La Citroën DS a-t-elle piqué les phares de la Panhard 24 ?

Publié le par Benjamin

La Citroën DS a-t-elle piqué les phares de la Panhard 24 ?

En 1967, la reine de la route made in France, la Citroën DS, passe par la case modernisation. Le travail est réussi, tellement que la grande routière Citroën restera dans les mémoires avec ce regard, et pas avec les feux ronds des premiers modèles. Mais certains ont toujours un « vol » de ce style, un vol à l’intérieur même de la famille des chevrons : chez Panhard.

Une histoire qui remonte à loin !

Tout débute en 1955. Doublement si on peut dire ! Cette année là, Citroën fait sensation. La Citroën Traction, sur les routes depuis 21 ans maintenant, va laisser sa place à une auto qui pousse l’innovation bien plus loin que les seules roues avant motrices. C’est l’arrivée de la Citroën DS, en grandes pompes, au salon de Paris, et avec elle des dizaines de milliers de commandes fermes.

Presentation Citroen DS 1955-

Mais un autre événement est marquant pour l’année 1955 : le rapprochement de deux sociétés. Citroën a en effet pris une participation dans la marque Panhard. Cette dernière est alors en perte de vitesse, même si ses créations n’ont rien à envier à celles des chevrons quand il s’agit de la technologie ou de l’inventivité. Un véritable mariage de raison qui va évoluer petit à petit.

L’histoire des phares débute… à Sens !

En 1961, le service compétition de Citroën veut faire un coupé sur la base de sa DS. Mais devant les faibles moyens alloués, il faut aller chercher à l’extérieur pour ce qui est de la carrosserie. Chapron est déjà bien occupé avec les cabriolets DS mais il existe UN carrossier qui s’est démarqué dans la transformation d’autos de série, souvent pour la course, et que les désormais cousins de Panhard connaissent bien. Il est basé à Sens, c’est Pichon-Parat.

Pichon-Parat s’attaque alors à la fabrication d’un Coach DS sur la base de berlines qu’ils reçoit terminées. Le coach effet une carrosserie plus sportive. Les portes arrières sont supprimées, le pavillon est abaissé et reçoit une vitre arrière plus carrée, à la manière des coupés réalisés par Chapron. L’arrière est « tronçonné » façon Kamm-Back, ce qui améliore significativement le Cx, et reçoit des phares ronds de Simca 1000.

DS par Pichon Parat-

La modification est encore plus présente à l’avant. Sur le capot trône une entrée d’air et les ailes abandonnent l’arrondi. Des ailes « profilées type Le Mans » sont posées, plus basses, avec des phares à iode Cibié mieux intégrés puisque carénés.

Dès lors, Pichon-Parat va se mettre à transposer cette transformation de l’avant sur des autos de série, amenées par des clients. Certains le font sur des berlines, d’autres demandent une transformation en cabriolet, comme cette auto de 1961 vendue par Artcurial en 2018. Et retenez bien la date de 1961 !

Ensuite nous voilà en 1963. C’est cette année-là que Panhard sort sa dernière automobile de série : la 24. L’auto propose un aspect qui diffère des précédentes créations de la marque. Surtout, elle comporte des phares Cibié carénés qui vont intéresser Pichon-Parat. En bonne relation avec l’équipementier, il va réussir à en obtenir. C’est ainsi qu’à partir de 1964, les Citroën DS revues par les sennonais se dotent réellement de phares de Panhard.

Citroen DS a phares Panhard Car Design Archives-

En 1963, l’équipe du style de Citroën est également chargée de revoir la mythique Citroën DS. Flaminio Bertoni est à la baguette. Ou plutôt à la masse. La légende raconte qu’il va s’attaquer avec cet instrument à une maquette en plâtre. Il vise particulièrement les ailes. Ensuite, il crée des ailes qui ne sont pas sans rappeler celles des Pichon-Parat. Le génial sculpteur italien décède brutalement en 1964. Robert Opron récupère alors les commandes et va poursuivre dans la voie ouverte par Bertoni pour remodeler la DS.

