Essai TVR Griffith 500 : Galet pas farouche

Publié le par Mark

Essai TVR Griffith 500 : Galet pas farouche

Si, comme moi, vous êtes un gamin des années 80-90 alors c’est probablement une marque qui compte. Faut dire que ce constructeur à l’image sulfureuse a de quoi éveiller la curiosité avec des productions excentriques et mal élevées. D’ailleurs, en bon joueur de Playstation 2, j’avoue que cela faisait un moment que je cherchais une Griffith ou une Cerbera à me mettre sous la dent. J’avoue que Gran Turismo 4 m’avait rendu accroc à ces modèles et aux suivants d’ailleurs. Visiblement rien d’impossible en 2022, alors quand l’occasion s’est présentée de prendre le volant d’une TVR Griffith 500 sur les routes Icaunaises, comment dire… j’ai sauté dans la Mini de production, direction Irancy pour une rencontre aussi improbable que couillue.

Intro

Chaque constructeur a LA bagnole qui a marqué les prémices d’une période d’apogée. Le genre de caisse qui a su s’inscrire avec brio dans son époque, permettant à son géniteur de passer sur le devant de la scène. Chez TVR cette transition a débuté sous la direction de Peter Wheeler avec la Griffith 500. Dans les années 70 la vie de TVR se résumait un peu à celle d’un chatelain ivrogne et désargenté. Le nom de la marque crée par TreVoR Wilkinson était bien implanté, mais cette dernière peinait à se renouveler et à trouver ses repères.

L’heure du roadster anglais à l’ancienne était révolue, et l’image moyenne. Le petit constructeur titubait tel un dipsomane entre des créations surannées à la plastique ubuesque et des envies de super sportives crédibles. Forcément à l’aube des années 80 les finances allaient mal. Et ce n’était pas à grand coup de V6 Essex placés dans des véhicules réputés rocambolesques au sein d’un marché qui n’avait plus de public que ces dernières allaient remonter.

Ce n’est pas non plus le rachat par Peter Wheeler en 1981, et l’implantation en 1983 d’un sinistre V8 rover de 197ch sous le capot d’une Tasmin 350i un peu trop Wedge qui allait conduire immédiatement l’entreprise sur les chemins de la prospérité. La marque devait se reconstruire, et la TVR S lancée en 1986 présageait des jours meilleurs avec son retour à des lignes plus rétro, mais là encore ce n’était pas suffisant pour relancer la machine.

Bref, à la fin des années 80 il devenait primordial de surfer sur le renouveau des sportives et sortir du bon ! Sans quoi Peter Wheeler n’aurait probablement eu d’autre choix que de fermer la boutique. C’est finalement un peu au pieds du mur que fut lancé le développement de la TVR Griffith. 18 mois de gestation, dans la sphère automobile c’est court, très court. Mais il faut croire que Wheeler et ses hommes avaient enfin trouvé l’inspiration avec cette Griffith deuxième du nom.

Présentée en 1990 au Motor Show de Birmingham la Griffith fit sensation. Faut dire qu’avec son design en partie dû à John Ravenscroft et Peter Wheeler la belle avait de quoi plaire. La rupture avec les précédentes productions était totale, et le mélange entre futur et rétro était une réussite. A cela était associé un châssis issu de la compétition et un gros V8 Rover enfin dopé comme il se devait.

Les performances promises étaient explosives avec un 0-160km/h annoncé en 10,5s et le tarif d’à peine 400 000 francs plutôt contenu au regard de ces dernières. La légende des TVR sauvages qu’on connait était née ! C’est en toute logique que le succès fut au rendez-vous avec un carnet de 300 commandes rempli en seulement quelques heures. La petite histoire raconte même qu’une Griffith s’écoulait toutes les 8 minutes sur le stand de la marque. C’était le début d’une belle carrière qui durera 11 ans.

Chez TVR on peut dire que Wheeler avait instigué un nouveau souffle. On avait retrouvé l’envie et on pouvait enfin respirer d’autant que deux ans plus tard le succès était de nouveau au rendez-vous avec la présentation de la Chimaera lors du même salon. Voilà qui permettait d’aborder sereinement les années 90, d’autant que la Cerbera présentée en 1994 connu elle aussi le succès. Sauf que l’argent brula les doigts du petit artisan, qui rêvait de devenir un constructeur important. La marque se lança dans des développements de plus en plus nombreux et onéreux au cours de la décennie.

