Concepts et Études, ép. 42 : Probe 16, instant culture

Parce que toutes les autos anciennes ne sont pas arrivées sur nos routes, on vous propose d’en découvrir régulièrement. Rendez-vous pour cela le troisième dimanche de chaque mois (les autres sont là). Ce mois-ci, nous allons à nouveau aborder une voiture aperçue au Salon de Brimingham. Penchons-nous sur la Probe 16.

Explorer de nouveaux horizons

Tout commence chez Marcos, en quelque sorte. Les frères Dennis et Peter Adams rejoignent le petit constructeur anglais après le départ de Frank Costin (qui va plancher sur la Costin-Nathan qui courra au Mans quelques années plus tard). La paire est complémentaire, Dennis au crayon, Peter à la planche à dessin, et c’est grâce à eux que nait la Marcos GT, qui va être le dessin phare de la marque pendant plus de 30 ans.

En parallèle de leurs activité chez Marcos, ils vont se lancer dans des études plus radicales, via leur entreprise Adams Brothers. Le but est de pousser le design à son paroxysme, et ce n’est pas par hasard que les modèles produits par la petite entité prennent le nom de Probe (sonde, en anglais).

Après une Probe 15 qui restera sans suite. Les deux frères vont lancer la fabrication de la voiture qui nous intéresse aujourd’hui, la Probe 16. Comme sa devancière, la voiture est un coupé à moteur central au design pour le moins radical, certes moins épuré que la Stratos Zero que nous avons abordée le mois dernier, mais pas moins accrocheur.

Sous ces courbes multiples, se cache un treillis tubulaire qui accueille un moteur d’Austin1800. Ce dernier a été retravaillé par JanSpeed Engineering, le faisant monter à 100 chevaux, une puissance tout à fait honorable, d’autant plus que la Probe 16 ne pèse que 900 kg.

Les passagers se retrouvent dans une position très allongée, sous cette grande bulle de verre et l’ensemble est rendu encore plus agressif avec les jantes de taille différente entre l’avant (en 10 pouces) et l’arrière (en 13 pouces).

Star de cinéma

Si la Probe 16 ou les frères Adams ne sont pas les plus connus de l’histoire automobile, la voiture connaitra son heure de gloire sous le nom de Durango 95. C’est en effet la voiture volée par Alex DeLarge et sa bande dans le film Orange Mécanique de Stanley Kubrick.

Je ne m’étendrai pas beaucoup plus sur ce film, car d’une part, l’œuvre de Kubrick n’est clairement pas ma tasse de thé (sa vision du monde me met mal à l’aise) et, d’autre part, je ne suis ni critique de cinéma, ni assez « tectuel » pour m’étendre sur le sujet.

La Probe 16 de nos jours

Adams Brothers a produit trois Probe 16 et on a réussi à les suivre jusqu’à aujourd’hui, même si les détails ne sont pas toujours clairs, voire extrêmement variables selon les sources. Prenez donc des pincettes avec ce que je vous annonce ici, j’ai pris pour vraies les informations que j’ai pu recouper au moins deux fois.

La première, châssis AB/2 (bleue, intérieur noir) a servi de support de promotion, notamment en faisant la une du Telegraph. C’est la seule Probe 16 avec le volant à gauche, car elle a été construite pour le compositeur Jim Webb. Après avoir été exposée au salon de l’auto de Montréal 1969-1970, a voiture a fini dans un état d’abandon avancé, avant d’être retrouvée dans les années 80, plus proche de l’épave que de la base de restauration.

La seconde, châssis AB/3 (rouge, intérieur noir, et surtout logo Adams Brothers sur le capot avant) a été fabriquée pour le bassiste du groupe Cream, Jack Bruce. Elle a été exposée à Earls Court en 1969 et a gagné un prix de style. Elle est ensuite passée entre les mains du batteur du groupe Mountain, Corky Laing, qui a eu quelques soucis pour s’en servir dans les rues de Montréal, avec sa faible garde au sol. Il la cédera à un professeur de mécanique de Montréal.

Par la suite, les Probe 16 AB/2 et AB/3 se sont retrouvées entre les mains d’un collectionneur canadien qui va les restaurer toutes les deux avant de vendre AB/2 à un collectionneur anglais en 2016. AB/3 a été pendant longtemps exposée au Petersen Museum devenue orange, avant d’être vendue à un collectionneur privé pour 180 000 dollars il y a quelques années.

Reste AB/4, la voiture d’Orange Mécanique. Elle a commencé sa vie, en gris, avec un intérieur rouge. Elle a été achetée par Robin Gibbons, qui la prêta à la production du film. Par la suite elle finit exposée au Pollock Auto Showcase en Pennsylvanie. En 1987, elle est de retour au Royaume-Uni, cette fois-ci, jaune, et en très piteux état. Elle fait une apparition, toujours délabré dans Top Gear en 2004, participant à un concours permettant au gagnant de faire restaurer sa voiture. Depuis elle a subi une restauration complète chez Club Autosport, passant à l’orange, et elle fait le tour des expositions, dont, le Salon de Birmingham en novembre dernier.