Quand on pense aux voitures anciennes américaines, les Mustang et autres Corvette viennent vite à l’esprit. C’est vrai qu’en Europe les berlines de Détroit sont bien moins connues, au point qu’on a vite des à priori. Voitures énormes, gros V8, comportement indolent et une conduite complètement inadaptée aux routes du vieux continent, bref des idées qu’on associe vite aux gros paquebots des années 50 et 60. Sauf que notre Buick Electra du jour est de 1975. Pour autant, elle reprend pas mal de caractéristiques évoquées plus haut. Est-ce que le conservatisme américain fait qu’avec quelques années de moins le comportement sera le même ? C’est le but de notre essai !
Notre Buick Electra 1975 du jour
Une chose est sûre : on ne va pas la confondre avec une citadine japonaise ! Son gabarit est impressionnant et tout en elle respire l’Amérique les USA (pardon pour nos amis canadiens). On vous l’a dit, c’est cependant une auto des années 70, une époque bien moins connue des amateurs de voitures anciennes… alors que dire des profanes !
Mais ce gabarit typique des berlines full-size, cette ligne carrée sans autre recherche que la stature et ces chromes qui font tout de même de la résistance suffisent à la classer dans la bonne case, pour son origine ou même son usage.

Quand on rentre dans le détail, on doit bien avouer qu’il n’est pas facile de trouver une ligne directrice qui permette d’identifier une Buick Electra 75. Encore faudrait-il connaître les autres me direz-vous et vous marqueriez un bon point. C’est vrai qu’au delà de sa provenance étasunienne, difficile de la rattacher à d’autres autos. La marque Buick elle-même est finalement méconnue.
Heureusement, elle s’affiche en toutes lettres à l’avant de notre berline du jour. En dessous, c’est la foire du chrome. La calandre est serrée et n’occupe pas que le bout du capot, elle déborde aussi sous les deux paires de phares situées au bout des ailes. Des ailes originales d’ailleurs puisqu’elles sont plates et s’effacent progressivement pour laisser encore plus d’espace au capot.
Le pare-chocs de la Buick Electra 75 devrait faire son travail. Il est plus travaillé qu’un IPN mais doit peser aussi lourd et il est renforcé par du caoutchouc, au cas où. En dessous, on retrouve la véritable ouverture pour amener de l’air au moteur et les clignotant qui, eux-mêmes sont énormes.



La démesure continue. Techniquement notre Buick Electra 75 du jour est une limited Hard-Top Sedan. Sur le profil, on en trouve l’explication et la traduction : c’est une berline sans montant… qui peut ressembler à un (très très) gros cabriolet recapsulé. Le hard-top en question se dote d’une petite vitre de custode, histoire d’avoir de la clarté à bord malgré les surfaces vitrées dignes d’un gratte-ciel de Manhattan.
Le style est chargé sur ce profil. On note un petit renflement remontant au niveau de la jonction de la porte arrière et du hard-top qui rejoint la ligne de l’aile arrière. Les lignes partant de l’avant, autour du capot et dessinant les ailes avant se prolongent de chaque côté, en ligne droite, plongeant vers l’arrière… ce qui fait que les deux poignées de portes ne sont pas à la même hauteur. Une autre baguette barre ces portes en plein milieu et le bas de caisse est chromé.
La Buick Electra 75 recèle de nombreux détails puisqu’on ajoute les répéteurs de clignotants, une vraie fausse grille d’aération moteur, un monogramme tout au bout de l’aile arrière et qu’on remarque que les roues arrières sont partiellement recouvertes par la carrosserie. Il devait rester un peu d’acier en stock.
On sait à quoi s’attendre en détaillant l’arrière de la Buick Electra et on ne va pas être déçu. Le coffre est long, long, et on peut loger je ne sais combien de sac de golf, dans la longueur, à l’intérieur. Niveau signature lumineuse, c’est étonnant. Certes, notre grosse berline a bien des ailes mais les feux qui sont au bout, forcément noyés dans un chrome massif qui s’étend depuis le pare-chocs (sacré pièce), se font voler la vedette par les deux grosses rampes situées juste en-dessous du couvercle de malle.
Pour les chocs, on ajoute deux butoirs, au centre et des autres au bout des ailes. Ceinture et bretelles. On termine avec deux sorties d’échappement aussi discrète que le reste.
La Buick Electra 75 est plus que conforme à l’idée qu’on se fait d’une berline full-size. Chez nous on pourrait parler d’Extra Maxi Large Size mais de l’autre côté de l’Atlantique, même après un premier choc pétrolier, ça paraissait normal. En tout cas, c’est certain que c’est impressionnant.


