La Matra MS 650, des victoires où on ne l’attendait pas

Publié le par Benjamin

La Matra MS 650, des victoires où on ne l’attendait pas

C’est une auto charnière au cœur de l’offensive Matra. La Matra MS 650 n’est au départ qu’un dérivé de l’auto qui la précède dans l’arbre généalogique des protos d’endurance de la marque. Mais elle pose des bases pour les suivantes et, surtout, elle remporte des courses qu’on croyait dévolues à d’autres !

Une double conception

En 1967 la Matra MS 630 est née. Avec son V8 Ford, elle se montre réellement performante l’année suivante quand le V12 de 3 litres dédié à l’endurance est prêt. Ses 24h du Mans 1968 sont chaotiques, malgré l’énorme performance de Pescarolo, sous la pluie et sans essuie-glaces pendant la nuit.

On tire les enseignements et on décide de fabriquer une nouvelle voiture. Sauf que deux « clans » se forment chez Matra. Autour de l’aérodynamicien Robert Choulet on crée la MS 640, autre coupé, hyper profilé, qui va connaître une sortie de route lors d’essais dans les Hunaudières dont Pescarolo sort miraculeusement vivant (mais pas indemne).

Cela ne fait que valider l’autre option qui a été développée chez Matra sport par Bernard Boyer : une barquette. Cette carrosserie a un « avantage » en cas de pluie : la perte d’essuie-glaces est moins impactante. De même, l’aéro y gagne, en particulier la traînée.

Le châssis est très semblable à celui de la MS 630 dont il est issu. En fait certains éléments ont été renforcés, d’autres ont été allégés. À l’arrière on adopte même des suspensions dérivées de celle de la F1 MS 80. L’empattement est réduit de 17 mm tandis que la voie avant est élargie de 40 pour coller aux dimensions de l’arrière. Toutes ces modifications s’accompagnent d’un régime sévère : la Matra MS 650 pèse 861 kg, contre 904 pour la 630.

Le V12 est légèrement modifié et sa puissance atteint désormais les 470 ch.

La carrosserie est donc une barquette ouverte. Avec le changement de réglementation c’est de plus en plus courant dans la classe des 3 litres.

En fait, la Matra MS 650 est prête avant la 640… du moins les modifications sont apportées à un châssis de 630 donnant naissance à la Matra MS 630/650 qui est engagée lors de la journée test des 24h du Mans fin Mars et qui débute sa carrière en course avec un abandon aux 1000 km de Monza à la fin avril.

Matra MS 650 630 aux 1000 km de Monza 1969- Matra MS 650
La Matra MS 630/650 à Monza

La Matra MS 650 aux 24h du Mans 1969

Entre Monza et les 24h du Mans, on ne voit pas de 650 ni de 630/650 au départ d’une course.

Par contre le premier châssis est prêt pour la classique mancelle. Ce sont Courage et Beltoise qui sont au volant et se qualifient 12e. Matra Sport a complété son armada avec Servoz-Gavin – Müller et Galli – Widows sur deux 630/650. On ajoute même un coupé, une 630 M confiée à Guichet et Vaccarella.

Si les voitures ratent la victoire en catégorie 3L, c’est de peu, Jean Pierre Beltoise et Piers Courage sont 4e à l’arrivée et 2e de classe en 368 tours, dans le même tour que la Ford GT 40 de Hobbs-Hailwood. En 5e position avec 359 tours couverts, la MS 630 de Guichet-Vaccarella est 3e de la catégorie. La troisième voiture, 630-650 de Galli-Widdows est 7e à l’arrivée avec 330 tours couverts. La dernière voiture engagée, la 630-650 de Servoz-Gavin et Müller abandonne après 158 tours couverts.

Une montée en puissance en fin d’année

La voiture est engagée aux Etats-Unis pour la suite du championnat du monde, à l’occasion des 6h de Watkins Glen où la Matra MS 650 fut confiée à Servoz-Gavin et Pedro Rodriguez qui terminèrent 4e une seconde voiture, une 630/650 abandonna avec Guichet – Widdows.

Servoz-Gavin et Rodriguez sont de nouveau engagés dans la dernière manche de l’année à Zeltweg mais un accident les fait abandonner.

Le premier laurier de la Matra MS 650 arrive finalement à domicile ou presque. Beltoise et Pescarolo, enfin remis, imposent l’auto aux 1000 km de Paris 1969, devant la 630/650 de Rodriguez et Redman !

