Casting d’Anciennes : La Dodge Monaco dans les Blues Brothers

Publié le par Gilles Chaput

Casting d’Anciennes : La Dodge Monaco dans les Blues Brothers

Après l’étonnante Siata Spring de Trafic, c’est à lire ici, on repasse sur une voiture ancienne bien plus connue, qui fut une des vedettes du film, devenu légendaire, The Blues Brothers.

Le film en bref :

Année 1980
Pays : Etats Unis
Genre : comédie musicale
Réalisé par John Landis
Production : Universal pictures
Durée 148mn Couleur
Acteurs principaux : John Belushi, Dan Aykroyd

Synopsis

Jake Blues vient de purger plusieurs mois de peine dans un centre pénitentiaire de Chicago. Son frère, Elwood, est présent à sa sortie : il le conduit directement à l’orphelinat où ils ont grandi. Cette visite, dans une institution administrée par une religieuse, les conforte dans leur choix d’une émancipation chaotique. Contre toute attente, lorsqu’il est question de fermer les portes du centre d’accueil pour enfants, les deux frères s’insurgent à propos de ce défaut de trésorerie et n’ont plus qu’une seule idée en tête : recueillir les fonds nécessaires !

La voiture vedette

La marque Dodge décline une version Monaco de 1965 à 1978 avec un certain succès puisque la série coiffe le haut de la gamme en proposant une berline « full size », très demandée à cette époque. Pour la clientèle, Dodge se fait particulièrement un nom dans les années soixante-dix, avec le catalogue de ses « muscle cars » : la Challenger, provocante à travers des emblèmes comme une crosse de révolver sur le sélecteur de vitesse, marque les esprits, suivie de près par le millésime 1973 qui se mesure aux Pontiac et Ford Mustang. Son logo à tête de bélier porte la devise «grab life by the horms » ( prenez la vie par les cornes), assez explicite sur l’ambition du constructeur.

La Monaco 1974 ne peut faire l’impasse sur un contexte économique qui impose des critères sévères depuis le choc pétrolier de l’année précédente. Baisser les consommations d’essence des V8, conçus dix ans plus tôt, devient le leitmotiv des ingénieurs. Pour cela il faut également revoir la carrosserie : réduire le poids de l’auto se traduit par une nouvelle plateforme C, type monocoque, véritable changement chez Dodge. Afin de figurer dans le segment intermédiaire (aux USA), les dimensions sont corrigées : de 5,64 m, la voiture concède une dizaine de cm. Sur la balance, 1800 kg correspond à l’entrée de gamme, culminant à 2000kg pour la Custom à moteur 440ci.

La motorisation standard devient le 360ci qui fait baisser la puissance de 290cv à 248cv, le tout est gavé par un carburateur double corps. Touche non négligeable au moment d’attirer la clientèle, la Monaco 1974 se dote d’un allumage électronique qui fiabilise un véhicule destiné à circuler tous les jours de l’année. En observant l’historique de la marque, il est curieux de repérer le rachat des chaines de production des frères Dodge par Chrysler en 1928. Ironie des aléas commerciaux, les nouveaux patrons conservent une gamme de poids lourds destinée à fournir les armées au moment des conflits, en nommant cette branche industrielle « les Dodges brothers » !

La place de l’auto dans le film :

Bien que la construction du scénario est caractéristique des comédies musicales (insertion des chorégraphies et de la bande son en suivant l’évolution des personnages) le véhicule utilisé est un élément clé du récit. Sans cette automobile, les deux frères sont dans l’incapacité de concrétiser leurs projets. Reformer un groupe musical et organiser des concerts, cela contraint à parcourir des milliers de kilomètres. Il faut ajouter à cet objectif une nette propension à enfreindre toutes sortes de règlements, dont un incontournable pour se déplacer : le code de la route !

