Concepts et Études, ép. 41 : Lancia Stratos Zero, à la pointe du style

Publié le par Pierre

Concepts et Études, ép. 41 : Lancia Stratos Zero, à la pointe du style

Parce que toutes les autos anciennes ne sont pas arrivées sur nos routes, on vous propose d’en découvrir régulièrement. Rendez-vous pour cela le troisième dimanche de chaque mois (les autres sont là). Ce mois-ci, le modèle était tout trouvé, suite au Salon de Brimingham, penchons-nous sur la Lancia Stratos Zero.

S’ouvrir des portes

Nous sommes à la fin des années 60, la Lancia Fulvia commence à perdre de sa superbe en rallye, face à des voitures telles que l’Alpine A110 ou la Ford GT70 (qui a déjà eu droit à son épisode), et Nuccio Bertone se dit que c’est l’occasion de s’ouvrir les portes du constructeur italien, jusqu’alors chasse gardée de Pininfarina.

Pour cela, il va, avec l’aide de Marcello Gandini, son responsable du style, concevoir un prototype dans le plus grand secret. En effet, il sait pertinemment qu’il se verra signifier une fin de non-recevoir s’il les contacte directement.

Du coup, c’est discrètement qu’il va se porter acquéreur d’une Fulvia accidentée, pour laisser libre cours à l’imagination de celui qui a déjà signé la Miura, et qui va créer certaines des plus belles pièces de l’automobile par la suite, tout en se permettant certaines créations plus alimentaires dont l’Anadol FW11 ou la Citroën BX. Gandini va assez logiquement placer le V4 en position centrale arrière, mais si cette architecture est encore considérée comme novatrice à cette époque, ce n’est clairement pas ce détail qui va rester dans les mémoires.

C’est quelques semaines avant le Salon de Turin 1970 que Bertone présente son prototype à Lancia, et ces derniers acceptent que la voiture soit présentée. Il faut bien admettre que le style est radical. La Stratos Zero (qui fait référence à la stratosphère, n’oubliez pas que l’aéronautique était plus qu’en vogue à l’époque) ressemble à une pointe de flèche de 85 centimètres de haut, et rien en elle ne peut laisser le public (ou Lancia, d’ailleurs) indifférent.

Il faudra attendre quelques mois pour qu’Ugo Gobbato , le patron de Lancia de l’époque, revienne vers Bertone. Il veut voir la Stratos Zero. Bertone prend alors le volant et conduit lui-même la voiture de Grugliasco à la via San Paolo, où se situe le département compétition de Lancia. C’est devant une équipe médusée qu’il coupe le contact dans la cour, et il ne faudra pas attendre longtemps pour que la réalisation d’une voiture industrialisable, qui deviendra la Stratos que l’on connait, soit commandée.

La Lancia Stratos Zero de nos jours

Après le Salon de Turin, la Stratos Zero a abandonné sa couleur cuivrée pour un gris métallisé plus conventionnel qui servira pour les supports de communication de Bertone par la suite. Elle intégrera le musée du carrossier, qui la restaurera intégralement en 2000, lui redonnant sa couleur d’origine. Elle sera mise en vente aux enchères en 2011, à Villa d’Este.

Le nouveau propriétaire ne mettra pas la Stratos Zero sous cloche, bien au contraire. On l’a vue à Villa d’Este en 2018, à Rétromobile en 2019, à Monte Carlo la même année. L’an dernier, elle a été prêtée au musée Petersen pendant quelques mois. Et cette année, on a pu la voir au Salon de Birmingham.

Crédits photo : News d’Anciennes, Kevin Van Campenhout pour Classic Driver, Rainer Schlegelmilch, Jens Heiner, Petersen Museum


Pierre

Tombé dans la marmite automobile quand il était petit, il a rejoint l'équipe de News d'Anciennes en 2015. Expatrié en Angleterre depuis Mai 2016, il nous partage les évènements de là-bas. En dehors de ça, il partage une bonne partie de son temps sur la route entre une Opel Ascona et une Mazda RX-8.

Commentaires

  1. LUCAS Jean-Jacques

    Ah ! Un sujet sur l’acmé du design gandinien tendu vers l’impossible, juste avant la Countach et la Stratos des rallyes, toutes deux viables et vivables. Lancia, c’est la lance, Stratos, c’est le nuage bas qui voile le ciel et l’auto culmine à 84 cm au-dessus du bitume. On n’est jamais descendu aussi bas. La pliure latérale, à bien y regarder, c’est la plume d’un stylographe, encore la référence cunéiforme pour cette auto en aile au bord d’attaque équivalent à la Carabo (1968). Cette auto ne fut pas vaine. Le prototype de la Countach de 1971 reprit le boîtier d’instrumentation excentré situé à la gauche du volant. Il le fallait bien sur la P-Zero en raison de l’accès frontal, le pilote en position de schlitteur. De même, le dessin des sièges à capitons rectangulaires passe de la P-Zero à la Countach de 1974. L’arche de roue arrière porte aussi la signature de Gandini, continuée jusqu’à la Maserati Quattroporte IV (1994-2011). Les deux seuls ouvrants s’articulent de façon contradictoire tant on accède contre nature ou poste de pilotage. Voilà deux capots moteurs, l’un soulevé, l’autre versé à l’instar du capot moteur de la Fulvia Sport Zagato (1965), tout en pointe de flèche, motif compris. P-Zero est accessible comme l’Isetta Velam. Et il y eut aussi la Reine 1950 de l’ingénieur Brandt. Voilà qui approche le cockpit de la Ferrari 512 S Berlinetta de Filippo Sapino (1969), mais il basculait vers l’avant à l’instar de la Chevrolet Corvair Testudo (1963) de Giugiaro, voiture-manifeste pour la décennie à venir et dont Gandini tira une partie de sa grammaire. Le petit V4 « seize-cents », au bruit si incongru sur cette auto, pousse la flèche tendue vers le futur. En 1970, l’automobile filait vers l’avenir. Marzal (1967), Carabo (1968), Bizzarini Manta (1968), 512 S Berlinetta (1969), Stratos-P Zero (1970), Modulo (1971), Maserati Boomerang (1972), quel bouquet !

    Répondre · · 20 novembre 2022 à 21 h 04 min

  2. Gougnard

    magnifique voiture avec une tres belle ligne merci

    Répondre · · 21 novembre 2022 à 16 h 01 min

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