Quand la Peugeot 505 a sauvé l’Aston Martin Vantage

Publié le par Pierre

Quand la Peugeot 505 a sauvé l’Aston Martin Vantage

Je vais vous parler d’une période révolue. Une époque où Aston Martin n’écoulait même pas 100 voitures par an. Une époque où le constructeur anglais faisait encore ses voitures intégralement à la main. Une époque où les idées ne manquaient pas, mais les finances étaient absente. Et je vais vous expliquer comment la Peugeot 505 a permis de sauver un projet dans l’impasse.

Un Virage vers les années 90 très compliqué

Depuis la mise à jour de la V8 en 1978, accompagnée de sa déclinaison Volante, la situation économique d’Aston Martin décline sans cesse. Ce n’est pas l’arrivée de Victor Gauntlett (à qui on va notamment devoir le développement de la Bulldog) qui va changer la donne, malgré 500.000 livres injectées, les ventes dévissent, et l’engagement en compétition n’y change rien.

Décision est donc prise de développer un nouveau modèle, mais les finances étant justes, il va falloir être imaginatif. On conserve le V8 développé par Tadek Marek, qui continue à évoluer, on reprend le châssis de la Lagonda, que l’on réadapte pour faire un coupé 2+2 plus logeable que sa devancière.

L’arrivée de Ford en 1987 ne vient pas interrompre le projet, et ne vient pas bloquer les pièces en provenance de l’extérieur afin de limiter les coûts. Même si les commodos sont en provenance de chez Ford, la clim vient de chez Jaguar, la colonne de direction de chez GM, les optiques avant de l’Audi V8, les optiques arrière de la Volkswagen Scirocco et les rétros, comme quasiment toutes les voitures artisanales de l’époque, proviennent de notre bonne vieille CX nationale.

Le résultat final donne la Virage, présentée en 1989. Un beau bébé de deux tonnes, animé par un V8 porté à 330 chevaux, avec l’injection. Le modèle s’écoulera ban an, mal an, jusqu’en 2000 à 500 exemplaires (coupé et cabrios confondus).

Prendre l'(a)Vantage

Fidèles à leur tradition, une version Vantage de la Virage est prévue. Comme diraient nos amis québecois, pas le temps de niaiser, le V8 est gavé par deux compresseurs Eaton, faisant monter la puissance à 557 chevaux, histoire de mettre tout le monde d’accord.

Remettons les choses dans leur contexte, la Vantage (elle abandonne au passage le nom de Virage) va offrir les performances d’une Ferrari 512TR, le tout dans un coupé 2+2 de presque 2 tonnes sur la balance, excusez du peu. Ben Collins, que l’on connait plus sous le nom de The Stig, déclare même dans l’ouvrage qu’il a dédié à Aston Martin que la Vantage de son père reste une des voitures les plus effrayantes qu’il ait jamais conduites.

Et ce n’est pas vraiment surprenant, car j’ai volontairement laissé de côté une info, le couple de camion de la bête ! 752 Nm de couple, une valeur absolument phénoménale pour l’époque. Pensez donc, le 3 litres turbodiesel de la Classe S contemporaine n’offre même pas la moitié de cette valeur.

Et c’est bien ça le souci des ingénieurs d’Aston Martin, il y a trop de couple. Il y a tellement de couple que tous les mulets de développement voient l’arbre de transmission s’arracher de son logement sous les efforts mécaniques.

Saved by the French

Vous êtes très certainement entrain de vous dire : « Elle est mignonne son histoire, mais il ne nous a toujours pas parlé de la 505, ce filou ! » J’y viens, justement. Un apprenti de l’époque a rapporté il a quelques temps, dans un post Facebook aujourd’hui effacé, qu’on l’avait envoyé chasser un différentiel, et surtout un arbre de transmission de Peugeot 505.

Cela peut sembler incongru tellement la différence de performances entre les deux voitures est énorme. Mais il n’en est rien, la Peugeot 505 avait recours à un assemblage peu courant au niveau de sa transmission. Au lieu du classique arbre relié, à la boite de vitesse à l’avant, et au différentiel à l’arrière, par deux cardans, la sochalienne utilise un arbre enchâssé dans un tube qui assure la rigidité de toute la transmission.

Les équipes d’Aston Martin vont adapter l’arbre, et le différentiel de la Peugeot, pour valider l’idée. Bien évidemment, les engrenages du différentiel vont littéralement se désagréger sous les efforts bien au-delà de leurs tolérances de fabrication, mais l’arbre n’a pas bougé d’un pouce. La solution sera adoptée, permettant à la Vantage d’entrer en production en 1992.

En 1996, la Virage va récupérer les panneaux de carrosserie de la Vantage et devenir V8 (on a d’ailleurs essayé sa déclinaison Volante), quant à la Vantage, elle devient V8 Vantage. Vous êtes perdu ? Soyez rassuré, moi aussi, j’y perds mon latin. Elle finiront leur carrière en 2000, le V8 ne passant plus les normes de pollution.

Crédits Photo : Aston Martin, Wheelsage, News d’Anciennes

Pierre

Tombé dans la marmite automobile quand il était petit, il a rejoint l'équipe de News d'Anciennes en 2015. Expatrié en Angleterre depuis Mai 2016, il nous partage les évènements de là-bas. En dehors de ça, il partage une bonne partie de son temps sur la route entre une Opel Ascona et une Mazda RX-8.

Commentaires

  1. Robert

    Je crois me souvenir que ce système de transmission adopté sur la 505 l’ était déjà sur la 504 !

    Répondre · · 25 janvier 2024 à 9 h 55 min

  2. Dubois

    N’oubliez pas la version ultime : la vantage Le Mans avec ses 612 chevaux ( produite en 1999 pour les 40 ans de la victoire de la marque). C’est le moteur qui m’a le plus impressionné au niveau du son. Il faisait trembler le sol. Bien plus impressionnant que tous les moteurs des coitures présentes à Dijon Prenois ce jour de 1999 ( vantage standart, murciélago, Bentley continental, porsche gt1, dauer eb110, koenigssegg…).

    Répondre · · 26 janvier 2024 à 0 h 10 min

  3. Arnaud

    Merci pour cette jolie histoire 🙂

    Répondre · · 26 janvier 2024 à 20 h 27 min

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