Essai d’une (autre) Ford Escort RS Cosworth : la T34, le Turbo qui change tout !

Publié le par Fabien

Essai d’une (autre) Ford Escort RS Cosworth : la T34, le Turbo qui change tout !

En début d’année, j’avais déjà essayé une Ford Escort RS Cosworth. Manque d’inspiration ? Je radote ? Non, pas vraiment parce que si je vous remmène au volant d’une Ford Escort RS Cosworth, ce n’est pas la même ! Oui, il en existe deux versions qui sont subtilement différentes. Il paraissait logique que lorsque l’occasion d’un essai d’une version Cosworth YBT Turbo, équipée du gros T34, s’est présentée, c’est avec une gourmandise non dissimulée que j’ai mis la main dans le pot de confiture ! Pour le coup, c’est reparti pour un tour.

Notre Ford Escort RS Cosworth du jour

Un titre qui fleure bon le déjà-vu. Alors, pas la peine de revenir sur la présentation de l’auto et les deux versions qui ont été produites par Ford, tout est dans l’article précédent.

Outre le Bleu Impérial, un bleu marine profond, qui habille notre Ford Escort RS Cosworth du jour, la différence la plus notable au premier abord, c’est son aileron. Celui qui est resté dans la mémoire de tous les passionnés. Celui qui a été hérité de sa grande sœur, la Sierra Cosworth. Cette « whale-tail », ou « queue de baleine », délicieusement monstrueuse, et surtout LA véritable signature visuelle de l’auto.

L’autre caractéristique, ce sont les jantes. Exit les jantes d’origine Ford, vues lors de notre précédent essai. Ici, la bête est parée de jantes blanches du plus bel effet. Et le diable se cachant dans les détails, ce ne sont pas des OZ, mais bien leurs inspiratrices : des jantes Compomotive Motorsport de 16 pouces montées en 225/45ZR16. Des jantes dont la première version, en trois parties, a été créée en 1973 !

Mise à part cela, on retrouve la ligne bodybuildée de la Ford Escort RS Cosworth notamment au niveau des ailes avant et les artifices aérodynamiques déjà vus lors de notre précédent essai. De ce côté là, rien ne change, jusqu’aux monogrammes du hayon. Bref, ça sent le Groupe A, il n’y a que la couleur pour apporter quelque chose de civil à notre auto du jour.

En tout cas, ça suffit largement pour changer une compacte des années 90, avec forcément des lignes qui commencent à s’arrondir (le biodesign arrive chez Ford quelques années après) en une voiture qui vous fait dire que le sport va être au programme. Et ça ne se traduit pas qu’à l’extérieur !

A l’intérieur de notre Ford Sierra RS Cosworth

Là encore, peu de différences. Les Recaro au parfait maintien sont toujours présents, même planche de bord, même monogramme Cosworth et même coffre au volume largement réduit par la roue de secours. Jusqu’au kilométrage, quasi identique avec 21.000 km et des broutilles au compteur.

Le pommeau de vitesse est ici d’origine, à l’inverse du volant, un Turn-One trois branches, tulipé, en peau retournée. Une touche typée rallye qui va comme un gant à notre belle du jour.

Quelques options de confort, toit ouvrant manuel et vitres électriques, viennent enfin compléter l’équipement qui à la base est plus spartiate. C’est qu’il fallait quand même la vendre cette Ford Escort RS Cosworth, et au prix où elle était affichée, mieux valait que l’acheteur en ait pour son argent.

Sous le capot, un bloc bien présent

Contrairement à la version T25, le moteur de 1994 cm3 n’est pas « civilisé ». Les quatre fils de bougies sont bien visibles au niveau du cache-culbuteur, et, moulés dans la fonte, deux lignes : sur la première, « DOHC 16-V TURBO » et sur la seconde le logo Ford suivi du nom mythique, Cosworth.

