Au volant d’une Alpine A110 1300S, pour un shoot de plaisir

Publié le par Benjamin

Au volant d’une Alpine A110 1300S, pour un shoot de plaisir

Il y a quelques années, j’avais déjà essayé une Berlinette. Le modèle n’était pas le même, on passe d’une V85 à une Alpine A110 1300S, mais ce n’est pas ce qui a motivé le fait de me remettre au volant. Clairement mon premier essai m’avait laissé un goût d’inachevé. Pourquoi ? C’était simplement une des premières voitures que j’essayais. Les points de comparaison étaient faibles… et clairement mes compétences aussi. Plus de 150 autos plus tard, je me sens mieux armé.

L’Alpine A110 1300S en bref

On ne va pas vous refaire toute l’histoire de la Berlinette puisque vous trouverez sur News d’Anciennes un article complet qui lui est dédié.

Par contre on va revenir sur l’histoire de cette Alpine A110 1300S. C’est la quatrième version de l’auto et elle apparaît en 1966. Comme la précédente « 100 », elle s’équipe du moteur de la R8 Gordini. Son S ne veut pas dire « Sport » mais « Super » puisque c’est la plus grosse motorisation proposée à l’époque. Le 1296 cm³ sort 115ch, 20 de plus que la précédente. Ce moteur de Type 804 est remplacé dès l’année suivante par le 812 de même cylindrée.

Peu de temps après la 1500 débarque, puis la 1600. L’Alpine A110 1300S n’est plus la plus puissante et elle reste dans la gamme, avec la 1100, jusqu’en 1971.

Notre Alpine A110 1300S du jour

Est-ce qu’il faut encore détailler le physique de l’Alpine A110 ? C’est une auto que l’on connaît tellement bien que ses proportions sont reconnaissables à 100m. En plus, notre auto du jour se pare du bleu qui est presque un signe distinctif à lui tout seul… mais heureusement certaines autos osent des coloris différents.

Ce gabarit justement, c’est à ses proportions qu’on le doit. On oublierait presque qu’avec 1.46 m de large, l’Alpine A110 1300S est une auto plutôt large pour son époque. La longueur est contenue, 3.85 m, mais ce qui est surtout contenu, c’est la hauteur : 113 cm. On verra plus tard que ce n’est pas forcément une bonne nouvelle pour tout le monde mais ça assoit bien l’auto.

Mais des proportions pareilles ne sauraient tout faire pour l’esthétique d’une voiture. Heureusement, la berlinette a reçu un dessin qui lui sied parfaitement. Hérité de l’A108, il s’est musclé avec le temps, avec la montée en puissance (au sens propre) et avec les accessoires. Ainsi notre Alpine A110 1300S a bien les projecteurs additionnels intégrés. Et comme ce n’est pas assez pour bien l’éclairer, comme bon nombre de ses consœurs, notre auto du jour fait appel à des phares additionnels fixés entre les butoirs qui encadrent la plaque, sous les lettres Alpine, et les pare-chocs chromés aux deux coins.

D’ailleurs, pour une auto si sportive, voire radicale, les chromes sont bien présents. On en trouve sur les joncs entourant les vitres, sur le rétroviseur obus, sur différentes baguettes qui soulignent les lignes et sur les entourages de phares. Pour autant on en trouve moins à l’arrière, hormis le large pare-chocs et les grilles d’aération placés sur les ailes arrières, juste devant les écopes.

On note quelques signes distinctifs pour cette auto de 1968, notamment les clignotants qui ne sont pas encore ceux des Dyane et qui sont encore placés dans les pare-chocs et pas au dessus.

Un design simple, consensuel, sportif et musclé, tout ce qu’on aime en fait.

À l’intérieur

On ouvre la petite porte et on retrouve un habitacle toujours aussi étriqué. En même temps, celui qui voulait de l’espace pouvait toujours opter pour l’A110 GT4

Il suffit de voir la taille du volant à l’intérieur de l’Alpine A110 1300S pour comprendre. Il prend de la place mais n’est pas si gros. Encadré par deux commodos, il laisse parfaitement visible les 5 compteurs à fonds noirs et aux graduations et aiguilles vertes. Compte-tour à gauche, vitesse à droite, pression d’huile, témoin de charge et horloge au centre… Le tout est intégré sous une casquette bien dessinée.

Quelques boutons prennent place sous la planche de bord pour les commandes des accessoires. Et puis on ne peut pas rater le levier de vitesse. Il vous paraît haut et grand ? C’est comme le volant, c’est une question de proportions !

Les sièges baquets noir sont en parfait état et derrière on trouve même un peu de place pour loger quelques bagages.

