Après la première partie consacrée à l’histoire de la Carrozzeria Bertone avant-guerre, c’est à lire ici, on reprend notre récit à la sortie du conflit mondial, quand Bertone va vraiment s’affirmer.
Une diversification toujours luxueuse
Avant le conflit, la Carrozzeria Bertone a surtout carrossé des marques italiennes et surtout des Lancia et des Fiat… parfois avec des dessins similaires. Après le conflit, on redémarre sur les mêmes bases, mais avec un peu plus d’Alfa Romeo. Par contre, les dessins reprennent les rondeurs des modèles d’avant-guerre, abandonnant tout de même les calandres « américaines ».
Nuccio Bertone court toujours et après sa rencontre avec Vittorio Stanguellini on dévoile un petit coupé sur base de Fiat 1100 qui aura une production limitée. Sa forme sera d’ailleurs adaptée, notamment pour les ailes, sur des Alfa ou encore des Fiat 1500. Les constructeurs étrangers commencent également à faire appel à la Carrozzeria. C’est le cas de Healey qui sort un cabriolet reprenant tous les gimmicks de Bertone.

Siata s’ajoute à la liste des clients et, en 1950 la Carrozzeria signe sa première Ferrari, qui sera sans suite, une 166 Inter Cabriolet.
1951 est une année charnière puisqu’elle voit l’embauche de Franco Scaglione. Amateur de formes aérodynamiques et futuristes, il donne naissance à de véritables concept-cars, comme l’Abarth Biposto dont le dessin n’est pas sans rappeler les magnifiques BAT que Bertone signera, sur des châssis Alfa, dans les années suivantes. D’ailleurs, la relation avec Alfa Romeo va devenir très forte avec l’apparition de la Giulietta Sprint dont la production devait être de 1000 exemplaires… et dont 40.000 autos seront produites.

La Carrozzeria travaille également avec les constructeurs anglais : MG, Bertone ou encore Aston Martin ou Arnolt qui partagent d’ailleurs les mêmes formes ! On propose également des dérivés très sportifs, pour aller marcher sur les platebandes de Zagato, avec les Giulietta SS, Maserati 3500 GT et on étend les capacités industrielles pour produire les NSU Sport Prinz.
Scaglione quitte Bertone en 1959. Mais cette année-là, on recrute un autre talent, venu de chez Fiat, pour le remplacer : Giorgetto Giugiaro. Son dessin va devenir mythique et faire entrer dans une autre dimensions. Les collaborations s’enchaînent. Aux Fiat, Alfa et Lancia s’ajoutent les Simca, les BMW, les ASA ou les ISO.
Triple coup de maître au milieu des 60s. D’abord, c’est bien Giugiaro qui signe pour Bertone la ligne du coupé de l’Alfa Romeo Sprint GT sur base de Giulia. Si vous n’avez pas compris, on parle tout simplement de l’auto qui sera surnommée le « Coupé Bertone », rien que ça !

Ensuite, si elle est moins mythique, la Fiat 850 Spider marque un nouveau tournant car il faut produire une auto qui a un succès fou… et on pousse les murs ! En 1968 on fabrique 30.000 unités de ce seul modèle !

Enfin, on se retrouve en 1966. Au salon de Turin 1965, Lamborghini a dévoilé le châssis et le moteur d’une sportive radicale à moteur central. Bertone se bat pour en signer la ligne et c’est ainsi que va apparaître la Miura, dévoilée au salon de Genève. Là encore, c’est une pièce maîtresse, personne ne viendra jamais remettre son dessin en doute.

Cette auto marque un autre tournant. Si Giugiaro en a dessiné quelques grandes lignes, c’est bien Gandini, entré dans l’entreprise en 1963, qui prend sa place. Son dessin fait de coins et d’autos plates et effilées va donner quelques uns des concepts les plus mythiques de l’histoire, de la Lamborghini Marzal à l’Alfa Romeo Carabo. Il donne le ton pour une nouvelle ère chez Bertone… qu’on vous racontera le mois prochain !