On aperçoit aussi le gros turbo Garrett T34, hybride T3/T04B, sous son carter. Ce turbo, c’est la grosse différence entre les deux autos. Pourquoi cette différence ? Un peu de technique permet de mieux comprendre ce qui se passe sous le capot de notre Ford Escort RS Cosworth… Pour cela, je reprendrai les mots du Club Cosworth France :

Le Garrett T025 [T25] peut produire une pression maximum de 1,4 bar à 2000 tr/min mais cette pression chute très fortement à partir de 5000 tr/min.
Le TO4 (monté sur les RS500) a un comportement contraire : peu de pression jusqu’à 4500 tr/min mais il est capable de rendre plus de 2.0 bars à 8000 tr/min. […]
Le T035 [T34] est un exemple d’hybride : temps de réponse assez faible et pression maximum élevée.

Club Cosworth France

Ainsi équipée, en version d’homologation, notre Ford Escort RS Cosworth développe 220 chevaux, soit 7 chevaux de moins que la version avec le turbo T25. La vitesse de pointe est moindre, mais ce qu’elle perd en pointe, notre bête du jour le récupère du côté de l’accélération.

L’autre différence, c’est que ce moteur respire mieux : aucun catalyseur n’est présent sur la ligne d’échappement, puisque notre auto est de 1993. Et pas de climatisation non plus. En d’autres termes, pas de frein à la sortie des gaz, pas de filtre… Pas de contrainte ! Toute la puissance passe dans la motricité aux quatre roues.

Enfin, mieux vaut ne pas perdre une douille ou un écrou dans le moteur : l’espace est millimétré et en jouant avec les ombres et lumières, le coeur de notre Ford Escort RS Cosworth en devient presque une oeuvre d’art.

Au volant de la Ford Escort RS Cosworth

Assis dans le Recaro, aucun problème, je ne suis pas dépaysé. Par rapport à la précédente Ford Escort RS Cosworth dans un premier temps. Mais finalement, niveau volumes, niveau ergonomie, niveau commandes, je ne suis pas dépaysé par rapport à l’installation dans n’importe quelle compacte d’il y a 30 ans. Dire qu’elle me rappelle ma ZX ACAV… quand même pas, mais il y a de l’idée ! Le levier de vitesse tombe bien sous la main et le volant tulipé ajoute encore à une bonne position de conduite, sans craindre le bras tendu.

Alors, on ne se prive pas. Contact. Toujours cette mélodie feutrée, légèrement rauque du L4. Quelques coups d’accélérateur pour entendre le sifflement du turbo, et oui, il faut aller chercher 1000 tours de plus qu’avec la T25 pour qu’il se déclenche. Ça se lit d’ailleurs sur la fiche technique avec le couple maximum, similaire sur les deux modèles à 300Nm pour la T25 et 290Nm pour la T34, mais respectivement à 2500 et 3500 tr/min.

On commence par un peu de circulation classique et de villages (obligatoire), histoire de voir comment réagit l’auto et constater la différence entre notre Ford Escort RS Cosworth avec son gros Turbo et celle de notre essai précédent. Et bien là, surprise. Dans la circulation, en conduite sereine, je préfère finalement ce modèle. Tout simplement parce que turbocompresseur ne se déclenche pas ! Tous les fans de « vrooom-pshiit » me regardent bizarrement, mais je m’explique.

Si l’on sait rester tendre avec la pédale de droite, les limitations de vitesses et une circulation normale, sans être dense, font que le régime moteur reste sous la barre des 3000 tours, et le 2.0 litres reste assez souple pour ne pas avoir à jouer du levier de vitesse en permanence. En fait, à 2000 tours, la Ford Escort RS Cosworth dispose déjà de 215Nm et c’est déjà un bel atout pour une conduite coulée.

Une très agréable surprise, donc. D’autant plus que, malgré la suspension ferme, la Ford Escort RS Cosworth étant une version routière, est dotée d’un bon confort de roulage. A l’avant, les sièges semi-baquets Recaro, en velours, bien dessinés pour un maintien optimal avant de basculer sur des sièges baquet, renforcent cette sensation de confort. A l’arrière, c’est bien simple, je suis même arrivé à faire des photos nettes à 80 ! Pour votre info, ce n’est pas si facile (avec un temps d’ouverture « long »), et c’est fait sur des routes françaises, si vous voyez ce que je veux dire.