Intérieur : vds loft, bel espace, ts équipements
Ouvrir une porte de la Buick Electra 75 demande autant d’efforts qu’un coffre de banque. La porte est massive et épaisse. À l’intérieur, on s’y attendait, il y a de la place. Alors qu’on a essayé des sportives aux baquets étriqués ces derniers temps, là on se retrouve devant des canapés parfaits pour un living room… ou qui auraient été descendus au sous-sols après avoir été remplacés par de nouvelles assises plus modernes.

Plus moderne ? Oui, les sièges velours avec accoudoir en skaï, c’est pas vraiment moderne. En tout cas la couleur bleue est présente et même très présente. Le velours s’étend sur les portes et la moquette est de la même couleur. Même le volant est gainé dans cette teinte. On ajoute une petite touche de bois sur le bas de la planche de bord pour donner du contraste (et une mini-baguette sur le volant). C’est sûr, il y a une ambiance à part à bord de la Buick Electra et les nostalgiques des années 70 y seront bien, ils pourront même mettre une 8 piste de Dick Rivers au moment de rouler.
L’équipement ne se limite pas à cet autoradio. Évidemment la direction assistée est au programme tout comme la clim. On compte plus de buses d’aération que de compteurs à l’intérieur de l’américaine. L’instrumentation est limitée à un tachymètre horizontal, aux odomètres et à une série de voyants. Non, ce n’est pas une sportive.
La commande de la boîte (auto, quelle question) est au tableau de bord et les pédales sont si grandes qu’elles ne rentreraient dans aucune sportive. On termine la visite avec un passage à l’arrière. Le cas où un occupant demande à celui de devant de s’avancer est minime. Il y a beaucoup de place et le confort est aussi impérial qu’à l’avant. Enfin, on note tout de même que les énormes surfaces vitrées atteignent leur objectif puisque cet intérieur est très clair.


Technique : la démesure jusqu’au bout
Au moment de commander votre Buick Electra en 1975 vous avez le choix entre… rien du tout. Cette Limited hard-top Sedan n’était dispo qu’avec un seul moteur et une seule transmission. Vous nous voyez venir, c’est une mécanique typiquement « made in Détroit ».
On a donc un V8 de 455ci, une bestiole qui équivaut à 7,5 litres sur notre vieux continent. Attention, si ce moteur est un gros cube, ses performances dans cette grosse berline ne sont pas du tout sportives avec 205ch seulement ! On se rattrape sur le couple de 468Nm et on s’étonne d’atteindre ces valeurs à 3800 et 2000 tours… même si on aurait dû s’en douter.
La bête n’est pas une ballerine. Avec sa taille énorme et son acier qui doit être aussi épais qu’un triple cheese, la Buick Electra dépasse largement les deux tonnes. Mais comme c’est une voiture de 1975 et que les américains savent quand même faire évoluer leurs voitures, le freinage est confié à des freins à disques ventilés. Mais uniquement à l’avant puisque ce sont des tambours qui se chargent de l’arrière !