Sous le capot

On passe à l’arrière, tout à l’arrière même pour ouvrir le capot de notre Alpine A110 1300S. Le moteur apparaît et ne laisse pas de doute : le sorcier Gordini s’est occupé de lui et y a même laissé sa marque sur la culasse, l’élément qu’il a le plus retravaillé.

Notre auto date de 1968 et ce n’est donc plus le 804 qui est ici. C’est toujours un Cléon, il cube toujours 1296 cm³ (75,7×72) et il est toujours alimenté avec deux carbus double corps. Mais son taux de compression a été légèrement augmenté tandis que la puissance passait à 120ch SAE (102 DIN).

Un bouilleur qui sied parfaitement à l’Alpine A110 1300S, toujours aussi légère (700kg) et qui permet des performances très honorables. Justement, c’est le moment de les tester !

Au volant d’une Alpine A110 1300S

L’installation reprend bien ce que l’ami Thierry Dubois décrit à propos des alpinistes (c’est excellent et à lire sur facebook ici). J’ai beau ne pas être bien vieux, faire un peu de sport, je ne suis pas particulièrement souple et il faut quand même se contorsionner pour se mettre au volant. Une fois qu’on y est… on en bouge plus. On est vraiment bien calé dans cette Alpine A110 1300S. Ceinture bouclée, c’est parti.

Un coup de clé, un coup de gaz et le moteur Renault s’ébroue. Le son met dans l’ambiance. Ce n’est pas un gros moteur, ça s’entend, mais il en veut, c’est évident et on le ressent dès le ralenti. La tringlerie de boîte a été refaite et le guidage, comme le verrouillage, de la première sont nickels. Allez je relâche l’embrayage… mais je dois quand même mettre un peu plus de gaz. C’est parti.

La route est droite et pas forcément en bon état. Les trous sont nombreux et permettent de me remettre dans le bain au niveau de la direction. Les souvenirs de mollesse de l’AMC AMX (notamment) sont bien loin. Là, on est sur du direct. On pourrait presque trouver dure cette direction mais elle est surtout hyper communicative. On sait exactement où on met les roues. Et pas besoin de beaucoup tourner pour faire dévier la berlinette.

J’arrive sur un premier stop. Les freins répondent parfaitement. La pédale offre un bon toucher, à l’image de la direction, c’est ferme et parfaitement dosable. Je laisse passer quelques autos, histoire d’avoir de la marge. Le démarrage est prudent, j’avoue que je suis un peu intimidé et qu’un tête à queue au redémarrage ne serait pas le bienvenu. Je démarre prudemment. La seconde rentre vite. Je suis en ligne droite, autorisation prise auprès du propriétaire de l’auto qui me l’a préalablement chauffée… et gaz !

Le moteur se fait entendre. Le quatre cylindre est rageur et le compte-tour décide de jouer l’alpiniste (lui aussi). Il grimpe vite. Troisième. La poussée est toujours franche. Ça envoie sévère, c’est presque du brutal et pourtant la cavalerie est limitée. Heureusement pour moi ! Les rapports montent et la vitesse aussi. Allez, pas trop non plus. Une grosse courbe arrive et je me remémore le mode d’emploi. Des freins pour charger l’avant, un rapport en moins, on vise la corde en tournant à peine le volant et re-pied dedans ! C’est efficace, c’est sportif, c’est jouissif.

L’Alpine A110 1300S n’est pas malmenée par la route. On connaît l’état du réseau secondaire national mais ce n’est pas ça qui va me poser problème. Dans notre berlinette on reste en ligne. Par contre, au lieu de se faire valdinguer, on se fait secouer. Le confort n’est pas la vocation première de la dieppoise et elle le rappellera vite à votre dos. Pour autant vous êtes tellement concentré sur la route que ce n’est pas un souci.

Les virages rapides s’enchaînent et aucune auto ne se rapproche dans le rétro. Par contre celles de devant grossissent vite. Des virages lents accentuent le trait. L’Alpine A110 1300S y est particulièrement à l’aise, virant à plat et se plaçant avec une précision chirurgicale. Une fois le mode d’emploi bien en tête, on passe vite du conducteur au pilote. Du moins au niveau des sensations.

Alpine A110 1300S par News dAnciennes Dynamique- Alpine A110 1300S

La seule chose qui nous fasse perdre du temps, c’est la synchro de seconde. Descendre un rapport depuis la troisième entraîne une plainte sonore de la boîte. En bon conducteur de Simca, je sais à quoi m’en tenir. En décomposant et en usant de ma maîtrise trop rudimentaire du talon-pointe, ça passe néanmoins parfaitement. Surtout que le point de corde est vite passé et que je pense déjà à ré-enquiller la troisième. Il faut quand même que je fasse gaffe. Sans jamais que l’arrière ne manque de passer devant, en y prêtant attention, on ressent bien son envie de le faire.

