Au volant d’une Opel Diplomat, une limousine allemande à l’âme américaine

Publié le par Benjamin

Au volant d’une Opel Diplomat, une limousine allemande à l’âme américaine

Dans le genre mouton à 5 pattes, cette grosse allemande se pose là. De nos jours, voir une grosse limousine avec un moteur qui ferait des merveilles sous le capot d’une sportive, c’est finalement courant. Dans les années 60 ou 70, c’était plus rare. Audi était alors absent du créneau mais on trouvait alors un autre représentant allemand : Opel. Oui, Opel et gros moteur ça fait bizarre mais c’est bien ce qui caractérise l’Opel Diplomat. On vous emmène la découvrir avec nous et surtout, tailler la route au son d’un V8 (et oui !).

Notre Opel Diplomat du jour

Cette auto de 1977 est une des toutes dernières du genre. Après elle, le blitz redeviendra plus sage avec la Senator avant de carrément abandonner le segment à ses concurrents germaniques. Pourtant la Diplomat c’est tout un pan de l’histoire d’Opel né avec les Kapitän et Admiral, dès avant la guerre et perpétué par une première génération « A » de Kapitän-Admiral-Diplomat en 1964 puis renouvelée avec les « B » en 1969.

C’est à cette génération que notre Opel Diplomat du jour appartient. Vous l’aurez compris, c’est la plus haut de gamme des trois grosses berlines de la marque. Et côté GROSSE berline, il suffit de la regarder pour comprendre. Ses dimensions sont celles d’une limousine avec 4,9m de long. Surtout, ce qui impressionne c’est qu’elle est plutôt basse (1,44m) et très large (1,85m). Un beau bébé d’autant plus voyant avec ce coloris jaune.

Cette version haut de gamme de la bande ne se distingue pas par ses dimensions mais elle était reconnaissable dans la gamme avec une face avant différente des Kapitän et Admiral (d’ailleurs l’histoire de ces trois autos est ici). Les trois voitures reprenaient un style très américain avec des lignes tendues et massives. Mais les deux autres proposaient des feux rectangulaires, dans la droite ligne des autos de la génération précédente.

L’Opel Diplomat affichaient donc une face avant différente avec ces deux phares verticaux, rejetés aux coins des ailes et légèrement inclinés vers l’avant. Sous le gros pare-chocs chromé et barré par du caoutchouc, aux formes torturées pour suivre le dessin de la calandre en pointe et des ailes, on prolonge d’ailleurs les feux avec des projecteurs supplémentaires. On retrouve également une prise d’air et les butoirs, situés sous le pare-chocs et ça c’est original.

Pour en ajouter côté luxe, en plus de la débauche de chrome, les feux supplémentaires ronds sont parfaits tandis que l’Opel Diplomat se pare également d’essuie-phares, l’accessoire ultime des voitures haut de gamme de l’époque.

Le profil de l’Opel Diplomat fait massif, lui aussi. C’est surtout dû à l’absence totale de lignes courbes. Même les passages de roues, qui accueillent forcément des roues alliage, haut de gamme oblige, ne sont pas ronds. Au milieu de la caisse, la baguette est strictement rectiligne et un léger pli, lui aussi droit, ainsi qu’une ultime baguette de bas de caisse renforcent le tout.

Pour autant, pas d’impression de lourdeur sur l’Opel Diplomat. Le capot est long mais le porte-à-faux arrière est bien plus grand que celui de l’avant. Cela donne un certain dynamisme à ce profil et ferait presque oublier les dimensions de la limousine au blitz.

Peu d’ornements sur ce flanc avec seulement le petit logo V8 sur le bas de l’aile avant et des poignées de porte très fines. Reste le toit et le montant de custode. Dans la plus pure tradition américaine, rappelons au cas où qu’Opel appartient en majorité à GM depuis 1929, l’Opel Diplomat expose un toit en vinyle noir qui accentue encore le jaune du reste de la carrosserie.

L’arrière est certainement le point le moins marquant pour cette Opel Diplomat. Comme à l’avant, on retrouve des feux verticaux qui encadrent cet arrière qui reprend d’ailleurs la légère pointe entrevue à l’avant. Le pare-chocs suit ces courbes et, une nouvelle fois, les butoirs sont placés en-dessous. La malle est grosse, c’est du classique dans cette catégorie.

Etonnamment, aucun logo Opel sur cet arrière. À gauche on retrouve un monogramme Automatic tandis qu’à droite il est inscrit Diplomat 5.4 et c’est d’ailleurs souligné avec les deux sorties d’échappement qu’on retrouve tout en bas.

En bref, on retrouve avec ce design ce qu’on attend d’une limousine allemande : pas de prise de risque stylistique et une présence statutaire. D’un autre côté on ajoute des lignes et un esprit américain qui devait séduire l’européen qui ne souhaitait pas sauter le pas en s’achetant une Cadillac.

