Musée Simca du Diamant, les hirondelles des tropiques

Publié le par Hugues Desoize

Musée Simca du Diamant, les hirondelles des tropiques

On le sait tous, les hirondelles sont des voyageuses infatigables. J’en ai pour preuve un nid trouvé à plus de 6500 Km de Nanterre et de Poissy, tout au sud de cette magnifique île des Caraïbes qu’est La Martinique. Le Musée Simca du Diamant, est un lieu à part. Plus qu’un musée conventionnel, c’est un endroit ou on honore la mémoire d’un constructeur Français disparu, la Société Industrielle de Mécanique et de Carrosserie Automobile. Vous y trouverez des véhicules bien sûr mais surtout, quantité de documents d’époque. Des anecdotes pour la plupart inconnues même des plus érudits d’entre nous. Passons la porte et remontons le temps, au temps des Hirondelles reines de la route.

Un nid haut perché

Il est vrai, qu’il faut chercher l’endroit. Perchée sur les hauteur d’un morne, se trouve l’habitation de Mr Christian Gallet de Saint Aurin, fondateur du musée Simca du Diamant. A mi-chemin, presque à flan de colline, se trouve un bâtiment abritant le musée. Véritable gardien des clés au sens propre comme au figuré, Christian a travaillé pour le concessionnaire Simca de La Martinique de 1948 à 1969.

Témoin oculaire de l’activité du constructeur, son témoignage est particulièrement édifiant, tant il est précis et animé. Des origines au final funeste de la marque, notre homme partage sa passion sans retenue, répond à toutes les questions. J’ai rencontré deux fois Mr Gallet de Saint Aurin, à chacune de mes visites, je suis sorti comblé. Ses multiples anecdotes permettent de relier entres elles toutes les informations glanées au fil du temps sur nos chers modèles.

Un musée différent des autres

Ne cherchez pas au musée Simca du Diamant, une collection de grande ampleur où les véhicules tous rutilants sont alignés par période ou par type de carrosserie, le tout dans un bâtiment majestueux comme le sont les habitations des « békés » d’autrefois. La richesse de la collection est ailleurs.

Véhicules, documents, panneaux d’informations et surtout les commentaires de Mr Gallet forment un tout. Les voitures illustrent le propos et lui donne le relief nécessaire mais finalement ne constituent pas le cœur du musée. Le musée « rétromobile » du Diamant, comme l’appelle Christian, à été conçu afin de partager l’intégralité de l’histoire de Simca.

La vingtaine de véhicules présentés au Musée Simca du Diamant sont représentatif des années fastes, de la Simca/Fiat Topolino à la 1100. Il fût un temps ou la collection dépassait les 40 véhicules mais faute de moyens nécessaires et sans espoir de transmettre le musée à un membre de sa famille, Mr Gallet à réorienté sa collection sur les modèles qui illustraient le mieux l’historique de Simca.

Précisons tout de même que pour le propriétaire du musée Simca du Diamant, la passion ne s’achète pas, il ne fait donc pas payer de droit d’entrée. Cependant, vous n’échapperez pas à la rédaction de votre commentaire dans son livre d’or.

Toute l’histoire Simca, mais aussi de quelques autres acteurs

Comment parler de Simca sans évoquer d’autres constructeurs qui font des apparitions dans cette fabuleuse aventure industrielle. C’est bien cette histoire complexe qui est illustrée au Musée Simca du Diamant.

Tout d’abord évidemment, il y a FIAT. La Fabrique Italienne des Automobiles de Turin est à l’origine de Simca. Le succès de la 508C « Balilla » poussa le bouillonnant sénateur Agnelli, président de Fiat (judicieusement conseillé par un de ses collaborateur, M. Téodoro Giuseppe Bartoloméo Pigozzi,) à faire disparaître la SAFAF, Société Anonyme Française des Automobiles Fiat (1926).

L’objet de cette dernière étant de distribuer on l’aura compris des Fiat sur le territoire Français. Une nouvelle entité nommée Simca vit le jour, afin d’assembler les véhicules en France et ainsi, échapper aux taxes sur les véhicules étrangers importés. Les taxes douanière étaient devenues, dans un contexte historique « tendu », exorbitantes.

