Acheter Une Ancienne : et si vous achetiez votre Madeleine ?

Publié le par Alexandre Guirao

Acheter Une Ancienne : et si vous achetiez votre Madeleine ?

Alexandre Guirao est dans le milieu automobile depuis des années. Il a fondé Classic Auto Invest. Ce nom ne doit pas faire peur, car ce n’est pour investir que ses clients le contactent, mais pour acheter la bonne auto, au bon budget, sans prendre de risque. Dans Acheter Une Ancienne, il nous livre quelques secrets pour bien acheter une ancienne… et ne pas en acheter d’autres !

Aujourd’hui on va vous parler de plaisir automobile. De ces autos dont on rêve, de celles qu’on achète au final et enfin… de celles qu’on utilise réellement !

Avant de commencer, un peu de légèreté. Si le plaisir était quantifiable, toutes les autos dont on va parler ici seraient ex-aequo. La raison est simple : chacun a sa sensibilité et son ressenti. Evaluer une TR3, une 190 SL, un Alfa GTV ou une Alpine A310 avec sonomètre et mesure de performances, c’était bien au moment de leur sortie. Des décennies plus tard, on aura du mal à les classer. La seule jauge dont on parlera ici est située dans notre hypothalamus. Nous vous proposons ici de l’émotion où chacun pourra se reconnaître.

Ces autos qu’on admire sans y toucher : very bad trip ou intouchables ?

Certaines autos font penser à la beauté fatale de la classe de 4eB, celle avec qui tout le monde veut sortir mais personne n’ose. Stars des salons, épinglées dans les chambres d’dos, les Countach et autres Testarossa, ainsi que leur descendantes sont cependant inaccessibles pour beaucoup. Même quand notre trésorerie pourrait s’en approcher, nous hésitons à sauter le pas. Pourtant sur les dix dernières années on pouvait trouver une Maserati Ghibli de 1971 pour 59.000 €, une Lamborghini Espada pour 23.000 ou une Dino 246 GT pour 104.500 € !

Vivre avec ces autos n’est pas forcément aisé puisqu’on peut vite faire monter la facture avec l’entretien. Mais pour celui qui voulait réaliser une plus-value, c’était le bon temps, les prix ont grimpé entre 2009 et 2015 et on pouvait régulièrement changer d’auto en montant en gamme. Par contre ceux qui s’y sont mis sur le tard avec cette idée en tête s’en mordent les doigts.

En dehors de ces incertitudes financières, l’autre aventure consiste à rouler avec ces autos. Ce type de machine passe souvent plus de temps au parking que sur les routes. Même si leur jeunesse s’est peut-être déroulée sur la Riviera, elles ont ensuite connu un long oubli… Et ça peut être très dommageable, la mélodie du 12 cylindres peut vite devenir une cacophonie. Il faut alors passer chez un sorcier pour remettre tout en ordre. Et même en dehors de la mécanique, les joints, courroies, poulies et pompes peuvent relever du casse tête. Nous vous en avons déjà parlé (c’est ici), prévoyez le quart du budget d’achat pour la remise en service.

Une fois cette étape passée, ce sera la première sortie… et rebelotte. La clim qui lâche, la boîte à fusible se met à fumer… Sortie 28bis sur l’autoroute, une nuit d’hôtel trouvée à la hâte, le camion d’assistance arrivera sous le regard et les injures de votre compagne. On peut comprendre pourquoi certaines autos restent alors au garage !

Si vous aimez les classiques, la Testarossa ou l’Aston Martin V8 seront pour vous. Pour les rebelles, une Countach ou une rare Wector W8 sont toutes indiquées.

Celle qu’il faut avoir : l’autobahn en 5e est un long fleuve tranquille ? Vraiment ?

Certaines autres autos apportent plus d’espoir. Celui d’un monde meilleur, sans panne, sans plastique qui se décolore et sans mobilier qui tombe, même après 250.000 km. Wilkommen in deutschland !

Quelle que soit l’auto qu’on recherche, et quel que soit notre budget, les constructeurs allemands proposent des machines abouties. Tellement qu’elles sont devenues des incontournables de la collection.

Si ce n’est pas l’émotion que vous recherchez absolument, bienvenue sur le terrain de l’auto-contrôle. De la Golf (pas GTI) à la 911, en passant par les Mercedes W-quelque chose et les BMW E-autre chose, vous ne ferez pas d’erreur. Pour ceux qui veulent de « l’exotisme » allez voir chez Opel ou Audi qui proposent des substituts intéressants et des « barroqueries ».
Ces allemandes sont conçues par des ingénieurs, quand chez les voisins les stylistes et motoristes se battaient avec les intellectuels, en Allemagne la fonctionnalité était reine. Un ventilateur doit aspirer de l’air pour refroidir, longtemps et sans faire sauter de fusible. Un siège doit maintenir sans s’user et vous fatiguer. Le moteur doit pouvoir tourner au régime maximum sans chauffer.