Autre étape : 1965. C’est désormais la prise de contrôle officielle de Panhard par Citroën. Mais finalement, cela n’a pas énormément d’importance pour notre histoire.

Les nouveaux phares de la Citroën DS

Nous voilà donc arrivés au Salon de Paris 1967. L’équipe du style Citroën a travaillé pendant quatre années à la nouvelle face avant de la Citroën DS. Les phares sont carénées, les ailes sont aplaties, cet avant est bien plus moderne.

La question de base était : la Citroën DS a-t-elle piqué les phares de la Panhard 24 ? On peut à ce moment-là voir que… non. Certes, l’inspiration y est, mais ce n’est pas la première fois qu’une belle trouvaille est réutilisée dans l’histoire de l’automobile.

Surtout que l’idée est retravaillée, certains diront améliorée. Les deux phares sont bien juxtaposés et sous verre, mais c’est là tout. Les phares de la DS forment un sourcil haut qui se prolonge en créant un renflement de l’aile. Une spécificité que n’ont pas les DS revues par Pichon-Parat dont les ailes sont plus rondes et plates.

Ajoutons également que ces projecteurs sont désormais munis d’une articulation, permettant d’éclairer le virage pris par l’auto. Une chose que ni les Panhard 24, ni les Pichon-Parat n’ont jamais proposé !

Là où l’histoire se répète, c’est que les phares sont fournis par… Cibié !

Avec cette nouvelle DS, les demandes de modifications reçues à Sens sont terminées ou presque. Quelques autos comportant l’ancienne face avant sont commandées mais c’est bien tout. Au total, le nombre de transformations aurait été d’environ 300. Le carrossier signera encore quelques coups avant de disparaître en 1983, longtemps après les dernières créations !

La Panhard 24 ? Elle essayera de se mettre dans le moule Citroën en proposant une berline ou un cabriolet. Ils sont rejetés par Javel. Les hybrides, des 24 à moteur et châssis de DS, des DS à moteur de 24, seront refusés. Évidemment, la 24 équipée du V6 de la SM aura le même sort. En fait, les dernières Panhard 24 sont sorties de l’usine en Juillet 1967, quelque semaines avant la sortie de la « nouvelle » DS.

Cette nouvelle DS relancera vraiment le modèle. Citroën consentira à de gros efforts techniques, notamment dans les motorisations, élevant la DS vers un haut de gamme qui tranche avec le reste de la production de la marque. Et elle gardera cet avant si original, celui qui est mis en avant par de nombreux stylistes, aujourd’hui encore, et qui reste l’avant le plus « évident » dans la tête des collectionneurs et amateurs.

Photos supplémentaires : Aventure-Citroën-Mini et Car Design Archives

Benjamin

http://newsdanciennes.com

Passionné d'automobile ancienne, il a créé News d'Anciennes en 2013 à force de se balader sur les salons sans savoir quoi faire de ses photos. Conducteur occasionnel de Simca 1100 il adore conduire les voitures des autres, dès qu'elles sont un peu plus rapides !

Commentaires

  1. jeanlucchotard

    J’ai appris quelque chose, merci beaucoup 🙂

    Répondre · · 16 août 2022 à 16 h 57 min

  2. Jacques

    Ce n’était qu’un début, et en plus c’était avec préméditation. Ciroën a bien tué Panhard c’est une honte !

    Répondre · · 16 août 2022 à 17 h 55 min

    1. Benjamin

      C’est une question que je voulais aborder dans un autre article. Parce qu’au final, Citroën n’a fait que donner les derniers sacrements. C’est le plan Pons qui a voulu tuer Panhard et la marque a survécu pendant des années en jouant sur sa créativité mais sans se remettre financièrement.