Malheureusement, ni la fiabilité, ni l’homogénéité n’étaient au rendez-vous. Le point d’orgue fut atteint avec le moteur speed six, et la monstrueuse Cerbera speed twelve prévue pour le règlement GT1 en réponse à une certaine Mclaren F1. Cette fois, TVR était devenu trop ambitieux, et fonçait de nouveau vers son destin finalement inéluctable.

Malgré nombre de productions légendaires à la fin des années 90 début 2000 le constructeur cessa son activité en 2012. Quand je repense aux Cerbera, Chimaera, Tuscan, Sagaris, Tamora, et autres T350 qui m’ont toutes faites rêver pendant mon enfance, je ne peux que regretter cette destinée. Peut-être qu’un jour je pourrais gouter aux fabuleux Speed Eight et Speed Six maison, mais je vais déjà commencer par la Griffith 500 à qui TVR doit beaucoup.

Extérieur : Galet de Blackpool

Bon d’accord, dire que les TVR viennent de Blackpool c’est un peu un abus de langage vu que le siège social de la marque si situe à Whiteley dans le Hampshire. Mais passons car j’ai un peu de pain sur la planche pour décrire notre bestiole du jour.

La première question qui m’est venue à la vue de notre modèle c’est : « Comment un objet aussi mignon peut-il avoir une réputation aussi méchante ? ». Non mais regardez la TVR Griffith, toute en rondeurs, avec ses petits yeux en amande et sa grande bouche ovale. Comment cette petite chose pourrait-elle vous vouloir autant de mal ? En fait, je suis presque certain que vous la trouverez plus attendrissante que n’importe quel chaton. Enfin, jusqu’au jour où elle voudra vous tuer au détour d’une corniche un peu trop grasse, mais ça, on y reviendra.

TVR Griffith 500 04191- TVR Griffith

Personnellement depuis Grand Turismo 4 où je l’ai découverte, je suis fan de la gueule de cette caisse, de ses galbes, comme de son aspect épuré qui fleure bon le néo-rétro et le biodesign. J’apprécie aussi énormément son côté compact et ramassé. Ah oui, il faut que je le précise, notre TVR Griffith mesure moins de 4m de long, ce qui signifie qu’elle est plus courte qu’une Clio moderne.

En photo on ne dirait pas, mais en vrai ça saute à la figure. Associé à sa belle largeur d’1,73m et ses lignes extrêmement fluides, il en ressort vraiment le visuel d’un galet posé sur la route. Et ce ne sont pas les jantes OZ toutes lisses (15 pouces à l’avant, 16 à l’arrière) à 7 bâtons, ni la teinte Highland Grey de notre modèle qui diront le contraire. Honnêtement j’ai rarement vue des lignes aussi pures. Habituellement, il y a toujours une poignée de porte, un boudin, un parechoc, une arrête pour venir accrocher le regard. Sur la TVR Griffith 500, rien de tout ça ! Même les poignées de porte et la trappe à essence sont dissimulées.

Le profil reprend parfaitement les codes du roadster sportif à l’Anglaise, avec son long capot plongeant, et son habitacle positionné tout juste en avant de l’essieux arrière. En parlant de ça, la poupe est plus massive, et consensuelle. Cela dit, son aspect tronqué cumulé à l’échancrure positionnée en amont de la portière, apportent ce qu’il faut de tranchant et de sportivité. Il en va de même pour la nervure frontale à l’intérieur de laquelle vient plonger le capot bombé.

En terme de design c’est un véritable tour de force qu’a réalisé l’équipe maison. En effet, obtenir ce résultat sans sombrer dans le rendu vieillot d’une Ford Mondeo Mk1 phase 2 n’est clairement pas une mince affaire. Tout comme le fait d’avoir obtenu des proportions aussi justes avec des dimensions aussi restreintes. Le titre du design décerné en 1991 par British Award Council n’était pas usurpé !