Par contre, avec ces idées là, c’est un coup à passer à côté d’un série de défauts dans notre certitude en la deutsche qualität ! Même si elles sont été bien conçues, elles vieillissent elles aussi. Le maquillage est plus facile sur une 911 qu’une Lancia… La galva mieux appliquée, des matériaux plus robuste, une électricité testée et validée font que ces autos peuvent traverser le temps, mais il faut être prudent.

C’est surtout vrai lorsqu’on regarde les autos des années 70 à 90. Les autos des années 50 et 60 n’ont pas besoin d’être allemandes pour être de bonne qualité, Jaguar Mk2, Alfa Giulia, Lancia Flaminia et autres Peugeot 504 en seront de bons exemples.

Vous êtes très traditionnel ? Optez pour une 911 Type G ou une BMW Série 3 E21. Plus anit-conformiste ? Regardez du côté de l’Opel Monza ou d’une Isdera Imperator !

On les achète faute de mieux : auto-masochisme ou humour décalé ?

Pour certaines autos, leur laideur apparente fait oublier la beauté de leur âme. Aujourd’hui les Lancia Trévi, CX, Porsche 928 ou Jaguar XJS sont adulées. Alors qu’à leur sortie ce n’était pas la même chose. Un parfum décalé est né avec le temps et à remplacé la bizarrerie.

Ce sont des choses qu’on ne verra plus. Tout simplement parce que les constructeurs ont maintenant tellement de garde-fous qu’ils n’oseraient plus. Comité de style, de direction, test labo et client. Les actionnaires valident avant les concessionnaires. Les folies n’existent plus…

Ces exemples ont tous joué un rôle dans l’histoire de leur fabricant. La CX ou la Trévi ont été les derniers espoirs de viser le haut de gamme. La 928 a été une préfiguration de la GT moderne. La XJS a enterré ses rivales en étant produite durant 22 ans !

A leur volant, c’est l’arrivée de l’émotion. On est joyeux à l’idée de rouler décalé, de découvrir des solutions techniques originales aussi. On parlera par exemple de la Diravi de la CX ou de la construction Transaxle de la 928. Dans la Jaguar on découvrira une absence totale de vibrations provenant du gros V12. Et puis dans la Trévi c’est la planche de bord qui vous ravira.

Et puisqu’on parle d’acheter une ancienne, ces autos sont singulières et si on part sur un bel exemplaire on ne rencontrera que peu de surprises au final. Et les collectionneurs qui franchissent le pas, comme vous, sont de plus en plus nombreux.

Vous n’avez pas de complexe : une Citroën CX, une Mazda 929 Coupé ou une Rover SD1 vous amuseront. Vous êtes vraiment décalé : une Tatra 603 avec son V8 refroidi par air monté en porte à faux arrière sera à la hauteur de votre originalité.

Celle qu’on achète sans se soucier du regard des autres : c’est pourtant facile de se tromper !

Enfin on attaque la partie 100% originalité. Les autos extrêmes qu’on ne rencontre presque jamais. On les choisit pour ce qu’elles sont, par pour ce qu’elles représentent. Des autos de bagnolards, de bricoleurs… et c’est parfois souhaitable !

Maserati Biturbo, Lotus Esprit, TVR de tous bords, Excalibur, Aston Martin Lagonda sont des autos qu’on mettra dans cette catégorie. Celles qui ont évité les pannes destructrices pour arriver jusqu’à nous vous en feront baver ! Pas de monotonie, et toujours prêtes à vous surprendre. Entre deux visites chez le garagiste, vous devrez traqué les pièces. Parce que si on ne vous regarde pas, c’est autant parce que l’auto est inconnue que parce que ces autos ne se voient pas… ou ne roulent pas. L’annonce disait pourtant « vendue à regret, faute de temps ».

Elles ont au moins un gros avantage : en vous souciant d’elles, vous n’aurez pas le loisir de vous soucier d’autre chose !

Vous avez de l’ambition : une Lotus Esprit Turbo ou une Aston Martin Lagonda vous apporteront tous les bonheurs et les soucis que vous voulez.

Vous êtes bluffeur : une Matra Bagheera ou une Marcos Mantula feront illusion à chaque (rare) sortie.

