Renault 16, la grande Renault qui cassa les codes

Publié le par Thomas

Renault 16, la grande Renault qui cassa les codes

Si la Renault 16 est l’une des voitures emblématiques de l’histoire automobile française avec plus de 1.8 million d’exemplaires vendus, on ignore trop souvent l’impact accompagnant sa sortie. Elle fut en effet la première berline à cinq portes (avec un hayon donc) du marché, une configuration aujourd’hui toujours d’actualité.

La genèse du nouveau haut de gamme de Renault

Dreyfus- Renault 16

Arrivé en 1955 à la tête de Renault, Pierre Dreyfus avait un plan d’avenir établi sur le long terme pour la marque. Connu pour anticiper la demande et faire confiance à son équipe, il estimait important le développement de voitures accessibles au plus grand nombre mais présentant néanmoins de grandes innovations.

Exit donc la formule tout à l’arrière jugée vieillissante sur le créneau des populaires et place au moteur à l’avant ! C’est dans ce contexte que fut remplacée la 4CV par la Renault 4 en 1961, adoptant la traction inaugurée sur l’Estafette.
Le milieu de gamme était alloué à la R8, lancée en 1962, qui conservait, elle, le schéma classique. 

En haut de l’échelle, la Frégate arrêtée en 1960 laissait un grand vide en tant que modèle étendard du constructeur de Boulogne-Billancourt. Comment occuper alors cet espace vacant ?

Renault Frégate Phase 2 1- Renault 16

Les choses furent en fait mises en branle dès la fin des années 1950. René Dreyfus motiva ses ingénieurs pour trouver des idées et en découla, en 1958, le projet 114. Désigné comme statutaire, il s’agissait d’une propulsion à quatre roues indépendantes et équipée d’un moteur six cylindres en ligne en aluminium 2.2 L, aux lignes signées Gaston Juchet. L’étude fut toutefois stoppée puisque jugée peu viable dans le cas d’un passage en série mais également pas assez innovante.

Il fallait alors repartir à zéro. Le projet 115 (en 1963), sous la houlette du directeur d’études Yves Georges, adoptait cette fois un quatre cylindres tandis que la traction fut envisagée. Le style, toujours sous le coup de crayon de Juchet, se démarquait de P114 avec une ceinture de caisse plus basse, des formes plus arrondies. La partie frontale intégrait un V central séparant des barrettes de calandre horizontales et des phares rectangulaires, une apparence que l’on retrouvera quasi inchangée sur la version de production.

Gaston Juchet pouvait compter sur Claude Prost-Dame, en charge de la partie carrosserie; ils étudièrent même ensemble la possibilité d’un coupé voire d’un coupé-cabriolet !

Au fil des mois, le cahier des charges de la Renault 16 se précisa : être à mi-chemin entre la berline et le break, disposer d’une modularité exemplaire grâce à un plancher plat et une banquette arrière amovible, plaire autant aux familles qu’aux nouveaux cadres mais aussi offrir une polyvalence et un confort à toute épreuve.

Elle fut officiellement dévoilée en mars 1965 à l’occasion du salon de Genève. C’est une berline bicorps à hayon, avec quatre roues indépendantes, à bloc quatre cylindres Cléon aluminium et barres de torsion qui s’offrit alors aux visiteurs curieux de découvrir cette nouveauté.

La Renault 16 entre 1965 et 1969

L’accouchement d’une longue 16arienne

Entre le projet 114 en 1958 et la commercialisation de la Renault 16 en 1965, sept longues années se sont écoulées. Ce temps de gestation permit aux équipes mobilisées de lever le voile sur une auto pensée comme différente et fonctionnelle. Le pavillon haut était dispensé de gouttières, le profil affichait six vitres alors que le pavillon haut permettait une excellente habitabilité.

À l’intérieur, une planche de bord aux tons clairs cohabite avec une platine rectangulaire argentée regroupant les instruments, disposée derrière un grand volant. Un étonnant système de chauffage/ventilation par nappes d’air trouvait également place. L’air était canalisé avant de pénétrer dans des orifices menant à un radiateur à ailettes, avant d’être diffusé en direction des passagers à travers une grille au sommet du tableau de bord.

La banquette arrière était amovible et coulissable, permettant un grand nombre de possibilités. Du simple voyage avec les enfants (et/ou le chien !) installés sagement au chargement d’objets imposants grâce au hayon et à l’assise basculée, les usagers avaient le choix.

Intérieur R16 1- Renault 16

L’extérieur faisait la part belle au chrome puisque celui-ci se trouvait au niveau des pare-chocs, de la calandre, des baguettes diverses, des poignées sans oublier le bandeau central badgé Renault sur le coffre entre les feux en amande.

R16 34 avant- Renault 16

Sous le capot, on retrouvait le tout nouveau quatre cylindres Cléon avec bloc et culasse en aluminium, il devint logiquement le Cléon-Alu par opposition au Cléon-Fonte. D’une cylindrée de 1470 cm³, il développait 55 ch grâce à un carburateur Zénith. La transmission aux roues avant s’effectuait via une boîte de vitesses à quatre rapports.
Les freins sans assistance comprenaient des disques AV et des tambours AR.