Les kilomètres passent très vite. Le moteur est toujours présent. La conduite est aisée, facile, cérébrale. La vitesse, en courbe comme en ligne droite fait son œuvre, c’est jouissif. Il n’y a rien à jeter dans ce cocktail servi par pintes entières. L’Alpine A110 1300S ne rechigne jamais, fait ce qu’on lui demande, et le fait bien !

Alpine A110 1300S par News dAnciennes Dynamique 6- Alpine A110 1300S

Voilà que la route devient plus large. Un cycliste décide de déboiter par l’extérieur à un stop et un SUV coréen me montre qu’on est sorti du terrain de jeu. En même temps je n’ai pas vraiment appréhendé notre berlinette dans la circulation moderne. Parce qu’entre les spéciales, il y a les liaisons. La berlinette y reste à l’aise. Du moins elle se fond parfaitement dans la circulation, ne laissant aucune auto, même un « mastodonte » comme une Twingo, distancer notre bleue.

Le moteur sait aussi mettre la sourdine en évoluant à une vitesse « radar friendly », bas dans les tours. On peut même discuter dans problème. La suspension se montre par contre bien dure à ces vitesses. C’était précédemment un atout, c’est là un point faible… et encore le mot est fort. Les ronds points sont pris tellement vite que vous devrez réfléchir à la marge que vous laissez aux véhicules de devant. Celui qui s’engage, là bas à gauche, ne sera jamais un souci.

La liaison est terminée. Je reconnais les routes, les vignes. Bref l’arrivée se rapproche. Mais les autos de devant se sont éloigné. Une nouvelle spéciale redémarre. Aucun chrono à abattre, simplement le besoin de se faire plaisir pour apprécier comme il se doit les derniers kilomètres. Le moteur hurle, les rapports passent et repassent, les courbes sont avalées, le volant tourne à peine. Et ça recommence !

Ça y est. Je gare l’Alpine A1300S. J’en sors non sans peine, c’est encore plus compliqué que d’y rentrer (je vous re-renvoie au texte de Thierry Dubois). Le moteur refroidit en émettant des cliquetis de satisfaction. J’ai un sourire béat, et certainement très idiot, imprimé sur le visage. Je n’ai pas fait beaucoup de bornes mais il faut bien reconnaître que ce fut fatiguant. Non pas la conduite, mais le pilotage. L’auto est tellement cérébrale que le cerveau est aux aguets non-stop. Et si c’est crevant… qu’est ce que c’est bon !

Conclusion

Clairement, mes impressions en Alpine A110 étaient bonnes… mais pas parfaites. J’en avais conduit une, je m’étais amusé. J’ai poussé le curseur, je me suis éclaté.

L’Alpine A110 1300S, c’est une auto plaisir. Une auto qui saura vous faire faire des bornes mais qui ne sera jamais autant plaisante que quand vous taperez dedans. Par contre, vous les sentirez ces bornes. Son côté radical n’est pas galvaudé. Pour autant, si vous n’en voulez pas, vous pourrez l’éclipser. Il faudra juste bien avoir appris le mode d’emploi.

Les plusLes moins
Une conduite cérébraleDes prix énormes
Des performances « faciles »Un habitacle interdit à beaucoup
Des sensations puresPas la meilleure des voyageuses
Une star, tout simplement
CritèreNote
Budget Achat8/20
Entretien14/20
Fiabilité16/20
Qualité de fabrication14/20
Confort13/20
Polyvalence13/20
Image20/20
Plaisir de conduite19/20
Facilité de conduite15/20
Ergonomie16/20
Total14,9/20

Conduire une Alpine A110 1300S

De toutes les berlinettes, l’A110 1300S n’est pas la moins chère. Mais au final, tous les prix ont été tellement tirés vers le haut qu’on est presque dans la bonne affaire du genre. Pas beaucoup moins performante qu’une 1600 (on ne parle pas des S) elle est néanmoins beaucoup moins chère : une auto dans un bel état se trouvera aux alentours des 75.000 €. C’est plus qu’une V85 ou qu’une 1300 G, mais c’est également 30% de moins qu’une 1600S !

Sinon, vous avez toujours la possibilité de vous créer une Alpine A110 1300S à partir de la coque d’une auto « plus petite », non restaurable en l’état, mais soyez sûrs de savoir où trouver les pièces manquantes.