Technique : le plus de Détroit

Vous l’aurez compris, le V8, c’est LE plus de l’Opel Diplomat. C’était d’ailleurs la seule motorisation disponible au lancement de la Diplomat A en 1964 (283ci). Mais très vite, alors qu’on proposait de nouveaux 6 en ligne sur le reste de la gamme, l’Opel Diplomat va pouvoir recevoir, d’abord sur la version coupé puis sur la berline, le V8 327ci.

Ce V8 327ci est repris sur notre Opel Diplomat B (qui peut aussi recevoir un 6 en ligne 2,8L mais la version à Injection). Ce moteur… c’est tout simplement celui qu’on trouvait (en 1964) sur la Chevrolet Corvette. Bien que la sportive de GM l’ait abandonné, il reste utilisé dans les différentes production du groupe.

Pour traduire et comme on l’a déjà vu sur la carrosserie, 327ci cela fait 5,4 litres. Une grosse cylindrée qui pourrait signifier une énorme puissance. Sauf que c’est ici une version « smooth » du small block qu’on utilise avec 230ch. Par contre on a quand même 427Nm de couple. L’Opel Diplomat n’est pas une sportive et ça se traduit notamment au niveau de la boîte. C’est évidemment une boîte auto, une Turbo-Hydramatic dont on n’attend pas vraiment de merveilles.

Sur le reste de la technique, on note des évolutions par rapport à l’Opel Diplomat A côté carrosserie avec des panneaux galvanisés. On ajoute aussi l’utilisation d’un pont De Dion à la place du pont rigide. Par contre, c’est lourd et on est à 1790kg sur la balance ! Pour le côté sécurité, on note qu’Opel a inclus des zones de déformation sur la carrosserie et on a doublé le circuit de freinage. Sur notre grosse Opel Diplomat, il agit sur des freins à disques ventilés à l’avant et à l’arrière.

Intérieur : luxe, forcément

Si l’Opel Diplomat se montre au top côté moteur, pour réussir à contrer les Mercedes, il ne faut pas lésiner côté intérieur. Et notre Opel ne se laisse pas abattre sur ce point.

Alors la sellerie des sièges avant n’est pas d’origine, il faut regarder à l’arrière pour découvrir le velours d’origine. D’ailleurs, tant qu’on est à l’arrière, on apprécie l’espace aux jambes. Si il n’était pas suffisant, le client pouvait d’ailleurs acheté une version rallongée avec 15cm d’empattement en plus. On retrouve aussi un accoudoir central basculant, des vitres électriques et, comme toute voiture de luxe de ces années 70, des cendriers pour chaque passager !

Retour à l’avant. La planche de bord est simple (jusque dans son dessin apparu sur le tard en 1976) avec un tachymètre, deux aiguilles pour le réservoir et la température d’eau et une grosse montre. Sur la droite on retrouve l’autoradio (dont l’antenne est intégrée au pare-brise). La plupart des boutons est située juste en-dessous de la casquette du tableau de bord.

On ajoute évidemment le gros levier de la boîte auto et les quatre boutons servant aux vitres électriques. Si on retrouve des manivelles sur les portières de l’Opel Diplomat, elles ne servent qu’aux déflecteurs. Du côté des autres équipements, notre allemande reçoit un toit ouvrant.

Une voiture aux belles prestations… maintenant, il fallait encore être à la hauteur sur la route. On va voir ça.

Au volant de l’Opel Diplomat B

Le cuir des sièges a beau ne pas être d’origine, il flatte bien le conducteur qui s’y assoit. Il faut un peu de force pour refermer la porte, bien lourde. Vient ensuite le réglage de la position de conduite. Ce n’est pas une Alpine, il y a de la place et je trouve vite ma position.

C’est ensuite que je démarre le moteur. Démarrer un V8 américain, même un « small » block ça donne envie. Gros moteur, ça doit faire du bruit non ? Raté. On est dans une limousine. On entend le ronronnement du 5,4 litres au ralenti, c’est vrai, mais c’est vraiment très feutré. Les propriétaires d’une Opel Diplomat avec un 6 en ligne sous le capot devaient se demander si le moteur était vraiment en route !

La boîte auto est passée sur D, c’est le moment de lever le pied du frein et d’accélérer. J’ai pris soin de bien caler mon pied. L’accélérateur au plancher n’est pas si courant et j’avoue que je suis étonné de le retrouver dans une voiture comme cette Opel Diplomat. Les presque deux tonnes de l’allemande s’ébrouent et c’est parti pour un peu de roulage.