Mais quand on a entre les mains une voiture avec 220 chevaux sous le capot, capable de sortir un 0 à 100 en moins de 6 secondes et un 1000 mètres en 25,9 secondes, il y a d’autres choses à faire que de rester dans la circulation ! Qui plus est lorsque toutes les commandes tombent parfaitement sous les mains, grâce à une bonne position de conduite encore améliorée par le volant tulipé, en comparaison à la version T25.

Et ce qui est bien, c’est qu’il y a des montées historiques régulièrement organisées dans le coin. Et ce qui est encore mieux, c’est quand on connaît certains organisateurs et qu’on tombe au bon moment. La route est fermée, sans risque de croiser un autre usager en sens inverse, et partir en reco sur un tronçon d’environ 5km, sinueux à souhait, cela permet de se rendre mieux compte de la bête que l’on a entre les mains !

A l’accélération, ça pousse très fort, d’autant que la motricité est sans faille : pas de cirage de pneus, 100% de la puissance passe sur l’asphalte. Il est logique que l’on retrouve les atouts de la transmission intégrale déjà évoqués lors du précédent essai. Mais ici, on a l’impression que l’on est passé en mode hyperespace à bord du Faucon Millénium ! Moins Star Wars dans l’image, c’est comme un avion qui passe le mur du son. Et malgré les 4 roues motrices permanentes, mieux vaut être bien aligné quand le turbo se met en action. C’est d’une violence rare, mais aussi d’une jouissance absolue.

Premier virage, les rapports tombent aussi vite qu’ils sont montés. La boîte de vitesses 5 rapports MT75 de la Ford Escort RS Cosworth, déjà présente sur la Sierra, est un régal. Pour rester dans les tours, elle requiert un maniement quasi permanent dans les configurations sinueuses. Et on vous conseille de rester dans les tours. 3000trs/min, c’est la base. C’est le chiffre auquel on dépasse les 100ch (n’oublions pas que la puissance est une courbe et pas une valeur constante) et le couple est déjà presque entièrement dispo.

La conduite est assez intuitive et la liaison au sol en 4RM rassurante. Dans ces conditions, on prend plaisir à faire souffler le turbo en permanence. Il y a certes un manomètre qui indique la pression, mais je n’ai même pas cherché à jeter un oeil dessus, tant ça va vite et que l’attention doit être intégralement focalisée sur la route et les virages.

Le tronçon est littéralement dévoré en un temps que ma 205 GTI ne m’aura jamais permis d’atteindre. Dans la grande courbe, la Ford Escort RS Cosworth reste d’une stabilité impressionnante, avec une tendance au sous-virage en attaque puis très vite une rassurante neutralité. La répartition de la motricité définie à 34/66% entre roues avants et roues arrières est probablement à l’origine de cette sensation, le train avant affichant une certaine paresse avant de se placer. Pour certains, ça peut sembler dommage, mais je ne suis pas François Delecour (le pilote le plus victorieux en WRC avec notre belle) et ce comportement est vraiment rassurant et permet de s’adapter rapidement à l’auto.

Ce sous-virage que l’on ressent dans les enchaînements, rajoute du piment à la conduite, et impose de batailler un peu avec le volant. Mais le ressenti, dans les reins et le dos, bien calé dans le Recaro, reste délicieux. Côté freinage, il est sans faille. Même après quelques montées. Le refroidissement est probablement amélioré du fait des jantes Compomotive et leurs ailettes. En tout cas, ça freine fort et longtemps et ça aussi ça rassure !

En fait, on retrouve les mêmes sensations que dans la T25, mais de façon décuplée. En fait, on réalise à la comparaison, que la Vmax, c’est sympa sur le papier, mais que les accélérations et les reprises sont des paramètres qui sont atteignables, en contexte adapté, et ils modifient le caractère d’une auto qui pour l’essentiel reste identique dans ses deux configurations.

Quant à l’aileron… Mes performances de pilote ne m’ont pas permis d’en déceler l’utilité. Mais son omniprésence à chaque coup d’œil dans le rétroviseur intérieur est un rappel de la bestialité de la Ford Escort RS Cosworth.

Conclusion

Finalement, avoir réalisé les essais dans cet ordre est particulièrement intéressant, car dans les deux cas, les sensations ont été au rendez-vous. De base, la Ford Escort RS Cosworth T25, c’est une version vitaminée (même si on est plus sur de l’EPO que de la vitamine C) de l’Escort. Mais quand on parle de la Ford Escort RS Cosworth T34, on passe par la case Dr Fuentes et là le dopage est suffisant pour aller chercher les meilleurs dans les cols… du Monte-Carlo 1994 par exemple. Tiens, elle l’a remporté !

