Peugeot 402, une populaire aux nombreux visages et un laboratoire roulant

Publié le par Benjamin

Peugeot 402, une populaire aux nombreux visages et un laboratoire roulant

On vous en a parlé en évoquant les anniversaires automobiles de 2025. Si certains modèles seront sous les feux de la rampe, d’autres seront certainement plus discrets. La Peugeot 402 est certainement de ceux-là. La voiture est donc sortie en 1935 et si sa ligne a marqué, ce serait dommage de la réduire à ce style qui sera le point de départ de la série 02. La Peugeot 402 fut en effet une voiture aux multiples facettes, de la berline populaire au laboratoire roulant.

Le besoin de se renouveler

En 1929, Peugeot lance une série qui est un vrai point de départ. Difficile d’imaginer une lionne qui n’ait pas un (ou deux) 0 centraux dans son nom. C’est bien la Peugeot 201 qui lance la machine cette année là et les 301, 401 et 601 viennent compléter une gamme qui va de la petite populaire à la luxueuse limousine.

Néanmoins, le contexte économique est morose et ce n’est rien de le dire. La crise américaine de 1929 finit par arriver, avec plusieurs mois de retard, en Europe. L’automobile en est encore dans une phase de démocratisation. Si de plus en plus de personnes peuvent y avoir accès, la crise ralentit le processus. Les ventes chutent. Certains dégainent plus tôt que le lion ce qui accentue encore la pression. En 1934 Citroën a frappé fort avec ses Traction 7 et 11 (pas encore la 15) tandis que Renault a lancé sa Primaquatre.

La réponse de Sochaux est dévoilée au salon de Paris 1935. C’est notre Peugeot 402. Contrairement aux Citroën et Renault, elle s’inscrit dans une mode venue des USA. Le mouvement Streamline concerne tout le design et, niveau automobile, il s’illustre avec une recherche de l’aérodynamisme qui propulse les Chrysler et DeSoto Airflow en première ligne même si on ne peut pas du tout parler d’un succès commercial. La mode gagne la Suède et Volvo ou la Tchécoslovaquie et Tatra.

La Peugeot 402 est donc dans cette veine. La calandre est arrondie, les ailes sont hautes et massives, la carrosserie est longue et le pare-brise en deux parties fend le vent. Là où la Peugeot 402 innove c’est qu’elle n’intègre pas les phares aux ailes mais les cache entre calandre et radiateur sans pour autant impacter l’éclairage. Ce style sera ensuite décliné et gagnera un nom : le Fuseau Sochaux.

Niveau technique, c’est beaucoup plus classique. Si la Peugeot 402 remplace à la fois la 401 et la 601, pas question de reprendre le 6 en ligne de cette dernière. C’est un quatre cylindres de 2 litres qui loge sous le capot. Avec 55ch, sa puissance est très correcte pour l’époque. La boîte se contente de trois vitesses dont les deux supérieurs sont synchronisés. Évidemment, la puissance est envoyée aux roues arrières, la Traction est bien seule sur le marché ! Les freins sont à tambours et actionnés par des câbles, les roues avant sont indépendantes et le pont arrière est rigide.

La Peugeot 402, comme les lionnes pendant des années, n’innove pas au niveau technique. Même la carrosserie monocoque, qui se démocratise alors, n’est pas au menu. C’est sur un châssis très rigide, alors gage de sécurité, que vient se fixer la carrosserie.

La Peugeot 402 et ses nombreuses versions

Dès son apparition, c’est une véritable gamme qui est proposée. Deux empattements sont proposés et on retrouve de nombreuses carrosseries.

Sur l’empattement de 3150mm on débute avec la Peugeot 402 la plus classique, le modèle de base, c’est la limousine qui tient son nom du fait qu’elle ait 6 glaces et qu’elle propose autant de places assises et elle est proposée en version Luxe et Grand Luxe à partir de 1936 (avec toit ouvrant coulissant en acier).

Sur cet empattement on retrouve aussi des versions plus cossues. La première, c’est le cabriolet « classique » à 4 ou 5 places mais également un coach deux portes pour 5 ou 6 places et un roadster 2 ou 3 places.

Bien sûr, la version la plus connue dans ce registre est la Peugeot 402 Eclipse qui apparaît en 1936 qui n’est pas vraiment une nouveauté puisque Georges Paulin a breveté le système en 1933 sur la 401. Néanmoins, la Peugeot 402 est la première à proposer ce système motorisé électriquement. C’est de loin la version la plus chère avec 34.900F en 1936 contre 23.900F pour une limousine.

Une Commerciale est également proposée. Si on peut la confondre avec la Limousine, l’arrière est différent puisqu’il s’ouvre avec un hayon en deux parties. Certaines seront d’ailleurs modifiées en véritable break avec un arrière de pavillon plus carré.