Recherchés par les polices locales de plusieurs états, les Blues Brothers n’ont pas d’autres solutions que la fuite. La Dodge Monaco représente alors l’outil indispensable pour préserver une liberté compromise. Cette dépendance fait dire au conducteur que le signe du salut, c’est l’aiguille de carburant qui bascule au compteur vers le F de full ! 90 litres d’essence embarqués, c’est l’assurance de rouler jusqu’à la prochaine scène de « rythm’n blues ». L’engouement porté aux comédies musicales légendaires conjugue souvent le romantisme, les passions, avec la puissance évocatrice des scènes chorégraphiées. Ici la Dodge fait rugir son moteur, entame des dérives de l’essieu arrière et s’invite à la danse par des prouesses de dérapages contrôlés !

L’ombre de la Dodge fait fulminer la police routière. Gardant le sens de la provocation, le réalisateur dirige et filme des carambolages inédits, explosant un nombre record de police car tout au long d’une course poursuite de 148mn. La Monaco 1974 prend des allures d’icone pour toute une génération, plébiscitée jusqu’en Europe où le triomphe sera tel que le street art ajoutera systématiquement les formes cubiques de la Dodge aux célèbres chapeaux et lunettes noires des blues brothers.

Au volant avec Dan Aykryod

Venir accueillir son frère à sa sortie de prison au volant d’une Dodge vendue au déstockage du parc policier, il y a sans doute mieux pour faire oublier le milieu carcéral… Elwood est sûr de son affaire : moteur Custom, suspensions et train arrière renforcés, quadruple carburation, pare choc tubulaire pour ne pas endommager le V8 ; sans omettre la boite de vitesse automatique, sélecteur sur la colonne de direction, idéale dans le cas de démarrages fulgurants en gardant les deux mains proches du volant. La propulsion arrière autorise des glissades à faire tourner la tête.

Badgée de ses numéros et initiales de patrouille, la Dodge ne cesse de combler son conducteur. Elle protège ses occupants, munie de plaques de métal insérées dans le dossier des sièges avants. Les portes résistent aux chocs violents par des renforts en kevlar. Comble de dérision, la Monaco peut loger sur sa banquette arrière des repris de justice, le sol moquetté à l’origine cède la place à un tapis d’épais caoutchouc qui se lave rapidement au jet d’eau !

Nous suivons alors les blues brothers dans un road movie atypique : l’histoire défile comme une bande dessinée ou un cartoon : les personnages se relèvent de chutes, de castagnes, d’attentats à la bombe sans la moindre égratignure. La voiture aussi, telle une héroïne s’avère invincible : malgré une carrosserie maltraitée, des sorties de routes à faire rompre la transmission, l’auto poursuit sa route et pour coller aux personnages vedettes, la voilà elle aussi en mission !

C’est ainsi que, confiant, Elwood laisse défiler la bande de bitume sous les roues de la Dodge, en mouvement perpétuel. Le dessus de la planche de bord est assez profond pour que s’entassent, pêle mêle, les paquets de cigarettes, les box cartonnées de pop-corn, quelques partitions de musique et surtout l’immanquable carte routière, boussole indispensable pour des artistes nomades. La voiture devient presque un lieu de vie : les sièges moelleux, tout comme l’interminable banquette arrière, offrent un confort à la hauteur de la spartiate chambre à coucher de Chicago, louée par Elwood.

Alors il n’y a plus qu’à embarquer avec les Blues Brothers ! Le dépaysement est garanti, aussi vaste que les plaines érodées de l’Illinois…

Le film est disponible en VOD, notamment sur Youtube.
Photos : Universal Pictures et Blues Brothers Central

Gilles Chaput

Passionné de véhicules anciens et de Cinéma, Gilles vous propose régulièrement ses chroniques "Casting d'Anciennes"

Commentaires

  1. Régis V

    Grand merci à l’auteur pour nous avoir fait revivre ce divertissement théâtral et musical en nous apportant des précisions sur cette Dodge que l’on peut considérer comme un des personnages essentiel du casting.
    Dans l’attente de lire votre prochain article.

    Répondre · · 6 avril 2025 à 15 h 24 min

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