Essai BMW M3 E46 : Un crime presque parfait acte II

Publié le par Mark

Essai BMW M3 E46 : Un crime presque parfait acte II

J’avoue, dans la série des M3, la génération e46 est celle qui me fait le plus vriller. Faut dire qu’avec sa gueule et sa réputation dithyrambique, il y a de quoi éveiller l’appétit des curieux d’automobiles de mon espèce. Mais voilà, j’avais eu l’occasion de gouter aux joies du S54 il y a bien 13 ans, et j’avoue que la présence d’une certaine boite SMG2 avait un peu joué les troubles fête. On m’avait promis un orgasme mécanique mais les saccades de la transmission m’avaient refroidi. Evidemment, j’avais aimé, mais cet amour n’était pas celui promis, il était plus amer, moins passionné. Par chance, cette année j’ai pu profiter d’une occasion exceptionnelle pour remettre le couvert et redécouvrir la belle allemande, en boite manuelle cette fois ! Alors pas une minute à perdre, en route, direction les Vosges en BMW M3 E46.

Notre essai du jour : Une journée rêveuse

L’essai du jour, c’est avant tout une anecdote aussi rare que formidable. Vous est-il déjà arrivé de rêver d’un matin ou l’on vous filerait les clés d’un de vos rêves automobiles ? Comme ça, sans conditions, juste accompagné au moment de partir d’un « amuse toi et ramène-la entière ce soir ». Ce genre de journée trop courte durant laquelle vous n’auriez qu’à rouler sans contraintes, prendre votre pied, admirer la belle, et passer à la pompe entre deux coups de sang.

Etant un doux rêveur, il m’arrive régulièrement de m’évader dans ces errances virtuelles dignes de Cendrillon. Puis, un beau jour d’Octobre 2022, allez savoir pourquoi, les jeux d’esprit se sont transformés en réalité. Mais qu’est-ce qu’il raconte lui encore ?

Tout simplement l’histoire qui se cache derrière notre essai du jour. Cette dernière a pris racine en septembre 2022 quelques jours après la publication de l’essai d’une certaine couscoussière atomique, la BMW M5 e39. De cette publication a découlé une réponse spontanée d’un de nos lecteurs enthousiastes nous proposant de venir tester quelques-uns de ses jouets dans les Vosges. Le menu avait l’air excellent surtout avec la présence à la carte d’une BMW M3 E46 boite manuelle.

Sur le papier j’étais chaud bouillant, mais il restait à encore à trouver une fenêtre pour me déplacer et me mettre à table. C’est finalement au début de l’automne que la situation s’est décantée, je devais me rendre dans les Vosges alors pourquoi pas ne pas prendre un peu de temps pour faire cette rencontre et cet essai.

L’idée était cool mais complètement à l’arrache. Car ce que je ne vous ai pas dit, c’est que j’ai appris le vendredi que j’allais dans les Vosges le samedi. Bref, j’ai quand même tenté le truc en envoyant un message à notre propriétaire du jour. Le début de sa réponse fut sans surprise, le délai était un peu court, et il ne pouvait pas se rendre disponible. Mais, et c’est là que l’histoire devient improbable : « je ne suis pas disponible mais si tu veux, je te laisse les clés d’une voiture, et tu peux te balader avec pour une journée voir le weekend. ».

Waouh ! Alors celle-là on ne me l’avait encore jamais faite ! Choqué, j’ai relu plusieurs fois la réponse parce que je ne pensais même pas qu’une telle confiance était possible. Nous étions deux parfaits inconnus qui correspondaient par mail pour la seconde fois. Pour moi il y avait un loup, une caution enfin un truc.

Mais en fait non ! Le propriétaire était juste ultra chaud et open. Après un appel afin de caler le truc, bah les seules conditions étaient de rendre la caisse entière avec le niveau d’essence, bref dans l’état dans lequel il me la laissait. Rien de plus normal. Même le programme que j’avais prévu ne l’avait pas refroidi malgré la présence de montagne et d’une chaussée potentiellement humide.