Finalement il n’y a guère que les deux trompettes de la grande orgue qui viennent contrecarrer la douceur des lignes de notre TVR Griffith 500. Elles permettent aussi de révéler un indice sur ses véritables intentions. Tout comme les différents éléments piochés chez les constructeurs dévoilent ses origines artisanales. Il est toujours amusant de voir l’art avec lequel les petits manufacturiers parviennent à intégrer des éléments déjà existants par manque de moyens.

A l’instar des traditionnels rétroviseurs de Citroën CX, on retrouve par exemple ce qui semblent être des feux arrière d’Opel Vectra retournés. Original non ? Bref, vous vous en doutez je pourrais mater ces galbes délicieux pendant des heures, (d’ailleurs c’est ce qu’on a fait) mais si on allait faire un tour dans l’habitacle ?

Habitacle : Tradition et excentricité

Ah les habitacles des TVR « modernes », un succulent mélange d’excentricité, de colle néoprène, de finitions réalisées à la pelle, et d’ergonomie définie au cours d’une partie de bridge un peu trop arrosée. Ça, c’est l’image que la plupart d’entre nous en ont car dans les faits, notre TVR Griffith 500 est plus subtile que ça.

Alors quand je découvre l’intérieur de la belle, évidemment, je me suis demandé à quelles vapeurs de dérivés pétrochimiques les designers s’étaient shootés. C’est simple, j’ai rarement vu autant d’audace et d’excentricité dans le dessin d’un habitacle. Tout n’est que courbes, reliefs, et lignes fuyantes. Le mobilier est massif, et les espaces pour le moins étroits. C’est franchement déroutant mais je crois que ça me plait, surtout dans cette couleur singulière tirant sur le bleu canard.

Intérieur de la TVR Griffith 500

A côté de ça, l’intérieur de notre TVR dégage quand même un certain amour de la tradition. En témoignent la large casquette en demi-lune recouverte de compteurs ronds reprenant le coloris de l’habitacle, les nombreuses touches d’aluminium guilloché façon Type-E, ou encore le cuir omniprésent. Tradition évidement entrecoupée d’éléments au caractère plus… excentrique, à l’image du volant Personal tout droit sorti d’un mauvais numéro de GTI Mag, du levier de vitesse en alu aussi beau que minuscule, ou encore du bandeau de diodes regroupant l’ensemble des voyants. Quand je vous disais que cela ne manquait pas d’audace !

Même les finitions surprennent. Alors c’est clair qu’on n’est pas à bord d’une classe S mais globalement je m’attendais à bien pire, et notre TVR Gritffith se situe bien au-dessus de ce que proposaient les Italiens à la même époque.

En revanche là ou notre TVR Griffith 500 ne renie pas ses origines, c’est au chapitre de l’ergonomie. Déjà gare au gabarit, car même du haut de mon mètre 75 je me sens à l’étroit. Enfin je dirais que je suis imbriqué à ras du sol entre le tableau de bord, la portière, et l’énorme console centrale. Ce n’est pas pour me déplaire car la position reste satisfaisante et me rappelle celle que j’avais au volant d’une certaine Dodge Viper GTS.

Mais je peux concevoir qu’à l’instar de l’absence de repose pied, ce ne soit pas optimal. Tout comme la disposition des différents éléments et commandes qui est comment dire ? Abracadabrante ! Après tout, quoi de plus normal que d’ouvrir la portière via une poignée située sur le tunnel central ? D’allumer sa clope via l’allume cigare placé dans le vide poche de la portière. Ou de faire le plein en passant par le coffre ?

Et puis, pourquoi s’embêter à faire des pictogrammes sur les commandes ? Ce n’est pas comme si elles étaient installées là où on en a l’habitude. C’est sûr, ça claque, mais à l’usage l’habitacle de notre TVR Griffith se transforme vite en test pour Alzheimer. Tout comme les sièges en cuir se transformeront vite en grille de rôtissoire.

Pour le coup, lorsqu’il est question de rendre l’ambiance caliente, le V8 de 5,0 litres et l’énorme boite de vitesses sont bien plus performants que le système de chauffage dédié. Elément de confort qui sera le seul équipement dont je vous ferais part aujourd’hui, étant donné qu’hormis un système audio aussi utile qu’un pot de fleurs, notre TVR Griffith verse dans la doctrine franciscaine. Light is right. Ce qui n’est pas forcément plus mal, car on parle d’un roadster sportif pur jus et pas d’un camping-car de luxe.