Quelques réalisations de Bertone de cette période
Juste à la fin de la guerre, la Carrozzeria décline ses formes… comme avant-guerre. Comment ne pas trouver une ressemblance entre l’Alfa Romeo 6C 2500 SS Berlinetta de 46, à gauche et la Stanguellini 1100 Berlinetta de 1947 ?


C’est d’ailleurs la même forme que la Stanguellini qui se retrouve sur le premier projet anglais de bertone avec cette Healey Cabriolet produite à peu d’exemplaires.

Arrive ensuite un autre style, avec l’avènement mondial du style « Ponton » qui se décline sur des autos de toutes tailles. On le retrouve notamment sur ces deux autos : à gauche une Fiat 1900 « Western Arrow » et à droite une Siata Amica Cabriolet.


La première Ferrari de chez Bertone n’est d’ailleurs pas très éloignée en terme de références stylistiques.

En 1950, Lancia produit l’Aurelia en version B52 : une mécanique nue spécialement pensée pour les carrossiers voisins. Habillée par Bertone, cela donne ce mélange d’élégance et de sobriété.

En 1951, on voit un style qui devient plus sportif. En même temps la base de cette Siata 300 BC Barchetta Sport Spider s’y prête.

Scaglione ne tarde pas à se mettre en évidence. Nous sommes au Salon de Turin 1952, un an après son arrivée, et la carrosserie de ce concept-car Abarth 1500 Coupé Biposto marque les esprits !

En 1953, le classicisme est toujours présent, à l’image de cette Alfa Romeo 1900 L coach.

Par contre, on retrouve également des formes plus évoluées. C’est notamment le cas de la première Alfa Romeo B.A.T, la B.A.T 5 (BAT signifiant Berlinetta Aerdinamica Technica), signée Bertone et qui n’est pas sans rappeler l’Abarth montrée plus haut.



On décline toujours les formes ! La même année on propose l’Aston-Martin DB2/4 Spider et une Arnolt-Bristol… très ressemblante ! La première est produite à deux exemplaires, la seconde à 136.


D’ailleurs, Arnolt est un bon client, cette MG Coupé date aussi de 1953.

En 1954 on présente un grand succès de la marque : l’Alfa Romeo Giulietta Sprint dont la production sera donc énorme.



Deuxième B.A.T : la n°7 qui est présentée au salon de Turin 1954 et pousse encore plus loin le concept précédent.


Logiquement, au salon de Turin 1955, on retrouve la dernière des B.A.T, la n°9, la plus élégante et aboutie.



Par contre, ses lignes servent pour la proposition d’une Alfa Romeo Sprint Spider. C’est finalement une proposition de Pininfarina qui sera choisie.


Par contre, l’Arnolt-Bristol Coupé voit bien la production, avec 6 exemplaires, mais ne fait que reprendre les lignes du roadster.

En 1956, la Fiat Abarth des records montre que les recherchez aéro de Bertone portent leurs fruits !

Quelques fabrications sur mesure sont toujours à l’ordre du jour. En témoigne cette Jaguar XK150 S de 1957 qui mixe de nombreuses influences.

La même année, Bertone propose l’Alfa Romeo Sprint Spéciale. Une superbe ligne tout simplement.


On arrive à l’année 1960 et le début de l’ère Giugiaro. Cette année là on retrouve une Ferrari 250 GT SWB, #1739 GT, le prototype EW, qui sera la seule à recevoir ces lignes tendues.

La même année on présente aussi l’Alfa Romeo 2000 Sprint et sa grande sœur la 2600. Là encore, c’est Pininfarina qui signe le cabriolet.

En 1961 Bertone propose sa vision de l’Aston Martin DB4 GT avec la « Jet » qui n’est pas sans rappeler les Ferrari Superamerica. Elle ne sera produite qu’à un seul exemplaire, contrairement à la version Zagato.



La même année, on note la première collaboration avec BMW avec la 3200 CS. Ce coupé qui succède à la 503 sera produit à 603 exemplaires.

