La belle carrière des Simca Vedette à l’étranger

Publié le par Morgan

La belle carrière des Simca Vedette à l’étranger

La grosse berline de Simca, on vous a déjà raconté son histoire, c’est à lire par ici. Ce qu’on sait peut-être moins c’est qu’en plus de sa carrière hexagonale, la Simca Vedette a aussi été exportée. On revient sur cette autre partie de sa carrière.

La Simca Vedette a été exportée dans de très nombreux pays, partout autour du monde. Certains pays ont une dimension considérable dans les exportations de Simca, premier constructeur généraliste français à l’export (en pourcentage de sa production) dans les années 1950.

Par exemple sur les 6 premiers mois de 1959 se sont 20.000 Simca qui ont été exportées aux USA ! Au cours de sa carrière, la Vedette fût aussi assemblée dans plusieurs pays comme la Belgique avec une usine à Anvers ou l’Afrique du Sud avec l’usine de Johannesburg, mais pas seulement…

La Vedette au pays des kangourous : Chrysler Australia

On retrouve aussi la Vedette en Australie (et en Nouvelle-Zélande) à partir de novembre 1956, un pays dans lequel Simca est présent depuis 1950 avec la Simca 8 et dans lequel l’Aronde est même assemblée depuis 1956.

La Vedette est importée là-bas uniquement en finition Versailles et quelques rares modèles 1956 laisseront rapidement leur place à la version 1957. Mais une nouvelle taxe de 400$ australiens apparue en 1957 va changer la donne et forcer Simca à changer ses plans.

Si la Beaulieu a d’abord été importée, le premier modèle étant livré fin février 1958, son prix prohibitif va faire qu’elle sera assemblée dans une usine de Mile End, à Adelaïde en Australie Méridionale.

Et ce pour la simple et bonne raison de contourner les droits de douane, ce qui sera envisagé à partir d’octobre 1958 avec donc un maximum d’éléments de provenance locale : peinture, pneus, batterie, tissus, etc… La conséquence sera une diminution de la finition mais aussi des taxes qui vont faire passer le prix de 3.790$ à 2.990$.

Cette Beaulieu australienne, version conduite à droite, sera réellement fabriquée sur place de mai 1959 à juillet 1961 avec quelques adaptations pour ce marché, comme un intérieur entièrement en vinyle. Elle évoluera aussi au fil des années en parallèle des versions françaises avec une simplification en 1961, visible avec la disparition du logo S sur le capot au profit d’un logo Simca. Les derniers modèles s’écouleront jusqu’en 1962.

La Vedette sera ensuite remplacée par la Plymouth Valiant et en 1980 Mitsubishi rachètera Chrysler Australia, détruisant au passage toutes les archives. On ne connaît donc pas les chiffres de production exacts des Simca en Australie. Néanmoins Gavin Farmer, spécialiste de l’histoire de Chrysler Australia, a estimé dans son ouvrage « Great Ideas in Motion » qu’environ 2.280 Simca Vedette furent assemblées là-bas entre 1959 et 1961. Alors ne vous étonnez pas si, au détours d’un champs en Australie, vous tombez nez à nez avec une Simca Vedette !

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Mais il existe un autre pays dans lequel la Vedette a été construite et pour lequel nous avons des archives bien plus conséquentes …

La Vedette façon Samba : Simca do Brasil

En 1957 Simca apprend que Renault envisage d’aller s’implanter au Brésil avec son partenaire américain Willys Overland : hors de question pour la firme de Poissy de laisser un de ses concurrents partir seul à la conquête d’un marché prometteur.

C’est après bien des tergiversations avec les autorités brésiliennes que Simca, aidé de son allié Fiat, créé le 5 mai 1958 la société Simca do Brasil, dont le capital est détenu à 50% par Simca et à 50% par la Compania Siderurgica Nacional y Compania Distribuidora pour un total de 16 millions de dollars.

Suite à cela, Simca construit en 1958 une usine dans la ville de São Bernardo do Campo pour y produire la Versailles et la Marly, mais entre-temps la Simca Vedette française est remodelée et c’est finalement la Chambord qui doit être produite au Brésil alors que le projet était déjà lancé…

Au début les voitures arrivent en containers, dits CKD (completely knocked down), comprenez en pièces détachées, l’usine brésilienne n’assurant que l’assemblage de pièces françaises.