Conclustion

Le monde de la collection automobile offre une large palette de choix de monture. Nous pouvons acquérir des autos allant des années 50 aux années 80, qui sont les témoins des avancées de l’époque, tant au niveau du style, de la technique que du marketing. Des époques avec de forts contrastes. Le grand écart était parfois utile pour surprendre un public friand de nouveautés tout en gardant ses parts de marché. Pour notre plaisir, ces autos sont encore disponibles et les faire rouler peut rester un acte raisonnable !
Alors profitons-en. Sur ce, bonne année automobile !

Photos : News d’Anciennes / Bonhams

Alexandre Guirao

https://www.classicautoinvest.fr/

Alexandre est un passionné d'automobile, et surtout un pro du milieu. Avec Classic Auto Invest il conseille les futurs collectionneurs pour qu'ils évitent les pièges du marché.

Commentaires

  1. Robert-Louis BREZOUT-FERNANDEZ

    Merci M. Guirao de n’avoir, à aucun moment, parler des voitures américaines.
    Leur mécanique est simplissime et, pour trouver les pièces, il suffit d’aller sur Ebay US (en anglais dans le texte) avec son caddie. Pour ce qui concerne le prix d’achat, ça vaut pas tripette.
    Mais, côté « voiture-plaisir », silence mécanique total, fauteuils « comme à la maison », onctuosité sur nos routes de campagne, aux 80 km/h règlementaires, alors là, c’est l’panard.
    Permettez, Monsieur Guirao, que j’arrête ici mon dithyrambe. ça pourrait donner de mauvaises idées à quelque collectionneur et priver d’autant les véritables aficionados de leur dose « d’american way of life ».
    Vous abandonnant sans un regard les « Autobahn Courier » et autres capricieuses ultramontaines, je vous prie de croire, cher Monsieur Guirao, à l’expression de mes plus profonds sentiments d’américanophile automobile indécrottable.

    Répondre · · 27 janvier 2019 à 16 h 14 min

    1. Benjamin

      Bonjour Robert-Louis.
      En tant que rédac’ chef j’ai failli ne pas le sortir parce qu’il ne parle pas des américaines, ni des japonaises, ni des suédoises et il n’évoque même pas Simca !!!
      Au delà de cette boutade, chacun sa madeleine, c’est le principe. Ce n’est pas parce qu’on ne cite par les américaines qu’elles ne sont pas les voitures de rêve de certains.
      Je trouve regrettable que les amateurs de telle ou telle auto crient au scandale à chaque fois que leur marque / modèle / pays de cœur n’est pas cité. On ne peut être exhaustif quand on parle de plaisir automobile.
      A bientôt (stand de la FFVE à Rétromobile ?)

      Répondre · · 28 janvier 2019 à 11 h 54 min

      1. Robert-Louis BREZOUT-FERNANDEZ

        Cher Monsieur.
        Justement, et pourquoi pas les japonaises, les suédoises ou les Simca !!!
        Vous inscrire dans le conformisme ambiant est une solution de facilité puisque hors voitures teutonnes et italiennes dont la valeur marchande explose, point de salut.
        Moins orienté vers des autos hors de prix et donc hors d’atteinte du vulgaire, dont je suis, votre article eut certainement gagné en objectivité. Mais il eut été beaucoup plus long. Il vous a donc fallu faire un choix . . .
        Le métier de rédac’ chef n’est pas un long fleuve tranquille.
        Au plaisir de vous retrouver, samedi après-midi, sur le stand de la FFVE, à Rétromobile, cela va sans dire . . .

        Répondre · · 28 janvier 2019 à 18 h 29 min

        1. Benjamin

          Ce n’est pas que nous nous inscrivons dans un conformisme ambiant. C’est simplement qu’Alexandre écrit sa chronique comme il l’entend ! Chacun sa sensibilité, si la sienne fait l’impasse sur certains modèles, c’est son choix !
          Il me signale d’ailleurs que la Wector… est bien une voiture américaine !
          Sinon, je serais à l’AG du matin mais après 5 jours sur place, je rentrerais dans mon aube profonde juste après.

          Répondre · · 29 janvier 2019 à 9 h 12 min

          1. Robert-Louis BREZOUT-FERNANDEZ

            Cher Monsieur, ce sera un plaisir évident que de vous rencontrer à l’AG de la FFVE.
            J’y serai en force, accompagné de 2 présidents de club de voitures américaines…

            Répondre · · 29 janvier 2019 à 10 h 25 min

  2. Antoine Lannoo

    C est toujours le coeur qui parle quand on franchit le pas, dans les limites de nos portefeuilles

    Répondre · · 27 janvier 2019 à 20 h 05 min

  3. Daniel DUCHEMIN

    Ah c’est malin ça ! Quand on a fini l’article on est encore plus indécis (pour pas dire emm..) qu’avant …merci quand même de faire travailler nos neurones et nos sensations.

    Répondre · · 28 janvier 2019 à 11 h 43 min

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