Alpine A108, bien plus qu’un modèle de transition

Publié le par Benjamin

Alpine A108, bien plus qu’un modèle de transition

On s’est déjà intéressé à presque tous les modèles de route de la marque de Dieppe. Presque tous, sauf l’Alpine A108. Et finalement, nous ne sommes certainement pas les seuls à avoir un peu « oublié » cette petite sportive, coincée entre l’initiatrice de la marque, l’A106 et la mythique Berlinette A110 qui installa définitivement la légende d’Alpine. Pourtant, quand on regarde bien, c’est bien à l’A108 que la marque doit tout.

Quand Alpine passe la seconde

Dés le début des années 50, Jean Rédélé veut lancer sa propre voiture de sport, basée sur la 4CV. La genèse va être longue et finalement, en 1995 il lance les 4CV Alpine, rebaptisée Alpine A106 et reprenant en fait la numérotation internet à Renault (la 4CV étant le projet 106, vous avez suivi)… qui n’ont pas été conçues par ses soins ! Ces coachs reprennent donc le moteur Billancourt de la petite populaire française et permettent de lancer la marque. Le démarrage commercial prend du temps mais on ne lésine pas sur le développement et de nouvelles version apparaissent.

En 1957, l’Alpine A106 devient une gamme puisqu’on présente également une version Cabriolet dont le dessin plus élégant est à mettre au crédit de l’italien Michelotti. Sauf que ce n’est pas la seule nouveauté présentée par la marque. Sur le stand du salon de Paris trône la nouvelle Alpine A108. Et il faut faire attention pour les identifier.

En effet les Alpine A108 sont deux, un coach et un cabriolet. La nouveauté, c’est que ces autos abandonnent le 747cm³ de la 4cv pour passer au 845cm³ de la Dauphine. En tout cas sur l’Alpine A108 de base puisqu’une version spéciale propose de l’équiper du Ventoux (37ch au lieu de 31) tandis qu’une A108-904 (pour la même cylindrée) propose un moteur poussé à 50ch pour 150km/h en pointe ! Pour autant la caisse de ce coach et de ce cabriolet sont identiques aux A106 et le tout repose sur le châssis de la 4cv.

Côté nom, l’Alpine A108 peut surprendre. L’A106 reprenait le numéro du projet chez Renault. Hors la Dauphine était le projet… 109 tandis que le projet 108 était celui d’une grosse berline abandonnée et remplacée par la Frégate. Est-ce pour se démarquer de la Dauphine, puisqu’on utilise toujours la base de la 4CV qu’on a changé de numérotation ? Mystère !

Plus de modèles et plus de sport

Après ce lancement avec deux modèles complémentaires, l’Alpine A108 va peu à peu devenir le modèle central de la marque. On abandonne pas les Coach, toujours produits à Brie-Comte-Robert chez Chappe mais Rédélé veut mettre son atelier dieppois, RDL qui produit le cabriolet, au centre de sa stratégie.

Au salon de Paris 1958 on dévoile une première nouveauté. Afin de mieux différencier l’Alpine A108 cabriolet du coach, on remplace son pare-chocs avant, composé jusqu’alors d’une fine lame semblable à celle du coach. Le pare-chocs s’épaissit autour d’un support de plaque d’immatriculation entouré par deux bananes chromées et renforcé de butoirs empruntés chez Simca.

Alpine A108 Cabriolet Phares droits- Alpine A108

L’année suivante, on fait encore mieux comprendre à Chappe que le Coach est sur sa fin. Cette fois il va être concurrencé en interne par une nouvelle carrosserie qui sera encore commune aux Alpine A108 et A106 et qui peut donc recevoir toutes les mécaniques de la gamme. Ce modèle c’est le Coupé Sport, une carrosserie qu’on pourrait appeler Coupé Hardtop puisqu’on a repris la caisse d’un cabriolet avant de lui ajouter un toit rigide. Cette nouvelle carrosserie, comme le cabriolet, reçoit une nouvelle planche de bord redessinée.

On en profite aussi pour sortir une nouvelle motorisation qui va pouvoir se monter sur les Alpine A108. On prend en effet le moteur de la Dauphine Gordini et on le réalèse pour atteindre 998cm³. Le moteur sort alors 70ch SAE. Il est d’office couplé à une boîte 5 à crabots et envoie l’Alpine A108 à 170km/h !

La liste des options s’allonge aussi. Les boîtes 4 et 5 sont proposées sur les autres motorisations tout comme un autre couple conique 7×29. Et si c’est le châssis qui pose souci, la suspension arrière à doubles amortisseurs Mille Miles peut aussi être commandée. Toutes ces options sont facturées à prix d’or mais il faut absolument faire rentrer de la trésorerie. La fabrication de toutes ces autos est artisanale et les cadences sont encore faibles.

La Berlinette qui change tout à l’Alpine A108

Au Tour de France Automobile 1960 (15 au 23 Septembre), voilà une nouvelle Alpine A108 qui débarque. Une nouvelle carrosserie en tout cas. En partant de la base du cabriolet, on a complètement changé le dessin de l’auto. L’arrière est étiré et abandonne le hardtop pour devenir une vraie Berlinette. D’ailleurs, la face avant est également redessinée. Finie les phares droits, ils sont maintenant sous bulle et enserrés dans un avant plus arrondi et plongeant. Une toute nouvelle auto qui fait plus parler par son physique que par ses résultats sportifs.