Elle avait l’originalité d’avoir un empattement gauche différent de celui de droite, avec un écart de 7 cm, suite au montage de barres de torsion transversales à l’arrière. Cela n’affecta toutefois pas la tenue de route, jugée très bonne par la presse de l’époque.

Les évolutions de la Renault 16 : en douceur

À son lancement en 1965, la Renault 16 ne fut disponible qu’en une seule version. Ses premiers exemplaires étaient reconnaissables à l’absence de losange Renault au niveau de la calandre.
À partir du mois août, le catalogue comptait désormais trois finitions : Luxe (banquette AV), Grand Luxe (sièges AV séparés et boîte à gants sans couvercle) et Super (sièges AV séparés, boîte à gants fermable, banquette AR avec accoudoir, vide-poches et peinture métallisée en option).

Le millésime 1966 fut l’occasion de monter un losange sur la calandre (septembre 1965) ainsi qu’un monogramme Renault 16 sur la planche de bord (octobre 1965). Autre élément intérieur, les trappes de ventilation/chauffage furent remplacées en décembre 1965 par des volets pivotants.

On note aussi que la R16 est couronnée voiture européenne de l’année 1966.

L’année-modèle 1967 fut surtout marquée par la pose d’une planche de bord en simili noir avec le combiné d’instruments et le centre du volant imitation bois. Son bandeau supérieur était gréé d’une grille de ventilation courant d’un bout à l’autre. Les portes, elles, gagnaient des garnitures à motif vertical.

A partir de septembre 1967, la planche de bord optait pour une finition givrée. La version Super s’enrichissait d’un accoudoir escamotable à l’avant.

Mais la véritable nouveauté survint avec l’introduction de la 16 TS en mars 1968. Elle disposait d’un bloc 1.565 cm3 à culasse hémisphérique développant 85 ch grâce à un carburateur double corps, de quoi espérer 165 km/h en pointe. Elle se distinguait du reste de la gamme par des projecteurs à iode à l’avant, une lunette arrière dégivrante, quatre cadrans ronds, des monogrammes “16 TS” sur le hayon et les ailes arrière, des sièges AV enveloppants et une planche de bord en simili brun.

Renault 16 TS 1968- Renault 16

Pour son millésime 1969, la 16 TS recevait deux feux de recul tandis qu’une version 16 TA rejoignit le catalogue. Celle-ci disposait du moteur 1.565 cm3 de la TS mais avec une puissance réduite à 67 ch puisqu’elle n’était pas équipée de la culasse hémisphérique. La boîte de vitesses était une automatique à trois rapports avec convertisseur hydraulique.

IMG 5967 resultat- Renault 16

La Renault 16 entre 1970 et 1974

La R16 met le cap sur le haut de gamme

Pour marquer son entrée dans la décennie 1970, la 16 reçut une planche de bord à l’aspect plus cossu. De part et d’autre apparaissait un aérateur rond et orientable. La TS recevait en sus une montre électrique. L’ensemble de la gamme se vit équiper dès avril 1970 de ceintures de sécurité à l’avant.

Le millésime 1971 marqua un changement stylistique. En effet, tous les modèles évoluaient avec des feux arrière rectangulaires surplombés par un bandeau noir intégrant le lettrage “Renault” à gauche et le monogramme de la version à droite. D’un point de vue technique, le bloc 1565 cm³ était généralisé. La TA à boîte automatique disparaissait tandis que la Super était remplacée par les L et TL.

La gamme s’établissait ainsi : L (67 ch et sièges AV fixes sans accoudoir), TL (67 ch, sièges AV inclinables avec accoudoir), TL automatique (67 ch et boîte auto trois rapports), TS (85 ch à quatre rapports) et enfin TS automatique (boîte auto trois rapports).

L’année-modèle 1972 fut plus “calme” avec simplement la suppression des feux de position sur les ailes AV tandis que les modèles de gamme recevaient un compteur kilométrique journalier.

Cela contrastait avec 1973, aux changements plus conséquents. Un nouveau losange pointa le bout de son nez, les portières se paraient de serrures de sécurité et la commande d’essuie-glaces s’éclairait la nuit. La L perdait ses entourages de vitres latérales chromés au profit d’une peinture ton caisse.

Une nouvelle planche de bord fut disposée à l’intérieur des L & TL avec un centre de volant noir et un combiné d’instruments rectangulaire plus moderne.

La Renault 16 entre 1975 et 1980

Le plastique c’est fantastique !

Pour se la jouer plus discrète, la Renault 16 profita du millésime 1975 pour se parer d’une nouvelle calandre en… plastique noir. Seule la nouvelle TX conservait son élément chromé. La L perdait même ses enjoliveurs de roues. Ce passage au plastique pour la majeure partie de la gamme avait plusieurs explications.