La suite vous la connaissez, la nuit fut très courte, et aux environs de 8h30 le samedi matin, après 4h30 heures de route, je me retrouvais à Strasbourg devant un grand gaillard passionné de caisses et complètement confiant à l’idée de me lâcher une de ses belles pendant une journée. Une heure plus tard je partais pour une journée rêveuse à sillonner les Vosges au volant d’une de mes bagnoles favorites.

Notre BMW M3 E46 du jour

Extérieur : Aussi canon que vulgaire ?

C’est certain, on ne reprochera pas à la série 3 e46 d’être un beau coupé, un très beau même. Erik Goplen a clairement fait preuve de génie lorsqu’il a dessiné cette carrosserie de 4,5m de long à la fois fluide et ramassée. Les lignes sont, certes, classiques, mais pures, élégantes, et toutes en rondeurs. Elles transpirent aussi d’un certain dynamisme grâce à des proportions inspirées et quelques arrêtes judicieusement placées.

La BMW M3 e46
La BMW M3 e46 tout en muscles

Evidemment les gênes de ses ainées sont aussi très présents avec ce porte à faux avant court, cette partie frontale massive prête à bouffer l’asphalte, cet habitacle très ajouré, et ce porte à faux arrière aussi long qu’élancé. Au même titre, les clins d’œil au passé ne manquent pas avec les feux avant reprenant subtilement le dessin des quatre phares ronds, le retour du montant arrière, les grilles latérales, ou encore cette ligne tranchant le profil de part en part.

Pour moi la série 3 e46 est un des plus beaux dessins de la marque, mais c’est aussi un coup de crayon qui a traversé les années avec une efficacité que ses aïeules ont dû envier par moments. Mais voilà, notre modèle du jour est une M3, et bien qu’elle reprenne en grande partie le dessin de ses sœurs, il faut bien qu’elle se démarque. On ne va pas se mentir chez Motorsport on y a été fort sur la sauce piquante.

Boucliers, capot, ailes ont été revu de manière large et agressive pour coller au pedigree de la belle. Autant la M5 e39 semblait bien sage de prime abord, autant notre BMW M3 E46, posée et élargie de 20mm ne cache pas son encanaillement. Au programme, bouche béante, ailes, bas de caisses larges, grilles latérales, capot bien bombé, rétroviseurs fuselés, jantes éclatantes « chrom-shadow » de 19 pouces (option), et quatre sorties d’échappement bien fat… Ouais ça pue la testostérone à plein nez.

Affublée de ces accessoires dessinés par Ulf Weidhase la BMW M3 E46 reste une caisse canon, charismatique, musculeuse à souhait, et par-dessus tout, toujours cool en 2023. Mais il est légitime de se demander si elle n’en fait pas un peu trop ? En troquant le costard contre son survêt diamond schwarz, est ce qu’elle ne serait pas devenue un peu vulgaire cette Béhème ? Ne dévoilerait-elle pas trop ses intentions au premier regard ?

Vous êtes les seuls à pouvoir répondre à cette question. Pour moi la génération e36 mixait avec davantage de subtilité sa culture de sportive accomplit et la discrétion liée à son rang de coupé premium. Mais bon j’aime tellement la gueule de cette e46 que j’en veux une. Après tout, vulgaire ou pas ce qui compte c’est qu’elle nous plaise non ? Puis au regard de la production actuelle elle est loin d’être too much. Au passage est ce qu’on n’irait pas jeter un œil à l’intérieur ?

Habitacle : Apogée sauce italienne !

Ce n’est pas une légende, les habitacles des BMW nées dans la seconde moitié des années 90 sont tous réussis et marquent une forme d’apogée de la marque en termes d’ergonomie et de qualité de fabrication. Les séries 3 e46 dont notre M3 fait partie n’échappe pas à la règle. La seule exception à la doctrine germanique faite par notre modèle, c’est que cette fois, en ouvrant la porte je me retrouve face à un cocon lumineux, aux couleurs gaies et chatoyantes.