Le manque de main d’œuvre qualifiée rend les débuts laborieux, de plus les autorités brésiliennes exigent que 100% des pièces de la voiture soient produites localement à partir de fin 1959. La première Chambord brésilienne finit par tomber des chaines le 7 mars 1959, globalement identique à la version française, l’intérieur est toutefois spécifique.

Bien qu’une usine entièrement nouvelle, basée à Belo Horizonte, ne verra finalement jamais le jour, Simca préférant conserver l’usine initiale en la modifiant.

L’usine produit alors environ 5 voitures par jour, et fête sa 1000 ème voiture le 16 novembre 1959. La production sera progressivement augmentée à 15 unités par jour courant 1960 avec 85% de pièces brésiliennes. La version Présidence, copiée sur le modèle français est ajoutée à la gamme en août 1960. Simca do Brasil compte alors un réseau d’environ 110 concessionnaires.

C’est à partir de cette relative autonomie de production, assurée par l’arrivée des anciennes machines-outils de Poissy, que l’usine brésilienne va prendre des libertés en créant ses propres modèles.

On note pour 1961 l’arrivée d’un moteur poussé à 90 ch et une boîte de vitesses à 3 rapports entièrement synchronisée. Parallèlement on note une modification des baguettes latérales désormais simplifiées, comme en France cette année là. Mais à la différence de notre Chambord 1961 française, les baguettes sont ici arquées vers l’arrière et s’accompagnent de la mise en place d’une hirondelle stylisée sur les ailes avant. Cette dernière idée sera reprise plus tard par Poissy sur les 1300/1500 de 1966.

Apparaît ensuite la Rallye en 1962, modèle sportif de la gamme reconnaissable à ses deux prises d’air additionnelles sur le capot. Son moteur est revu pour aboutir à un 2414 cm³, grâce à une course augmentée à 88mm au lieu de 85,7mm, délivrant 100 ch à 4 800 tr/min et appelé Tufão.

Puis, en décembre 1962 c’est la Jangada (qui signifie radeau en brésilien) qui débarque, un break équivalent au Marly français, à un détail près : la partie arrière redessinée pour intégrer les ailerons de seconde génération. Cette même année les baguettes latérales de caisse adoptent un enjoliveur spécifique au niveau de la portière arrière, les enjoliveurs de roues sont eux aussi revus avec un style à ailettes en remplacement des rayons issus des versions françaises.

En 1962 la Simca Chambord devient définitivement culte au Brésil en intégrant la première série 100% brésilienne de l’histoire : O Vigilante Rodoviário. L’histoire d’un policier de la route brésilien accompagné de son chien qui traquent héroïquement les malfrats avec plusieurs véhicules, notamment une Simca Chambord 1959 aux couleurs de la police locale ! Cette série recevra de multiples récompenses au Brésil et fera entrer la Chambord dans l’imaginaire collectif du pays en devenant la Simca la plus célèbre du Brésil.

C’est ensuite, en juillet 1963, au tour de l’Alvorada (nom d’un palais de Brasilia) d’entrer en scène : une finition de base, sans chromes, enjoliveurs de roues simplifiés, petits clignotants avant, disponible uniquement en gris, jaune pâle ou rouge vermeille et avec un intérieur dépouillé. Cette version ne trouvera pas son public et servira surtout aux taxis locaux, elle n’existera qu’à peine plus d’un an et sera produite à seulement 378 exemplaires…

Puis en 1964 Simca redessine le pavillon des Vedette brésiliennes, dans une version plus carrée sur sa partie arrière, ceci s’appliquant à toute la gamme sauf le break Jangada. Les feux arrière sont eux aussi redessinés, la calandre reçoit un logo central spécifique, les butoirs en caoutchouc sont coupés droits et striés, enfin les poignées de portes, plus anguleuses et modernes, sont reprises sur les Simca 1300 françaises.

Cette seconde série restylée est nommée Tufão (Typhon) en référence à la nouvelle génération de moteur apparue en 1962 et désormais généralisée sur toute la gamme. Les Chambord et Jangada obtiennent donc le moteur Tufão de 2414 cm³ de 100 ch des anciennes Rallye.

