Essai d’un VW type 181, l’air marin, différemment

Publié le par Thibaut

Essai d’un VW type 181, l’air marin, différemment

Avec Benjamin, on a monté une petite campagne d’essais sur la Côte Vendéenne. Au programme, bien sûr, des cabriolets (une Minor découvrable et une 204 cabriolet pour ne citer que ces deux modèles)… mais je voulais aussi faire dans la voiture de plage, dans la voiture purement inutile donc diablement nécessaire. La Méhari ? Tout le monde la connaît, et je n’en avais pas parmi mes connaissances. Finalement débarque Charley qui nous propose un VW type 181, civil, dans son jaune d’origine, banco ! On vous emmène !

Commençons par un (petit) tour de la question…

Le type 181, Benjamin en avait déjà croisé un dans la rue il y a quelques années. Puisqu’il s’agissait d’un coup d’œil sur une auto croisée dans la rue, difficile de vraiment s’intéresser à son historique, nous allons donc tâcher de s’y intéresser un peu plus.

C’est de nouveau dans les années soixante que nous allons nous immerger, outre-Rhin cette fois. Volkswagen surfait alors sur la success story de la Coccinelle et la décline à l’envie. Et cette économie de réemploi, la firme de la « voiture du peuple » l’emploiera de nouveau en 68 pour son Type 181.

En 68 donc, VW prend tout ce qu’il a de plus intéressant dans son catalogue pour tâcher de mettre la main sur le juteux marché proposé par l’armée allemande : plancher de Karmann-Ghia, trains à réducteurs des Kombivan (retirés en 73 faute d’utilité pour une clientèle civile), moteur 44ch de la Cox…

Bref, VW est contacté en 68, lance ses préséries et présente le Type 181 dès février 69, on fait donc avec ce que l’on maîtrise, ce qui marche déjà… et marchera, mais un peu seulement. Elle restera assez longuement au catalogue (dont un certain nombre d’années pendant lesquelles elle sera produite de l’autre côté de l’Atlantique), mais ne dépassera que difficilement les 90000 exemplaires (50000 commandes militaires y compris), constituant ainsi un plus grand succès que prévu.

Au régime des évolutions majeures au cours de sa carrière : apparition d’une nervure qui distingue les préséries des séries, rallongement des rétroviseurs extérieurs courant 70, moteur porté à 1600cc et 44ch en août 70 puis à 48ch en 73… voilà pour les principales, les autres restent du domaine des experts.

En 1983, la production du Type 83 est définitivement mise à l’arrêt et laissera place au prochain projet militaire de VW, le modèle Iltis.

Et le modèle du jour dans tout ça ?

Vous le verrez dans nos photos, le modèle qui nous a été prêté et que nous vous présentons, n’est probablement pas le plus beau que vous verrez, le plus neuf que vous croiserez.

Mais personnellement, cela m’importe peu : il ne s’agit pas d’une voiture de luxe, pas d’un salon sur roues, mais d’un utilitaire décapsulé qui doit pouvoir servir tant de voiture de plage que de franchiseuse, alors au diable les peintures rutilantes !

Côté esthétique : soldat plutôt qu’esthète

Avant de s’installer au volant de notre auto du jour, prenons quelques minutes pour en faire le tour, pour en détailler les lignes. Et le mot dé-tailler prend ici tout son sens tant Wolfsbourg semble s’être affairé à l’usage de la serpe pour dessiner son Type 181.

On trouve donc tous les codes de son ancêtre, la Kübelwagen : un capot avant anguleux, plongeant (effet accentué par les nervures), une face avant raide droite avec les 2 phares (entourés de chrome cela dit) expulsés chacun dans leur coin. Et c’est tout pour l’avant. Simple, efficace, utilitaire donc. Un œil aguerri repèrera les charnières à la base du pare-brise : oui, ce dernier est rabattable, façon Jeep par exemple. Autre détail sympathique, les fixations autour des phares qui permettront de fixer une grille de protection, un masque pour le « mode nuit », etc.

Quart tour de sur le côté et l’on découvre le profil de ce Type 181 à la robe jaune (sa teinte d’origine d’ailleurs). Sans surprise, l’ensemble reste assez rectiligne, toujours taillé à la serpe. Evidemment, les ailes angulaires et les portes non profilées n’aident pas, mais prenez le profil d’une Méhari et vous ferez sensiblement les mêmes constats.