En 1962, c’est avec le français Simca que collabore la Carrozzeria Bertone. Naît la Simca 1000 « Coupé Bertone » à la ligne rappelant la Giulietta SS… en réduction !

C’est la même année que débute la fabrication de l’Iso Rivolta GT avec une ligne qui rappelle un peu la Ferrari 250.



Une autre Ferrari 250 GT SWB sera d’ailleurs produite cette année là, avec une forme toujours originale.

En 1963, Bertone propose sa réinterprétation pour un Spider basé sur la Giulia. Pas suffisamment moderne, il ressemble trop à la Giulietta du même nom, il est rejeté.


Par contre, toujours pour la série 105 de la Giulia, on propose la Spint GT. Le coupé sera retenu et deviendra le fameux Coupé Bertone dont les différentes versions (les premières avec deux phares et la boîtes aux lettres, les suivantes sans ses artifices) seront produites jusqu’en 1977 !

Plus sportive, mais moins répandue, Bertone signe aussi la ligne de l’Iso Grifo A3C.

Plus petite, c’est Bertone qui signe la ligne de l’ASA 1000 GT, la « Baby » Ferrari.


1963 marque enfin la première collaboration avec un constructeur japonais. C’est avec la Mazda Luce 1000 exposée au salon de Tokyo.

En 1964, toujours chez Alfa, Giugiaro signe pour Bertone le concept-car Alfa Romeo Giulia 1600 Canguro… qui rappelle la Grifo !

La même année, c’est le début de production des 100 exemplaires de la Gordon-Keeble GT.

En 1965, nouveau concept. Il est dévoilé au salon de New York et la base est le nouveau carton de l’industrie automobile américaine : la Ford Mustang.



Mais surtout, le gros carton c’est le lancement en production, chez Bertone d’ailleurs, de la Fiat 850 Spider.

Du côté d’Iso Rivolta, c’est le début de production de la Grifo de route.

En 1966 on produit toujours des autos sur-mesure. Encore une fois, on retrouve une Jaguar avec cette GT Coupé de 1966, pas forcément très élégante.

À Genève, on révèle un prototype de Porsche 911 Roadster… qui en restera à ce stade.


Par contre, on fait aussi sensation avec la définition technique et les formes de la nouvelle Supercar, la Lamborghini Miura, première auto de la marque qui ne soit pas signée Touring. Avec elle, Bertone passe définitivement de Giugiaro à Gandini.



L’année suivante, on profite de l’exposition universelle de Montréal pour exposer l’Alfa Romeo du même nom. Rien à voir avec l’auto de série, la base est encore celle de la Giulia avec un 4 cylindres. Plus d’infos dans notre article.

D’autres concepts sont présentés par la Carrozzeria Bertone cette année là. Tout d’abord la Jaguar Pirana avec ses lignes tendues rappelant une Lamborghini qui arrivera bientôt.



En parlant de Lamborghini, on présente aussi la révolutionnaire Marzal avec ses larges surfaces vitrées.


Du côté de la série, c’est Bertone qui a adapté les lignes de la Giulia pour donner naissance à l’Alfa Romeo 1750 Berlina.

Chez Fiat, c’est la proposition de Bertone qui est retenue pour la production du coupé de la Dino. Le spider ? Encore Pininfarina !

En 1968, la Jaguar Pirana est devenue Lamborghini Espada ! C’est la voiture 4 places la plus rapide du monde ! On en a essayé une, c’est à voir ici.


En 1969, on présente un concept Targa très étonnante au salon de Genève : la BMW 2800 Spicup.


Une nouvelle Iso est également mise en production : la Rivolta Lele qui abandonne les arrondis.


Pour terminer cet article et l’année 1969, au salon de Turin, on propose un coupé 4 place sur une base de Fiat 128… comme quoi l’inspiration n’est pas toujours au rendez-vous !

Photos additionnelles : Carrozzieri Italiani
gougnard
superbe le travail de ce styliste il à realise des magnifiques voitures
· · 4 septembre 2022 à 14 h 42 min