Histoire des Spice, un privé du Groupe C

Publié le par Benjamin

Histoire des Spice, un privé du Groupe C

A la lecture des engagés de Le Mans Classic 2018, voir Guide complet pour Le Mans Classic 2018 : programme, horaires, engagés, on trouve beaucoup de Spice, 10 pour être précis. Cette marque est relativement méconnue du grand public, pourtant elle est triple championne du monde du Groupe C2, le « petit » Groupe C.

Les débuts de Spice Engineering, avec des châssis Tiga

Le Spice Engineering est fondé par Godron Spice, qui a déjà un beau passé en course dont un podium aux 24h du Mans 1981 sur une Rondeau, et Raymond Bellm. Le tout s’appuie sur un gros sponsoring, celui de Listerine. Quand le Spice Engiennering débute en 1984, c’est avec un châssis Tiga GC84 et l’équipe ne lutte pas vraiment contre les Porsche 956 (lire La Porsche 956, ou le début de la domination des années 80). En fait les autos de l’équipe sont engagées en Groupe C2. C’est une sous-division du Groupe C qui regroupe des autos privées, comme les LMP1 non hybride actuelles. Le parallèle est complet puisque la définition technique change : les Groupe C ont une limitation de consommation de carburant. Les C2 n’en ont pas.

La GC84 engagée cette année là se montre performante et avec cinq victoire de classe, au Nürburgring, à Brands Hatch, Spa, Imola et Sandown Park, l’équipe est le grand artisan de la troisième place de Tiga en classe C2.

En 1985, le Spice Engineering est partie prenante de la création et du développement de la GC85. Encore une fois, l’équipe va amener la Tiga à cinq victoires de classe, à Imola, Monza, Hockenheim, Mosport et Spa, auxquelles s’ajoute la plus brillantes de toutes, celle du Mans où Spice, Bellm et Galvin terminent 14e. Pour la première fois un titre officiel est attribué en classe C2 et c’est le Spice-Tiga Engineering qui l’emporte.


Spice devient constructeur

1986 : apparition de la Spice SE86

La SE86, pour Spice Engineering 1986 est la première voiture conçue directement par l’équipe. L’auto est dessinée par Graham Humphrey et construite par B.S Constructions. C’est une coque en aluminium qui la constitue et elle peut recevoir différents moteurs en fonction de son engagement.

Elle a un double objectif : en Europe elle court en Groupe C2 avec le moteur Ford Cosworth DFL et aux USA, en IMSA GTP c’est un moteur Pontiac qui l’anime. Là aussi ce n’est pas en GTP pur qu’elle est engagée, mais en Lights, la « petite » catégorie. Elle n’est donc pas confrontée à la redoutable Porsche 962. Par contre son design doit la faire ressembler à une Pontiac Fiero.

Pour sa première saison en Groupe C2, l’auto se montre relativement performante. Elle se fait battre au championnat par les autos de l’Ecurie Ecosse, de deux petits points seulement, mais remporte deux succès de Classe à Silverstone et Jerez. Aux 24h du Mans, Spice, Bellm et Martin sont 19e et derniers. Consolation, Spice et Bellm sont champions du monde C2 des pilotes.
En IMSA, Bob Earl est le pilote de ponte de la Pontiac Fiero GTP et il est parfois épaulé par Chip Ganassi, qui est encore pilote et non directeur d’écurie.

1987 : La Spice SE87 au sommet

La deuxième saison sera la bonne. La Spice SE87 va elle aussi connaître un double engagement, mais elle ne sera pas seule. En IMSA le Ball Bros. Racing engagera sa SE86CL en parallèle des SE86 et SE87 de Spice et Collins et Aikman engageront une SE87 dès qu’elle sera livrée. En Championnat du Monde C2 c’est le Chamberlain Enginnering qui engagera une SE86C en plus de la SE87 de l’écurie principale.

Les résultats vont être à la hauteur en Championnat du Monde, Spice et Velez vont gagner 8 victoires de classe sur les 10 courses, avec une quatrième place scratch à Jérez comme meilleur résultat. Dans ces victoires on trouve les 24h du Mans, terminées à la 6e place avec de Henning comme troisième pilote. Coup double donc avec le championnat pilote pour Spice et Velez et le championnat équipe.
En IMSA light les résultats sont plus contrastés, avec 4 victoires de classe en 16 courses, mais Earl, Kline et Bell remportent la première course, les mythiques 24h de Daytona.