BMW M3 e46 par Mark pour News dAnciennes 29- M3 e46
Couleurs au programme de l’habitacle de la M3 e46

Pour une fois, c’est une véritable invitation au voyage. Ce cuir dakota souligné par de nombreuses touches de noir offre un réel plus, renforçant le dessin flatteur du mobilier intérieur. Et puis la finition frise le sans-faute, et l’ergonomie est tout simplement impeccable. Bref, j’ai immédiatement envie de vautrer dans les superbes sièges sport !

Cela dit, les plus exigeants constateront quelques détails de finitions qui auraient pu être meilleurs ainsi que certains matériaux, dont les plastiques au revêtement soft touch ayant du mal à encaisser les années. Mais le plus gros défaut que certain reprocheront à l’habitacle de notre BMW M3 E46 c’est son manque de singularité par rapport aux autres autos de la série.

Pour chipoter les plus observateurs auront noté deux trois détails spécifiques comme le bloc instruments doté d’un light shift de la température d’huile ainsi qu’une police spécifique, ou encore les seuils de porte siglés ///M3. Mais pour le reste l’habitacle, est le même que celui de la 318i du voisin. Pour ma part ce n’est pas dérangeant tant cet intérieur est réussi.

Coté équipements, de base, les séries 3 e46 ne sont pas les plus avares chez BMW, et les M3 le sont encore moins. En revanche, cela n’empêchait pas le catalogue d’options d’être aussi long qu’un discours politique. Cela dit, cette dotation généreuse n’était pas vraie sur tous les marchés, notre modèle d’origine transalpine en témoigne. A bord ça fleure bon l’Italie ! Les gadgets se font rare et je me retrouve face à une configuration qui fait davantage la part belle à aux fondamentaux du grand tourisme qu’au luxe du début des années 2000.

Pour cette journée il faudra se contenter d’un lecteur cassette, d’un régulateur de vitesse, d’un toit ouvrant et d’une sellerie cuir offrant un maintien de qualité. Bon j’exagère car il y a malgré tout la climatisation automatique, les sièges électriques et c’est à peu près tout. Même l’accoudoir dédié aux places avant n’est pas de la partie.

Notre BMW M3 E46 est donc bien loin de ce que pouvaient offrir les e46 et peut sembler pauvrement équipé. Mais finalement est ce qu’on a besoin de plus quand on a un superbe cuir, un toit ouvrant pour profiter du soleil automnal, un 6 en ligne qui semble avoir fait ses gammes à Juilliard School, et une boite manuelle reliée aux roues arrières !? Clairement non.

Sous le capot : 6 cylindres façon master class et châssis aux petits oignons

Attention, lorsqu’on lève le capot de la BMW M3 E46 c’est une œuvre pornographique qui s’offre à nous, un six cylindres en ligne incliné à 30 degrés à la sauce master-class. Ouais non, années 2000 oblige, en fait ce sont surtout des « caches ».

BMW M3 e46 par Mark pour News dAnciennes 38- M3 e46
Le moteur de la BMW M3 e46

Mais sous tous ces éléments noirs se love une œuvre d’art. Le nom de cette pièce maitresse : S54B32. Cubant 3246 cm3 ce six en ligne fait la part belle aux matériaux nobles et à la technologie. Il est aussi bien plus éloigné du S50 des M3 e36 qu’il n’y parait. Bah ouais en fait ce n’est pas juste une bête reprog décata en vue d’augmenter la puissance, c’est une refonte.

Le menu est copieux. L’alésage est accru pour coter à 87mm avec une course de 91mm. Les arbres à cames sont aussi spécifiques, tout comme les pistons redessinés permettant d’accroitre le taux de compression. L’ensemble est revêtu de graphite et bénéficie de la technologie du double vanos permettant d’optimiser la courbe de couple. La culasse n’échappe pas non plus aux motoristes de chez Motorsport avec des soupapes plus larges et remplies au sodium coté échappement. La gestion du moteur est aussi plus fine et les six papillons d’admission sont désormais pilotés électroniquement.