Les nervures viennent tout de même donner du relief à l’ensemble, les poignées de porte noir mat casseront le côté uniteinte. On saluera une coquetterie sur les roues avec les centres de roues couleur alu. A l’inverse, on remarquera que la capote, une fois repliée, ne disparaît pas le moins du monde, elle reste posée sur l’espace moteur… utilitaire on vous dit.

Nouveau quart de tour et l’on découvre l’arrière du véhicule. Et, franchement, c’est probablement sous cet angle là que le préfère ce Type 181. Car si on ne changera pas une équipe qui gagne en continuant à donner de l’angle là où les courbes sont souvent préférées mais c’est ici que le duo jaune/noir (cher aux Rochelais) donne tout son sens : la capote et le pare-choc, noirs, encadre la face arrière et son capot moteur, jaunes. On joue le contraste. Le capot moteur d’ailleurs, parlons-en : il ouvre vers le haut mais il dispose de ce qu’on pourrait appeler une « sécurité pas vraiment prévue pour être une sécurité ».

Eh oui, regardez bien le contour dudit capot moteur, vous ne voyez pas un obstacle à son ouverture ? Le jerrican. Installé dans un coin, comme les feux (d’ailleurs dénués de chromes ou contours), il vient confirmer le côté baroudeur-militaire de ce Type 181 : monté sur charnières basculantes, il vous faudra impérativement le déployer sur le côté pour espérer accéder au moteur.

Alors bien sûr, ce serait mentir de dire que le Type 181 est un canon de beauté. Bien sûr, on pourra difficilement argumenter sur une recherche d’un design mêlant élégance et finesse de ligne. Mais bien sûr qu’il ne faut pas oublier ce pourquoi il a été conçu.

Car un véhicule militaire, c’est avant de l’efficacité, saupoudrée de rationalisme, le tout agrémenté d’une pincée d’austérité. Pourtant, je dois avouer bien l’aimer ce Type 181 : justement parce que ses lignes tranchent avec la fluidité des lignes actuelles, parce qu’elle a un look baroudeur qui (toujours à mon humble avis) manque à la Méhari (y compris dans ses versions 4×4)… parce qu’on n’a pas l’habitude de ce genre de lignes, tout simplement.

Côté intérieur : spartiate au possible, mais l’essentiel y est

Ne prenez pas comme un affront la répétition de ce qui est pour moins l’ADN même de ce Type 181, mais il s’agit d’un utilitaire militaire. Alors forcément, à l’intérieur, tout va nous le rappeler. Ou plutôt, le « rien » va nous le rappeler. Car la liste des équipements intérieurs est des plus réduite : un gros compteur central, quelques boutons et voyants, un grand volant avec 2 commodos, le tour est fait.

Mais c’est parfois dans le dénuement qu’on trouve son bonheur… car tout tombe sous la main proprement, depuis les commodos (pourtant des plus fins) jusqu’au neiman en passant par le levier de vitesse qui tombe tout seul sous la main. Bien sûr, peu de possibilités de réglage, mais l’auto n’est pas faite pour les longs trajets, on monte, on tourne la clé et on file. On notera que le Type 181 dispose tout de même d’un chauffage, pas forcément inutile…

De reste, on oubliera les notions d’habillage, les notions d’accessoires, etc. pour se limiter au strict nécessaire. Mention spéciale pour les sièges : on pourrait s’attendre à une assise rigide, à des sièges qui relèvent du strapontin, mais il n’en est rien. Le vinyl est confortable, l’assise suffisamment ferme pour qu’on ne s’y avachisse pas mais suffisamment confortable pour que l’on se sente assis et non pas suspendu. Bonne impression à ce niveau là, reste à jeter un œil au moteur avant de prendre la route.

Côté moteur : un flat 4 de 1600cc et 44ch

On l’a dit, ce véhicule est une sorte de Cox rhabillée, bricolée, adaptée. On retrouve donc, et ça semble pour le coup naturel, un flat 4 posé comme un sac à dos, et un flat 4 bien connu : 1600cc, 44ch, c’est celui de la Coccinelle, ni plus ni moins.

Refroidi par air, bien sûr, tout à l’arrière pour une belle conception RR (pour rear-rear) : on positionne le moteur à l’arrière, on embarque une propulsion, une Cox quoi. Pas de surprise donc de ce côté là, on pourra s’attendre à retrouver à son volant des sensations proches de celle de la Cox.

