Essai d’une Citroën CX Leader IE, toujours une longueur d’avance

Leader des grandes berlines françaises des années 70-80, on ne vous présente plus la CX. Pourtant, Citroën souhaitait appuyer sur ce qu’il faisait de mieux avec cette Citroën CX Leader IE justement. Essentielle en apparence et pourtant extrêmement aboutie, c’était, sur le papier, l’expression même du concept de la CX. Personnellement, c’est aussi la première Citroën de la grande époque que j’essaye et je l’ai plaisir de vous livrer mon expérience. 

Notre Citroën CX Leader du jour

Extérieur : Coquerico, le chic à la française  

Chaque version de Citroën CX qu’on croise possède un peu son propre style, sa propre personnalité dépendant des versions et des moteurs. La Citroën CX Leader de notre essai du jour ne dérogea pas à la règle et l’apparition de certains appendices intriguent illico.

On reconnaît toujours le style de la CX, celle qui avait la charge, pas facile, de remplacer la DS sur la route et dans le cœur des français, chose qu’elle assura parfaitement, même si son aura fut toujours moindre. Si la DS se déclinait en différentes finitions, la CX allait encore plus loin dans le domaine. C’est comme ça que naquit la Citroën CX Leader, première série limitée du modèle, 10 ans après sa sortie !

Sans revenir sur le style général, pas besoin de vous redécrire la CX et sa ligne originale pour le segment (elle s’attaquait surtout à des tricorps sans en être vraiment une), on peut détailler la Citroën CX Leader. Parce qu’extérieurement, il y a des choses à dire. Et ça se voit déjà à sa couleur : le Gris Perlé Métallisé. En fait c’est un deux tons qui apparaît en 1984, avec une partie basse un peu plus foncée reprenant une grosse inscription Leader. Les deux parties n’étaient pas vraiment démarquées lors de la première année, mais une baguette apparaît en 1985.

Cette baguette porte une barre chromée. D’ailleurs le chrome on le retrouve encore sur les pare-chocs. Pourquoi c’est notable ? Car c’est l’apanage de toutes les Citroën CX Leader de 1985, y compris celles comme la notre qui sont sorties après Juillet 1985. Si la date ne vous parle pas, c’est celle de la sortie de la phase 2, qui fait justement disparaître les pare-chocs chromés au profit du plastique couleur carrosserie, plus moderne. D’ailleurs la baguette fera aussi disparaître le chrome sur les Citroën CX Leader qui reviendront en 1987.

Il reste encore des spécificités à mettre au crédit de la Citroën CX Leader. Il faut ainsi parler des encadrements de fenêtres noir mat, des enjoliveurs de roues spécifiques, absents ici, laissant apparaître des jantes tôlées avec des pneus Michelin TRX. Dernière chose, mais si on vous ne vous le dit pas, vous ne le verrez pas, la Leader proposait un pare-brise teinté dégradé et des vitres teintées. Des équipements qui dépendent en fait de l’option Isother… qu’on va mieux vous décrire en parlant de l’intérieur.

Intérieur : Have a sit, My Lord ! 

C’est d’abord depuis la banquette arrière que je découvre la Citroën CX Leader. Il paraît que c’est la meilleure place pour voyager à son bord, mais aussi pour prendre quelques clichés de son tableau de bord… que je détaillerai après. Les places arrière sont d’un moelleux si ouaté qu’il sera presque difficile de ne pas tomber dans les bras de morphée. L’espace y est appréciable et on bénéficie d’une excellente luminosité, chère à la marque avec ses grandes vitres de ¾ arrière et la large lunette de coffre. Ces places arrières sont choyées par la fameuse option Isother puisqu’une isolation supplémentaire est rajoutée sous la banquette.

Je jette un coup d’œil au tableau de bord depuis l’arrière. Il semble assez rudimentaire, mais mieux vaut passer à l’avant pour l’analyser de plus près. En accédant aux places avant, je remarque davantage les sièges habillés d’une sellerie en tissus à motifs écossais spécifiques à la Citroën CX Leader, very distinguished ! 

Derrière le volant de la Citroën CX, j’y découvre une planche de bord à la fois simple et novatrice. Si la console centrale est marquée d’une inscription CX encadrée bien en vue, de petits rangements et de grilles de ventilation placées bas, le poste de conduite de la Citroën CX est tout de suite plus captivant. Il est d’ailleurs le tableau de bord le plus futuriste de l’industrie automobile française sur cette phase I avec ses célèbre “lunules” et les différents “satellites de conduite” qui y sont accrochés, remplaçant les traditionnels commodos. Atypique à l’époque et encore aujourd’hui !

Les nombreux voyants et différents cadrans sur le tableau de bord de la Citroën CX donnent l’impression de remuer comme les rouleaux d’une machine à sous de casino au gré des informations attendues, il faut s’y habituer. Le design général de la planche de bord se montre clivant entre conducteur et passager mais reste néanmoins agréable et fonctionnel.