1988 : La Spice SE88 confirme

La SE88 est une nouvelle auto, pas une évolution de la précédente comme l’était la SE87. Elle est dessinée plus finement, on ne cherche pas à coller à la Pontiac Fiero, ce qui donne une aéro plus soignée. Le berceau moteur peut accueillir les V8 DFL de 3.2 litres ou DFZ de 3.5 litres qui la placent en Groupe C2 ou Groupe C tout court. Aux USA les V8 Pontiac, le V6 Buick et même un V8 Ferrari peuvent s’y loger !

En Europe, les Spice vont cartonner. Deux autos sont engagées par « l’usine » et une seconde par le Chamberlain. Une SE87 par le Cosmik G.P Motorsport et la SE86 de Chamberlain sont aussi engagées. Sur les 11 courses, seul le Nürburgring échappera à une Spice dans la catégorie des C2. Encore une fois le meilleur scratch est une 4e place à Brands Hatch. Aux 24h du Mans, la 13e place de Spice, Bellm et Pierre de Thoisy est synonyme de victoire de classe, les autres autos ne terminant pas la course. Spice remporte son 4e titre C2 consécutif, l’écurie son 2e.
En IMSA, les autos sont aussi performantes mais elle ne remportent que deux courses, ce qui n’est pas assez pour le titre.

Spice dans la cour des Grands Constructeurs

La Spice SE89 a de grosses ambitions

En 1989, le principal changement pour Spice, se retrouve au niveau du règlement. Le poids des C1 atmo baisse et peut offrir aux SE89C de belles perfs, avec le DFZ, tandis que les autos peuvent toujours embarquer le DFL pour courir en C2. En Championnat du Monde, on retrouvera ainsi l’usine « chez les grands » et le team Chamberlain « chez les petits ». Chez les C1, on retrouvera comme meilleurs résultats une 4e place à Jarama et une 5e à Spa, combattre avec les usines Mercedes, Porsche, Jaguar et Nissan n’est pas encore à la portée du jeune constructeur.
En C2, le Team Chamberlain va remporter les 4 premières courses, et sur les 5 dernières le Team Mako, qui engage une SE88C va en gagner 4 autres. Les deux teams terminent en tête du championnat.

Au Mans, cela ne s’est pas aussi bien passé que les années précédentes. Même si deux autos sont sur le podium des C2, c’est Courage qui s’adjuge la victoire de classe. Les deux autos engagées en C1 ont parcouru 150 et 229 tours avant d’abandonner.

En championnat IMSA, les Spice sont nombreuses. De la SE86C à la SE89C, tous les modèles sont représentés. Les Top 5 sont fréquents, et on notera les podiums de Miller et Earl sur une SE89P à Watkins Glen et à Tampa.

1990 : la Spice joue les outsiders en C1

En 1990 le championnat voit le départ de beaucoup d’équipes… dont des usines. L’absence des 24h du Mans au championnat est une des raisons. En plus la SE90C accueille un nouveau moteur le DFR, toujours de 3.5 litres de cylindrée.
En championnat du monde les flèche d’argent, dont la Mercedes C11, (lire : La Sauber Mercedes C11, championne partout…. sauf au Mans) ne laisseront qu’une victoire à Jaguar. Spice jouera les outsiders et se classera derrière Nissan, à la 4e place. Les deux meilleurs résultats sont deux troisièmes place à Silverstone et Donington. Cette année là on note aussi la disparition du Championnat du Monde C2.

En IMSA c’est toujours Miller qui est le meilleur, même si l’usine engage directement deux autos. Les meilleurs résultats sont à Lime Rock, Miller est 2e avec Taylor et l’usine classe son auto 3e. Miller court encore avec une SE89P quand l’usine engage, logiquement la SE90P ! Taylor seul sur la voiture de Miller fera 3e à Portland.

1991 : Les privés assurent en Championnat du Monde, l’usine rêve d’Amérique

Plus de Spice d’usine en championnat du monde ! C’est uniquement en IMSA qu’on verra des Spice officielles. Et malgré le retour du Groupe C2, c’est bien en C1 que les Spice vont briller. En fait le groupe C2 regroupe les autos dérivées des autos des saisons précédentes. La classe C1 est réservée aux autos de 3.5 litres de cylindrée : Spice, Peugeot et Mercedes dont la C291 n’est pas au point.
C’est l’écurie batave Euro Racing qui va porter haut les couleurs du constructeur anglais avec une SE90C. L’équipe avec ses pilotes Euser et Zwolman va signer quatre quatrième places (Suzuka, Monza, Magny-Cours et Mexico). Mais la plus grosse victoire, c’est celle de classe aux 24h du Mans ! Les Mercedes et Peugeot ont abandonné et la seule Spice qui est classée, 12e, est la première C1, derrière les C2 !