La mort d’une histoire donnant la vie à une autre (clin d’œil à Jackie Quartz), la mise à mort des automobiles Donnet-Zedel permit à Mr Agnelli de louer dans un premier temps en 1934 le site de Nanterre et de l’équiper progressivement à la pointe de la technologie de l’époque. La « Ballila » devient ainsi Simca 6cv et « l’Ardita 2000 » la SIMCA 11cv (l’essai ici). En 1936 l’usine est prête à produire en volume conséquent un petit modèle économique issu de Fiat 500 « Topolino » (petit rat), la célèbre Simca 5 (son histoire), que l’on considère comme la première Simca. Tout ceci est abondamment illustré au musée Simca du Diamant et magistralement conté par Mr Gallet de Saint Aurin.

Simca 5 au Musée Simca du Diamant

Mais que fait une Jeep (Hotchkiss) à l’entrée du musée Simca du Diamant ? Vous y apprendrez comment H. T. Pigozzi, en quelques minutes à répondu après-guerre à un appel d’offre de l’armée Américaine concernant le reconditionnement de moteurs de la célèbre baroudeuse. L’usine de Nanterre ayant été miraculeusement épargnée par les bombardements, ce marché permettra à Simca de redémarrer les machines et faire rentrer de l’argent plus rapidement que bien des concurrents.

Simca Musee 8306- musée SIMCA du Diamant

Des histoires singulières

Même si la collection du musée Simca du Diamant s’est allégée de bien des pièces, Christian Gallet de Saint Aurin à conservé les modèles les plus représentatifs de la marque à son sens. N’hésitez pas à le questionner sur la présence de chaque modèle, vous obtiendrez ainsi des informations bien étonnantes.

Prenons par exemple, l’histoire de cette Aronde P60 Etoile (infos ici) avec 30 Kilomètres au compteur. Version appelée ici Etoile « outre-mer », c’est en fait une 7cv. En effet au tout départ, la P60 Etoile était disponible en 6cv uniquement. Etonné par le manque d’enthousiasme du distributeur Martiniquais pour ce modèle, le responsable Simca du secteur fît ce qu’il pu pour dynamiser ses troupes. Refus catégorique de Mr Gallet, les Super Deluxe 7cv continueront de faire l’affaire. Celles-ci, bien que dépassées, étaient équipées d’un moteur de 48cv et non de 40cv, plus adapté à la topographie Martiniquaise. Compte tenu de mon expérience, je veux bien le croire !

C’est ainsi que la gamme Etoile ne mit les roues en Martinique qu’à partir d’Octobre 1959, lorsqu’elle fût enfin disponible en 7cv fiscaux et 48cv réels. Le modèle qui nous est présenté au musée Simca du Diamant à été vendu neuf à un fonctionnaire par Christian Gallet.

L’homme acheta le véhicule non pas par besoin, mais pour faire cesser les railleries de ses collègues à son égard, car il ne possédait pas d’automobile et dans cette période des « 30 glorieuses », une auto dans le garage était un symbole de réussite sociale. Bref, la voiture fût livrée au client, baptisée par Mr le curé de Balata (eh oui, il fût une époque où une assurance c’était nécessaire, mais pas suffisant) et remisée au garage par Mr Gallet lui même car le client était peu à l’aise avec les manœuvres.

Plus de cinquante ans après, c’est notre hôte qui, contacté par la famille, vint la chercher suite au décès de son propriétaire et la fit entrer au Musée Simca du Diamant. Belle histoire non ?

Et si vous êtes amateur de belles histoires, interrogez donc Mr Gallet sur les circonstances qui ont permis l’entrée de la Simca 5 dans la collection du musée Simca du Diamant ou bien encore, comment les Vedettes Présidence entrèrent au palais de l’Elysée ». Et bien d’autres encore.

