Corvette C1, la légende a eu du mal à se lancer !

Publié le par Benjamin

Corvette C1, la légende a eu du mal à se lancer !

Quand on croise une Corvette C1 de nos jours on sait que c’est une auto iconique, le point de départ d’un modèle entré dans la légende. Pourtant à son lancement, personne n’aurait parié un kopeck sur une telle destinée. C’est ce qu’on vous raconte aujourd’hui.

Une idée marketing avant tout

Les origines de la Corvette C1 nous placent après la seconde guerre mondiale. Les GIs reviennent d’Europe avec des envies de sport. Sauf que le marché local… ne propose pas de petite auto, relativement puissance et surtout avec de vraies velléités sportives. Le choix se résume alors à fabriquer un hot-rod ou à acheter une anglaise genre MG TD ou Xk120 quand on est un peu plus fortuné.

Le premier constructeur d’envergure à se lancer va être Nash mais la Nash-Healey est trop bâtarde et trop chère pour réussir à vraiment se placer. Chez General Motors c’est Harley Earl qui va pousser l’idée de réaliser une auto de ce type. Mais on va avancer prudemment et d’abord sortir un concept. C’est sous le nom de « Project Opel » qu’on travaille. Mais évidemment on ne prévoit pas de voiture pour la marque allemande du groupe.

C’est EX-122 qu’on crée alors. Cette toute première Chevrolet Corvette est présentée en Janvier 1953 au Waldorf-Astoria de New York. Une auto de sport de petite taille, motorisée par un 6 en ligne et prévue pour être abordable. Entièrement réalisée à la main sa carrosserie est en plastique renforcé de fibre de verre. Une nouveauté à l’époque pour une auto américaine… qui marque les esprits ! Et puis le style est séduisant, et il se démarque des autos anglaises de l’époque.

Très vite, alors que la Corvette continue de faire le tour des USA avec le General Motor Motorama on prend la décision de fabriquer l’auto. Tellement vite qu’on ne trouve pas de ligne de production pour accueillir l’auto. On décide d’en construire à Saint-Louis mais en attendant c’est à Flint dans le Michigan qu’on bricole une pseudo-ligne d’assemblage pour la nouvelle auto.

Par contre chez GM on reste prudent. Et encore une fois on a pas le temps de développer beaucoup l’auto alors on pioche dans la banque d’organes du groupe. Le moteur sera donc le 6 en ligne « Blue Flame » de 3.9 litres sortant 150 ch grâce à trois carbus Carter. Il est relié à une boîte… automatique à deux rapports. Certes elle manque d’agrément sportif mais aucune boîte du genre ne peut encaisser la cavalerie.

La plateforme est reprise sur d’autres autos de la marque. Elle fait appel à des suspensions indépendantes à l’avant mais un essieu rigide sur lames transversales à l’arrière.

La carrosserie est toujours en fibre de verre sur les premières autos qu’on assemble à la main. On pense bien remplacer le procédé par l’acier mais pour ces premières autos, on garde la solution initiale.

1953 Chevrolet Corvette Assembly 05- Corvette C1

1953-1954 : les premières Corvette C1 essuient les plâtres

Seulement 6 mois après la présentation de l’auto on la propose à la vente. Problème, elle a été pensée pour être vendue autour de 2000 $ et à 3513 $ elle est au dessus de sa cible. Toutes les autos sont blanches (Polo White) avec un intérieur rouge.

Et puis on connaît encore mal les coques plastiques-fibres. Les finitions sont médiocres et des infiltrations d’eau sont à noter un peu partout. Pire, le manque de rigidité de la caisse fait que les portes peuvent s’ouvrir en marche ! Ces premières autos fabriquées artisanalement s’améliorent au fil du temps mais les premiers retours ne sont pas forcément bons. Même si on a confié une centaine d’autos (sur les 300 fabriquées) à des stars qui en font la promotion, les premières Corvette C1 ne sont pas forcément bien vues.

À la fin de l’année 1953 on déménage la production dans la nouvelle usine de Saint-Louis. Là on peut y produire 10.000 autos par an !

Début 1954 place à de nouvelles Corvette dans le GM Motorama. Trois versions sont dévoilées : un roadster avec hard-top, un coupé Fastback qu’on appelle Corvair et un étonnant break de chasse qu’on appelle Nomad mais qui est en fait basé sur la Bel Air avec un avant de Corvette !