On retrouve aussi une version longue avec un empattement de 3300mm. Celle-ci sert de base à la Peugeot 402 Familiale dont l’intérieur permet de passer à 7 ou 8 places avec une rangée intermédiaire de strapontins escamotables dans le plancher.

C’est également sur cette version que se décline la version Taxi avec un compartiment bagages à côté du conducteur, un toit ouvrant à l’arrière, une séparation chauffeur et 7 places à bord.

Des évolutions constantes

Même avec de nombreuses versions, on ne s’arrête pas à la gamme établie. En 1936 on propose également la Peugeot 302. En fait, c’est une Peugeot 402, simplement elle repose sur un châssis de 2880mm d’empattement et reprend un moteur plus petit, un 1758cm³ de 43ch.

Cette même année, le cabriolet Eclipse est proposé sur le châssis long pour offrir 5 ou 6 places tandis que la motorisation du système est abandonnée.

Dès 1937, certaines versions ont cependant été retirées. Il est vrai que les volumes de production sont faibles et les Peugeot 402 coach, cabriolet « souple » et l’Eclipse à 2 ou 3 places.

Au salon 1937, pour le millésime 1938, la Peugeot 402 Commerciale passe à l’empattement long. En parallèle on propose surtout une vraie nouveauté : la Légère. En réalité, elle remplace la 302 (qui disparaît) et dote la voiture du moteur 1991cm³ de la 402. Cette légère sera par la suite la base d’un coach sans montants et une version cabriolet à capote souple.

Au passage, la Peugeot 302 Darl’Mat devient une Peugeot 402 Darl’Mat… et ne change elle aussi que le moteur.

En Janvier 1938, la série 02 de Peugeot se dote d’une seconde voiture. On a mis du temps à remplacer la Peugeot 201 et voilà donc la 202. Elle reprend le « fuseau Sochaux » avec un moteur plus petit et restera en production après la guerre.

En Octobre 1938, la Peugeot 402 devient 402 B. Son moteur passe à 2142cm³ pour délivrer 63ch. Au passage, elle cesse d’être une 11cv pour passer dans la gamme des 12cv. Elle atteint alors 125km/h en pointe. Sa calandre est plus proéminente tandis que la malle arrière intègre la roue de secours. On note que l’inscription 402 passe en haut de la calandre pour ces versions B.

En 1939, la Peugeot 402 B Légère fait son apparition. Contrairement à la première légère, elle reçoit l’habitacle bien moins lourd de la Peugeot 402. Ce mariage pas forcément génial au niveau du style permet à la voiture d’être bien plus performante et d’atteindre les 135km/h en pointe.

Forcément, à partir de la fin de l’année 1939, la carrière commerciale de la Peugeot 402 prend un sacré coup avec l’entrée en guerre. Pourtant la voiture continue à être produite, notamment avec les commandes passées par l’armée. Apparaît ainsi la Peugeot MK5, une camionnette bâchée basée sur la 402.

Les tarifs du Printemps 1940 proposent encore la limousine 6 place et la familiale. Les dernières Eclipse sont d’ailleurs terminées à l’Automne 1940. Mais la production a cessé. Beaucoup d’autos, encore récentes, seront transformées au Gazogène. D’autres seront réquisitionnées par l’armée allemande et utilisées jusqu’à la fin de la guerre… jusqu’en Russie !

Par contre, au moment de redémarrer les usines, si la 202 est bien concernée, la 402 est oubliée. Le clap de fin était définitif. Au total ce sont 75.068 exemplaires qui ont été produits.

La Peugeot 402 façon laboratoire roulant

Les Peugeot 402 HL50, prémices du diesel

Non, le Diesel n’est pas une invention de l’après-guerre. Rappelons simplement qu’en produisant de l’essence, on produit aussi du diesel lors du raffinage. Réservé aux camions, utilitaires, bateaux et tracteurs il est interdit sur les véhicules de tourisme. Peugeot fabrique des moteurs diesel dans son usine de la CLM (Compagnie Lilloise de Moteurs) dès 1928.

En 1936, la marque au lion sort un « petit » moteur diesel de 2300cm³. Cette mécanique est annoncée pour 55ch et baptisée HL50, HL signifiant Huile Lourde. Le moteur ne se retrouve pas de suite sur la Peugeot 402 et équipe d’abord des camions légers.

Mais en 1938, on monte quelques prototypes de ces Peugeot 402 HL50. Avec une dérogation, c’est une petite série de voiture qui est produite au début de l’année 1939. Ces voitures sont basées sur la carrosserie longue et vont être vendues en tant que taxi. Si la voiture est économe en carburant, elle perd en performance. Elle reste cependant très discrète avec très peu de voitures en circulation. À la fin de la guerre… il n’en existe plus qu’une !

Cette expérimentation sera cependant utile à Peugeot qui fera sensation avec la Peugeot 403 qui sera l’une des pionnières françaises de l’utilisation du Diesel sur une voiture de tourisme à partir de 1959.