En Octobre, c’est le salon de l’automobile à Paris. Si la nouvelle Alpine A108 Berlinette « Tour de France » attire tous les regards, c’est en fait toute la gamme qui a changé. Le cabriolet et le coupé sport ont également adopté la nouvelle face avant, bien plus sexy et moins datée que celle apparue sur le coach A106. D’ailleurs, les coachs A106 et A108 sont aux abonnés absents.

En effet, il n’y a pas qu’une seule nouvelle carrosserie sur le stand, il y en a bien deux. Chappe, voyant le Coach être progressivement exclu, décide de créer une nouvelle carrosserie : l’Alpine A108 2+2. Le dessin n’emballe spécialement Rédélé (c’est la seule auto de la marque à ne pas recevoir la ligne Tour de France) mais au moins il ne lui a rien coûté en développement. Par contre, cette auto est la première Alpine a introduire un principe que Rédélé aurait vu voir dès le début sur ses voitures. Plutôt que d’utiliser la lourde plateforme de la 4CV, il veut en effet créer un châssis poutre et c’est enfin chose faite.

D’ailleurs, à partir de 1961, ce châssis est généralisé aux 4 carrosseries de l’Alpine A110. Techniquement, c’est un plus et commercialement, entre la nouvelle ligne et les avancées techniques, on accélère enfin la cadence et on rentre des devises. On rentre même des devises… étrangères !

La Willys Interlagos

Si il ne peut pas forcément augmenter ses débouchés locaux, Rédélé veut cependant vendre plus d’autos pour mieux amortir les coûts. Et c’est de l’autre côté de l’Atlantique qu’il va trouver un débouché, au Brésil. Willys-Overland y produit la Dauphine sous licence. Surtout, la population brésilienne est jeune et une petite frange commence à avoir des moyens. Il faut donc une voiture sympa dans la gamme et c’est l’Alpine A108 qui va être choisie, pour sa mécanique Renault mais aussi parce que la production d’une carrosserie polyester ne demande pas de gros investissements.

À la fin de l’année 1961 on présente la Willys Interlagos et elle entre en production au milieu de l’année 1962. Si on connaît, éventuellement, la berlinette, les versions Coupé Sport et Cabriolet sont également produits localement jusqu’en 1966.

Ces développements ont considérablement amélioré la santé d’Alpine. Rédélé décide alors de passer à la vitesse supérieure. Depuis 1960, Renault propose son nouveau moteur Sierra, qui tourne sur 5 paliers et qui cube 956 ou 1108cm³. Oui, c’est le cléon-fonte. Ce moteur va être monté dans la toute nouvelle Alpine A110 qui se différencie par un arrière différent, sans grille, en tout cas sur la berlinette originelle. Avec elle, Alpine attaque une nouvelle phase. Le cabriolet puis le coupé 2+2 (alors appelé GT4) deviennent A110.

Mais l’Alpine A108 n’a pas dit son dernier mot. En 1963 on la produit encore, en berlinette Tour de France, même si les motorisation 845cm³ ont disparu du catalogue, ne laissant que le 998cm³ au catalogue. Et on trouve même un nouveau débouché !

La FASA-Alpine A108

Après le Brésil, c’est en Espagne qu’on va produire des Alpine A108. Là encore, le partenaire local n’est pas choisi au hasard puisqu’il produit également des Dauphine. Les autos sont fabriquées à partir de 1963 à Valladolid. Ce sera une petite production puisqu’elle ne durera que trois ans.

L’Alpine A110 a bien pris le relais mais l’Alpine A108 fait un peu de résistance. On la propose en 1964 avec la boîte 4 rapports de série, avec le radiateur à l’avant et avec les suspensions doubles Mille Miles. On peut même, en option cette fois, la doter d’une culasse hémisphérique et de deux carburateurs. Les toutes dernières autos, fabriquées en 1965 reçoivent les freins à disque de la Renault 8.

Après cela, c’en est fini, en France en tout cas, de l’Alpine A108. Environ 1500 exemplaires ont été fabriqués en France. La ligne « Tour de France » a radicalement changé l’auto car on avait produit seulement 300 autos à phares droits avant cela. On ajoute les 822 Willys Interlagos et les 338 voitures produites par FASA et on se rend compte qu’avant même l’A110, c’est bien l’Alpine A108 qui a vraiment lancé la marque vers les sommets.

Les Alpine A108 de nos jours

Elle est dans l’ombre de l’Alpine A110, c’est évident. Pire, les modèles à phare droits sont souvent confondus avec les A106 ! Du coup son image est confidentielle, dommage tant elle est importante historiquement.

L’Alpine A108 était produite de façon très artisanale avec des changements constants. Il sera parfois compliqué de retrouver la bonne pièce pour en restaurer une. Déjà, évidemment, il faudra en trouver une et il est vrai que les opportunités sont rares. Du coup, il est difficile de donner une vraie cote à cette voiture, sachant que les versions sont nombreuses.

En tout cas, si vous en voyez une, profitez, car ce ne sera pas tous les jours !

Photos complémentaires : Carjager

Benjamin

http://newsdanciennes.com

Passionné d'automobile ancienne, il a créé News d'Anciennes en 2013 à force de se balader sur les salons sans savoir quoi faire de ses photos. Conducteur occasionnel de Simca 1100 il adore conduire les voitures des autres, dès qu'elles sont un peu plus rapides !

Commentaires

  1. Philippe

    Le cabriolet rouge et le cabriolet gris, dépourvus d’ouie latérales sur l’aile AR sont des A110

    Répondre · · 8 mars 2024 à 18 h 35 min

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