On commence dans un village. Un petit village alsacien à la chaussée agréable mais pas forcément très large. Finalement, ce n’est pas si commun de s’installer au volant d’une voiture des années 70 qui a un gabarit qu’on peut aisément rapprocher de celui d’un SUV moderne, la hauteur en moins. Néanmoins, il faut bien viser quand on croise un de ces SUV en plein village.

L’autre test que passe l’Opel Diplomat en plein village, c’est celui des ralentisseurs. Un vrai test auquel aucune ancienne ne peut se défiler, sur les routes du XXIe siècle en tout cas. L’Opel s’en sort bien… mais il faut dire que je passe à la vitesse d’un escargot à peine dopé. Les suspensions font leur boulot mais on sent bien qu’elles ont fort à faire avec les deux tonnes de l’engin remuées par ces obstacles souvent hors-normes.

Voilà qu’on sort du village. C’est assez idiot d’essayer une Alpine sur une 2×2… et c’est l’équivalent qui nous attend puisqu’on attaque un col au volant de l’Opel Diplomat ! L’allemande ne tarde pas trop à montrer qu’elle n’est pas spécialement à l’aise. Le gabarit est un des problèmes quand il s’agit de viser la corde mais le souci numéro 1 reste le poids pachydermique de notre voiture du jour.

Le poids élargit les trajectoires et puis le feeling de la direction est à l’image de la ligne de l’auto : très américain. Le volant de l’Opel Diplomat est de bonne taille et tourne facilement mais peut-être trop facilement justement. Surtout, les retours d’informations sont aussi rares que ces berlines sur nos routes. Autant vous dire qu’on navigue à vue et naviguer est certainement le bon mot.

Le freinage n’aide pas franchement. D’accord, Opel a doté ses Diplomat B de freins à disques ventilés. Mais le poids reste important et l’efficacité du système est du coup très relative. Sans qu’on se fasse vraiment peur, c’est certain que ce n’est pas l’auto la plus rassurante au moment où on se rend compte qu’on a été un poil optimiste en attaquant le virage.

Dans ces virages en montée, pas vraiment le temps de tirer dans le moteur… mais le temps de se rendre compte qu’il est vraiment muselé. Certes, son couple est appréciable et c’est vrai que l’Opel Diplomat grimpe finalement à une bonne vitesse. À bas régime, ça reprend bien, sans pour autant nous coller au siège hein. Mais ensuite, alors qu’on penserait que le moteur va pousser un peu plus… c’est le néant. La fiche technique affiche bien 230ch et ils sont probablement presque tous présents (modulo le poids des ans). Mais alors ces canassons sont des bêtes de somme, pas des pur sangs. Impossible de faire une grosse mise en vitesse sur des distances aussi courtes.

Pour en revenir à l’Alpine en 2×2 voies, l’Opel Diplomat n’est pas une voiture de cols et heureusement, une fois les photos mises dans la boîte, on retrouve la vallée. Sur la descente, assez étonnamment les freins n’ont pas faibli malgré le poids. Mais même avec la pente, pas moyen de réussir à prendre vraiment de la vitesse.

Sur le plat, ça va changer. Forcément on sollicite moins les freins. Et les routes proposent des virages plus doux ce qui évite de trop râler sur le feeling de la direction. Et puis on se dit que c’est certainement là que le V8 de Corvette va enfin pouvoir s’exprimer. Je vous le dis de suite : NON. Lors d’une sortie de village, avec une route claire devant moi j’appuie à fond sur l’accélérateur… et j’ai l’impression d’avoir mal mis mon pied sur la pédale au plancher. Un rond point plus tard… même chose.

On sent le moteur volontaire. La reprise est là, même si la lenteur de la boîte pénalise l’Opel Diplomat sur cet exercice. Et au moment d’accélérer franchement, on se demande vraiment comment pouvait faire la Corvette. D’accord, la sportive pèse bien moins lourd et n’avait pas la même boîte. Mais clairement notre limousine du jour n’a rien de dynamique. La vitesse monte, mais sans affoler les chronos. Seul indice qu’on attaque un peu : le son du moteur est un peu plus présent. Après, du côté de la concurrence, une Mercedes 350 ou 450 SEL ne faisait pas vraiment mieux niveau dynamisme.

Mais est-ce vraiment ça qu’on demande à une Opel Diplomat ? Probablement pas. On lui demandait surtout d’être une voyageuse. Une routière et une autoroutière confortable. Et finalement, même si on s’en serait douté, elle y arrive très bien. Une fois la route libérée de ses ronds-points et villages nids à ralentisseurs, l’allemande abat les kilomètres avec facilité. Le moteur ronronne, on s’enfonce mollement dans le siège et on apprécie le confort. Il n’y a finalement qu’une aiguille de conso instantanée qui pourrait venir apporter une ombre à ce tableau.

On oublie le V8 et on roule. On roule et on avance à un bon rythme. L’Opel Diplomat est impériale mais finalement toute l’originalité qu’on peut lui trouver sur le papier s’évapore sur la route. Dommage… mais ça n’empêche pas de rouler.