La Peugeot 402 Andreau

Au salon de Paris 1936 on a dévoilé une voiture très spéciale : la Peugeot 402 « Andreau ». Elle reprend le nom de son concepteur, l’ingénieur Jean Andreau mais son vrai nom est N4X. On remarque tout de suite que l’auto est une « 02 » avec ses phares sous la calandre mais on remarque surtout que l’aérodynamique est encore plus soigné. Avec un Cx de 0,34 au lieu de 0,68, l’auto est remarquable. Ses galbes sont plus importants et son aileron vertical à l’arrière est spectaculaire.

En fait cette auto n’aurait pas dû être une Peugeot 402 mais une Peugeot 802 qui aurait dû embarquer un V8 ! Plusieurs moteurs ont tourné (un existe encore) et les monogrammes sont dessinés quand on abandonne le projet. On se rabat donc vers un moteur 4 cylindres classique pour la voiture qui va plus vite tout en consommant 30% de moins !

5 voitures ont été construites et toutes existent toujours !

La Peugeot 402… chez Berliet !

En 1934, Berliet produit toujours des voitures. Il sort sa Dauphine déclinée en 11 et 9cv. Sa carrosserie est très classique et il faut bien dire que le contexte est compliqué et que Berliet est à la traîne. Si on tente de changer la carrosserie de la voiture, cette nouvelle version est vite abandonnée.

À la foire de Lyon en 1939 on a changé d’idée ! En fait la carrosserie de la Peugeot 402, concurrente de la Berliet Dauphine est utilisée. Elle se greffe sur le châssis du constructeur lyonnais qui a remplacé l’avant. Celui-ci reprend les codes américains de l’époque avec une calandre verticale et arrondie et des phares placés de chaque côté. Les ventes restent faibles et la guerre condamne la voiture (et la division automobiles du constructeur). Au total, seules 200 voitures sortiront des usines ce qui en fait une véritable rareté.

Les Peugeot 402 de nos jours

Les Peugeot 402 seront-elles à la fête en 2025 ? Pour leurs 90 ans, on peut le souhaiter même si on se doute que ce sera plus du fait des clubs que des organisateurs de salons.

D’un côté purement pratique, la Peugeot 402 est une voiture intéressante pour celui qui voudrait se lancer dans l’aventure de l’avant-guerre. Un peu plus archaïque que la Traction, elle offre des performances similaires qui vous permettent de rouler sans trop de limites. C’est en tout cas ce qui ressortait de notre essai que vous retrouvez ici :

Côté prix, on trouvera de tout. Depuis la Limousine classique qui commencera sous les 10.000€ jusqu’aux formidables Eclipse qui dépassent facilement les 150.000€, il y en a pour toutes les bourses ! En tout cas, il y en a aussi pour toutes les utilisations tant la gamme est vaste. Et puis le Fuseau Sochaux fera toujours son effet lors d’un événement. Alors n’oubliez pas la Peugeot 402 et envisagez-la sérieusement, elle a de nombreux arguments à faire valoir au moment d’acheter une avant-guerre (dont son prix finalement).

Photos additionnelles : Peugeot Press, Aventure Peugeot

Benjamin

http://newsdanciennes.com

Passionné d'automobile ancienne, il a créé News d'Anciennes en 2013 à force de se balader sur les salons sans savoir quoi faire de ses photos. Conducteur occasionnel de Simca 1100 il adore conduire les voitures des autres, dès qu'elles sont un peu plus rapides !

Commentaires

  1. Brézout Robert

    Parmi les rares voitures françaises que j’ai possédées, il y eut une 402 Eclipse de 1937. Vendue en 1939 (carte grise d’origine) c’est déjà indiquer que, parmi tous ses défauts, son prix prohibitif fut une des causes de ce flop commercial. Contrairement à ce qui est indiqué dans l’article ci-dessus, elle était mue par un 6 cylindre qui, même convenablement refait à Sochaux, consommait allègrement ses 22 litres/100. Mais ça n’était pas le pire des défauts de cette auto. Elle freinait comme un sabot sur la neige et avait une tenue de route façon valse viennoise. Erreurs de conception de Peugeot et d’achat de ma part.

    Répondre · · 27 décembre 2024 à 17 h 23 min

    1. Benjamin

      Alors pour le coup on n’a jamais entendu parler (ni vu) de 402 Eclipse à 6 cylindres…

      Répondre · · 27 décembre 2024 à 19 h 41 min

    2. DELMAS Jérôme

      La 402 Eclipse n’a jamais été motorisée par un 6 cylindres. Par contre, avant elle, la très rare 601 Eclipse possédait un 6 cylindres. Quant à la consommation d’essence, certes elle consomme, mais nous plus proche des 15 litres que des 22 litres. Pour plus d’informations sur la 402 Eclipse, vous pouvez visiter mon site perso 402eclipse.free.fr

      Répondre · · 29 décembre 2024 à 8 h 33 min

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