Renault Colorale, le Crossover avant l’heure

Publié le par Benjamin

Renault Colorale, le Crossover avant l’heure

On en voit tellement peu, elle est encore moins visible que la Frégate, c’est dire, qu’on en oublie son existence. Pourtant la Renault Colorale a été une des premières autos à oser, assumer et même prôner le mélange des genres. Pas tout à fait berline, plutôt break, elle s’est même faite baroudeuse au besoin !

La naissance de la Renault Colorale

Pendant que la France se reconstruit doucement, la gamme Renault est plutôt mince. On a relancé la Juvaquatre et la Renault 4CV est arrivée. Même s’il n’est pas suivi à la lettre, il faut bien dire que le Plan Pons limite quand même la marge de manœuvre de tous les constructeurs français. Heureusement, il existe des « failles », notamment quand il s’agit de motoriser la campagne et encore mieux quand il s’agit d’un véhicule utilitaire.

On lance donc l’étude d’une voiture fonctionnelle et robuste qui se placera entre la Juvaquatre et la fourgonnette 1000 kg. Le but est de motoriser tout le monde dans… l’Empire Français. La France est encore un pays très colonial. D’ailleurs cela va donner son nom à l’auto, pas encore visé par la mouvance Woke, alors il ne faut pas le dire trop fort ! En effet, Colorale est en fait la contraction de deux mots d’ordre : COLOniale et ruRALE.

Logo Renaul Colorale- Renault Colorale

Les premières études sont lancées dès 1946. Ses dimensions sont bien plus larges que celles de la 4cv. Même si en 2022 4,27m de long correspond presque à une compacte, c’est 65cm de plus que la « motte de beurre ». Avec ses 1,98m de hauteur et ses 1,75m de large, on s’assure de jouer dans la catégorie des poids-lourds. D’ailleurs la bête est logiquement la plus lourde de la gamme avec 1610kg sur la balance !

Pour le moteur, on choisit aussi du rustique. Évidemment, le Billancourt de la 4CV n’est pas suffisant, pas plus que le « 88 » de la Juvaquatre. Alors on se rabat vers un gros moteur de l’avant-guerre, le « 85 » né avec la Primaquatre en 1936. Soupapes latérales et grosse cylindrée au programme : 2383 cm³. C’est gros, mais ce n’est pas très puissant. 46ch au total, et avec un tel poids, on se rend vite compte que les 100 km/h en pointe sont avancés mais rarement atteints. Cerise sur le gâteau : pour emmener un tel mastodonte, il consomme énormément !

Pour sa carrosserie, on la dote d’une calandre rappelant vaguement la 4CV avec ses moustaches et ses phares à l’avant des ailes mais pour le reste on se contente surtout d’habiller le volume. Pour faire face à la demande en 4CV, les usines Renault ne pourront pas tout faire… c’est pourquoi on a notamment envisagé un arrière « woodie » ou « boulangère » avant de se rabattre sur l’acier. C’est donc Chausson qui produira les carrosseries, l’usine de Boulogne-Billancourt n’assurera que l’assemblage final.

Comme la Vedette chez Simca quelques années plus tard, la Colorale c’est en fait une vraie gamme. On retrouve donc la Colorale « de base » avec ses versions pick-up, Taxi 7 places, plâteau-ridelles, fourgonnette et même un châssis-cabine pour qui voudra créer une ambulance ou un fourgon spécial.

Mais la première de la gamme, c’est la Renault Colorale Prairie. C’est la moins utilitaire de toutes puisque c’est un break vitré. Dans la ligne droite des visées coloniales de l’auto, on propose aussi la Savane, un break colonial selon l’appellation officielle qui n’a que deux portes. Pour aller dans le sens d’une utilisation dans les pays chauds, des rideaux peuvent occulter les ouvertures à l’arrière et le pare-brise peut s’entrouvrir !

Évolutions de la Renault Colorale

Après la présentation de la Renault Colorale Prairie en Mai 1950 à la presse dans le parc de Bagatelle, puis au public au salon de Paris d’Octobre de la même année la gamme se met en place et la commercialisation débute. Son type chez Renault R2090 pour les Savane, Taxi et Prairie, R2091 pour les autres, annonce la couleur, le 2 étant l’apanage des utilitaires légers de la marque.