Dans le prolongement de la console centrale qui fait sa jonction, on trouve d’abord le levier de vitesse garni d’un simili-cuir noir avec la représentation à sa gauche des changements de rapports. De part et d’autre du levier sont placés les interrupteurs des fenêtres et en dessous de chacun.

Au centre, à droite du frein à main, sont logés les réglages de la ventilation qui prennent la forme de levier de commande type “bateau” avec, notons-le, le dessin de ce qui semble être un visage et celui d’un soulier pour régler la direction de l’air. Encore un trait de design original et décalé de la Citroën CX !
Pour terminer, on retrouve au bout de la console le levier pour ajuster la hauteur de caisse. 

Moteur : Follow the Leader 

On ouvre le capot de la Citroën CX Leader qui est maintenu par un double axe de levier avec une rotule et on découvre cet grand espace… bien occupé ! N’oublions pas que l’implantation mécanique de la CX était différent des projets initiaux. Normalement, c’est un Wankel de la Comotor qui aurait dû équiper la grande routière. Finalement, c’est une évolution du moteur de la DS, lui-même issu du moteur de la Traction, qu’on retrouve sous le capot.

La première Citroën CX Leader, de 1984, embarquait le 2 litres à carbus. En 1985 l’offre était plus large puisqu’on pouvait commander la Leader avec ce même moteur, deux diesels 2.5 litres (atmo et turbo) et le moteur qui équipe notre auto du jour.

Ce moteur, c’est le 2500 cm³ de 135ch, à Injection Electronique (d’où le Leader IE) multipoints Bosch et développe 211 Nm de couple à 4 000 tr/min. Ce moteur, c’est celui des Pallas IE, Prestige mais aussi de la GTI atmo, celle que que nous avions essayé par ici. Ainsi équipée la Citroën CX Leader accroche les 200 km/h !

Comme toutes les grandes Citroën, la Citroën CX est équipée de suspensions hydropneumatiques, son fonctionnement reste toujours sensiblement le même et sa praticité n’est plus à démontrée. 

Là où la Citroën CX se démarque encore une fois, c’est sur son architecture unique. Le châssis supporte toute la mécanique et les pare-chocs sont directement fixés à ses extrémités, ce qui lui confère une très bonne rigidité et une excellente tenue de route. C’est le moment de vérifier ça… 

Au volant de la Citroën CX Leader : On navigue sur un lac

Avant de monter à bord, j’avais déjà eu des échos, principalement de mon grand-père, du confort remarquable de la Citroën CX. Je dirais même plus, à peine croyable. Alors quand est venu ce moment où je pourrai enfin ressentir sa douceur de conduite tellement vantée, j’étais aussi impatient que curieux. 

Avant de m’installer à bord de la Citroën CX, on m’avertit de deux choses : la direction spécifique à Citroën, dite Diravi, héritée de la SM, est extrêmement sensible et précise. Il n’existe pas de liaison mécanique entre la direction et les roues, ce qui l’isole complètement du revêtement et l’état de la chaussée. Le volant doit être maintenu en permanence car il revient à son point milieu aussitôt qu’il est laché. La course de la pédale de frein est aussi très, très courte.

Instructions données, je m’assois au volant de la Citroën CX Leader. Sans avoir réglé quoique ce soit, je m’y sens tout de suite à l’aise. À ce moment-là déjà, une expérience commence. Le siège est ultra moelleux, le grand volant monobranche laisse une vue dégagée sur le tableau de bord, si propre à la Citroën CX avec ses compteurs “pèse-personne”, un autre nom qui leur va bien. Contacteur à gauche, à la manière Porsche, mais sans envie d’aller tâter des Hunaudières, je mets la Citroën CX en route. 

Je m’élance sur les routes escarpées de Bourgogne pour suivre notre ami Patrick, au volant de l’Alfa Romeo 164 QV, on vous en parlait dans notre essai précédent. 

Je réalise assez vite qu’il n’est pas utile de trop braquer le volant dans les virages, tant la direction est réactive. Je dois ensuite me concentrer sur la pédale de frein, je ne tenais pas à faire un arrêt brusque et il est vrai que sa course est limitée et que ça freine très fort et très vite. Je maîtrise assez rapidement son fonctionnement, finalement assez proche d’une voiture contemporaine, même si son ralentissement immédiat reste impressionnant. Je continue de sillonner les routes étroites à bonne allure, je tente de maintenir le rythme… V6 Busso vs 4 cylindres Citroën, c’est assez inégal comme match !

