sortie, elle était une pionnière, il n’y avait pas de break à caractère sportif à part peut être la Volvo 240 Turbo, mais c’était pas la même catégorie. Rien que pour ça elle mérite d’être considérée.

    Répondre · · 26 avril 2023 à 19 h 03 min

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