Côté production la Corvette C1 n’a pas bonne presse et sur les 3600 autos produites en 1954 environ un tiers ne se vend pas. Pourtant on a ajouté des coloris, et des options, mais celles-ci sont en fait obligatoires et toutes les autos sont équipées de la même façon !

En plus des finitions on reproche le manque de sportivité de l’ensemble boîte-moteur, bien que la première soit en fait seule responsable. Pourtant, selon une étude, plus de la moitié des acheteurs la considèrent meilleure qu’une sportive européenne.

On se demande même si on va continuer la production. Mais la Corvette C1 a des partisans chez GM et on va alors jouer une carte maîtresse.

1955 : la Corvette C1 se muscle

En 1955 Chevrolet lance un nouveau V8. On pourrait penser qu’une marque américaine a forcément un V8 sur ses étagères, et bien la marque n’en proposait plus depuis 1919 ! Le changement de cylindrée n’est pas énorme par rapport au 6 en ligne puisqu’on passe à 4,34 litres. Mais ce moteur bien plus moderne permet à la Corvette C1 de voir sa puissance de bondir à 195 ch. Une partie de l’équation sportive trouve ainsi une solution et ce sera complété avec l’apparition d’une boîte manuelle à trois vitesses quelques mois plus tard. Le nombre de coloris passe aussi de trois à cinq. Les nouvelles autos voient aussi leur système électrique passer à 12V.

Extérieurement on fait remarquer la présence d’un V8 en agrandissant le V du monogramme Chevrolet présent sur les ailes.

Les Corvette avec moteur 6 en ligne ne peuvent recevoir ni la nouvelle boîte ni le système en 12V. Par conséquent elles se retrouvent « déclassées » et très peu sont produites.

La Corvette est alors relancée… mais cela ne suit pas sur les ventes. Seules 700 autos sont produites à Saint-Louis. Il faut de nouveau booster l’auto.

1956 : première mue pour la Corvette C1

Cette année là c’est Zora Arkus-Duntov qui prend en main le programme haute performances pour Chevrolet. Déjà à l’origine de l’adoption du V8 sur l’auto il va superviser tous les aspects de sa carrière. Et justement en 1956 la Corvette C1 change d’aspect.

Globalement on garde l’air de famille avec les premières versions. Mais les phares sont désormais ronds et sans bulle, plus verticaux. Les flancs se creusent et cette partie peut recevoir une couleur différente du reste de la carrosserie. Enfin à l’arrière la Corvette C1 perd ses ailerons.

Au passage on propose désormais de vraies fenêtres latérales descendantes et une capote de meilleure facture. Vitres et capote peuvent être commandées électriquement et le Hard-Top est proposé en option.

Le 6 cylindres n’est plus au programme. Côté boîte la Powerglide automatique est désormais une option et la manuelle 3 vitesse est de série. Le V8 est proposé avec deux niveaux de puissance : 210 ch ou 240 ch avec un arbre à cames retravaillé. 3467 autos sont produites cette année là. La Corvette C1 repart !

L’année suivante le V8 passe à 283ci soit 4,6 litres et reçoit des soupapes en tête. On peut aussi le doter de l’injection, une innovation en 1957 puisque seule la Mercedes 300 SL l’a vraiment expérimentée sur la route. Côté puissance la gamme est large : 220, 245 et 270 ch avec carbus et 250 ou 283 avec l’injection ! Le 9 Avril on propose enfin une boîte manuelle à 4 vitesses.

Du coup la Corvette C1 commence à être réellement sportive. Elle peut être commandée prête à courir avec un tachymètre adapté et des suspensions et roues spécifiques.

Côté commercial, c’est le vrai décollage. Avec 6339 autos construites on se rapproche plus que jamais de l’objectif. La Corvette C1 est enfin la voiture de sport qui manquait à l’amérique.

1958 : deuxième mue pour la Corvette C1

Pour l’année 1958 la Corvette C1 évolue encore stylistiquement. La ligne globale reste la même et on la distingue surtout parce qu’elle se plie à la mode d’alors : 4 phares ronds à l’avant et des chromes un peu partout avec de fines baguettes ! À l’intérieur le compte-tour est déplacé et il est en plein devant le conducteur. Du sport ! Par contre on augmente aussi la sécurité avec le montage de ceintures sur les chaînes.

Côté moteur on a toujours un large choix de puissances avec les moteurs à carbu et à injection qui vont de 230 à 290 ch. On peut toujours agrémenter son auto avec quelques options pour la rendre plus sportive.