Le 2.5 L de la Citroën CX Leader est doux et souple, il s’élance sans discontinuer jusqu’à la vitesse souhaitée et ses 138 ch font largement l’affaire pour accélérer de manière confortable. D’ailleurs il le fait depuis n’importe quel rapport, sa grosse cylindrée permet d’avoir du couple assez bas et c’est un vrai plus pour l’agrément de conduite. Bien qu’il soit l’un des moteurs les plus puissants de la Citroën CX, il donne aujourd’hui presque l’impression de livrer au minimum ce qu’on attend d’une voiture de ce type. La boîte de vitesses qui lui est associée se gère sans difficulté, même si le retour des changements de rapports ne me semblait pas aussi précis que le reste. 

Pendant que je me concentrais sur ces différents éléments en plus de la route avec ses irrégularités et aux croisement assez justes, j’oubliais de prêter attention au confort de la Citroën CX Leader. C’est justement en l’oubliant que je réalise à quel point il est épatant. Toutes les aspérités de la route se font oublier, la Citroën CX Leader suit la trajectoire qu’on lui donne, sans être perturbée par l’état des routes secondaires du Charolais.

Pour autant, ne pensez pas à une voiture qui vire à plat. La CX reste sous-vireuse et prend du roulis. Plus on hausse le rythme, et avec ce moteur de GTI c’est finalement assez facile, plus c’est vrai. Ce comportement qui n’a rien de verrouillé est assez prévenant. Jamais je n’ai l’impression que la Citroën CX Leader ne va m’échapper, même quand je rentre fort dans un virage.

Après, il suffit de se rappeler qu’un simple effleurement de la pédale de frein suffit à remettre du poids sur le train avant, toujours dirigé parfaitement par le volant. Le réflexe de faire revenir le volant est assimilé et il faut bien cela vu le gabarit de l’auto et l’étroitesse des routes. Du coup, l’auto enroule parfaitement… et la 164 n’est pas si loin devant !

Après avoir saisi les subtilités de conduite de la Citroën CX Leader, je continue mon itinéraire jusqu’au point d’arrivée. À rythme plus classique je prends d’autant plus de plaisir à la conduire, la CX suit la route sans broncher et j’éprouve rapidement un grand sentiment de sécurité tant elle est maniable. Pourtant, clairement, les routes empruntées ne sont pas son terrain de jeu. Mais en a-t-elle vraiment un défini ?

Le soleil commence à s’estomper, laissant apparaître ses lueurs chaudes par-dessus les collines permettant d’apercevoir encore un peu la route car il faut le dire, les phares suffisent à peine. Je profite encore un peu du cadre bucolique et de l’excellent confort de la suspension hydraulique de la Citroën CX Leader avant de la ramener dans la cour de son propriétaire. J’en ressors conquis et ébahis ! 

Conclusion :

Conduire une Citroën CX Leader, ce n’est pas conduire n’importe quelle auto des années 80. Vous avez là le témoignage de quelqu’un qui n’avait jamais conduit de chevronnées de la grande époque. Si vous voulez connaître cette expérience, ou simplement la revivre, la CX est une parfaite auto.

La CX ? On va s’arrêter à la Leader. Ou alors une GTI, équivalente niveau perfs mais mieux dotée. Des autos atypiques, qui rouleront bien et longtemps et sauront à la fois vous divertir si vous le souhaitez ou simplement vous emmener d’un point à l’autre avec un certain confort… et sans se traîner !

Rouler en Citroën CX Leader

Rouler en CX ou rouler en Citroën CX Leader, ce n’est pas la même chose. Des CX, vous en trouverez. Des Leader… beaucoup moins. Impossible de trouver des chiffres exacts de production. Une chose est sûre, c’est une auto qui sera pour un coup de cœur ou alors pour un collectionneur voulant ajouter une série limitée à sa collection.

Finalement, ainsi motorisée, la Citroën CX Leader est une alternative à la GTI. Certes, vous n’aurez pas le sigle « magique » GTI apposé sur l’auto. Par contre, vous aurez une auto aussi performante et plus originale. Quand on met le tout dans la balance, on se retrouve avec des prix sensiblement identiques : autour des 8000 € pour cette auto. Évidemment vous trouverez des modèles fatigués ou d’autres CX pour moins cher.

Pour ce qui est à surveiller, une Citroën CX Leader reste une CX. La corrosion peut être problématique, même sur les autos d’après 1980 et traitées par cataphorèse. Ensuite il faudra surveiller le moteur. Si le bougre est robuste, ces grandes routières ont accumulé les kilomètres et leur cote n’a pas toujours justifié un entretien aux petits oignons. N’oubliez pas de vérifier la santé du système hydropneumatique dont la réfection est coûteuse. Et prévoyez un budget carburant conséquent, il n’y a que 4 cylindres, mais ils ne laissent pas leur part de sans-plomb aux chiens.

Merci à Patrick de Classic Car Charolais pour l’essai de cette auto pas si connue.