Pourquoi la Twingo devient collector, et pourquoi c’est totalement logique ?

Le stand Renault à Rétromobile 2023 avait de quoi étonner. D’un côté des véhicules rétrofités, de l’autre côté une voiture qui est encore très présente sur nos routes : la Twingo. C’est une sorte de consécration que Renault Classic a offert à cette voiture qui fête ses 30 ans cette année. Avec cette présence, elle s’affiche aux yeux du monde comme un vrai collector… mais son histoire montre que ce n’est pas dû au hasard.

Plongée dans l’histoire de la Twingo

L’idée de la Twingo est simple : remplacer… la Renault 4 ! Alors oui, ça représente un grand écart temporel mais il s’explique facilement. Quand la Renault 5 arrive, elle se place dans les 5cv… comme la plupart des 4L et celle-ci reste tout de même en place. Même chose avec la Supercinq. La Renault 4 traverse les décennies en étant l’entrée de gamme du constructeur au niveau tarifaire mais aussi en étant la citadine pratique et passe partout. La régie a bien tenté de lui trouver une remplaçante mais aucun des projets n’avait les épaules.

Au début des années 80, le monospace commence à prendre de la place. Après les bi et tri-corps, le monde de l’automobile redécouvre la simplicité du monocorps (bien après une Fiat 600 Multipla par exemple) qui est tourné en monospace : c’est l’espace intérieur qui est vanté. Le Chrysler Voyager y est pour quelque chose, mais en Europe c’est surtout Matra, en poussant l’Espace dans les bras de Renault qui déclenche cet essor.

Matra sort en 1990 son concept P41. Ce petit Monospace préfigure en fait toute une série de citadine qui naîtront dans les 30 années suivantes ! Chez Renault, on adopte pas directement le concept mais on aime l’idée.

On lance donc la conception de la Twingo, une conception qui va faire son succès, à coup d’astuces, de coûts maîtrisés et de cible bien trouvée.

1 : la Cible

Ne pas se tromper de cible ! C’est une rengaine à chaque lancement de voiture. Et quand il s’agit de remplacer un véhicule qui a 30 ans, la Renault 4 est sortie en 1961, il faut faire attention. Autant celle qui est devenue la « quatrelle » était rustique et visait une clientèle rurale et populaire, autant 30 ans plus tard, l’esprit rural n’est plus trop visé par les équipes marketing des différents constructeurs. On va donc viser une clientèle plus citadine, et aussi plus féminine.

Cela sous-entend qu’on va concevoir la deuxième voiture de la famille moyenne (façon image d’Épinal). Une voiture qui doit être pratique, fiable et robuste et économique. Citadine sous-entend également qu’il faut une petite voiture. De nos jours, on ne peut pas dire qu’une Renault 4 soit énorme (mettez-la à côté d’un SUV même un petit et vous verrez), mais avec la Twingo on va faire mieux.

La voiture va mesurer 3,43m de long. C’est 30cm de moins qu’une Clio… et 22 de moins que la R4 ! Un sacré tour de force à l’époque où, déjà, les voitures grossissent d’année en année.

2 : la technique et les équipements

Pour ce côté citadin, l’équipe de Yves Dubreil ne dispose pas d’un énorme budget. Il va falloir trouver des astuces. Côté technique on est bien obligé de partir d’une feuille blanche, aucune plateforme dans la gamme ne correspond. Par contre, niveau moteur… et bien on va reprendre le Cléon-Fonte, le même qui fait le bonheur des Renault 4 GTL qui seront remplacées. Pas tout à fait le même puisque c’est le 1300, celui des Estafette, Renault 12 et Renault 5 qui va se loger sous le capot (en longitudinal forcément). Avec 55ch disponibles, la citadine atteint 155 km/h, sachant que beaucoup ne dépasseront les 50 que de façon très occasionnelle !

Pour accroître les économies, on va faire à peine mieux que sur une Renault 4. On va proposer peu d’options et le moins d’équipements possibles. On cherche les économies partout et ça va marcher !

3 : l’Espace

Non, on ne parle pas du véhicule de l’autre bout de la gamme. Le tour de force de la Twingo va résider dans son espace intérieur, malgré la petite taille déjà évoquée. La forme de l’auto va être un sacré plus puisque l’habitacle occupe tout ce qui est possible. On trouve des astuces là encore, notamment le volant aux branches concaves.

Le résultat se traduit en chiffres. En avançant la banquette, le coffre atteint 261 litres, une taille correcte. Même en voulant loger des adultes à l’arrière, avec 168 litres c’est parfait, surtout pour une voiture de cette taille ? Vous voulez déménager votre frère ? Rabattez la banquette et vous aurez 1096 litres, plus qu’une R21 Nevada, carrément ! Vos avez besoin de faire une sieste ? Vous pouvez créer un lit en rabattant les sièges avant. Personne n’a parlé du confort par contre !

Cet espace intérieur et cette praticité ne font que renforcer l’intérêt pour un véhicule comme la Twingo. Car même le « premier véhicule de la famille » ne fait pas forcément aussi bien.

4 : la bouille

Dire que les études de style n’ont pas été appréciées par le panel test ! Les dessins de base sont signés Jean-Pierre Ploué et Patrick Le Quément confirme la direction prise quand il prend la tête du style de Renault en 1988. On notera que malgré la collaboration forte qu’il y a à l’époque entre Italdesign-Gandini et Renault, on va opter pour une solution 100% interne.

De nos jours, ce dessin ne peut être qu’apprécié. On s’y est habitué mais surtout la Twingo a réussi a se rendre sympathique, à proposer plus qu’un style : une présence. L’idée des feux ronds y est pour quelque chose, dotant la face avant de vrais yeux. Et puis l’aération située au-dessus de la plaque a également joué en ajoutant une bouche.