Puis finalement hormis ces quelques excentricités cet habitacle il a bien vieilli, il est carrément cool et il me file envie de profiter du soleil couchant sur la route. Est-ce que ce ne serait pas tout ce qui compte ?

Sous le capot : Grenade sans compromis

Alors qu’est-ce qu’on retrouve sous ce capot à l’ouverture bien singulière ? TVR oblige, du gros ! Faut dire que la maison n’avait pas froid aux yeux lorsqu’il était question d’animer ses productions. C’est aussi pour ça qu’on les aime ces bestioles. En conséquence, quoi de plus normal que de coller un beau V8 de 4997cm³ sous le capot d’une caisse à peine plus encombrante qu’une 206 ?

Moteur de la TVR Griffith 500

C’est certain, cet organe n’aura pas grand mal à déplacer les 1060kgs à vide de notre TVR Griffith. D’ailleurs les chiffres parlent d’eux même, avec un 0 à 100 torché en à peine 5s, et moins de 20 pour s’envoyer en l’air à 200 chronos. Autant dire qu’en 1993 les accélérations de cette grenade sur roues étaient dévastatrices pour la concurrence. Par exemple une Ferrari 348TB mettait 1,5s de plus pour boucler le 1000m départ arrêté.

Pourtant la technique demeure simple. Ce bloc, vous le connaissez tous. Il ne s’agit ni plus du moins que de l’éternel V8 Rover lourdement revu par les sorciers de chez TVR Power à Coventry. Déjà l’alésage et la course sont gonflés en passant à 94mm et 90mm. Les deux culasses 8 soupapes sont aussi largement modifiées avec des conduits et des soupapes bien plus importants. Le rapport volumétrique est évidement optimisé avec des compressions qui en ressortent accrues. L’arbre à came central passe aussi par la case refonte, tout comme le système d’injection Lucas et la gestion de l’ensemble.

Il en ressort des chiffres intéressants avec 325ch obtenus à 5500trs/min et 480nm de couple à 3750trs/min. Voilà de quoi mettre à mal mes cervicales, le volant moteur liposucé, la boite cinq de rover SD1, et les pneus arrière en 16 pouces.

Coté châssis, notre grenade ne verse pas dans le compromis. La TVR Griffith 500 reprend la structure tubulaire des Tuscan qui courraient pour le Tuscan challenge. Oui, oui, un châssis de voiture de course, qui associé à une carrosserie en polyester offre la légèreté et la rigidité nécessaire pour répondre aux prétentions de la belle. Pour les trains roulants, là encore sport c’est sport, grâce à l’adoption d’une suspension à double triangulation montée avec des amortisseurs Koni.

Histoire de parfaire la panoplie on retrouve quatre disques ventilés (260mm à l’avant 270mm à l’arrière), un différentiel autobloquant et une direction à crémaillère non assistée. En revanche ne comptez pas sur une quelconque aide lorsque vous attaquerez comme un âne sur les axes secondaires. Au volant de la TVR Griffith 500 vous serez seul maitre à bord, le système d’ABS, et autres dispositifs d’antipatinage ayant été volontairement oubliés chez les équipementiers.

Vous voilà prévenus, et si on allait faire un tour maintenant ?

La TVR Griffith 500 sur la route : Bourrue mais pas si mal élevée

Certaines soirées s’annoncent mieux que d’autres. Pour une bande de petrolhead, je crois que celle si présage les meilleurs augures. La météo est au rendez-vous, accompagnée de la lointaine douceur d’un été généreux, et d’un V8 cheveux aux vents. Cette fois c’est Adrien, notre propriétaire du jour qui m’a proposé spontanément de prendre place sur le siège conducteur. Même si au fond j’en avais très très envie, je ne m’y attendais pas spécialement.

