Parce que toutes les autos anciennes ne sont pas arrivées sur nos routes, on vous propose d’en découvrir régulièrement. Rendez-vous pour cela le troisième dimanche de chaque mois (les autres sont là). Ce mois-ci, penchons-nous sur la Röhr Tatzelwurm (à vos souhaits).
Je ne me targuerai jamais d’être omniscient en matière d’automobile, chaque recherche me démontre à quel point j’en ai toujours à apprendre. Cependant, je ne pensais pas tomber sur une voiture dont presque aucun élément de l’histoire ne m’était connu de près ou de loin en me baladant à Rétromobile cette année. Il est donc temps pour moi de vous partager ce que j’ai découvert.
Röhr : de l’aviation à l’automobile
Commençons par le commencement, Hans Gustav Röhr est un ingénieur aéronautique qui, suite à la Première Guerre Mondiale, se trouve dans l’obligation de changer de vocation. C’est ainsi qu’en 1926, il s’associe avec Hugo Greffenius le principal actionnaire d’un bureau d’études basé à Munich, MIAG, pour créer Röhr Auto AG.
L’entreprise rachète alors les actifs de Falcon, un autre constructeur allemand, alors en faillite, et il faut attendre quelques mois pour que l’usine d’Ober-Ramstadt, dans la Hesse, pour voir les premières Röhr 8 apparaitre. Il s’agit d’une voiture mue par un 8 cylindres en ligne développant 40 chevaux.


Les voitures recontrent un succès relatif, mais stable, le carnet de commande atteint les 2200 voitures dès 1928, à 8000 marks pièce, l’avenir s’annonce plutôt radieux pour l’entreprise. Malheureusement, le Jeudi noir pointe le bout de son nez et comme beaucoup d’entreprises apparues entre les deux guerres, Röhr fait faillite à cause de la Grande Dépression, et Hans Gustav Röhr abandonne pour rejoindre Adler en tant que responsable du développement.
Cependant, tout n’est pas perdu, l’entreprise est rachetée par un investisseur suisse qui relance la production en 1931. La 8 est remise à niveau, le moteur passe à 55 chevaux, et la gamme s’enrichit avec la Röhr Junior, une voiture d’entrée de gamme, basée sur la Tatra 75.





Le nouveau propriétaire va même faire intervenir Ferdinand Porsche dans le développement d’un nouveau modèle en remplacement des Typ R et RA. En découle la Typ F, forte de 75 chevaux, cependant, son prix prohibitif va rapidement mener à des ventes pour le moins confidentielles, malgré une version à compresseur développant 100 chevaux. Après 250 exemplaires de Typ F assemblés en 3 ans (plus 20 à compresseur), la Neue Röhr AG subit le même destin que l’entité qui la précède, et disparait définitivement.
C’est la faute du stagiaire !
Et notre Röhr Tatzelwurm dans tout ça ? J’y viens, j’y viens, ne soyez pas si impatients. En 1933, l’entreprise accuille un stagiaire, Karl-Wilhelm Ostwald, qui poursuit ses études en ingénierie mécanique. Le jeune homme passe son année et quitte Neue Röhr AG à la fin de son contrat.
Cependant, (les détails sont plutôt obscurs sur comment c’est arrivé), Ostwald ne part pas les mains vides. Il emmène avec lui un chassis de Röhr Junior, numéro 10227, qui trainait dans un coin de l’usine d’Ober-Ramstadt.
Il se lance donc dans la fabrication d’une voiture expérimentale, permettant de valider les théories aérodynamiques qu’il étudiait également à l’époque. Il en résulte une carrosserieau pavillon fuyant, faite, faute de moyens financiers, de bois et de toile, assemblée sur un treillis en acier.
L’ensemble pèse tout juste 900 kg, et avec ses ailes intégrées dans la carrosserie et sa ligne générale basse, la voiture est très en avance sur ses contemporaines.





La Röhr Tatzelwurm de nos jours
La Röhr Tatzelwurm est assez facile à tracer sur ses presque 90 ans d’existence. Ostwald s’en est servi au quotidien pendant plusieurs annnées, ayant fait homologuer et immatriculer sa machine (qui porte encore son imatriculation AH d’après-guerre). Et sa famille l’a conservée pendant une quarantaine d’années avant de la remiser.
Par la suite, elle a été stockée, dans un état assez pauvre au musée d’Ober-Ramstadt par le second propriétaire. On l’a vue apparaitre avec une début de restauration (notez les serre-joints qui sertent à maintenir le squelette de capote en place) lors que quelques événements en Allemagne l’année dernière, arborant une sellerie neuve ainsi que de nouveaux panneaux de contreplaqué latéraux.
Enfin, même si elle n’a pas atteint le prix de réserve lors de la vente publique d’Artcurial, la voiture a trouvé preneur en parallèle de Rétromobile 2023. Espérons que la voiture pourra retrouver son lustre d’antan entre les mains de ce nouveau propriétaire, puisque l’intégralirté des documents de conception ont été conservés !







Crédits photo : News d’Anciennes, Werner Schollenberger, Artcurial
Gougnard
interessant cette presentation merci Pierre
· · 20 février 2023 à 19 h 23 min