Le système d’échappement a lui aussi fait l’objet de soins particuliers dans le but de réduire le phénomène de contre pression des gaz évacués d’environ 40% par rapport au S50. Bilan des courses, ce S54 développe la bagatelle de 343 chevaux à 7900trs/min pour un couple de 365nm à 4900trs/min. Ouais ça fait 106 chevaux par litre ce qui classait cette mécanique au sommet des rendements atmosphériques de l’époque derrière le V8 de la 360 Modena et le célèbre F20C de chez Honda qui déployait jusqu’à 125 chevaux par litre.

BMW M3 e46 par Mark pour News dAnciennes 37- M3 e46

Forcément avec une telle cavalerie les performances ne sont pas en reste. Le 0 à 100km/h est expédié en 5,2s et la barre des 200 en 18,4s pour pointer à 292km/h sans la bride des 250. Ouais ça envoie quand même ! D’ailleurs pour arrêter tout ça la BMW M3 E46 fait appel à des disques ventilés en deux parties (l’anneau extérieur relié sur le bol via des goujons coulés) de 325mm à l’avant et 328mm à l’arrière le tout pincé par des étriers à deux pistons. En théorie ce système de freinage renforcé permet à la belle de passer de 100km/h à 0 en environ 36 mètres.

Pour rester sur la route les ingénieurs ont aussi travaillé le châssis, bien né, des e46. Les voies sont élargies (37 mm à l’avant, 42 mm à l’arrière), le berceau est renforcé, les trains roulants aussi, et les barres stabilisatrices voient leur diamètre revu à la hausse (26mm à l’avant, 21.5mm à l’arrière). Bien entendu, les suspensions sont raffermies, la direction voit sa démultiplication réduite (15.4:1 au lieu de 13.7:1), et pour parfaire le tableau notre BMW M3 E46 se dote d’un différentiel autobloquant. Ce dernier nommé M variable est capable de transmettre 100% du couple à la roue ayant le plus de traction et fonctionne grâce à un système d’embrayage multidisques.

Pour terminer ce chapitre, la BMW M3 E46 est la première M3 d’un ESP (DSC) agissant sur les freins et la gestion moteur afin de garder le cap. Au chapitre de la sécurité elle reçoit aussi les classiques ABS et antipatinages. Bon et si on allait essayer tout ça sur la route ?

La BMW M3 E46 sur la route : Polyvalence totale

Je dois bien avouer que pour cet essai mes premières impressions ne sont pas dépaysantes. Ayant une e46 = six cylindres comme daily, je ne suis pas bousculé et n’ai pas vraiment d’appréhension au moment de tourner la clé de notre M3. L’installation à bord est aisée bien que basse, et je retrouve avec plaisir cette position de conduite ainsi que ce poste de pilotage impeccable. Quart de tour, le S54 se réveille discrètement, faut dire que notre propriétaire a eu la bonne idée de remettre une ligne en adéquation avec l’origine du modèle.

Première, en route, immédiatement la BMW M3 E46 me donne une leçon de polyvalence façon masterclass. Sur les avenues Strasbourgeoises force est de constater que rien d’exceptionnel ne se trame à bord. J’ai juste l’impression d’être dans ma 328Ci en plus ferme, un poil plus sonore, et peut-être même un peu plus creuse.

Vous l’aurez deviné, la prise en main est enfantine, et aux allures règlementaires cette BMW M3 E46 reprend toutes les qualités inerrantes aux séries 3 e46. La tenue de route est sereine, les commandes ne sont ni trop fermes ni trop douces, et l’insonorisation est excellente. De son côté, le S54 cache bien son jeu en faisant preuve d’une certaine discrétion, et d’assez de souplesse dès les plus bas régimes. Tous ces éléments mis bout à bout font ressortir un caractère très aseptisé, bienvenu lorsque l’on a juste envie de rouler au quotidien sans se battre.