Pour le « guide d’achat », faites appel à un spécialiste. À la faveur de sa carrosserie en fibre de verre, une Alpine A110 qui a tapé peut être parfaitement maquillée. Regardez également si elle est complète, quelques éléments spécifiques à certains millésimes deviennent très compliqués à trouver. Vérifiez également le châssis, ce n’est pas facile à identifier mais si vous devez le réparer, c’est le début d’un très long travail.
Le bon point viendra des pièces mécaniques, issues de la banque de pièce de Renault et plutôt faciles à trouver.

Surtout, comme on vous le disait récemment, conduisez en une AVANT de vous lancer. L’habitacle ne convient pas à tous et certains pourraient se dégoutter un peu vite de ce « détail ».

Un grand merci à Patrick pour nous avoir passé le volant de sa belle récemment reconstruite.

Fiche Technique de l’Alpine A110 1300S
MécaniquePerformances
Architecture4 Cylindres en ligneVmax210 km/h
Cylindrée1296 cm³0 à 100 km/h8,2 s
Soupapes8400m da15,5 s
Puissance Max102 ch à 7200 trs/min1000m da29 s
Couple Max124 Nm à 4500 trs/minPoids / Puissance6,86 kg/ch
Boîte de vitesse5 rapports manuelle
TransmissionPropulsion
ChâssisConso Mixte10 L/100 km
Position MoteurLongitudinale arrièreConso Sportive14,6 L/100 km
FreinageDisques pleins AV et AR
Dimensions Lxlxh385 x 146 x 113 cmCote 202175.000 €
Poids700 kg

Benjamin

http://newsdanciennes.com

Passionné d'automobile ancienne, il a créé News d'Anciennes en 2013 à force de se balader sur les salons sans savoir quoi faire de ses photos. Conducteur occasionnel de Simca 1100 il adore conduire les voitures des autres, dès qu'elles sont un peu plus rapides !

Commentaires

  1. Fred

    Bonjour,
    Votre estimation d’une vraie 1300S est sous estimée. Je ne vous parle pas des 1300G et compagnie transformées en 1300S mais de celles qui ont une CG conforme. Les 1300S sont plus rares que les 1600S et leur côte est au minimum au même niveau de prix, sinon plus, c’est à dire 100 000 euros. Produites en plus petit nombre, les 1300S sont beaucoup plus agiles que les 1600 du fait d’avoir un moteur plus léger. En course de côte à l’époque, les 1300S étaient homologuées en 1440cc en groupe 4 ce qui leur procurait un avantage par rapport au 1555cc de la 1600S même passée en 1590. Il a fallu attendre que la 1600S sorte en 1605cc pour devenir imbattable en passant en 1800cc groupe 4.
    Autre point de détail : tous les propriétaires de berlinette installaient et installent toujours un bloqueur sur la commande de changement de vitesse dans l’habitacle pour éviter de rétrograder de 3ème en marche arrière même si la boite 353 grogne et vous avertit.
    Cordialement
    Au plaisir de dialoguer par téléphone avec votre journaliste si il le souhaite.
    Frédéric

    Répondre · · 9 août 2021 à 19 h 09 min

    1. Benjamin

      Bonjour,
      Concernant l’estimation, c’est celle d’un modèle en très bon état, mais pas concours que nous donnons. Ce chiffre provient d’un site spécialisé qui agrège les données de centaines de sites et d’annonces.
      Concernant la boite par contre, le fait qu’elle accroche est un problème de synchro, pas de bloqueur.

      Répondre · · 10 août 2021 à 7 h 57 min

  2. LESIMPLE

    La température d’eau ne manque même pas, elle apparaît à droite du compte tours.

    Répondre · · 9 août 2021 à 21 h 58 min

    1. Benjamin

      Trop absorbé dans la conduite (et pas assez observateur) je suis passé au travers !

      Répondre · · 10 août 2021 à 7 h 56 min

      1. LESIMPLE

        Heureux temps où les tableaux de bord n’étaient pas avares d’informations détaillées sur la santé du moteur!

        Répondre · · 10 août 2021 à 10 h 54 min

  3. jean pierre

    bonjour on s’y perd avec toutes ces alpine berlinette la mieux en 1300 s ou 1600 s et c’est cher hors de prix qui risquent de chuter avec l’europe et les voitures électriques terminé en 2030 ou 2035 mais il y a pas de frontières pour les pollutions merci

    Répondre · · 2 février 2023 à 13 h 33 min

  4. Hugon michel

    Ce n’est pas les syncros mais bien le petit axe qui empêche de passer de 3 en marche ar il est entre les 2 axes des commandes des fourchettes et se bloque en 1ere lorsque il y a trop de jeu dans l’alesage du carter de boîte.
    Maladie de la boîte 5 Renault.
    J’ai moi même bloqué la boîte et fait Valence martigues en 1ere…..
    Michel H.

    Répondre · · 3 octobre 2023 à 23 h 30 min

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