En IMSA, le premier résultat probant de la saison sera celui de Kendal sur la SE89P de Miller, 4e à Palm Beach. A Sebring c’est la SE89P de Tom Miller qui se classe 6e comme meilleure représentante des Spice et à Miami Kendall signe une nouvelle seconde place. Purner sur l’auto de Milner fera 3e à la Nouvelle Orléans, tandis qu’à Laguna Seca c’est la SE90P de l’écurie officielle que McCarthy place sur le podium. Néanmoins les places d’honneur du Comptech Racing au général avec des SE90P motorisées par des Acura / Honda de la catégorie light se transforment en 8 victoires de classe, et en titre.

1992 : Chamberlain et Comptech mènent la danse des Spice

Euro Racing passant chez Lola, avec la T92, c’est Chamberlain qui reçoit le soutien de Spice comme écurie officielle en championnat du monde. La classe C1 et ses V10 ou V12 conformes ou du moins identiques aux moteurs de F1 cohabitent avec les autos engagées en FIA Cup, dont les Spice, avec un plateau motorisé surtout par des moteurs Cosworth. Contre le Chamberlain Engineering et sa SE89C, seul les italiens de SCI engagent une SE90C tandis qu’on verra une Gebhardt C91 sur le premier rendez-vous uniquement (lire : La Gebhardt C91, plus rapide en 2016 qu’en 1991). Le Chamberlain remportera 5 victoires de classe en autant de course. Evidemment celle des 24h du Mans, où De Lesseps, Piper et Iacobelli se classent 14e… et derniers, est la plus belle, mais le podium scratch de Silverstone ne doit pas être oublié.

1992 21- Spice
Aux 24h du Mans 1992

En IMSA, Comptech signera de beaux résultats en engageant des SE90P et SE91P dans la catégorie Light. En GTP seul Tennyson, soutenu par Spice USA engagera la SE92P avec un moteur Chevrolet. Comptech signera quelques résultats scratchs, 5e des 24h de Daytona et 4e à Phoenix, remportant 8 victoires de classe sur 14 courses et un nouveau titre. En GTP, quatre 5e place et une quatrième seront les meilleurs résultats.

L’ère 100 % IMSA

1993 : nouveaux chassis mais les vieux résistent bien

En 1993 Spice introduit un nouveau châssis en GTP, le Ak93 qui sera utilisé par le Brix Racing. A la base développé pour un V10 3.5 Honda et pour le Groupe C, celle qui devait être la SE92C est finalement modifiée pour accueillir un V8 Chevrolet et elle sera engagée en GTP.
En parallèle, Comptech aligne toujours sa SE91P Acura et Tennyson sa SE92P Chevrolet.
Les résultats sont une fois de plus honorables. Rien de notable à Daytona puis Tennyson place sa voiture à la 3e place à Miami. Ensuite l’auto du Comptech Racing sera 5e à Sebring puis Tennyson est 4e à Atlanta. La voiture est 3e à Lime Rock, Laguna Seca et Lime Rock. La nouvelle Ak93 sera assez décevante puisqu’elle ne signera comme meilleur résultat qu’une 4e place à Phoenix.
Comptech remporte pour la troisième fois le championnat light

En 1993 il n’y a plus de championnat des voitures de sport. Par contre on retrouve deux Spice SE89C aux 24h du Mans. La voiture du Chamberlain Engineering sera contrainte à l’abandon, celle du Graff Racing pilotée par Bouvert, Balandras et Miot se classera 20e. On retrouve en fait les autos dans les courses Interseries.


1994-1998 : le bal des châssis décapsulés

En 1994 les châssis de Spice présents en course sont nombreux. En fait la réglementation de l’IMSA a remplacé la catégorie Light par les WSC. Ces World Sport Car sont en fait les premières LMP1 et ce sont des prototypes ouverts. C’est ainsi qu’apparaît la Spice WSC94, une SE90P, « décapsulée » engagée par Scandia Motorsport et la HC94 qui est engagée par le Brix Racing. Les deux autos sont propulsées par des V8 Oldmobile et c’est le même moteur qui rejoint le capot de la Ak93.
De son côté le Dyson Racing fait appel à un V8 de Ferrari 348 pour propulser son auto !