Résultat : une carrière folle

Voilà autant de critères où la Twingo a bien joué. Elle est présentée au Salon de Paris 1992, pour le millésime 1993 (donc elle a un peu plus de 30 ans). D’emblée, c’est une voiture décalée, tant par sa taille, ses équipements réduits que son prix : 54.000 francs. Quatre couleurs flashy sont disponibles, le rouge corail, le vert coriandre, le bleu outremer et le jaune indien. Évidemment aucune n’est métallisée mais on va ajouter plus tard un noir et deux métallisés (rouge et gris).

La Twingo a d’emblée une belle carrière. Tellement qu’elle érode les ventes de la Clio ! En 1994 elle est dans le Top 5 des ventes tandis qu’on améliore l’équipement (essuie-glaces trois vitesses) et la sécurité (barres anti-encastrement dans les portes).

L’année suivante elle est 4e alors qu’on est passé à la « Collection 2 » avec de nouvelles teintes métallisées et deux intérieurs au choix. Airbag, ABS, Pack Électrique vont venir garnir le catalogue des options tandis que les séries limitées arrivent. À Rétromobile on pouvait ainsi voir une Twingo Benetton de 1995 ou une (la bleue) ou une Lecoq, créée par le carrossier du même nom avec un certain luxe à bord.

Petit à petit la Twingo s’embourgeoise tout en restant une des plus petites voitures disponibles et l’une des moins chères. Les collections se succèdent et on passe carrément à la phase 2 en 1998 (les clignotants ne sont plus orange, notamment), à la phase 3 en 2000 et à la phase 4 en 2004.

Niveau technique, cela a aussi évolué. Le 1.2 litres D7F est arrivé en 1996 dès l’entrée de gamme et en 2000 on propose le D4F, un 16 soupapes de 75 chevaux !

Bref, la Twingo traverse les ans en se vendant toujours bien. Pour autant, on la remplace en 2007… mais la mayonnaise ne prendra plus de la même façon. Style moins personnel, une auto plus grande… la Twingo II ne tiendra que 7 ans avant de laisser sa place au modèle actuel. Les chiffres de vente sont bien en dessous de ceux de la première génération : 2,6 millions de Renault Twingo en 15 ans !

La Twingo n’a pas attendu Rétromobile 2023…

Voilà plein de raisons qui ont amené la Twingo a bien occuper le paysage automobile. Mais maintenant que les dernières autos de la première génération ont 15 ans… on en voit encore plein. Leur chiffre décroit évidemment mais on a pas fini d’en voir. En fait la Twingo est en train de passer directement d’occasion à collector. Et c’est ça qui est logique.

Qu’est ce qui fait d’une voiture un collector ?

Les sportives, les autos haut de gamme ou en série limitée sont des collectors. Les autos qui ont fait rêver aussi. Ainsi, bien avant la Twingo, les MX5, les Honda S2000, les Audi TT, ou la Peugeot 406 Coupé sont passées directement d’occases à collector avec certains amateurs avisés qui avaient vu venir la chose.

Sauf que la Twingo n’est pas à mettre dans la même case. Clairement, elle n’a pas été conçue comme une voiture plaisir, le peu d’équipements et la fiche technique suffisent pour s’en convaincre. Ce qui fait de la Twingo un collector c’est un mix de plusieurs choses :

• sa cote d’amour puisqu’elle a été la première voiture ou une voiture de famille de beaucoup de ceux qui sont les « nouveaux collectionneurs »
• son concept décalé, précurseur
• son design, qui la distingue d’un Espace qui n’a pas cet aura tout en étant également un concept précurseur
• le simple fait que « des comme ça on en fait plus »

Certains s’intéressent à la Twingo depuis longtemps

On ne fait que de vous expliquer pourquoi s’intéresser à la Twingo. Si vous franchissez le pas, vous ne serez pas les premiers ! La Renault Twingo est en effet suivie et aimée depuis bien longtemps.

Ainsi, rien que chez nous, l’association Génération Twingo, qui regroupe a été lancée en 2010. On était bien loin des voitures pouvant prétendre à un Certificat d’Immatriculation Collection. L’engouement est donc ancien même si on ne trouve pas de trace de rassemblements d’ampleur depuis la pandémie. Il y a des chances que ça revienne !

Sur facebook le « Twingo Owners Club » est plus étonnant. Fondé en 2008, il regroupe 3500 membres, majoritairement anglophones, anglais et irlandais. Il est intéressant de noter que la petite citadine y est particulièrement prisée. Pourquoi ? Parce qu’il est difficile de faire plus original : pour simplifier au maximum la conception, les version en conduite à droite n’ont jamais été envisagées ! Du coup, pas d’importation sur place ! De quoi créer une certaines rareté et faire de l’auto une bizarrerie appréciée de quelques connaisseurs !

La Twingo en collection

En collection… il faut le dire vite ! Mais c’est possible et il ne faut regarder que les toutes premières autos de la série. La majeure partie des Twingo que vous trouverez à vendre le sera à bas prix : moins de 1000 €. Souvent les autos ont bien vécu, accumulent les kilomètres, les soucis et souvent les motifs de contre-visite.

Pour autant, on peut aussi trouver des autos dans un bel état, pas trop kilométrées, bien préservées et prêtes à rouler voire à rejoindre un événement dédié à la citadine et s’y faire admirer. Là, l’addition tournera entre les 2500 et 3500 €. L’avantage, c’est qu’avec ces critères, vous pourrez justifier une demande de Certificat d’Immatriculation Collection. Une vraie nouveauté pour les Renault Twingo !