Les Présidence et Rallye passent quant à elles à un moteur appelé Tufão Super de 2505 cm³ pour 112 ch, une cylindrée augmentée cette fois-ci sans toucher à la course mais à l’alésage qui passe à 67mm. La Rallye profite de ce lifting pour abandonner ses 2 grosses entrées d’air sur le capot au profit de modèles plus discrets et mieux intégrés au capot.

Un de ces nouveaux moteurs Tufão Super sera monté dans un coupé à châssis tubulaire de Maserati 200S avec carrosserie aluminium appelé Tempestade. Ce prototype remportera les 6H de Brasilia en 1964 et les 500 km de Rio de Janeiro en 1965 ! Consciente des retombées commerciales possibles, la marque exposera cette voiture sur son stand officiel lors du salon national brésilien de fin 1964.

La promotion des Tufão sera aussi appuyée sur un record réalisé du 1er octobre au 15 novembre 1964 : une Rallye réussissant à parcourir 120.048 km sur une portion de route brésilienne de 224 km, entre Brasilia et Paracatu. Une performance qui s’est tenue sur 44 jours et 44 nuits, à la moyenne de 113,1 km/h ! Les témoignages d’époque font état d’allers-retours, soit 448 km, abattus en 3h50 en moyenne… sur route ouverte !

Cette même année, le Général De Gaulle lui-même viendra visiter l’usine Simca lors d’un voyage officiel au Brésil.

Après le restylage, en 1965, Simca se trouve sans réelle nouveauté si ce n’est l’arrivée de l’allumage transistorisé, matérialisé par un logo « Transistorizado » sur l’aile avant gauche. Et surtout la marque n’a plus réellement d’entrée de gamme avec la fin de l’Alvorada.

Arrive alors, à la demande des autorités brésiliennes soucieuses d’avoir des véhicules populaires, la version Profissional (soit Professionnel, trahissant la cible visée), avec une finition encore plus dépouillée : ni couvercle de boîte à gants, ni lave-glace, ni ventilation-chauffage, ni cendrier et avec des pare-chocs gris anthracite sans butoirs. Son avantage ? Elle est 30% moins chère que la Chambord ! Elle sera principalement utilisée par les compagnies de taxi locales.

Pour 1966 la Profissional se dote elle aussi du moteur 100 ch. À partir d’avril 1966, les Chambord et Jangada peuvent avoir en option un 2414 cm³ poussé à 130 ch. La Rallye est supprimée à la fin de l’année après avoir obtenu une version Especial à moteur 2505 cm³ de 140 ch. Idem pour la Présidence qui tire sa révérence après 848 exemplaires produits. Ces augmentations de puissance sont dues aux moteurs Emi-Sul.

La Rallye Especial équipée de ce moteur était capable d’atteindre 176 km/h grâce à une boîte de vitesses à 6 rapports (dite 6M) du fait d’un overdrive ajouté sur les 3 rapports initiaux, il n’en resterait aujourd’hui que 2 exemplaires dans le monde. Les deux variantes du moteur Emi-Sul (versions 130 ch et 140 ch) sont équipées de culasses hémisphériques à soupapes en tête dérivées des culasses Ardun qui avaient été créées à l’origine pour les Ford V8-60 et conçues par un certain Zora Arkus Duntov, père de la Chevrolet Corvette C1… Une grande première pour un moteur fabriqué dans l’hémisphère Sud (Sul en brésilien), d’où son nom Emi-Sul.

La puissance de ces nouvelles versions de moteurs entrainera le montage d’un vilebrequin renforcé après que de nombreux équipages mobiles aient été détruits sur les premiers exemplaires… La promotion brésilienne des nouveaux modèles, rebaptisés Emi-Sul pour l’occasion au lieu de Tufão, sera assurée par le cascadeur Jean Sunny, habitué des Simca Vedette en France et envoyé sur place par Simca pour faire son show !

1967 apparition de l’Esplanada, premier modèle né sous l’impulsion de Chrysler devenu majoritaire au capital à la mi 1966. Cette nouvelle version a un style plus moderne, sans ailerons arrière et avec une face avant remaniée, mais la cellule centrale reste la même habilement maquillé sous un toit en vinyle. Elle remplacera à terme la Chambord et est dotée d’un 2505 cm³ dans une version délivrant 140 ch.