En 1959 on ne retouche que l’intérieur, surtout la décoration mais un bac de rangement apparaît côté passager. La Corvette C1 est alors toute proche de ses objectifs de vente : 9168 en 58 et 9670 en 1959.

En 1960 la puissance maxi du moteur à injection grimpe à 315 ch. C’est là la seule modification notable. Mais la Corvette C1 atteint enfin les 10.261 exemplaires vendus. Comme quoi, il fallait persévérer !

1961-1962 : dernières évolutions

Avec les modèles 1961 l’aspect des Chevrolet Corvette C1 évolue de nouveau. Finies les barres de calandre, remplacées par une grille. À l’arrière on change tout. Une ceinture de caisse haute débarque et en dessous les feux sont ronds et au nombre de 4. Côté technique, rien de vraiment notable tandis qu’on vend 10.939 autos.

1962 sera la dernière année de la Corvette C1. Et on ne l’abandonne pas pour autant puisqu’elle gagne un nouveau moteur : le V8 Small-Block de 5,4 litres disponible en version 250, 300 et 340 ch à carbu et 360 ch à injection !
On les reconnaît à leur calandre noire avec entourage chromé et des moulures de bas de caisse elles aussi chromées.

Ce dernier millésime sera le plus vendu. La Corvette a désormais une vraie image et 14.531 exemplaires sont fabriqués. Ensuite c’est le clap de fin. La Corvette C2 arrive, encore plus bestiale !

La Chevrolet Corvette C1 en course

Qui dit voiture de sport dit course automobile. Dès 1954 alors même que la Corvette est décriée elle est engagée en course. À cette époque un accord entre les trois géants de Détroit impose de renoncer à un engagement officiel en sport auto. Ce sont donc les clients qui engagent leurs autos. Ainsi on voit quelques autos en SCCA et l’une d’elle est même au départ de la Carrera Panamericana.

Il faut attendre le début de l’année 1956 pour voir des Corvette dans des courses internationales. C’est aux 12H de Sebring que ça se passe avec des résultats anecdotiques. En SCCA elles sont très nombreuses sur chaque manche. En 1957, toujours à Sebring, une auto termine 2e de sa catégorie et certaines autos candidatent pour les 24h du Mans sans s’y présenter.

En 1958 c’est la première victoire internationale d’une Corvette C1. Certes il s’agit d’une victoire de classe aux 12h de Sebring et les concurrentes ne sont… que des Corvette. Mais quand même !

En 1960 après une nouvelle victoire de classe à Sebring elles sont 4 Corvette à se présenter aux 24h du Mans ! Camoradi en engage une aux côté de ses Maserati et Briggs Cunningham se charge de l’engagement de trois autres autos. Elles porteront les n° 1 à 4 en course. Dotée du plus gros V8, la version 290ch avec injection, de trains roulants préparés et d’une robe blanche et bleue (les couleurs officielles des autos américaines) les Corvette connaissent des fortunes diverses. Deux des autos de Cunningham partent en flammes après des accidents, celle de Camoradi sort à quelques encablures de l’arrivée et n’est pas classée.

Par contre l’auto restante, celle de Fitch et Grossmann se classe 8e au général et première de sa classe… c’est aussi la seule à l’arrivée !

Il faudra attendre 1962 pour revoir une Corvette au Mans, mais ce sera une C2.

La Chevrolet Corvette C1 de nos jours

Ils ont eu raison de s’accrocher ! Avec 69.015 exemplaires la Corvette C1 reste cependant la version la plus confidentielle. Et cela en fait d’autant plus un collector que les alternatives des autres constructeurs sont sorties après et ont été bien plus largement diffusées.

Certains modèles de Corvette C1 sont de vrais collector comme les modèles 1953 et 1955 avec 300 et 700 exemplaires produits !
Pour les autres, on pourra trouver une auto un peu au dessus des 70.000 €. Après si vous avez des envies particulières sur le moteur ou la couleur, il faudra chercher, le volume de vente est forcément bas ! Mais une chose est sûre : vous ferez tourner les têtes !

Banniere PA Chevrolet- Corvette C1

Photos additionnelles : Chevrolet Press, RM Sotheby’s

Benjamin

http://newsdanciennes.com

Passionné d'automobile ancienne, il a créé News d'Anciennes en 2013 à force de se balader sur les salons sans savoir quoi faire de ses photos. Conducteur occasionnel de Simca 1100 il adore conduire les voitures des autres, dès qu'elles sont un peu plus rapides !

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