Les fourgonnette, pick-up et châssis-cabine ne sont disponibles qu’au bout de quelques mois. En un an, le succès est très relatif avec 11.500 Renault Colorale vendues alors que l’assemblage a été lancé dans l’usine belge de Jaren.

En 1952, le panel est complet avec la présentation de la version 4×4 avec une transmission Sinpar. Haute sur pattes, elle se veut vraiment franchisseuse avec sa transmission et ses nombreux renforts. Problème : le moteur. Sa puissance faible et sa consommation forte sont des freins à l’achat. En 4×4, il a bien du mal à emmener l’auto. Et ça vaut finalement pour toutes les versions.

Ce crossover à l’ancienne ne réussit pas ce que la prouesse des crossovers modernes. En fait, elle ne ment pas. Ceux qui veulent du rustique peuvent le trouver facilement. Les GMC et autres Jeep sont présents en nombre dans les campagnes, laissés sur place par les forces alliées de la seconde guerre mondiale. À l’opposé, quand on cherche un break familial, même si le volume de la Renault Colorale Prairie est intéressant, sa ligne est instantanément ringardisée quand on la met en face de la Peugeot 203 par exemple.

Cela joue plus sur certaines versions. Par exemple la version Taxi est quasiment abandonnée en 1952 et se retrouve vendue uniquement sur certains marchés étrangers via le carrossier Carrier.

Renault Colorale- Renault Colorale

Pour la forme, on ne peut pas faire grand chose. Pour ce qui est du moteur, on profite de la nouvelle gamme Renault, la Frégate, pour lui piquer son moteur à partir de 1953. Ce 11cv Type 668 de 1996 cm³ est directement pensé pour remplacer le Type 85. En alu chemisé avec soupapes culbutées et plus latérales, il sort 58ch. Une puissance accrue mais une souplesse en baisse. Dommage pour une voiture utilitaire !

Cela ne relance pas du tout les ventes. Pire, Renault perd de l’argent sur chaque Renault Colorale! Pourtant le prix de l’auto lui-même élevé et un frein à son succès. Le vrai souci c’est que le contrat établi avec Chausson ne permet pas de stopper la production si facilement. Si on décide d’arrêter la production en 1954, on ne peut pas. On lance donc deux nouvelles versions : le pick-up simplifié et une auto-école pour l’armée néerlandaise ! On ajoute ensuite la Prairie Service, dépouillée, et la Prairie « Union Française », baroudeuse sans être un 4×4.

Il faut attendre 1956 pour voir les dernières Renault Colorale sortir des chaînes. Et malgré tout l’auto reste au catalogue pendant encore un an avant que les stocks ne soient écoulés.

Avec 38.150 exemplaires vendus, il est impossible de parler de succès pour les différentes versions de la Renault Colorale. Le break Frégate Domaine qui prend le relai ne fera, d’ailleurs, pas beaucoup mieux.

L’idée du Crossover était bonne. Mais elle avait plus de 50 ans d’avance…

La Renault Colorale de nos jours

C’est le genre d’autos pour laquelle le plus dur sera d’en trouver une ! Les laborieux n’ont pas toujours bien traversé le temps… Néanmoins un modèle propre en plateau bâché se dénichera autour des 4000 €.

Si vous cherchez une Renault Colorale en version 4×4, déjà ce sera encore plus dur d’en trouver une… et ensuite vous pourrez tabler sur un budget de 10.000 €… et faites attention aux pièces !

Cote Collector Car Value

Benjamin

http://newsdanciennes.com

Passionné d'automobile ancienne, il a créé News d'Anciennes en 2013 à force de se balader sur les salons sans savoir quoi faire de ses photos. Conducteur occasionnel de Simca 1100 il adore conduire les voitures des autres, dès qu'elles sont un peu plus rapides !

Commentaires

  1. Sébastien Vitre

    Merci de ce site à vous ou je re-découvrir mon auto sur des photos si vous voulez la voir je si président du clubs de pinterville 27400 on se rassemble 2 dimanche de chaque moi à la mairie de pinterville se sera avec plaisir de vous balader sur les route du village

    Répondre · · 4 janvier 2023 à 13 h 43 min

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