Simca Versaille 8254- musée SIMCA du Diamant

Musée privé pour certain, véritable temple pour d’autre

Pour résumer, simple curieux, amateur d’histoires et d’automobiles ou bien inconditionnel de la marque, à la limite de l’internement en établissement spécialisé (ne rigolez pas, ils se reconnaîtront), ne quittez pas l’île aux fleurs sans avoir appelé Christian Gallet de Saint Aurin (les infos ici) pour savoir s’il peux vous recevoir au Musée Simca du Diamant. Et si ce n’est pas possible, il ne faut pas lui en vouloir car l’homme est d’un âge certain.

En ce qui me concerne, c’est bien loin de chez moi que j’ai trouvé un jour, un temple, un peu isolé, sur les flans d’une colline verdoyante. À l’intérieur, un passeur d’histoire faisant vivre la mémoire et l’histoire des hirondelles des tropiques, pour notre plus grand plaisir. Un immense merci à Mr Christian Gallet de Saint Aurin pour son accueil et sa disponibilité.

Un dernier petit tour avant de quitter le Musée Simca du Diamant :

Hugues Desoize

Breton et collectionneur, dans l'automobile au jour le jour, Hugues se rend sur les rassemblement en Simca ou en Solex et vous les fait vivre sur News d'Anciennes depuis l'été 2021.

Commentaires

  1. Michel MAES

    Magnifique reportage, belles photos et textes.
    Amicalement
    M M Belgique

    Répondre · · 31 juillet 2023 à 18 h 19 min

  2. Gougnard

    tres interessant ce reportage sur les Simca merci Hugues

    Répondre · · 31 juillet 2023 à 18 h 42 min

  3. Fredsimca

    Il me semble que beaucoup de voiture on été vendu, je dois en avoir une a côté de chez moi ,pas très courante qui roule peu.

    Répondre · · 1 août 2023 à 9 h 19 min

    1. Ladé

      Bonjour Fred, effectivement la collection de CGSA a été démantelée il y a à peu prêt une dizaine d’année. A part la 8 sport cab qui est en aquitaine, on ne sait pas ce qu’elles sont devenues. J’aimerai bien savoir où se trouve la Figoni Florida, car je recense les survivantes.

      Répondre · · 4 août 2023 à 16 h 19 min

  4. tourneux

    C’est tellement inattendu un musée Simca aux Antilles ! belle histoire humaine authentique !
    Merci Hugues ! quelle équipe à News d’Anciennes !

    Répondre · · 1 août 2023 à 10 h 14 min

  5. Francois Vignaud

    Félicitations d’avoir sauvegardé ce patrimoine ! J’ai 69 ans et j’aime les SIMCA
    depuis l’enfance, la voiture de notre famille
    était une Aronde 1956 commerciale, dans
    laquelle nous montions à 13 enfants avec
    mon père au volant !

    Répondre · · 2 août 2023 à 8 h 25 min

  6. Loirat

    Pour l’avoir visité il y a quelques années c’est magnifique, d’autant que j’ai eu la « chance » de travailler pendant 9 années dans une concession SIMCA de 1972 à 1981. Les commentaires du maître des lieux sont à ravir. Il connaît parfaitemnt l’historique de la marque.
    Respect pour son fabuleux travail…

    Répondre · · 2 août 2023 à 17 h 27 min

  7. Jean Luc Buhant

    Super reportage

    Répondre · · 2 août 2023 à 18 h 30 min

  8. Daniel Trousselier

    Pas de mot,simplement magique et magnifique.

    Répondre · · 2 août 2023 à 20 h 11 min

  9. Marc Bergin

    J’ai eu l’occasion en temps que passionné de SIMCA, de le visiter plusieurs fois ce musée et je ne me lasse pas des commentaires que Monsieur Christian Galet de Saint Aubin nous prodige.
    Un livre vivant et qui fait vivre cette marque aujourd’hui disparue.
    Merci Monsieur.

    Répondre · · 2 août 2023 à 21 h 07 min

  10. Lafayolle

    Merveilleux et bravo, car nous avons sur St Étienne (42) le SIMCA and Co LEGEND, Nous espérons faire vivre ces Marques encore longtemps

    Répondre · · 4 août 2023 à 11 h 13 min

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