Les amateurs de sportives exacerbées seront déçus, mais l’amortissement un peu ferme les rassurera. Car oui, certains indices trahissent la vraie nature sportive de la BMW M3 E46. Déjà, le compte tour gradué jusqu’à 9000trs/min, et la sonorité du S54 se gavant d’air sur les voies d’insertion annoncent la couleur. Mais c’est surtout dans la rigidité de l’ensemble que notre M3 e46 peine à cacher son jeu. Le constat est encore plus flagrant sur notre modèle rabaissé qui attend un retour à des suspensions d’origine.

Tant que l’enrobé est correct cette fermeté ne pose pas de soucis, au contraire cela peut être un atout. Mais c’est un cas de figure qui commence à se faire rare chez nous, particulièrement en ville ou sur les axes secondaires. Bilan notre BMW M3 E46 avec ses roues de 19 pouces, et ses voies élargies a davantage tendance à suivre les aspérités de la route et peut se montrer un brin cassante suivant les chemins empruntés.

BMW M3 e46 par Mark pour News dAnciennes 19- M3 e46

Les suspensions d’origines que j’ai déjà eu l’occasion de tester offrent un meilleur compromis sans non plus transformer l’Allemande en tapis volant. Hormis ce détail je n’ai rien à reprocher à notre Béhème. Même le freinage est suffisant pour un usage quotidien ! En fin de compte, tandis que j’arrive à hauteur de Colmar, la BMW M3 E46 me fait penser à sa grande sœur la M5 e39. C’est le genre de caisse ultra polyvalente, facile et plaisante au quotidien. Mais certains indices trahissent une bestialité sous-jacente dont je ne vais pas tarder à prendre la mesure.

A rythme soutenu : Boite à rêves !

Cela fait bien une centaine de kilomètres que je découvre notre BMW M3 E46, et l’arrivée sur les contreforts du col de la Schlucht me susurre qu’il serait temps d’ouvrir davantage les papillons d’admission. D’autant plus que j’ai l’intuition d’avoir probablement le meilleur 6 en ligne de l’histoire de la grande série sous le capot. Et cela tombe bien, car depuis Turckheim j’ai été rejoint par un compagnon de route en Alfa Romeo 147 GTA.

Forcément avec un cortège motorisé par deux six historiques, la sortie Soultzeren vrille en une session de conduite que je qualifierais de… latine. Je pourrais être de mauvaise foi et dire qu’il ne m’a pas laissé d’autre choix que de le suivre. Mais non, j’ai juste pas de mental quand je me retrouve sur de belles routes au volant d’un atmo dont le compte tour est gradué jusqu’à 9000trs/min.

Depuis le temps vous connaissez le refrain, deuxième, sortie d’épingle, et godasse progressivement dans la tôle histoire de pouvoir apprécier toutes les gammes et le caractère détonnant du S54 sans trop affoler le tachymètre. A ce moment précis, vous vous en doutez, le daily facile que j’avais entre les mains se transforme en un engin un peu plus… suggestif, bestial.

Dans l’immédiat, ce qui me frappe ce n’est ni le « broaaap » évocateur de l’admission, ni la mélodie entonnée par les quatre tubulures d’échappement, et encore moins la poussée. Non, c’est la finesse, l’élasticité et la réactivité avec lesquelles ce S54 s’exprime. Je vais me faire taper dessus, mais ce moulin m’évoque fortement un certain V8 3,5L Italien. Fabuleux ! Certains diront qu’on ne mélange pas les torchons et les serviettes, mais force est de constater que la frontière entre ce 6 diabolique et certaines mécaniques italiennes de renom est plus ténue qu’on pourrait l’imaginer.