Alors forcément, j’étais sur un petit nuage au moment de mettre à feu le V8. C’est d’ailleurs à cet instant précis que je pris la pleine mesure de la dichotomie qui caractérise notre TVR Griffith 500. A force de la regarder j’avais fini par oublier ce qui se cachait vraiment derrière cette gueule d’ange.

C’est clair, le 5,0 litres sort les muscles en secouant la caisse au premier coup de clé. On dirait un ours mal léché qui s’étire à la sortie de l’hibernation. La TVR Griffith 500 sonne bien sale, et elle n’hésite pas à me rappeler quel point elle est mal élevée au moment d’armer la première. Le maniement du petit levier s’annonce bien rustique à l’instar de la direction qui me remet instantanément les idées en place.

Peu à peu je commence à prendre la mesure d’à quel point je suis seul commandant à bord. La position est très sportive, toutes les commandes sont viriles, et les deux trompettes sonnent comme l’arrivée des cavaliers de l’apocalypse. Il y a du danger dans l’air, c’est intimidant, mais au moins je me sens vivant ! Et puis une fois lancé cette sensation de menace imminente s’estompe.

Parce qu’en fait, bah en roulant normalement elle n’est pas si mal élevée. Bourrue, rustique, franchement oldschool, oui, mais pas insupportable. En fait aux allures règlementaires c’est même une superbe machine de balade. Le genre de bagnole qui distille ce qu’il faut de sensations fortes sans pour autant être usante au point de vouloir mourir plutôt que de faire une minute de plus à son volant. Finalement, le comble c’est que la TVR Griffith 500 n’incite pas tant que ça à rouler comme un sauvage. Le V8 au caractère intense se révèle souple, et particulièrement plaisant à mener sur un filet.

Cela dit, on sent quand même que ce dernier n’est pas taillé pour évoluer dans les tréfonds de compte tour. Ce n’est pas non plus un six trois quart ! A contrario, je dirais qu’on peut commencer à le savourer à partir de 2500trs/min. Régime auquel, il flatte l’ouïe d’un râle très… macho, sans chercher à détruire mes tympans par le biais d’une quelconque résonnance.

Le châssis, pas de doutes, on est dans une caisse de sport ! Je sens qu’il est bien rigide, et que l’empâtement est court. La TVR Griffith 500 dégage quelque chose de très tonique, compact, et nerveux dans ses changements de cap. A bord, je sens tout ce qui se passe, la moindre inconstance dans ma conduite, et j’ai vraiment le sentiment d’avoir enfilé un costume à ma taille. C’est difficile à décrire mais particulièrement agréable.

Et puis comme pour le V8, c’est rustique, intense, sans être insupportable. En effet, les trains roulants ont l’air suffisamment fermes pour attaquer comme un porc sans avoir la sensation de piloter un hotdog, mais aussi suffisamment permissifs pour apprécier un usage routier le coude sur la portière. Pas d’hernie discale au programme du jour ! Bien joué TVR car le cocktail est vraiment savoureux ! Et pour le reste ?

Bien la direction est sans histoires. Un peu lourde certes, mais elle saura flatter votre virilité. Puis son toucher de route 100% bio et incisif est un petit bonheur à lui seul. Tout comme le maniement de la boite de vitesse, bestial, précis, qui me rappelle presque celui d’une certaine Dodge Viper et les grandes heures que j’ai vécu sur le Semnoz.

Cela dit, à l’image d’une couleuvre, la TVR Griffith 500 est un peu moins excessive que le serpent Américain dans sa démarche. Il en va de même pour les freins. Ces derniers nécessitent force et honneur à l’usage mais en contrepartie ils répondent au doigt et à l’œil. Finalement les seuls détails qui pourraient me déloger de la TVR Griffith 500 sont l’absence de repose pied, et la déshydratation promise par le groupe motopropulseur. Ouais Adrien ne m’a pas menti, il peut vite faire très chaud à bord.

Est-ce que ce ne serait pas une bonne excuse pour provoquer un peu plus notre Anglaise et accroitre le refroidissement éolien ?

A rythme soutenu : Boule de nerfs

Vous connaissez la chanson, on va remettre un coup de deuxième plus si affinités pour voir ce que donne notre 5.0 litres sans trop offusquer Florence Guillaume. J’aurais bien voulu tenter le double débrayage, mais conduite à droite oblige, j’avoue que ma coordination n’est absolument pas au point. Cependant aucun problème pour mettre la godasse dans le fond et énerver la bête qui sommeille sous le long capot !