Cet essai a permis de constater la pertinence des ingénieurs de chez Ford d’avoir apporté de la docilité à ce fauve sauvage en diminuant la taille du Turbo. Car, même si le moment passé au volant a été exceptionnel, l’exploitation de cette version T34 dans la circulation actuelle reste une gageure tant l’envie du « coup de pied au cul » est indissociable de l’expérience de conduite. Certes, on est au milieu des années 90 et le Groupe A n’a pas autant fait rêver que le Groupe B. Mais une auto d’homologation reste une auto d’homologation et sur la route, ça arrache le bitume !

Les plus de la Ford Escort RS CosworthLes moins de la Ford Escort RS Cosworth
Les sensations de conduiteLa consommation en conduite sportive
La ligne (et l’aileron !)Le coût de l’entretien
Le confort d’une familialeLe volume de coffre (on cherche)
Notes de la Ford Escort RS Cosworth T34 par News d'Anciennes
Fiche techniqueFord Escort RS Cosworth
Années1992-1994 (T34 – Cosworth YBT Turbo)
Mécanique
Architecture4 cylindres en ligne
Cylindrée1994 cm³
AlimentationInjection Multipoints et Turbo Garrett T34
Soupapes16
Puissance Max220 ch à 6250 trs/min
Couple Max290 Nm à 3500 trs/min
Boîte de VitesseManuelle 5 rapports
Transmission4 roues motrices
Châssis
Position MoteurLongitudinale Avant
FreinageDisques Ventilés AV et AR
VoiesAV 1465 mm / AR 1490 mm
Empattement2550 mm
Dimensions L x l x h4210 x 1740 x 1390 mm
Poids (relevé)1275 kg
Performances
Vmax Mesurée230 km/h
0 à 100 km/h5,9s
400m d.a13,9s
1000m d.a25,9s
Poids/Puissance6,39 kg/ch
Conso Mixte± 9 litres / 100km
Conso Sportive± 19 litres / 100 km
Prix± 60.000 €

CONDUIRE UNE FORD ESCORT RS COSWORTH

Cette Ford Escort RS Cosworth fait partie des 2500 exemplaires initiaux nécessaire à une homologation en Groupe A. Elle est donc de faible diffusion et son aileron reste mythique ! Par contre, son usage sera restreint du fait de ses performances « sans filtre » ce qui ne fait pas baisser son prix d’achat qui reste un peu plus élevé que celui de la T25 qui est pourtant montée à plus de 7000 exemplaires produits !

Comme je le disais il y a quelques mois, le prix de cette voiture en occasion peut varier du simple au double. Tout dépend de l’authenticité de ce modèle qui se prêtait plus encore que sa petite soeur T25 aux préparations. Quant à l’entretien, c’est un point d’autant plus crucial pour cette version T34, qu’elle est très pointue… Même si, du fait de l’absence de pot catalytique, un poste de dépense conséquent s’évapore.

Merci Richard pour, non seulement avoir permis la réalisation de cet essai, mais en plus, m’avoir laissé les « clés de la maison ».

Fabien

Un lion et un cheval cabré m'ont fait aimer les voitures de mon enfance... Un livre, «La maîtresse d'acier» de Pierre Coutras, et des pilotes de légende m'ont conduit à me passionner pour des bolides plus anciens. A mon tour de partager avec vous.

Commentaires

    1. Fabien

      Merci ! Et des conditions d’essais uniques !

      Répondre · · 18 décembre 2023 à 18 h 49 min

  1. marc

    Merci….. encore une fois, Fabien de la bande à Benjamin, c’est du beau travail et quelle veine de s’amuser avec de telles autos. En plus, c’est tellement bien écrit qu’on a l’impression d’être assis à droite !

    Répondre · · 18 décembre 2023 à 19 h 46 min

    1. Fabien

      Merci pour ce commentaire et pour… Le compliment cher copilote !

      Répondre · · 18 décembre 2023 à 19 h 58 min

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