Alors attention, si vous aimez vous faire éclater les lombaires à grand coup de couple, le S54 va vous décevoir. Ce n’est pas le délire du constructeur bavarois qui laisse ce crédo à la concurrence étoilée. A bord les maitres mots sont, poigne, linéarité, rage et bestialité une fois passé 5000trs/min. Le tout exprimé par une symphonie tantôt bourdonnante, tantôt métallique qui devrait être proposée comme hymne nationale allemand. Et puis, purée qu’est-ce qu’il aime les tours ce moulin ! 5000-6000-7000-8000, plus les régimes sont himalayens plus il en redemande ! La poussée s’exprime en toute noblesse et ne s’arrête jamais. Toujours plus élastique, franche, hargneuse, et mine de rien, ça va vite, très vite, trop vite !

Mais à bord on s’en fout, l’ivresse de la fée atmosphérique est là, et ça fait belle lurette que mon cerveau lobotomisé par les hurlements de la belle a dégagé sur la banquette arrière. Troisième, quatrième, le cocktail est aussi addictif que déraisonnable. Il n’y a finalement que l’équilibre délicat à haute vitesse qui maintienne l’esprit concentré sur la réalité.

Sur les pentes Vosgiennes, la BMW M3 E46 est pourtant saine, très saine. Une pointe de sous virage en entrées et ce qu’il faut pour enrouler vivement les sorties des courbes de la Schlucht en confiance. L’équilibre est excellent, les changements de cap son dynamiques et précis. Le toucher de route comme la direction ne sont pas en restes. C’est une franche réussite, et l’embonpoint de notre coupé se fait presque oublier. A bord, ça pue l’efficacité à plein nez !

Tandis que toujours accompagné par la 147 GTA je dévore copieusement la route des crêtes, j’ai vraiment l’impression d’être sur des rails mais je réalise aussi que le flacon est pile à la hauteur du contenu. Il y a assez de moteur pour s’éclater en toute sérénité mais il ne faudrait pas forcément beaucoup plus de puissance pour que le S54 ne déborde le châssis de la bavaroise. La BMW M3 E46 rassure ceux qui veulent aller vite, mais demande une certaine dextérité si vous voulez aller très vite ! Rares sont les cocktails aussi homogènes et bien calibrés en matière d’automobile.

De son côté la boite manuelle de notre modèle vient parfaire une copie déjà excellente. Débattements cours, guidage précis, verrouillages fermes, c’est tout ce que j’aime ! Le gain en termes de contrôle et de fluidité est flagrant et transcende littéralement cette génération que j’avais pu tester en version pilotée SMG2. Essayez la boite manuelle, goutez au talon pointe permis par le pédalier, et il vous sera très difficile de repasser sur une boite SMG2.

Alors que les bandes blanches et les « S » défilent au son de cette mélodie sculpturale je vis un rêve éveillé. A tel point que je ne prête même plus attention au pire défaut de la belle : son freinage. L’attaque est mollassonne, et la puissance ainsi que l’endurance ne sont pas vraiment au rendez-vous comparativement aux vitesses atteintes. Mais est-ce vraiment rédhibitoire pour de la balade sur route ouverte ? Au regard de ce que les freins servent en temps normal, et du plaisir que délivre cette M3, la réponse est non.

Me voilà désormais au Markstein, l’après-midi est bien entamée et c’est le moment de sortir l’appareil photo. Quelques minutes plus tard, c’est à notre cortège passionné de se séparer et à moi de remonter sur Strasbourg rendre la belle du jour. Histoire de continuer à profiter des couleurs automnales et de cette mécanique d’exception, je décide de remonter via la route des crêtes. Les points de vue et les courbes s’enchaînent en souplesse, le soleil finit par décliner.

Au moment où ce dernier vient taper l’horizon, une dernière ligne droite d’offre à moi. L’habitacle Dakota est ambiancé par la douce lueur d’une belle fin de journée d’automne, et le dernier refrain de cette ballade rêveuse chantée par ce fabuleux S54 est déjà tout trouvé… Quatrième, troisième, seconde, le vrombissement cristallin se fait entendre une dernière fois tandis que les montagnes se perdent dans l’horizon des rétroviseurs.