Et là, j’avoue que le terme bête n’est pas usurpé ! C’est féroce ! La presse de l’époque ne s’y était pas trompée, la TVR Griffith 500 est foncièrement mauvaise envers mes cervicales et mon permis. On ne parlera pas non plus de la bande son émise par les deux trompettes de l’apocalypse. Le râle se veut grave, menaçant, et finalement très américain. Pas de doutes, pour mon plus grand plaisir auditif la paire de notre V8 est bien descendue.

Le temps d’enfiler la troisième et la TVR Griffith 500 me savate furieusement les lombaires. Il n’y a rien à faire, le tachymètre s’envole comme si c’était un compte tour, et le paysage me saute à la figure. Les sensations dispensées par notre roadster sont vraiment peu courantes ! C’est une vraie bombe ! A l’accélération tout n’est que brutalité et franc parler. Ici, pas de place pour la finesse d’une mécanique Italienne, ou la perfection technique d’une Allemande.

La TVR Griffith 500, c’est juste un gros bulldog Anglais, une vraie boule de nerfs qui vous choppe le bras avec une ténacité hors du commun. J’ai rarement eu des mécaniques aussi trapues à l’accélération. Le V8 est compact, oubliez les régimes himalayens, il n’aime pas ça ! Oubliez aussi les reprises brutales à 2000 tours, ce n’est pas son dada. En revanche il balance sa tempête de chevaux vapeurs de 3500 à 5500trs/min, et là, c’est aussi spectaculaire qu’addictif. Preuve en est j’en redemande au moment de rentrer la quatre ! Pourtant, entre les bandes blanches qui commencent à furieusement s’enchainer et le tonnerre mécanique, il y aurait de quoi flipper.

Mais il n’y a pas que le moteur qui participe à ce côté boule de nerfs ! La transmission à aussi sa part de responsabilité. Elle tire court, elle est taillée pour l’accélération, et bien étagée ! Associée à la plage d’utilisation réduite du V8, on se retrouve perpétuellement à changer de rapport et à retomber là où le 5,0 litres est le plus redoutable ! La conduite est dense, les changements de rapport sont de véritables coups de boutoir, et le maniement du ridicule shortshifter est tout simplement magnifique de virilité ! C’est ferme, court, bien guidé et les verrouillages francs sont tellement savoureux !

Vous la voyez la banane ? Peut-être pas, mais je vous garantis que je jubile d’avoir de nouveau entre les mains une voiture aussi masculine et sans finesse ! La TVR Griffith 500 me rappelle la Viper, ou la Corvette 427 dans sa manière de s’exprimer et son manque de savoir être ! Pour les plus chanceux elle évoquera surement une Cobra.

C’est clair que ce soir il n’y a pas de la limande sole dans l’assiette. Mais paradoxalement, si notre galet s’exprime sans le moindre savoir vivre, il en réclame beaucoup de la part de son conducteur. La TVR Griffith 500 peut vite devenir très mauvaise. En fait, si vous êtes une bille ou que vous manquez de doigter elle va vous butter. Ce qui ne veut pas dire que le comportement est médiocre. Oh non, il est très bon !

Les changements de cap sont vifs, nerveux. De même, l’empâtement court et les relances fulgurantes permettent d’enrouler fort temps qu’il y a de la motricité. Même les freins qui peuvent sembler récalcitrants sont bons ! Ils sont adaptés, endurants, et exécutent exactement ce que je leur demande. Cela dit, je ne dois pas oublier l’absence d’ABS, vue les mise en vitesse, la sentence d’un blocage de roue serait immédiate et sans appel !

Et c’est pareil pour chaque étape de la conduite. La direction est superbe de sincérité, de tonus, et les remontées du train avant me donnent l’impression de frotter la route de mes mains. Mais voilà, l’équilibre n’est pas parfait. L’organe testiculé qui gronde sous le capot alourdit davantage l’avant. Même si la TVR Griffith 500 se place au doigt et à l’œil, il est obligatoire de respecter son équilibre et de la manier avec dextérité. Sans quoi, en l’absence d’assistance, vous connaissez la musique.