D’abord, elle permettait de faire des économies de production. Ensuite, elle permettait de distinguer les versions classiques, à portée populaire, de la TX, réservée davantage à une élite. Enfin, la Renault 20 fut lancée en novembre 1975 et il était donc logique de lui laisser une nouvelle place.

En 1976, l’ensemble des modèles voyait son premier rapport de boîte raccourci et ses essuie-glaces passer au noir. La puissance de la L fut réduite à 55 ch en raison d’un taux de compression plus faible (8.0:1). Sur la TS et la TX, la commande d’essuie-glaces s’effectuait désormais via un levier. Les L et TS étaient uniquement disponibles en boîte manuelle.

La Renault 16 continua son déclin pendant l’année-modèle 1977 avec l’arrêt des versions L et TS. La TL était disponible en deux niveaux de puissance : 55 ch (taux de compression de 8.0:1) et 65 ch (8.6:1). Une TL automatique fit également son arrivée, avec le bloc 1.647 cm3 assorti d’une boîte auto à quatre rapports pour une puissance de 68 ch.

Sur la TX, la planche de bord troquait ses entourages chromés contre du noir tandis que les cadrans adoptaient un éclairage vert et des aiguilles orange. Finis aussi les enjoliveurs d’ailes et la calandre chromée, désormais noire.

Renault 16 1977- Renault 16

Le millésime 1978 marqua la fin de la TL de 55 ch. Le reste de la gamme adopta un garnissage de pavillon façon “grain de vache vanille” (même teinte que les sièges auparavant). Sur les TL restantes, les feux de recul furent incorporés aux blocs optiques arrière.

Les dernières années de production virent logiquement peu de modifications. En juillet 1978, les ceintures de sécurité furent montées de série à l’arrière tandis que les phares devinrent bicolores. Un an plus tard, la TL automatique fut arrêtée.

En mai 1980, la Renault 16 tira sa révérence lorsque la dernière TX quitta le site de production. En tout, 1.851.502 exemplaires furent assemblés en quinze ans, un excellent score !

Elle fit même une courte carrière aux États-Unis entre 1968 et 1972 sous l’appellation “sedan-wagon” avec un moteur 1.565 cm³ de 62 ch, des phares ronds dits “sealed beams”, des feux de position, une planche de bord spécifique ou encore des pare-chocs renforcés.

La Renault 16 de nos jours

La Renault 16 était donc une voiture plutôt haut de gamme. Et cela a contribué à la préserver, on en trouve encore beaucoup sur nos routes. En plus, comme notre essai le prouve, elle est encore à l’aise dans la circulation actuelle et peut tout à fait être une auto de tous les jours !

Les pièces se trouvent en nombre et acheter une Renault 16 ne sera pas si compliqué. Comptez 3000 € pour les TL, les versions de base. Ensuite les autres modèles s’échangent entre 4000 et 4500 €. Enfin le haut de gamme (presque sportif) la Renault 16 TX se trouve aux alentours des 6000 €. Une bonne pioche assurément !

Banniere PA Renault copie- Renault 16

Photos additionnelles : Groupe Renault

Thomas

https://numeroschassistb.com/

Passionné d'anciennes en général mais vouant surtout un culte aux Facel Vega (au grand dam de son entourage...), il a rejoint News d'Anciennes en 2015 suite à une discussion impromptue lors de Rétromobile avec Benjamin. Il est propriétaire d'une Talbot Samba Cabriolet datant de 1983.

Commentaires

  1. Luc

    La légende disait qu’elle aurait été piratée de chez un autre constructeur??? Ce qui expliquait le changement de conception… mais c’est peut être l’inverse…. quand on voit ce qu’on voit, on a bien raison de penser ce qu’on pense

    Répondre · · 16 mai 2020 à 18 h 28 min

  2. Philippe

    Quelle légende ? Hormis la bagarre avec Citroen pour la soudure toit-côté de caisse dont le principe provenait de Simca dont le bureau de style a été dissout par Chrysler (Opron chez Citroën et Luc Louis chez Renault). Luc Louis a beaucoup donné à la R16 même si Gaston Juchet en est le père légal.

    Répondre · · 16 décembre 2021 à 23 h 21 min

  3. Jean-Pascal

    J’ai le souvenir de la 16 TS comme etant la première à avoir proposé des vitres électriques à l’avant.
    Et la TX arborait aussi un petit aileron en haut du hayon.

    Répondre · · 25 février 2024 à 8 h 16 min

    1. Philippe

      Exact la 16TS la 1ere française avec lève-vitres électrique. Et la TX la 1ere avec condamnation centrale. Renault et Neiman en pointe.

      Répondre · · 27 février 2024 à 13 h 24 min

  4. FredJx

    J’en ai possédé une de 1967, ma première voiture, donnée par mon père ; moteur cassé à 70000 km, la voiture se vautrait dans les virages et la rouille attaquait bas de caisse et ailes avant, une 4L lui a succédé, ces 2 voitures m’ont définitivement dégoûté de la marque…

    Répondre · · 26 février 2024 à 20 h 58 min

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