La saison 1994 commencera par une 2nd place aux 12h de Sebring… pour la SE89P d’Auto Toy Store ! L’auto continue sur sa lancée avec une 3e place à Road Atlanta. Les WSC vont se réveiller, la DR-3 sera 3e à Indianapolis, la HC94 fera de même à Laguna Seca. Elle remporte même la course Portland puis celle de Phoenix.

En 1995, la BDG-02 apparaît, avec un Oldsmobile et pour le Brix Racing.  Elle termine 2e des 24h de Daytona. La vieille SE89P d’Auto Toy Store va encore briller, en terminant 2e des 12h de Sebring.

Les Spice sous leurs diverses formes courront jusqu’en 1998 de façon intensive. Maintenant elles sont redoutable… en Groupe C !

Les Spice en 2018

En regardant les engagés de Le Mans Classic, on trouve donc beaucoup de Spice. Elles seront 10 au départ. En partant des plus anciennes :

  • La SE88C de Dozin
  • La SE89P de Huff
  • La SE89C de Scemama
  • La SE89C de Crefcoeur
  • La SE89 de Wrigley
  • La SE90C de Merlin
  • La SE90C de Bateman
  • La SE90C de Sinclair
  • La SE90C de De Doncker
  • La SE92P de Campagne et Kalff

Ces autos sont classées en 3 catégories. On trouvera la SE92P en C3a, les plus récentes, les SE88 et SE89 en C2a, logique évolution du Groupe C2 et enfin les SE90 en Groupe C1a.

Les Spice sont plutôt performantes dans ces courses. Depuis le début de l’année 2018, une SE89C et une SE90C ont signé chacune un podium à Barcelone (résumé ici), avec Scemama et Tandy. Le même Tandy a gagné à Spa et Sinclair à fait 3e dans la seconde course.

Les Spice étaient bien classées à l’époque, mais les autos qui les devançaient alors sont désormais dans leurs rétros. La raison est assez simple. Les Spice européennes sont équipes de moteur Cosworth et les américaines de V8 Chevrolet… faciles à trouver ! Ces moteurs s’échangent bien moins cher que n’importe quel autre. Imaginez le prix d’un V12 Peugeot ! De plus les châssis plus simple sont plus facilement réparable. Il est du coup bien plus facile de taper dans la mécanique sans trop d’arrière pensée !

Alors si au Mans Classic vous voyez ces autos batailler avec des légendes du Groupe C, ne soyez par surpris !

 

Benjamin

http://newsdanciennes.com

Passionné d'automobile ancienne, il a créé News d'Anciennes en 2013 à force de se balader sur les salons sans savoir quoi faire de ses photos. Conducteur occasionnel de Simca 1100 il adore conduire les voitures des autres, dès qu'elles sont un peu plus rapides !

Commentaires

  1. Eric Dagniesse

    Bonjour! Votre historique est remarquable. Mais je doute que les C2 aient été dispensées de limite à la consommation. Car Il y avait des voiture usine en C2 notamment les Mazda 717 et les Lola. Je pense même que la limitation en carburant était plus drastique. Ce qui permettait une diversification de moteur de  »moyenne » cylindrée. Porsche turbo à faible régime pour la Courage de Philippe Farjon, V6 Rover Atmo je crois pour et Cosworth bridés. Lorsque Spice engagea des voitures en Groupe C1, il s’agissait en fait des voitures correspondant au futur championnat 3500 cc atmosphèrique, 905, Jaguar XJR14, Mercedes C12 et Toyota RT10, pour qui Balestre supprima le Groupe C. Et ni Tiga ni Spices n’y survécurent.

    Répondre · · 1 juillet 2018 à 21 h 47 min

    1. Benjamin

      Sur les premières années les C2 en étaient dispensées. Sur la fin, peut-être cela avait-il évolué. Rappelez vous qu’en 1985 Porsche déserte les 24h puisqu’il n’y a plus de limitation réglementaire.

      Répondre · · 1 juillet 2018 à 22 h 04 min

  2. Nordschleife

    Je crois qu’une Spice SE90 roulait en endurance gt/proto de VdeV au début des années 2000.

    Répondre · · 11 juillet 2018 à 9 h 51 min

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