Côté conduite : sympathique hors des voies rapides

Le Type 181, tout porte à le déguster prioritairement en ville ou sur routes de campagne. Plusieurs raisons à ça, et je m’en suis vite rendu compte.

Contact mis, sans aucun problème car l’auto tourne rond, la première s’engage sans problème. Elle est suffisamment longue pour vous permettre de démarrer sans crainte, tous les autres rapports sans difficulté : la grille se repère facilement, les rapports verrouillent sans heurts, tout au plus pourra-t-on reprocher des rapports assez courts qui, couplés à une puissance assez limitée, forcent à jouer du levier de vitesse régulièrement. Léger désagrément pour moi, mais peut-être y suis-je pour quelque chose : alors que la pédale d’embrayage se fait douce à la manœuvre, j’ai eu du mal à trouver le point de patinage, difficile donc de proposer sur cet essai une conduite coulée…

En ville, l’auto se fait souple. Le moteur relance suffisamment pour ne pas rendre l’auto dangereuse ou fatigante, le gabarit réduit permet de se fondre dans la circulation même sans bien connaître le véhicule. Côté direction, pas de grand flou artistique, pas de dureté excessive, elle communique et obéit sans effort, j’aime bien.

Restent les questions du freinage et des suspensions. Le freinage ne pose aucun problème car si l’office est offert à des tambours, le Type 181 se situe sous la tonne, la pédale est réactive et relativement courte, pas d’affolement donc même s’il faut freiner urgemment.

Côté suspensions par contre, il faut s’attendre à une auto assez rigide tout de même : elle accuse les cahots, fait remonter en toute clarté les passages de ralentisseurs. Rien d’affolant, mais pas forcément un bijou de confort. A l’inverse, elle prend finalement moins de roulis que ce que je craignais, l’auto penche mais ne vous projette pas sur les côtés.

Je disais du Type 181 qu’il se préfère en ville ou sur routes de campagne. Et je persiste et signe. S’il est agréable de le conduire en ville, le fait de jouer des rapports pourrait le rendre un peu fatigant. Mais sur route, il devient une vraie petite promenade de santé : le moteur reste assez silencieux (silence aidé par sa position arrière, le bruit étant poussé par le vent) et volontaire, la direction se fait plus stable encore.

On profite alors de rouler cheveux (en ce qui concerne notre pilote du jour, Charley dont on a essayé la TVR) ou casquette (en ce qui me concerne, avec un joli p’tit pin’s News d’Anciennes, qu’on trouve en boutique) au vent… aux vents devrais-je dire ! Car le Type 181, compte tenu de sa conception, ne vous protègera pas du tout des éléments, les remous seront au rendez-vous, sensibles aux courants d’air s’abstenir.

A l’inverse, inutile de songer aux voies rapides. Certes, le compteur vous autorise à filer jusqu’à 140km/h (voire 160 pour les versions post-71), mais vous risquez alors de ne plus trouver le moindre plaisir à rouler ce Type 181 : bruyant, poussif, venteux… bref, pas particulièrement réjouissant, mais on sort de son périmètre de confort, du nôtre aussi par extension. S’il le faut, le Type 181 vous emmènera sur voie rapide, mais j’ai peur que vous n’y preniez guère plaisir…

Reste la question de la visibilité dans ce Type 181. Forcément, à rouler décapoté, on profite d’un 360° degrés dégagés. La chose est plus complexe une fois la capote relevée… mais c’est un véhicule qui est destiné à être roulé par temps clément, pour aller à la plage. D’ailleurs, gros avantage : l’intérieur, dépouillé, permet un nettoyage facile !

Conclusion

Je dois reconnaître qu’en essayant cette auto, je partais avec quelques a priori négatifs car je ne suis pas un très grand fan des réalisations de la firme de Ferdinand Porsche, rares sont les modèles qui m’attirent.

Et pourtant. Et pourtant je dois avouer que ce Type 181 frise le coup de cœur : parfaitement inutile, totalement aux antipodes de l’ergonomie classique, dénué de toute recherche d’esthétisme… donc tout à fait nécessaire. Elle vous distinguera des Méhari et autres JP4 à la plage dans sa configuration civile, elle se glissera parmi les Jeep en configuration militaire. Une auto finalement sympa et agréable à conduire.