Première saison complète en 1970 pour la Matra MS 650

Pour 1970, deux autres châssis sont construits. Pour lancer la saison, une 630/650 confiée à Pescarolo et Beltoise gagne les 1000 km de Buenos Aires, disputés hors championnat.

Les grands débuts se font aux 24h de Daytona où deux voitures sont engagées. Cevert et Brabham terminent 10e et Beltoise – Pescarolo arrivent 18e. Des débuts timides.

À Sebring le 21 Mars, Pescarolo / Servoz-Gavin se classent 5e et Gurney / Cevert se classent 12e. La Matra MS 650 est désormais fiable, ne manquent que les performances.

A Brands Hatch pour le début de la saison sur le vieux contient, Brabham et Beltoise se classent 12e, Pescarolo / Servoz-Gavin abandonnent.
A Monza, joli tir groupé aux 5e et 6e place, Beltoise et Brabham devant Pesca-Servoz ce qui permet d’assurer le doublé en classe prototypes de moins de 3L.

L’équipe fait l’impasse sur la Targa Florio, Spa et le Nürburgring alors qu’aurait dû apparaître la nouvelle Matra MS 660.

Retour aux 24h du Mans

Pour la classique mancelle, on engage la nouvelle MS 660 confiée à l’équipage de pointe Pescarolo-Beltoise, et deux Matra MS 650 sont confiées à Brabham-Cevert (n°32) et Depailler-Jabouille-Shenken (n°30).

Mais la course vire à la Bérézina ! Toutes les voitures abandonnent dans la 7e heure ! Les pistons, nouveaux sur le moteur ont lâchés. La 660 parcoure 79 tours, la n°32 76 et la 30 n’en couvre que 70.

La Matra MS 650 est alors remplacée par la 660 et ne verra plus les circuits.

La deuxième carrière de la Matra MS 650

Malgré tout, la voiture va connaître une nouvelle carrière étonnante. Du 19 au 27 Septembre 1970, deux voitures sont engagées au Tour de France Automobile. Une course de 4500 km, avec de grands passages sur route ouverte pour un proto des 24h avec une plaque d’immatriculation ! Original !

La première est confiée Beltoise – Depailler et Jean Todt, la seconde à Pescarolo – Jabouilles – Rives. Pourquoi trois pilotes ? Car au début de la course, Beltoise et Pescarolo sont au Canada où ils courent le grand-prix de F1.

La concurrence est composée de Porsche 911 ST avec Gérard Larrousse en pointe. Néanmoins les allemandes ne peuvent rien contre les prototypes français. Beltoise, Depailler et Todt sur la n°146 gagnent la course avec 4 minutes d’avance sur la n°145.

En 1971, les Matra MS 650 sont de nouveau engagée au Tour de France Automobile. La concurrence s’est renforcé, des Ford GT 40, Ferrari 512 M et Daytona sont engagées. La première voiture est confiée à Gérard Larrousse et Johnny Rives sur la 134, la seconde à un pilote CG, Fiorentino, assisté de Gelin sur la 135.
Le doublé est une nouvelle fois à la porté des voitures mais Fiorentino sort et abandonne la course.

Cette victoire sera la dernière de la voiture.

Les Matra MS 650 de nos jours

Pour ce qui est du châssis 01, elle fut offerte à un artiste par Jean-Luc Largardère qui la revendit à David Piper. Celui-ci l’équipa d’un moteur Ford et d’une boîte Hewland. Par la suite elle est revendue à un autre propriétaire qui récupéra un moteur Matra MS12. Ensuite l’auto fut proposée aux enchères à Rétromobile 2009 et Artcurial la vendit pour 1.490.646 €. On l’a revue à Rétromobile 2013 :

Pour ce qui est du châssis 03, il est facile à voir puisqu’il est exposé au Musée de Romorantin et sort parfois pour des expositions sur certains salons.

Et puis, si on a mis à jour cet article, c’est parce qu’il existe aussi une reconstruction, propriété de Mr John of B., grand amateur de Ligier, de Matra et de Ligier-Matra, qui court avec dans les séries Peter Auto. On l’a vue à Dijon en Juin dernier et on la reverra prochainement sur le Tour Auto 2021.

Photos : Luc Joly (dont vous retrouvez les photos dans le beau livre Bleu Matra aux éditions ETAI), Jacques ALluchon, Pierre, Thibaut

Benjamin

http://newsdanciennes.com

Passionné d'automobile ancienne, il a créé News d'Anciennes en 2013 à force de se balader sur les salons sans savoir quoi faire de ses photos. Conducteur occasionnel de Simca 1100 il adore conduire les voitures des autres, dès qu'elles sont un peu plus rapides !

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