      Répondre · · 17 août 2022 à 9 h 09 min

  3. LUCAS Jean-Jacques

    Mais, ce n’est plus News d’anciennes, mais la Revue de l’Art ou le Congrès Archéologique ! Cela me plait bien ! Cette histoire de phares sous verrière ou carénés parait une vogue des années 50/60 jusqu’à l’orée des 70’. On peut leur ajouter celle des phares escamotables remontant au moins aux Cord de Buehrig en 1935. La « Panard et Levassor » ultime était basse, ses ailes avant aplanies. La force du dessin de l’équipe Bertoni/Opron c’est d’avoir soumis l’aile de la DS au système d’éclairage et non d’y avoir enfoncé l’objet dans une sorte d’orbite. Qui plus est, la DS de l’automne 1967 termine la mutation commencée avec le modèle 63, continuée avec les feux additionnels « boules ». C’était le côté Monte-Carlo de la 21 disqualifiant l’aile cendrier et le phare fuselé. La DS était monumentalisée par cet avant massif et si ingénieux. Les phares directionnels ainsi esthétisés valaient mieux que le type « fouilleur » de la Tucker ou des tentatives des années 20. Le carrossier Pichon-Parat bien inspiré mettait, pour sa part, à l’horizontale les parures verticales vues chez Mercedes-Benz, avec élégance chez Facel ou sur la DB Le Mans de 1962. Peut-on aussi faire le lien avec le phare rectangulaire de la CD Panhard de 1964 ? Et les phares doubles connotent « grand sport ». Finalement l’atelier de style Citroën a étiré la membrane vitrée jusqu’au bord de la cavité. L’aile et le phare ne font qu’un, forme et fonction s’unissent. Ce phare est une aile, cette aile fait la coquille du phare. Á l’extrémité la grande optique, à l’intérieur le petit phare directionnel issu de la boule des 21 modèle 1966. Le phare Pichon-Parat de la DS et celui de la Panhard 24 sont de la même limonade. Le phare « ailé » de la DS du Salon 67 est une œuvre de design aboutie, un luminaire à installer debout. La DS Pichon ne changeait pas grand-chose, sinon avait à voir avec le fameux prototype C60 (tiens on songe à la P60). La DS 67 change de statut avec cette solution si réussie, aux phares tournants. La rampe de la SM vient plutôt du prototype Dino vu au Salon de Paris 65, phares orientables en sus. Mais, quel spectacle ! Et Gandini initiait, en 63, depuis son œuvre matrice Chevrolet Testudo, les optiques basculantes, les « yeux au ciel » au repos. On les a revues celles-là ! Miura, 850 spider, Samantha Vignale, Porsche 928.

    Répondre · · 16 août 2022 à 23 h 22 min

  4. philippe pasco

    belle histoire merci

    Répondre · · 18 août 2022 à 19 h 31 min

  5. Olivier 11300

    La 3 ème face est l’œuvre de Robert OPRON, il y avait une demande de productivité de Citroën. Les ailes des débuts demandaient beaucoup d’opérations d’emboutissage (une dizaine de mémoire) et moitié moins avec les nouvelles ailes…ça a été décisif dans le choix.

    Répondre · · 20 août 2022 à 10 h 26 min

  6. caouine

    pourquoi noter 1961? les ailes « le mans » comportaient un phare simple sous bulle ; Pichon Parat a monté des phares doubles après avoir pu utiliser les optiques  » panhard 24″. Quand la ds 68 est sortie, toute la presse a fait le rapprochement avec la 24, Panhard ayant été absorbé par citroën en 65. Que l’idée ait été approfondie, l’inverse aurait montrè une grosse paresse de la part du bureau d’ études citroën. Quand à la fin de panhard, elle est très bien expliquée dans les livres de B Pérot ou B Vermeylen.

    Répondre · · 20 août 2022 à 16 h 26 min

  7. Vincent

    Quel dommage qu’on ne puisse pas zoomer sur le texte et les photos

    Répondre · · 21 août 2022 à 21 h 34 min

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