La Buick Electra 75 sur la route
Ça y est, c’est le moment. On est toujours un poil intimidé quand on se met au volant d’une voiture comme ça. Déjà, je suis seul dans l’habitacle et j’ai l’impression de pouvoir m’y perdre ! Ensuite, l’auto impressionne quand même. Son gabarit est imposant et on est quand même allé prendre des photos sur des routes qui ne sont pas du tout de taille US. Va falloir ouvrir l’œil.
Le moteur se met en route sans soucis. Le ronronnement est typiquement américain et quasi inaudible si je n’accélère pas. Ceinture bouclée, c’est parti. Va falloir bien viser. Le capot est immensément long et les roues sont perdues quelque part en dessous. Le souci, c’est que c’est comme viser avec une mire qui ferait 1cm de large et un canon qui choke. La raison est simple : la Buick Electra 75 Limited est bien américaine au niveau de la direction. Le volant est immense et la direction est très assistée. Quasiment aucune résistance et pas une information ne remonte.
Faut croire que je vise pas trop mal et la bestiole arrive sur la route. Oui, elle fait toute la route ou presque. Faudrait pas que je croise… même un cycliste en fait puisque notre auto du jour dépasse les 2m de large. La route en question est dans un état plus que passable, loin de celui de notre Buick Electra 75. En tout cas, l’américaine n’en a pas grand chose à faire de la route. Enfin, si, elle encaisse et fait office d’un filtre complet.
La direction ne renvoie rien quand les roues rencontrent un nid de poule mais l’amortissement est également parfait. Certes, ça peut rebondir un peu mais vu le poids de la bête, c’est léger. En tout cas, rien ne filtre à travers les amortisseurs… combinés au siège épais comme une encyclopédie (une vraie).


La grosse difficulté va venir d’un village. Alors peut-être qu’il y a un peu de passage dans la rue, mais le Stop n’est clairement pas adapté à un paquebot du genre. Impossible d’y voir quoi que ce soit sans faire déborder le capot sur l’intersection (ce qui équivaut à la boucher totalement). Petit coup d’accélérateur et ça repart. Même chose à l’intersection suivante. Heureusement que le camion qui arrive sur ma gauche a vu une débauche de chromes débouler… et me laisse le passage. Là, il y avait plus de monde et ça aurait été bien embêtant.
Allez, on arrive sur une route dont les proportions sont plus adaptées à la Buick Electra. Les 50 en ville sont bien tenus, évidemment et un coup d’accélérateur permet d’atteindre sans mal les 90. Pas besoin de forcer, les grosses gamelles emmènent parfaitement la bête. Dans tout ça la boîte est d’une douceur extrême et le moteur est toujours inaudible.
La Buick Electra commence à m’étonner. Sur une américaine full-size, je me suis habitué à trouver des loups à un moment ou un autre. Le rond-point qui se profile va forcément être horrible ! Je prends les freins… et ça freine. Ça freine très bien même quand on a en tête le poids de l’américaine. Personne n’arrive, j’entre dedans comme je le ferais avec une voiture plus légère… et la Buick Electra ne bronche pas. L’amortissement extrême devrait se transformer en un roulis digne d’un paquebot en pleine tempête mais notre auto du jour n’en prend pas plus que n’importe quelle compacte !


En sortie de rond-point, pied tôle. Ah ah, je vais la piéger. Même pas ! L’ensemble moteur-boîte est au diapason. Les plus de 200 canassons ont révisé leur partition et débarquent tandis que la boîte a tombé un ou deux rapports, je ne sais même pas, pour transformer la Buick Electra en auto dynamique. J’ai failli dire sportive, mais il ne faut quand même pas exagérer… les GTI de l’époque faisaient mieux. Mais les versions d’en dessous étaient bien loin.
Cette accélération reste une prouesse puisque l’américaine est particulièrement alerte. En regardant la fiche technique, on est étonné de trouver un 0 à 100 abattu en 12s et des brouettes mais les sensations sont bien conformes à ces chiffres. Les reprises ? Avec ce couple de tracteur elles sont forcément au top et le même couple est un redoutable allié dans les villages traversés sur un filet de gaz.
Aucun reproche ? Les américains auraient-ils appris à faire de leurs erreurs au point de faire des voitures au comportement anormalement normal comparé à leur taille dans les années 70 ? Il faut en avoir le cœur net. La route suivante propose quelques virages de plus et une chaussée plus étroite. Sauf que la Buick Electra, elle s’en fiche ! Le confort est toujours bon et la bête ne se vautre pas dans les virages. Les relances sont franches et le freinage n’est jamais pris de court, même quand on répète les pressions sur la pédale.
Non mais oh, elle n’a rien à se reprocher ? Il faut quand même avouer que ce n’est pas avec elle qu’on va faire un record du tour. La raison vient surtout de sa direction. On va aller là où on veut, mais il faut accepter que la Buick Electra ne soit pas placée au millimètre. Impossible de viser juste avec le gabarit et puis la direction est vraiment trop molle. Mais une fois en ligne droite, elle relancera sans soucis. Là non plus, je ne vais pas dire que c’est sportif, mais c’est beaucoup moins mou que la direction.