Conclusion : Aboutissement d’une recette magistrale

La fin des années 90 et le début des années 2000 souriaient à BMW qui sortait à tour de bras des modèles de grande série très aboutis aux mécaniques nobles. La BMW M3 E46 s’inscrit parfaitement dans le ton de cette période bénie en proposant un cocktail incontournable aussi équilibré que polyvalent. Qu’importe les circonstances, la bavaroise, à l’instar du certaine 911 propose des prestations de haut vol, le S54 en plus. Quel moteur ! Souple, puissant, explosif, aérien, les qualificatifs ne manquent pas pour décrire ce joyau aussi noble que poignant. Ne serait-ce pas finalement le meilleur six en ligne de toute la production ? Peut-être bien.

Finalement, même si la M3 e46 ne révolutionne pas la M3 e36 elle y apporte une bonne dose de maturité et se permet d’aller au bout d’une recette déjà fabuleuse de base. Au lieu de partir d’une feuille blanche, BMW s’est intéressé aux détails afin de rendre la M3 e46 plus efficace, sure, confortable, et mieux finie. Tout simplement plus aboutie et moderne que son ainée.

Malheureusement pour certains cette évolution s’est faite un peu au détriment du fun et des sensations brutes, oldschool proposées par la M3 e36. Pour moi, la M3 e46 c’est une incroyable machine à plaisir surtout lorsque cette dernière est affublée d’une boite manuelle. En définitive, en conciliant modernisme et authenticité de la plus belle des manières, BMW a encore commis le crime presque parfait avec cette M3 e46.

Encore un grand merci à Ben pour le pret de son jouet et la confiance incroyable, mais aussi TAP ASSURANCE sans qui tout cela n’aurait pas pu être possible.

Les plus de la M3 e46Les moins de la M3 e46
PolyvalenceLe freinage moyen
LignePiège à permis
Meilleur 6 en ligne de la production ?Petits couacs de fiabilité
Comportement efficacePeut être un peu vulgaire ?
GrisantePas assez extrême ?
Performances
Qualité de fabrication/présentation
image- M3 e46
Fiche techniqueBMW M3 E46
Années2000-2006
Mécanique
Architecture6 Cylindres en ligne
Cylindrée3246 cm³
AlimentationInjection multipoints
Soupapes24
Puissance Max (au banc)343 ch à 7900 trs/min
Couple Max365 Nm à 4900 trs/min
Boîte de VitesseManuelle 6 rapports
TransmissionPropulsion
Châssis
Position MoteurLongitudinale Avant
FreinageDisques ventilés AV et AR
VoiesAV 1508 mm / AR 1525 mm
Empattement2725 mm
Dimensions L x l x h4492 x 1780 x 1372 mm
Poids (estimé)±1570 kg
Performances
Vmax Mesurée292 km/h
0 à 100 km/h5,2s
400m d.a13,6s
1000m d.a24,5s
Poids/Puissance3,6 kg/ch
Conso Mixte±10,5L/100km
Conso Sportive±20L/100km
Prix± 25-40000€

Rouler en BMW M3 E46 :

Autrefois un des meilleurs rapports prix/perfs/plaisir du marché les M3 e46 subissent actuellement une remonté fulgurante de leur cote. Cela dit, pas de panique la belle reste encore relativement abordable pour ce qui est de la fourchette basse. Comptez autour de 25.000€ pour un modèle en boite SMG2 un peu kilométré.

En revanche si vous n’êtes pas du genre à faire de compromis et qu’il vous faut une boite mécanique avec peu de kilomètres, l’addition peut être plus salée. Beaucoup plus salée. En effet il n’est pas rare de voir ce genre de modèle tourner autour de 40.000€ voire davantage dans les cas extrêmes. En ce qui concerne l’achat, privilégiez un modèle avec carnet ou un facturier complet témoignant d’une bonne maintenance. Car, oui, cela reste une sportive équipée d’une mécanique pointue ou la fiabilité dépend directement de l’amour accordé.