Sous virage en entrée, puis l’empâtement court, et le train arrière délesté par le freinage feront le reste pour vous envoyer au royaume des cieux à la relance. Ce sera à l’image du rapport poids puissance, explosif, particulièrement si vous n’avez pas le reflexe au moment où l’autobloquant essayera de vous ramener dans le droit chemin.

N’oubliez pas que la TVR Griffith 500 roule vite, très vite, et que même si son comportement est aussi prévisible qu’intuitif, toutes ses réactions s’exécutent brutalement en un éclair ! L’expression rouler sur le fil du rasoir n’a rarement été aussi vraie ! Mais bien qu’impressionnant, cet animal sauvage ne doit pas faire peur. Au contraire, ce serait une grave erreur.

Car si vous faites l’effort d’humilité et d’application, si vous prenez le temps de décomposer la conduite, d’apprendre. Alors les sensations seront exemptes de frayeur et à la hauteur des hurlements sauvages du V8 ! Fabuleuses ! Et c’est bien de cette conduite que je me contente ce soir dans les S d’Irancy. J’ai beau hacher, décomposer, faire preuve d’énormément de retenue, dans les courbes, à la relance, à la remise de gaz aux changements de rapports, je suis quand même comblé par cette boule de nerf tout droit sortie d’une autre époque.

Conclusion :

Je m’attendais à une auto, sensationnelle, mal branlée, foncièrement débile, et invitant son conducteur à l’être tout autant. Mais la TVR Griffith 500 est plus nuancée dans sa prose. Débile, pas farouche, et particulièrement sensationnelle ça c’est clair ! Après tout il suffit de la regarder, de l’écouter, de la prendre en main pour s’en rendre compte.

Pour être sauvage, elle est sauvage, et il vous faudra un gros cœur affublé de sérieuses compétences pour en tirer la quintessence. Car si la bestiole est capable de performances superlatives, que son comportement est sain, elle n’en demeure pas moins un démon caché derrière une gueule d’ange.

Cependant, la TVR Griffith 500 n’est pas qu’un engin hors norme, et marginal. C’est aussi une superbe auto de balade, intense, bourrue certes, mais pas si mal fichue ou invivable que ça, si on exclut sa fiabilité parfois aléatoire. C’est une auto qui ne pousse pas nécessairement au crime, et qui se laisse mener sans histoires au rythme de son conducteur. Un coup de maitre de la part de TVR qui en plus d’être une ode aux roadster Anglais de la grande époque m’a rappelé une certaine Dodge Viper, la démesure en moins.

Un grand merci à Adrien pour le prêt de son jouet et cette soirée mémorable.

Fiche techniqueTVR Griffith 500
Années1993-2002
Mécanique
Architecture8 Cylindres en v
Cylindrée4997 cm³
AlimentationInjection multipoints
Soupapes16
Puissance Max (au banc)325 ch à 5500 trs/min
Couple Max480 Nm à 3750 trs/min
Boîte de VitesseManuelle 5 rapports
TransmissionPropulsion
Châssis
Position MoteurLongitudinale Avant
FreinageDisques ventilés AV et AR
VoiesAV 1460 mm / AR 1470 mm
Empattement2286 mm
Dimensions L x l x h3975 x 1725 x 1185 mm
Poids (estimé)±1170 kg
Performances
Vmax Mesurée253 km/h
0 à 100 km/h5,0s
400m d.a13,3s
1000m d.a24,1s
Poids/Puissance3,6 kg/ch
Conso Mixte±12L/100km
Conso Sportive±21L/100km
Prix± 45000€

Rouler en TVR Griffith 500 :

Noël arrive et il va falloir conserver vos étrennes. Cela dit, j’espère que vous avez été très sage et que le père Noel va vous gâter en conséquence. Parce qu’une TVR Griffith 500 ça commence à valoir un peu de ronds. Il vous faudra compter autour de 25- 30 000€ voir 45-50 000€ pour vous en procurer une. Cet écart de cote provient surtout de la position du volant mais au regard des prestations ce n’est pas si cher payé !