On arrive. Le hangar se dessine et il faut garer la Buick Electra. Ah, il est là le souci. Vous aurez beau bien viser sur la place de parking… ça devrait dépasser de partout. Gare aux coups de portes !
Conclusion
Si votre idée d’une américaine full size c’est une voiture qui se vautre, qui n’a rien de dynamique, qui ne freine pas vraiment et qui mise tout sur l’espace intérieur… va falloir se mettre à jour. La raison est en fait assez simple. Chez nous, une américaine full-size est souvent plus ancienne, de la fin des années 50 ou des années 60. La Buick Electra 75 est une évolution de toutes ces autos. Et, oui, même les américains savaient améliorer leurs voitures pour éviter que les références soient forcément européennes !
En bref, la Buick Electra 75 est une bonne surprise en plus d’être une bonne voiture. Elle vous apporte un regard nouveau sur ces grosses berlines. Oui, ce n’est pas facile à vivre comme expérience puisque ces autos sont encore plus rares que les full-size plus anciennes. Mais ça vaut le coup.
Les plus de la Buick Electra | Les moins de la Buick Electra |
---|---|
Plutôt performante | Gabarit à appréhender |
Facile à conduire | Direction mollassonne |
Douce | Consommation saoudienne |
Confortable | |
Concentré d’USA |

Fiche technique | Buick Electra Limited |
Années | 4e génération : 1971-1976 |
Mécanique | |
Architecture | 8 cylindres en V |
Cylindrée | 7468 cm³ |
Alimentation | Carburateur 4 corps |
Soupapes | 16 |
Puissance Max | 205ch à 3800 trs/min |
Couple Max | 468 Nm à 2000 trs/min |
Boîte de Vitesse | Automatique 3 rapports |
Transmission | Propulsion |
Châssis | |
Position Moteur | Longitudinale Avant |
Freinage | Disques Ventilés AV et Tambours AR |
Voies | AV 1615 mm / AR 1642 mm |
Empattement | 3226 mm |
Dimensions L x l x h | 5928 x 2029 x 1400 mm |
Poids (relevé) | 2235 kg |
Performances | |
Vmax Mesurée | 184 km/h |
0 à 100 km/h | 12,2s |
400m d.a | 18s |
1000m d.a | 33,3s |
Poids/Puissance | 10,9 kg/ch |
Conso Mixte | ± 18 litres / 100km |
Conso Sportive | ± 35 litres / 100 km |
Prix | ± 25.000 € |
S’offrir une Buick Electra
Si vous êtes conquis par ce que vous venez de lire… ça va se compliquer. Rouler dans une telle auto est bien plus facile que d’en trouver une. C’est simple, vous trouverez moins d’une dizaine d’annonces en Europe. Les états varieront et les coupés seront plus nombreux. Les prix, par contre, seront plutôt doux puisque la voiture ne dépasse généralement pas les 30.000€.
Vous vous doutez que le meilleur moyen d’acheter une Buick Electra, c’est d’aller à la source. Aux USA et au Canada, elles ne pullulent pas mais elles sont plus nombreuses. Alors fiez-vous à un contact sur place qui ira inspecter que l’auto a été bien entretenue (et qu’elle n’est pas trop corrodée) ou passez par un importateur qui se fera une joie de chercher autre chose qu’une Mustang ou une Corvette.
Ensuite, niveau entretien, pensez bien que les pièces ne se trouvent pas facilement mais que la mécanique est à la portée de tous les garages connaissant les anciennes. N’oubliez pas non plus les coûts afférant à ce genre d’auto. La puissance fiscale est énorme. Cela jouera sur le prix de la carte grise mais aussi sur le prix de l’assurance. Enfin ne zappez pas le prix de l’essence parce que la Buick Electra est aussi efficace qu’un Houdini pour la faire disparaître à raison de 18 litres aux 100km en rythme normal !
Un énorme merci à Denis, le boss de Melun Rétro Passion qui n’apprécie pas que les populaires françaises !

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