En effet les M3 e46 sont des voitures fiables et très bien construite, les modèles dépassant les 200.000km sont légion. Mais elles ne sont pas exemptes de pépins et non des moindres. Les coussinets de bielles sont une réelle problématique et doivent être envisagés autour de 150.000km, qu’importe la phase. Cela dit les premiers modèles sont encore plus fragiles que les derniers.

Au chapitre des autres problèmes récurrents on retrouvera le système vanos défectueux se traduisant par un grognement ou des pertes de couple. A cela on peut rajouter des problèmes de broutages à froid, de bobines et autres capteurs qui n’encaissent pas toujours les années avec brio. Il en va de même pour le pont autobloquant qui peut émettre des bruits ou fuir au niveau de la tête. Dans les deux cas il faudra se méfier car si une vidange de ce dernier peut résoudre le problème de bruit, ce n’est pas forcément la solution miracle.

On continue ? Les attaches de pont des e46 sont réputées pour avoir des envies nomades, particulièrement sur les phases 1. Il faudra de toute façon prêter une attention particulière à l’état des trains roulants qui sont un peu fragiles suivant l’usage de la belle. Au moindre doute sur un éventuel déchirement de la caisse au niveau des fixations du pont (louvoiement de train arrière aux changements de rapports) il vaudra mieux vous raviser.

Pour le reste les M3 e46 partagent les mêmes défauts que les autres coupés de la gamme. A savoir sur certains exemplaires des joints de portes/fenêtres faiblards, les parties encollées de l’habitacle qui peuvent très mal vieillir, des sièges sports dont le cuir et les coutures sont un peu fragiles avec le temps (tendance à se déchirer). L’électronique comme pour beaucoup de modèles de cette époque peut aussi s’avérer un peu dilettante. Cela dit, tous les problèmes des e46 sont bien référencés alors je ne vais pas tous les citer.

Pour finir, une bonne nouvelle. Il est vrai que quand on aime on ne compte pas, mais sachez que la M3 e46 peut se montrer frugale. Lors de notre essai la consommation notée était d’environ 10,2L/100km pour un usage ville/autoroute/plaine/montagne. Compte tenu de l’âge et des performances ce chiffre est remarquable d’autant qu’il est tout à fait possible de descendre sous les 10L/100km. En revanche comme pour n’importe quelle auto, si vous tapez dedans le S54 saura vous gratifier d’une descente que vous n’aimeriez pas remonter.

Banniere PA BMW- M3 e46

Mark

Passionné de photo et de sa BMW E30, Mark a rejoint News d'Anciennes courant 2016. Essais, road-trip, reportages, tout l'intéresse du moment qu'il peut sortir son appareil photo.

Commentaires

  1. Gougnard

    tres belle présentation merci Benjamin

    Répondre · · 3 avril 2023 à 19 h 04 min

  2. Emmanuel Rose

    J’en ai une , que du bonheur

    Répondre · · 4 avril 2023 à 9 h 54 min

  3. Bayeurte

    Merci Benjamin pour cet article très complet. Je suis moi-même possesseur d’une M3 E46 cabriolet de 2006 l’une des toutes dernières fabriquées. C’est un model Individual full option avec une particularité… Sa couleur… C’est un Sépia Metallic… C’est donc l’une des 12 dans cette livrée

    Amicalement
    Antoine

    Répondre · · 4 avril 2023 à 17 h 22 min

  4. Antonyo

    Merci de la presentation , je posséde aussi la m3 e46 je dirais que cette auto a quelque chose que toutes les autres non pas, elle donne la trique a chaque sortie, ça c’est de la bagnole bordel ! cette caisse carément elle m’hypnotyze! Je souhaite a tout amoureux en voulant une de se l’offrir

    Répondre · · 5 avril 2023 à 22 h 26 min

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