La Jangada évolue aussi avec une partie arrière redessinée pour être plus logeable, elle est reconnaissable son montant de hayon arrière plus épais et sa décoration latérale rectiligne, mais elle conserve son moteur 130 ch. La Jangada série Emi-Sul est extrêmement rare, il n’en sera fabriqué que 88 exemplaires !

En août 1967 Simca do Brasil devient officiellement Chrysler do Brasil : dès lors Chrysler va commercialiser sous son logo des Simca… conçues et motorisées par Ford !

Pour compenser la fin de la Chambord, une version Regente, plus basique, est présentée. Elle offre la carrosserie de l’Esplanada avec le moteur 2414 cm³ de 130 ch et un intérieur simplifié, par exemple la montre de tableau de bord laisse place à un graphique de plage d’utilisation des rapports de boîte de vitesses. Dernières modifications pour l’ensemble de la gamme en 1968 avec une face avant à double optiques. Les productions Chrysler do Brasil deviennent au passage les premières voitures garanties 2 ans (ou 36.000 km) au Brésil !

Enfin en 1969, toute la gamme se retrouve avec le moteur 2414 cm³ de 130 ch. Intérieurement elle adopte un nouveau compteur à trois cadrans ronds. On note aussi l’apparition d’une version au look plus sportif appelée GTX avec une boîte de vitesses à 4 rapports synchronisés. L’intérieur est aussi revu avec une console centrale en bois, un levier de vitesses au plancher, un volant à trois branches à trous et des sièges avant séparés et enveloppants.

Extérieurement ce modèle a des bandes latérales noires au milieu et au bas de la caisse et des coloris spécifiques. La bande intermédiaire ayant aussi un logo GTX repris sur le coffre.

Ce modèle produit à 621 exemplaires fut le baroud d’honneur des Simca Brésiliennes, terminant ainsi une carrière mouvementée, après 68.282 exemplaires produits au Brésil, tous modèles confondus (dont 42.910 Chambord).

L’usine Simca do Brasil produira ensuite des Dodge Dart puis Charger. Mais lors de la chute de « l’empire Chrysler », l’usine de São Bernardo do Campo sera vendue à Volkswagen do Brasil, qui l’utilise encore actuellement. Le Brésil restera le pays étranger comptant le plus de Simca sur ses routes, il y aurait à ce jour 666 Simca Vedette recensée là-bas… soit plus qu’en France !

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Source : Webmaster Simca

Un immense merci au Club Simca Australia, plus particulièrement à John PICKLES, Doug MURPHY et Ted CHURCH ; ainsi qu’au Club Simca do Brasil, notamment Marcelo FERNANDES FONSECA VIANA, sans qui la réalisation de cet article aurait été impossible.

Morgan

http://webmaster.simca.free.fr/

Passionné par les anciennes, mais surtout par les Simca, Morgan est également bon photographe et sait prendre sa plume à l'occasion. Il a rejoint l'équipe au printemps 2019. Il gère également le site http://webmaster.simca.free.fr/

Commentaires

  1. Peyla

    Bonjour,
    Il y a plus de 666 Vedette en France car rien que au Club Vedette France nous sommes près de 700 ayant souvent 2 à 3 modèles chacun plus celles de la Cappy, ça fait pas mal d’autos.
    Cordialement, Guy Peyla

    Répondre · · 7 juin 2021 à 10 h 30 min

    1. Morgan

      Bonjour,
      il est précisé que ce recensement ne prend en compte que les Simca Vedette et non pas toutes les Vedette. La personne gérant les recensements des différents modèles au Club Simca France m’a communiqué ces chiffres. =)

      Cordialement,
      Morgan ARCHAMBAULT

      Répondre · · 8 juin 2021 à 19 h 19 min

      1. Peyla

        Bonjour Morgan,
        Tout d’abord félicitation pour votre article.
        Je vais voir avec le responsable fichier et je vous donnerais le chiffre exact des Simca V8 du club considérant qu’il y en a encore au moins 10% de plus qui ne veulent pas être en club.
        Cordialement,
        Guy

        Répondre · · 8 juin 2021 à 19 h 31 min

      2. Peyla

        De Guy
        J’ai oublié
        Le club Simca France n’a pas a mon avis toutes les références du CLUB VEDETTE FRANCE que vous pouvez consulter vous y verrez la Chambord brésilienne qui voyage en France en ce moment.

        Répondre · · 8 juin 2021 à 19 h 38 min

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