Conclusion

Même en collant un éclair sur un pachyderme ou en lui collant un moteur de sportive, il est difficile de faire des miracles. L’Opel Diplomat est une auto qui flatte plus qu’elle n’épate. Avec elle, l’amateur de voiture américaine n’avait pas besoin de fouiner à la recherche d’une Cadillac. La ligne, le côté imposant et statutaire et même le moteur, tout était réuni pour avoir une voiture qui serait plus originale qu’une Mercedes.

Pour autant, il ne fallait pas trop s’enflammer. De la Corvette, elle n’en avait que le moteur (et 15 ans plus tard). De la Cadillac, elle en avait surtout la ligne même si niveau confort, équipement et finitions elle avait son mot à dire… mais gardait un éclair sur la pointe de la calandre.

Les plus de l’Opel DiplomatLes moins de l’Opel Diplomat
Très originaleMolle malgré son V8
Un parfum d’amériqueLourde, très lourde
Un V8 coupleuxPas facile de trouver des pièces
Le confort au rendez-vous
Opel Diplomat : les notes
Fiche techniqueOpel Diplomat B
Années1969-1977
Mécanique
Architecture8 cylindres en V
Cylindrée5354 cm³
AlimentationCarburateur Quadruple Corps
Soupapes16
Puissance Max230ch à 4700 trs/min
Couple Max427Nm à 3200 trs/min
Boîte de VitesseAutomatique à 3 rapports
TransmissionPropulsion
Châssis
Position MoteurLongitudinale Avant
FreinageDisques Ventilés AV et AR
VoiesAV 1430 mm / AR 1430 mm
Empattement2845 mm
Dimensions L x l x h4920 x 1852 x 1445 mm
Poids (relevé)1790 kg
Performances
Vmax Mesurée200 km/h
0 à 100 km/h9,9s
400m d.a16,7s
1000m d.a30,7s
Poids/Puissance7,78 kg/ch
Conso Mixte± 14 litres / 100km
Conso Sportive± 26 litres / 100 km
Prix± 10.000 €
Cote Collector Car Value

Conduire une Opel Diplomat

Si elle vous a tapé dans l’œil, va falloir commencer à chercher et ça peut durer longtemps. Fort logiquement, l’Opel Diplomat est une rareté en France. En plus de cette jaune, Xavier en aperçoit une de temps en temps du côté de Toulouse mais on en voit très peu, il y en aurait moins de 50 chez nous. Elle est plus courante en Allemagne et encore, courante est un bien grand mot et il faudra chercher… d’autant que l’état sera particulièrement important.

L’Opel Diplomat est la moins courante de la triplette Kapitän-Admiral-Diplomat et comme elle a les plus gros moteurs et les meilleurs équipements, c’est logiquement la plus chère. Pour autant elle n’est pas bien haut dans la cote. Un modèle roulant sera aux alentours des 8500-9000€ tandis que les plus belles iront chercher au-delà des 15.000€ mais elles devront être parfaites. Notez que la version 6 cylindres permet de faire une économie d’au moins 30%… mais n’est pas forcément plus simple à trouver.

En effet, l’auto étant rare et peu produite, si on trouve facilement les pièces pour le V8, pour le reste il va falloir chercher. L’intérieur, le toit vinyle, tout peut être compliqué à trouver. Heureusement que les tôles sont galvanisées, ça évite que la carrosserie soit trop attaquée mais il reste la structure qui peut avoir connu plus de soucis.

Un énorme merci à Maxime qui nous a proposé cet essai insolite. Si vous voulez en faire autant, n’hésitez pas à nous contacter.

Benjamin

http://newsdanciennes.com

Passionné d'automobile ancienne, il a créé News d'Anciennes en 2013 à force de se balader sur les salons sans savoir quoi faire de ses photos. Conducteur occasionnel de Simca 1100 il adore conduire les voitures des autres, dès qu'elles sont un peu plus rapides !

Commentaires

  1. Philippe CENTA

    Du temps où Opel frôlait le premium.
    Diplomat, Commodore B, Monza, Senator puis … des Daewoo, des Suzuki etc … la chute.

    Répondre · · 5 août 2024 à 19 h 09 min

  2. Paulet

    L’Opel Diplomat de cet essai a eu une peinture refaite non d’origine. La référence de la
    peinture « Gold » est celle que l’on peut voir dans le compartiment moteur.

    La Sénator qui a suivi en 1978 a été un ratage esthétique avec un « replâtrage » pas du meilleur effet.

    Bravo pour cet essai très complet, et longue vie aux Opel KAD série B !

    Répondre · · 8 août 2024 à 15 h 05 min

Répondre à Philippe CENTAAnnuler la réponse.

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