La seconde étape consistera à trouver la bestiole. Les TVR Griffith 500 sont rares mais par chance il y en a pas mal de déjà présentes sur le continent. De plus ce ne sont pas les plus pénibles à importer ou homologuer. Ouf ! En revanche si vous êtes récalcitrant à rouler du côté passager, j’ai une mauvaise nouvelle pour vous. Malheureusement vous avez 97% de chances de tomber sur une conduite à droite étant donné que seul 3% de la production fut livrée avec le volant du bon côté. Soit… 40 exemplaires sur 1500. Clairement, n’en faites pas un critère de sélection !

A coté de ça les Griffith 500 ne sont pas les TVR les plus chiantes en terme de fiabilité. Alors attention ce ne sont pas des Peugeot 504 et la fiabilité de l’Anglaise demeure assez aléatoire. Enfin tout ça pour dire que vous finirez bien par avoir des déboires essentiellement électriques. Ce n’est pas forcément gravissime, mais c’est toujours pénalisant et ennuyeux. L’autre gros point noir, c’est la corrosion…

Autant la carrosserie ne risque absolument rien à ce niveau, autant le châssis tubulaire est réputé pour croustiller comme une Alfa des années 70. Là c’est carrément vicieux, parce que c’est difficilement repérable dans des conditions d’achat normal. Prenez donc bien le temps de vous pencher et de regarder les moindres parties visibles. En cas de doutes, fuyez ! Pareil, portez une attention particulière à l’état de la carrosserie et au comportement de la belle sur route. Vu les prix demandés ces derniers doivent être irréprochables !

En revanche pour ce qui est de la partie mécanique bah le V8 rover a cet avantage d’être connu et plutôt robuste si entretenu et respecté. Enfin comme n’importe quelle caisse un peu pointue finalement. Au détail près que son entretien n’est pas particulièrement onéreux. La vidange se fait avec de la 10W40 (Mobil1) à des intervalles de 5000km ou 1 an.

Pour le reste c’est assez classique mais n’oubliez pas d’inspecter la distribution entre 70 et 100 000km de même que la courroie d’alternateur réputée faiblarde sur les premières versions. Niveau pièces si les éléments de carrosserie peuvent poser un problème, sachez que pour le reste on peut encore s’en sortir avec les honneurs. Beaucoup de pièces sont largement disponibles et pour le reste il suffira de fouiner chez nos amis Anglais ou de se faire aider par le club TVR France. N’hésitez pas non plus à faire appel à eux pour vous conseiller sur le choix du professionnel chargé d’entretenir la belle. En définitive, c’est bien le plus difficile à trouver !

Reste le chapitre de la consommation, oui, la TVR Griffith 500 est portée sur la boisson !

Cotes : Collector Car Value

Mark

Passionné de photo et de sa BMW E30, Mark a rejoint News d'Anciennes courant 2016. Essais, road-trip, reportages, tout l'intéresse du moment qu'il peut sortir son appareil photo.

Commentaires

  1. philippe

    Dommage de n’avoir pas conté l’histoire de Jack Griffith, qui, un peu comme Caroll Shelby le fit avec les AC, mit un V8 US sous le capot d’une petite anglaise dans les années 60.

    Répondre · · 20 décembre 2022 à 11 h 37 min

    1. Benjamin

      Ici c’est un essai. C’est pour ça qu’on propose des articles dans différentes catégories 😉

      Répondre · · 20 décembre 2022 à 11 h 44 min

      1. philippe

        Au moins évoquer l’origine du nom

        Répondre · · 20 décembre 2022 à 14 h 36 min

        1. Benjamin

          Alors pour le coup… c’est indiqué en début d’article !

          Répondre · · 20 décembre 2022 à 14 h 52 min

          1. philippe

            Bah non je crois pas, il est juste dit que cette Griffith est la 2e du nom. Pas grave cela-dit.

            Répondre · · 21 décembre 2022 à 21 h 29 min

  2. clark guébeul

    Chouette article merci. Je la mets illico dans ma collection virtuelle de voitures sympas des années 90 ( à coté de la Lotus Elise ).

    Répondre · · 20 décembre 2022 à 18 h 17 min

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