Les plusLes moins
Une mécanique qui n’a plus rien à prouverUn dénuement un peu extrême
Un modèle finalement pas si courantUn style qu’on dira « clivant »
Une cabriolet encore abordableMoteur qui pourrait être plus vaillant
CritèreNote
Budget à l’achat16 / 20
Entretien16 / 20
Fiabilité16 / 20
Qualité de fabrication12 / 20
Confort12 / 20
Polyvalence14 / 20
Image13 / 20
Plaisir de conduite15 / 20
Facilité de conduite16 / 20
Ergonomie*10 / 20
Total14 / 20
Ergonomie : je mets 10 car il est difficile de qualifier d’ergonomique une auto aussi dénuée…

Rouler en VW Type 181

90000 pièces, on ne dira pas que le Type 181 est rare. Plus encore, les nombreuses commandes militaires font qu’au gré de leur réformation des modèles font très régulièrement surface.

Autre gros avantage, le melting pot de pièces VW permet de très facilement retrouver les pièces utiles à une restauration ou à un entretien courant. Y compris pour la carrosserie pour laquelle on retrouve assez facilement des refabrications.

A l’achat, comptez environ 10000€ pour un Type 181 en bon état, mais plus facilement 12 à 14000€ pour un état concours… quasiment introuvable reconnaissons-le ! On pourra chercher à trouver l’une des multiples versions spéciales du 181 : militaire, ambulance, etc. qui présenteront quelques détails intéressants.

Vous voulez en savoir plus ? Je vous propose comme d’habitude quelques sites utiles :

Fiche Technique du VW type 181
MécaniquePerformances
Architecture4 cylindres à platVmax117 km/h
Cylindrée1600 cm³0 à 100 km/h
Soupapes8400m da
Puissance Max44CV à 4000trs/min1000m da
Couple Max10,2 m/kg à 2000 trs/minPoids / Puissance
Boîte de vitesse4 rapports manuelle



TransmissionPropulsion
ChâssisConso Mixte10 litres / 100km
Position MoteurPorte à faux arrièreConso Sportive
FreinageTambours AV – AR
Dimensions Lxlxh378 x 164 x 162 cmCote 2021±10.000 €
Poids900 kg à vide

Thibaut

Copilote, président de l'AutoMoto Classic de l'Ouest, Directeur de Course FFSA... et rédacteur/photographe pour News d'Anciennes (depuis 2017) lorsque les évènements s'y prêtent. C'est au guidon d'une Terrot TENOR de 1963 et au volant d'une Lancia FULVIA 1.3S de 1971 que j'arpente les routes de France... c'est fort de ces différentes casquettes que je tâcherai de vous faire vivre par procuration autant d'évènements que possible : pas toujours de manière professionnelle, mais avec une constante sincérité...Viendriez-vous avec moi découvrir ce que la passion de l'auto ancienne a de plus diversifié ?

Commentaires

  1. ShamWerks

    Merci pour ce test! 😉
    J’apprécie en particulier la conclusion « parfaitement inutile, totalement aux antipodes de l’ergonomie classique, dénué de toute recherche d’esthétisme… donc tout à fait nécessaire ».
    C’est à peu de choses près ce que je réponds aux gens qui me demandent pourquoi j’ai un engin pareil. Ca ressemble à rien, on peu pas faire plus minimaliste, mais j’ai le sourire quand je le regarde. :-))

    Répondre · · 25 mai 2021 à 14 h 58 min

    1. Thibaut

      Merci à vous ! J’ai pour habitude d’essayer d’être toujours le plus objectif possible… mais sans oublier ce pourquoi est conçue une auto : on n’attend pas la même chose d’une 2CV que d’une Lusso, on ne peut donc pas toujours placer les curseurs aux même niveaux. Ici, on est sur un véhicule purement futile, purement utilitaire, mais c’est très précisément ce qui fait son charme !

      Répondre · · 1 juin 2021 à 21 h 43 min

    1. Thibaut

      Merci beaucoup pour ce relais ! J’ai cherché à le faire suivre aux plus spécialistes des acteurs du net, mais j’avoue ne pas suffisamment connaître les clubs ou entités actifs outre-Quiévrain pour être allé chercher de ce côté là !

      Répondre · · 1 juin 2021 à 21 h 43 min

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